Seconde partie (C) :
LE SOLEIL SPIRITUEL
 

Le Divin Amour et la Divine Sagesse,
qui procèdent du Seigneur comme Soleil
et font la chaleur et la lumière dans le ciel,
sont le Divin procédant qui est l'Esprit-Saint.

    146. Dans La Doctrine de la Nouvelle Jérusalem sur le Seigneur, il a été montré que Dieu est un en personne et en essence, qu'en Lui est la Trinité, et que ce Dieu est le Seigneur ; et aussi que la Trinité en Lui est nommée Père, Fils et Saint-Esprit, et que le Divin de qui tout procède est nommé Père, le Divin Humain Fils, et le Divin Procédant Saint-Esprit. Néanmoins personne ne sait pourquoi l'Esprit-Saint est appelé le Divin Procédant, parce que jusqu'à présent on a ignoré que le Seigneur apparaît comme Soleil devant les anges, et que de ce Soleil procèdent une chaleur qui dans son essence est le Divin Amour, et une Lumière qui dans son essence est la Divine Sagesse. Tant que cela était ignoré, on ne pouvait savoir que le Divin Procédant n'est pas le Divin en Soi ; en conséquence, la doctrine Athanasienne de la Trinité déclare qu'il y a la personne du Père, une autre qui est celle du Fils, et une autre qui est celle du Saint-Esprit. Or maintenant, quand on sait que le Seigneur apparaît comme Soleil, on peut avoir une idée juste du Divin Procédant, qui est appelé Esprit-Saint, à savoir, qu'il est un avec le Seigneur, mais qu'il procède de Lui comme la chaleur et la lumière procèdent du soleil. Pour cette même raison, les anges sont dans la Divine Chaleur et dans la Divine Lumière dans la mesure où ils sont dans l'amour et dans la sagesse. Sans cette connaissance que le Seigneur apparaît comme Soleil dans le monde spirituel, et que son Divin procède ainsi, on ne peut jamais savoir ce qui est entendu par procéder, par exemple, si c'est seulement communiquer les choses qui appartiennent au Père et au Fils, ou seulement illustrer et enseigner. Mais puisqu'il est maintenant connu que Dieu est un, et qu'il est Omniprésent, il ne convient pas à une raison éclairée de reconnaître le Divin Procédant comme Divin par Soi, de l'appeler Dieu, et ainsi diviser Dieu.

    147. Il a été montré ci-dessus que Dieu n'est pas dans l'espace, et que par cela même Il est Omniprésent, et aussi que le Divin est le même partout, mais que son apparence différente dans les anges et dans les hommes vient d'une réception différente. Maintenant, puisque le Divin Procédant du Seigneur comme Soleil est dans la lumière et dans la chaleur, et que la lumière et la chaleur influent d'abord dans les réceptacles universels, qui sont appelés atmosphères dans le monde, et que celles-ci sont les réceptacles des nuées ou nuages, on peut voir que l'homme ou l'ange est le réceptacle du Divin Procédant selon la façon dont les intérieurs qui appartiennent à l'entendement ont été voilés par de telles nuées. Par les nuées sont entendues les nuées spirituelles, qui sont les pensées. Celles-ci sont en concordance avec la Divine Sagesse si elles viennent des vrais, et sont en discordance si elles viennent des faux. En conséquence, lorsque dans le monde spirituel, les pensées d'après les vrais se présentent à la vue, elles apparaissent comme des nuées blanches, et les pensées d'après les faux comme des nuées noires. D'après ces explications, on peut voir que le Divin Procédant est, il est vrai, dans tout homme, mais qu'il est différemment voilé par chacun.

    148. Puisque le Divin même est présent dans l'ange et dans l'homme par la chaleur et la lumière spirituelles, il est dit de ceux qui sont dans les vrais de la Divine Sagesse et dans les biens du Divin Amour, quand ils sont affectés et que par l'affection ils pensent sur ces vrais et ces biens d'après ces biens et ces vrais, qu'ils sont embrasés de Dieu, ce qui arrive même parfois jusqu'à la perception et la sensation, comme lorsqu'un prédicateur parle d'après le zèle. On dit aussi d'eux qu'ils sont éclairés de Dieu, parce que le Seigneur par son Divin Procédant non seulement embrase la volonté par la chaleur spirituelle, mais éclaire aussi l'entendement par la lumière spirituelle.

