XVIII

THEOPHANE A STELLA

Les nouvelles que vous envoie Andréas sont une épreuve pour vous, mon enfant, en ce sens que les choses merveilleuses qu'il vous raconte pourraient vous, donner l'envie de manger du fruit défendu. comme dit Moïse. Vous avez déjà compris que ce fruit défendu n'est pas la science de la vie, mais bien la science de l'intelligence. Ce n'est pas sans raison que Lucifer est le premier des savants ; il porte en effet une lumière, mais elle est glacée par l'orgueil, elle meurt de la volupté d'être seule. Le type inconnu du savant, celui dont rêvent, sans pouvoir heureusement le réaliser, tous les hommes que la force de leur pensée enivre, c'est cet archange déchu, créé pour la Vie et à qui son orgueil fait préférer l'image de la Vie; parce que dans cette dernière il règne, et tandis que dans la première il lui faudrait servir.

Tous les hommes passent à un moment donné par la méme épreuve ; celui que vous aimez n'est pas loin de franchir ce tournant redoutable. Ah! que les forces de votre amour s'exaltent pour émouvoir les anges qui le protègent. Faites-vous des amis, beaucoup d'amis pour que vous trouviez des auxiliaires au moment du combat. Amassez un trésor où il vous sera facile de puiser dans quelques temps.

Vous, savez que vous ne pouvez rien faire si la Nature ne vous prête des milliers de serviteurs ; que de combinaisons, de rivalités, de protections ne faut-il pas pour que vous traversiez un carrefour sans qu'un cheval vous renverse. Aucun de vos actes n'est donc indifférent, et comme la volonté qui les dirige est celle-là même qui, dans le cours des siècles antérieurs, vous a toujours plongée de plus en plus profondément dans les mirages du Moi, de l'Égoïsme, dans les splendeurs fausses de la Lumière Noire, apprenez donc peu à peu à remplacer cette volonté par le souhait des êtres qui vous entourent. Essayez-vous à faire la volonté des autres, vous arriverez vite à faire la volonté du Père; et quand vous en serez là, vos actes seront vivants dans l'éternel, parce qu'ils seront accomplis par le Verbe, fils unique de Dieu.

Sentez, chère enfant, comme ces choses sont vraies. Votre cœur ne bat-il pas plus fort à lire des enseignements qui ne sont pas miens d'ailleurs; je vous les transmets comme on me les a transmis. La fidélité avec laquelle vous les publierez à votre tour sera donc la rnesure où vous sentirez votre néant, où vous brûlerez du feu inexprimable de l'Amour divin.

Que votre vie soit une prière ininterrompue.