II

Contrition de surface et contrition profonde

 

Brève histoire, mais en même temps lumineuse leçon sur la manière de regretter ses fautes – en profondeur – quand on est à confesse.

 

Avant d'entrer au Carmel de Pamiers, la Mère Marie-Thérèse, qui y devint maîtresse des novices, avait été religieuse de Saint-Joseph, à Lyon. De Lyon, elle fit une fois le pèlerinage d'Ars. Cœur plein de bons désirs, mais tempérament vif, ardent, elle pouvait, bien dirigée, atteindre aux plus hautes vertus. Elle l'a bien prouvé dans la suite. Mais, jeune religieuse à l'époque de son pèlerinage auprès du saint Curé, elle avait besoin encore de fortes leçons. Là elle en reçut une dont elle se souviendrait toute sa vie.

 

Le voyage en diligence l'avait fait sortir quelque peu de bon habituel recueillement. Dans l'église d'Ars, tout en préparant sa confession – il faudrait attendre si longtemps ! – elle avait examiné sa conscience sans doute, mais aussi ces files de pénitentes, tantôt intéressée, tantôt intriguée, tantôt amusée... Bref, les heures coulèrent, coulèrent, et elle se trouva aux pieds du serviteur de Dieu, qui écouta ses accusations, puis refusa de l'absoudre.

« Mon enfant, lui dit-il, vous n'avez fait qu'effleurer... Vous n'avez pas assez de contrition. Revenez demain. »

 

Sur ces mots, la pauvre Sœur se retira bien confuse. Puis un chagrin intense la saisit ; chez elle, ce fut surtout du dépit d'abord, mais qui se changea bientôt dans un regret amer de ses moindres imperfections passées : contrition véritable cette fois, brisement du cœur, douleur sans borne d'avoir offensé son Père des cieux... Elle ne put tenir dans sa petite chambre : elle eût rempli l'hôtellerie de ses sanglots. « Je m'en allai, je m'enfuis dans un des petits bois voisins du village, devait-elle redire plus d'une fois à ses Sœurs du Carmel de Pamiers, et là je hurlai comme une lionne ! »

Le lendemain, toute pacifiée, elle revint à l'église. Le saint la distingua dans la foule, lui fit signe d'approcher, la confessa, lui donna l'absolution. Enfin, la main encore levée pour bénir : « Et maintenant, mon enfant, acheva-t-il, au revoir jusqu'au ciel ! » (1)

 

(1) D'après les souvenirs des Carmélites de Pamiers réunis dans une lettre adressée par l'une d'elles à Mgr Convert, le 29 janvier 1939.