    149. On peut voir d'après les passages suivants de la Parole, que l'Esprit-Saint qui fait un avec le Seigneur, est la Vérité même d'après laquelle l'homme a l'illustration. Jésus dit : Quand l'Esprit de vérité sera venu, il vous conduira dans toute la vérité, car il ne parlera pas de lui-même, mais il dira tout ce qu'il aura entendu. -. Jean XVI, 13. Il me glorifiera, parce qu'il prendra de ce qui est à moi, et vous l'annoncera . - Jean XVI, 14, 15. - Il demeurera chez les disciples, et il sera en eux,- Jean XIV. 17. XV, 26- Jésus dit : les paroles que je vous dis sont esprit et vie - Jean VI, 63. - D'après ces passages, il est évident que la Vérité même, qui procède du Seigneur est appelée Esprit-Saint ; et parce qu'elle est dans la lumière, elle illustre.

    150. L'illustration qui est attribuée à l'Esprit Saint est il est vrai, dans l'homme par le Seigneur, néanmoins elle se fait par le moyen des esprits et des anges. Mais cette médiation ne peut encore être décrite ; il sera seulement dit que les anges et les esprits ne peuvent nullement illustrer l'homme d'après eux-mêmes, car eux aussi sont illustrés par le Seigneur. Il s'ensuit donc que toute illustration vient du Seigneur seul. Elle se fait par le moyen des anges et des esprits, parce que l'homme qui est dans l'illustration est alors placé au milieu de certains anges et de certains esprits, qui, plus que les autres, reçoivent du Seigneur seul l'illustration.

Le Seigneur a créé l'univers et toutes les choses
de l'univers au moyen du soleil, qui est le
premier procédant du Divin Amour et
de la Divine Sagesse

    151. Par le Seigneur il est entendu Dieu de toute éternité ou Jéhovah, qui est appelé Père et Créateur, parce que le Seigneur est un avec Lui, comme il a été montré dans La Doctrine de la Nouvelle Jérusalem sur le Seigneur. C'est pourquoi, dans la suite où il s'agit aussi de la création, il est nommé le Seigneur.

    152. Dans la première partie, spécialement aux N°s 52 et 53, il a été pleinement montré que toutes choses dans l'univers ont été créées par le Divin Amour et la Divine Sagesse. Maintenant il sera montré que cela a été fait au moyen du Soleil qui est le premier procédant du Divin Amour et de la Divine Sagesse. Celui qui peut voir les effets d'après les causes, et ensuite par les causes voir les effets dans leur ordre et dans leur série, ne peut nier que le soleil ne soit le premier de la création, car par lui subsistent toutes les choses qui sont dans. son monde ; et comme elles subsistent par lui, elles ont aussi existé par lui. L'un implique et atteste l'autre. En effet, elles sont toutes sous l'aspect du soleil, parce qu'il les a placées pour qu'elles y soient, et les tenir sous son aspect c'est les placer continuellement. C'est pourquoi il est dit que la subsistance est une perpétuelle existence. De plus, si la moindre chose était entièrement soustraite à l'influx du soleil à travers les atmosphères, elle serait sur le champ dissipée ; car les atmosphères qui sont de plus en plus pures, et sont mises en activité et en puissance par le soleil, contiennent toutes choses et les rassemblent. Maintenant, puisque la subsistance de l'univers et de toutes les choses de l'univers vient du soleil, il est évident que le soleil est le premier de la création, de qui tout procède. Il est dit du soleil, mais il est entendu du Seigneur par le soleil, car lui aussi, a été créé par le Seigneur.

    153. Il y a deux soleils par lesquels toutes choses ont été créées par le Seigneur, le Soleil du monde spirituel et celui du monde naturel. Toutes les choses créées viennent du Seigneur par le Soleil du monde spirituel, mais non par celui du monde naturel car le soleil naturel est loin au-dessous du soleil spirituel il est entre le monde spirituel qui est audessus de lui, et le monde naturel qui est au-dessous. Le soleil du monde naturel a été créé pour porter un secours subsidiaire, dont il sera parlé dans la suite.

