VIII
DE L'ÉPREUVE QUE L'ON SUPPORTE AVEC PATIENCE
VINCENT : Je vous remercie de m'avoir si bien éclairé, mon oncle. Parlez-moi maintenant de ce point que vous vous proposiez de traiter en dernier.
ANTOINE : Bien volontiers, cher neveu. Nous traiterons maintenant des épreuves que j'avais rangées dans la deuxième catégorie, celles qui sont supportées avec patience sans toutefois avoir été voulues.
Nous diviserons cette catégorie en deux branches : la première, nous l'appellerons tentation, la seconde persécution. Mais ici, il nous faut observer que je ne veux pas parler de toute espèce de persécution mais seulement de celles qu'on se résout à supporter patiemment pour ne pas déplaire à Dieu. Pourtant, si nous y réfléchissons, nous verrons que chacune d'elles agit sur l'autre et vice-versa car, par la tentation le diable nous persécute et par cette persécution il nous tente. Et, si la persécution est une épreuve pour tout le monde, la tentation est une épreuve pour l'homme de bien. Toutes deux sont des armes du Malin, mais la différence entre elles est la suivante : la tentation est une embûche et la persécution un combat à visage découvert. Cette sorte de tribulation dont nous parlons maintenant, je l'appellerai tentation et je ferai deux divisions : dans la première, nous verrons les embûches du démon, dans la seconde, ses combats à visage découvert.