V

L'incomplète guérison de Joséphine Janody

 

Un jour de 1859, les époux Janody-Badoux, concierges de la préfecture de Bourg-en-Bresse, apportaient à Ars leur petite Joséphine, fillette de 4 ans tout à fait infirme. Sourde-muette, elle ne marchait pas encore, bavait sans cesse et paraissait privée de toute intelligence.

Les parents présentèrent cette loque humaine au bon saint Curé qui regarda l'enfant avec compassion, lui fit un signe de croix sur le front, une caresse sur la joue... Immédiatement la fillette glissa des bras de sa mère et, disait un témoin de la scène, « se mit à courir comme un petit furet ».

On la rattrapa, et l'on constata, à la vivacité de son regard, qu'elle avait recouvré l'intelligence de cet âge. Seulement, si elle entendait, elle ne parlait pas.

« Monsieur le Curé, implora la mère, n'allez-vous pas aussi lui rendre la parole ?

— Il vaut mieux pour son âme qu'elle reste muette », répondit l'homme de Dieu.

Grande leçon pour quiconque a une langue et aime à s'en servir. Une intuition d'en-haut venait d'apprendre au Curé d'Ars que, durant toute sa longue existence, il serait plus profitable à Joséphine de se taire que de parler.

 

Ces détails furent donnés en novembre 1931 par Sœur Laurence, des Sœurs de la Charité de Bourg, à Mgr Convert qui, au bas des notes recueillies, ajoutait lui-même :

« J'ai connu Joséphine Janody à l'Institution des Sourdes-Muettes de Bourg, où j'étais aumônier. Elle assistait de temps en temps à mes catéchismes. »

« Née à Bourg le 27 février 1855, a écrit depuis Sœur Saint-Claude complétant ces informations, Joséphine, fille de Claude-Joseph Janody et de Jeanne-Marie Badoux, est à l'Hospice de la Charité depuis le 25 septembre 1895. Elle a 76 ans, et est chargée actuellement d'un dortoir de vingt-deux lits. Elle est encore forte et agile. »