    154. L'univers et toutes les choses de l'univers ont été créés par le Seigneur au moyen du soleil du monde spirituel, parce que ce Soleil est le premier procédant du Divin Amour et de la Divine Sagesse, et que toutes choses viennent du Divin Amour et de la Divine Sagesse, comme il a été montré aux N°s 52 à 82. Il y a trois choses, la fin, la cause et l'effet, dans tout objet créé, tant dans les plus grands que dans les plus petits. Dans le plus grand qui est l'univers, ces trois choses existent dans l'ordre suivant : la fin de toutes choses, est dans le Soleil qui est le premier procédant du Divin Amour et de la Divine Sagesse ; les causes de toutes choses sont dans le monde spirituel : les effets de toutes choses sont dans le monde naturel. Mais il sera dit dans la suite comment ces trois sont dans les premiers et dans les derniers. Puisqu'il n'y a pas d'objet créé dans lequel ne soient ces trois, il s'ensuit que le Seigneur a créé l'univers et toutes les choses de l'univers par le Soleil où est la fin de toutes choses.

    155. La création elle-même ne peut être à la portée de la compréhension, si l'espace et le temps ne sont éloignés de la pensée. S'ils peuvent être éloignés, ou s'ils le sont autant que possible, et si le mental est tenu dans une idée séparée de l'espace et du temps, on percevra qu'il n'y a pas de différence entre le très grand et le très petit de l'espace. Alors on aura de la création de l'univers une idée semblable à celle de la création des choses particulières qu'il contient. On percevra aussi que la diversité dans les objets créés vient du fait que des choses infinies sont dans Dieu-Homme, et par conséquent des choses sans limites dans le Soleil qui est le premier procédant de Dieu, et que ces choses sans limites existent comme dans une image dans l'univers créé. Il s'ensuit que deux choses absolument semblables ne peuvent jamais exister, d'où la variété de toutes choses, variété qui se présente devant les yeux avec l'espace dans le monde naturel, et avec l'apparence de l'espace dans le monde spirituel ; et cette variété concerne les choses en général et en particulier. Tout cela a été traité dans la première partie, où il a été montré que les choses infinies sont distinctement un dans Dieu-Homme, N°s 17 à 22 ; que toutes choses dans l'univers ont été créées par le Divin Amour et la Divine Sagesse, N°s 52, 53 ; que toutes choses dans l'univers créées sont des réceptacles du Divin Amour et de la Divine Sagesse de Dieu-Homme, N°s 55 à 60 ; que le Divin n'est pas dans l'espace, N°s 7 à 10 ; que le Divin remplit tous les espaces sans espace N°s 69 à 7 2 ; que le Divin est le même dans les très grands et dans les très petits, N°s 77 à 82.

    156. On ne peut pas dire que la création de l'univers et de toutes les choses qu'il contient ait été faite d'espace à espace et de temps à temps, ainsi progressivement et successivement ; mais on doit dire qu'elle a été faite de ce qui est éternel et infini, non de l'éternel du temps puisqu'il n'y en a pas, mais de l'éternel du non-temps, car c'est la même chose que le Divin, ni de l'infini de l'espace, puisqu'il n'y en a pas non plus, mais de l'infini du non-espace, ce qui est aussi la même chose que le Divin. Je sais que cela surpasse les idées des pensées qui sont dans la lumière naturelle, mais non celles qui sont dans la lumière spirituelle, car dans celles-ci il n'y a rien de l'espace et du temps. Cela peut ne pas surpasser absolument les idées des pensées qui sont dans la lumière naturelle, car lorsqu'on dit qu'il n'y a pas d'infini de l'espace, chacun l'affirme d'après la raison. Il en est de même de l'éternel qui est l'infini du temps. Ainsi éternellement est saisi d'après le temps, mais de toute éternité n'est saisi que si le temps est écarté.

Le Soleil du monde naturel est pur feu,
et par conséquent mort ;

la nature aussi est morte, parce qu'elle tire son origine de ce soleil.

