V

Catherine au couvent

 

Le regretté M. Robert de Champ, qui habitait le manoir de la Rochette en Saint-Pierre-la-Palud, se rappelait fort bien Catherine – il ne lui connaissait que ce nom-là. Catherine, qui était cuisinière chez son grand'père et sa grand'mère, M. et Mme Théobald de Champ. Ils logeaient à Lyon, au numéro 11 de la rue Saint-Dominique.

Catherine était une excellente fille, très attachée à ses maîtres et très pieuse. Il faut une grande demi-heure pour monter à pied de la rue Saint-Dominique, proche de la place Bellecour, à Notre-Dame de Fourvière. Or Catherine faisait presque chaque matin ce pèlerinage. Elle partait avant son travail, dès cinq heures, et ne revenait chez ses patrons qu'après avoir entendu la messe dans la vieille chapelle si chère à la piété lyonnaise.

Dans sa jeunesse, Catherine avait pensé « s'établir ». Quelqu'un semblait soupirer pour elle. Cependant elle hésitait à prendre parti. Dans son indécision, elle se souvint du Curé d'Ars, alors vivant, que certaines de ses compagnes avaient consulté sur leur avenir.

Ses maîtres eux-mêmes l'engagèrent à voir le serviteur de Dieu.

« Dois-je quitter mes maîtres et me marier ? » lui demanda-t-elle après sa confession. Elle n'en dit pas plus long sur M. et Mme Théobald de Champ.

— Non, mon enfant, répondit le saint. Restez chez eux. Ils sont de bons maîtres. Vous ne vous marierez pas et vous finirez vos jours dans un couvent. »

 

De retour à Lyon, Catherine conseilla au soupirant d'aller soupirer ailleurs. Elle avait repris son service d'un cœur plus vaillant. Toutefois, une inquiétude lui restait : ce couvent où elle finirait ses jours ?...

Elle demeura jusqu'à un âge avancé chez M. Théobald de Champ, autant que ses forces lui permirent d'assurer son service.

Enfin, elle se retira, à titre de pensionnaire, dans le couvent dit de la Salette, situé au Point-du-Jour, près de Lyon. Et là, douce et tranquille, elle se prépara à une pieuse mort, refaisant bien des fois par la pensée le pèlerinage d'Ars, où « le saint lui avait prophétisé toute sa vie » (1).

 

(1) Ces détails proviennent de M. Robert de Champ.