V
LA PERTE DES BIENS MATÉRIELS
Commençons par ce qu'on appelle la fortune, les biens, les honneurs qui ne font partie intégrante ni de l'âme ni du corps.
Que peut-il y avoir en eux de si précieux pour qu'ils portent le nom de « biens de ce monde » ? Un homme qui possède la force est fort, un homme qui a la vertu est vertueux, mais un homme qui possède beaucoup de « biens » n'est pas pour cela un homme de bien. Le plus souvent même, c'est le contraire. Pourquoi se réjouir de posséder ce qui se trouve à profusion dans les mains des plus mauvais ? Le Grand Turc et ses pachas ne surpassent-ils pas sur ce chapitre les seigneurs chrétiens ? Il y a une vingtaine d'années, le sultan de Syrie, qui menait aussi grand train que le Grand Turc, perdit tout son empire en un seul été : il fut envahi par les Turcs. Puisse son empire à lui être envahi par les chrétiens quand ceux-ci retrouveront la faveur de Dieu.
Puisque des royaumes entiers, de puissants empires sont si peu stables, qu'est-ce qu'un homme comme vous et moi, comme le plus puissant seigneur de ce pays, peut espérer de la possession d'un tas d'argent ou d'or ? Ce ne sont là que métaux blanc ou jaune, qui ne donnent rien par eux-mêmes si ce n'est de jolis reflets comme le fait aussi le fer.