    157. La création ne peut aucunement être attribuée au soleil du monde naturel qui est complètement mort, mais elle doit l'être tout entière au Soleil du monde spirituel qui est vivant, car il est le premier procédant du Divin Amour et de la Divine Sagesse. Puisque ce qui est mort n'agit pas par soi-même, mais est mis en action, c'est pourquoi attribuer au soleil du monde naturel quelque chose de la création serait comme si l'on attribuait à un instrument mis en action par les mains d'un ouvrier, l'ouvrage que fait celui-ci. Ce soleil est un pur feu dont a été séparé tout ce qui appartient à la vie mais le Soleil du monde spirituel est un feu dans lequel est la vie Divine. Les anges pensent que la vie Divine est intérieurement dans le feu du Soleil du monde Spirituel, et extérieurement dans le feu du soleil du monde naturel. On peut ainsi voir que l'activité du soleil naturel ne vient pas de lui, mais vient de la force vive procédant du Soleil du monde spirituel. Si cette force lui était ôtée, il n'aurait plus de puissance vitale. Il s'ensuit que le culte du soleil est le plus bas de tous les cultes rendus à Dieu, car il est absolument mort comme le soleil lui-même, et il est appelé dans la Parole une abomination.

    158. Puisque le soleil du monde naturel est pur feu et par conséquent mort, la chaleur et la lumière qui en procèdent sont donc mortes aussi, pareillement les atmosphères appelées éther et air qui reçoivent dans leur sein la chaleur et la lumière de ce soleil et les transportent. Comme tout cela est mort, toutes et chacune des choses du globe terrestre, qui sont au-dessous et sont appelées terres, sont mortes aussi. Néanmoins toutes ces choses en général et en particulier, ont été enveloppées de spirituels qui procèdent et affluent du Soleil du monde spirituel. S'il n'en était ainsi, les terres ne pourraient être mises en activité pour produire les formes des usages qui sont les végétaux, et les formes de la vie qui sont les animaux, ni les matières par lesquelles l'homme existe et subsiste.

    159. Puisque la nature commence par le soleil, et que tout ce qui existe et subsiste d'après lui est appelé naturel, il s'ensuit que la nature, avec toutes les choses qui la composent, est morte. Elle parait comme vivante dans l'homme et l'animal, parce que la vie l'accompagne et la met en action.

    160. Dans la nature il y a des espaces et des distances d'espace parce que les derniers de la nature qui constituent les terres sont morts, immuables et fixes, et qu'ils ne peuvent ni changer ni varier selon les états des affections et des pensées, comme dans le monde spirituel. Il en est ainsi, parce que la création se termine là, et y demeure en repos. Il est donc évident que les espaces sont une propriété de la nature ; et puisque les espaces n'y sont pas des apparences d'espaces selon les états de la vie, comme dans le monde spirituel, ils peuvent aussi être appelés morts.

    161. Les temps, comme les espaces, étant fixes et constants, sont aussi une propriété de la nature, car la longueur du jour est toujours de vingt-quatre heures, et celle de l'année de trois cent soixante cinq jours et quart. Les états mêmes de la lumière et de l'ombre (matin, midi, soir et nuit), de la chaleur et du froid, (printemps, été, automne, et hiver), qui marquent la variété de ces temps, reviennent constamment aussi. De plus les états de l'année varient constamment,aussi les états des jours. Tous ces états, n'étant pas des états de la vie, comme dans le monde spirituel, sont morts aussi ; car dans le monde spirituel il y a une lumière continuelle qui correspond à l'état de la sagesse chez les anges, et une chaleur continuelle qui correspond à l'état de l'amour chez eux, ce qui rend vivants leurs états.

    162. On peut ainsi voir la folie de ceux qui attribuent tout à la nature ; quand ils se sont confirmés pour elle, ils ne veulent plus élever leur mental au-dessus de la nature, par conséquent celui-ci est fermé par le haut et ouvert par le bas. L'homme devient alors naturel sensuel, c'est-à-dire spirituellement mort. Comme il ne pense plus que d'après les choses qu'il a puisées dans le monde par les sens du corps, il nie même Dieu de cœur. Alors toute conjonction avec le Ciel étant rompue, il se fait une conjonction avec l'enfer. Seules lui restent la faculté de penser d'après la rationalité, et la faculté de vouloir d'après la liberté, facultés qui sont données à l'homme par le Seigneur, et qui ne lui sont jamais ôtées. Elles sont également chez les diables qui les appliquent à extravaguer et à mal faire, et chez les anges qui s'en servent pour être sages et bien faire.

Sans deux soleils, l'un vivant et
l'autre mort, il n'y a pas de création

    163. L'univers en général est divisé en deux mondes, l'un spirituel et l'autre naturel. Les anges et les esprits sont dans le monde spirituel et les hommes dans le monde naturel. Ces deux mondes sont si semblables quant à l'apparence externe, qu'ils ne peuvent être distingués, mais ils sont absolument différents quant à l'apparence interne. Les hommes qui sont dans le monde spirituel, sont appelés anges et esprits et sont spirituels ; ils pensent donc spirituellement et Parlent spirituellement. Mais les hommes qui sont dans le monde naturel étant naturels, pensent naturellement et parlent naturellement. La pensée et le langage spirituels n'ont rien de commun avec la pensée et le langage naturels. Il est évident que ces deux mondes sont absolument distincts l'un de l'autre, et ne peuvent en aucune manière être ensemble.

    164. Du fait de la séparation de ces deux mondes, il est nécessaire qu'il y ait deux soleils, l'un dont procèdent tous les spirituels, et l'autre dont procèdent tous les naturels. Comme tous les spirituels dans leur origine sont vivants, et que tous les naturels d'après leur origine sont morts, et que ces origines sont les soleils, il s'ensuit que l'un des soleils est vivant et que l'autre est mort ; et aussi que le soleil mort, a lui-même été créé par le Seigneur au moyen de soleil vivant.

    165. Le soleil mort a été créé afin que dans les derniers, toutes les choses soient fixes, déterminées et constantes, et qu'ainsi existent les choses qui doivent se perpétuer et durer longtemps. De cette façon, et non autrement, est fondée la création. Le globe terrestre, dans lequel, sur lequel et autour duquel sont de telles choses, est comme une base et un support car il est l'ouvrage ultime dans lequel tout se termine, et sur lequel tout se repose. Il sera dit dans la suite qu'il est aussi comme une matrice, de laquelle les effets, qui sont les derniers de la création, sont produits.

    166. On peut voir que le Seigneur a créé toutes choses par le Soleil vivant, et n'a rien créé par le soleil mort, en ce que le vivant dispose le mort sous sa dépendance et le forme pour les usages qui sont ses fins, et non l'inverse. Seul un homme déraisonnable peut penser que toutes les choses viennent de la nature, et que la vie en vient aussi, il ne sait pas ce que c'est que la vie. La nature ne peut donner la vie à quoi que ce soit, car en elle-même, elle est complètement inerte. Il est absolument contre l'ordre que le mort agisse dans le vivant, ou la force morte dans la force vive, ou ce qui est la même chose, le naturel dans le spirituel. Par conséquent penser cela est tout à fait déraisonnable. Il est vrai que le mort, c'est-à-dire le naturel peut être altéré ou changé de plusieurs manières par des accidents externes, cependant toujours est-il qu'il ne peut agir dans la vie, mais la vie agit en lui selon le changement de forme introduit. Il en est de cela comme de l'influx physique dans les opérations spirituelles de l'âme ; on sait que cet influx n'existe pas, parce qu'il n'est pas possible.

La fin de la création existe dans les derniers ;
cette fin veut que toutes choses retournent au
créateur, et qu'il y ait conjonction.

    167. Il y a trois fins qui se suivent en ordre, et qui sont appelées fin première, fin moyenne et fin dernière, ou fin, cause et effet. Ces trois doivent être ensemble dans tout sujet pour qu'il soit quelque chose, car il n'y a pas de fin seule sans une cause et sans un effet. Pareillement, il n'y a pas de cause seule sans une fin dont elle provient, et sans un effet dans lequel elle est ; il n'y a pas non plus d'effet seul, ou d'effet sans cause et sans fin. On peut saisir qu'il en est ainsi, si l'on pense que la fin sans l'effet, ou séparée de l'effet, ne peut exister, aussi n'est-ce qu'un mot. Pour qu'une fin soit en actualité une fin, elle doit être terminée, et elle est terminée dans son effet, dans lequel le premier est appelé fin parce qu'il en est la fin. Il semble que l'agent efficient existe par soi, mais cela est une apparence provenant de ce qu'il est dans un effet ; s'il est séparé de l'effet, à l'instant il disparaît. D'après ces explications il est évident que la fin, la cause et l'effet doivent ensemble être dans tout sujet, pour qu'il soit quelque chose.

    168. De plus il faut savoir que la fin est le tout dans la cause, et aussi le tout dans l'effet ; c'est pourquoi la fin, la cause et l'effet sont appelés fin première, fin moyenne et fin dernière. Mais pour que la fin soit le tout dans la cause, il faut qu'il y ait quelque chose d'après la fin, dans lequel elle sera ; et pour qu'elle soit le tout dans l'effet, il faut qu'il y ait quelque chose d'après la fin par la cause, dans lequel elle sera. Car la fin ne peut être en soi seule, mais elle doit être dans quelque chose qui prend son existence d'elle, et dans lequel elle doit habiter tout entière, et par l'action produire l'effet, et ainsi arriver à la subsistance. Ce dans quoi elle subsiste est la fin dernière, qui est appelée effet.

    169. Ces trois, à savoir, la fin, la cause et l'effet, sont tant dans les très grands que dans les très petits de l'univers créé. Ils y sont, parce que dans Dieu Créateur, qui est le Seigneur de toute éternité, il y a la fin, la cause et l'effet. Mais comme Il est infini et que les infinis dans l'Infini sont distinctement un, ainsi qu'il a été montré aux N°s 17 à 22, c'est pourquoi aussi ces trois dans le Seigneur et dans Ses Infinis, sont distinctement un. Il s'ensuit que l'univers, qui a été créé par l'Etre du Seigneur, et qui, considéré quant aux usages, est l'image du Seigneur, doit posséder la fin, la cause et l'effet dans toutes et dans chacune de ses choses.

    170. La fin universelle, c'est-à-dire la fin de toutes les choses de la création, c'est la réalisation d'une conjonction éternelle du Créateur avec l'univers créé. Cette conjonction n'est pas possible, à moins qu'il n'y ait des sujets dans lesquels Il puisse habiter et demeurer. Pour qu'ils soient Ses habitacles et Ses demeures, les sujets doivent être des réceptacles de Son Amour et de Sa Sagesse comme par eux-mêmes, ainsi doivent comme par eux-mêmes s'élever vers le Créateur et se conjoindre à Lui ; sans cette réciprocité il n'y a pas de conjonction. Ces sujets sont les hommes, qui peuvent comme par eux-mêmes s'élever et se conjoindre à Lui. Il a été démontré ci-dessus plusieurs fois que les hommes sont de tels sujets, et qu'ils sont des réceptacles du Divin comme par eux-mêmes. Par cette conjonction le Seigneur est présent dans toute œuvre créée par Lui, car la fin pour laquelle tout objet a été créé, c'est l'homme. De ce fait, les usages de toutes les choses créées montent par degrés depuis les derniers jusqu'à l'homme, et par l'homme jusqu'à Dieu Créateur, de qui tout procède, comme il a été montré ci-dessus, aux N°s 65 à 68.

    171. La création va continuellement vers cette dernière fin par la fin, la cause et l'effet, parce que ces trois sont dans le Seigneur Créateur, ainsi qu'il vient d'être dit, et parce que le Divin est dans tout espace sans espace, N° 69 à 72, et est le même dans les très grands et les très petits, N°s 77 à 82. Il est donc évident que dans sa progression générale vers sa fin dernière, l'univers créé est respectivement la fin moyenne, car dans leur ordre les formes des usages sont continuellement élevées de la terre par le Seigneur Créateur jusqu'à l'homme, qui vient aussi de la terre quant à son corps. L'homme ensuite est élevé par le Seigneur au moyen de la réception de l'amour et de la sagesse, et les moyens lui sont donnés pour les recevoir. Il est fait de telle manière qu'il peut recevoir, pourvu qu'il le veuille. D'après ce qui vient d'être dit, on peut voir, toutefois d'une manière très générale, que la fin de la création existe dans les derniers, fin qui veut que toutes choses retournent au Créateur, et qu'il y ait conjonction.

172. On peut encore voir que la fin, la cause et l'effet sont dans toutes et dans chacune des choses créées, en ce que tous les effets, qui sont appelés fins dernières, deviennent de nouveau fins premières dans une série ininterrompue à partir du Premier, qui est le Seigneur Créateur, jusqu'au dernier, qui est la conjonction de l'homme avec Lui. Il est évident que toutes les fins dernières deviennent de nouveau fins premières en ce qu'il n'existe pas de chose tellement inerte et morte qui n'ait une force efficiente en elle. Même d'un grain de sable il sort une exhalaison qui aide à produire quelque chose, par conséquent à effectuer quelque chose.