PAROLES DE PIE X LE GRAND
Et l'enfance, en sa fleur, dont l'âme rayonnante, A la voix du Pontife, approche de Jésus Pour le baiser d'amour... apaisant la tourmente. Va donner à la France une gloire de plus. Pécheresse sublime, illustre pénitente, Alors doit resplendir le Soleil de Justice Elle ira, comme Saul, vers un autre Ananie, |
Paris, ler Décembre
de l'an de grâce 1911
R. CHAMONAL.
PREFACE DU TRADUCTEUR
Voici, Lecteur, le Traité auquel aboutit logiquement toute l'oeuvre merveilleuse du « divin Contemplateur Rusbroch ... ».
La Voie est tracée par le Maître, qui l'a suivie le premier Ego sum via veritas et vita : Quiconque me suit ne marche pasdans les ténèbres Qui sequitur me non ambulat in tenebris. Il est la Lumière véritable qui pénètre les voiles de la chair, dissipe l'aveuglement de l'âme, bouleverse les consciences, et entraîne à sa clarté les amants de la Vérité : Lux vera quoe illumi nat omnem hominem venientem in hune mandum. Tout homme en effet entrevoit d'abord cette flamme divine, qui se refIèteen lui-même ; mais bientôt, s'il n'y prend garde, à cause de la perversion de sa nature, le monde et les passions interceptent la lumière, et jettent l'homme en dehors de sa voie. Seuls, ceux qui écoutent les suggestions de la grâce, et suivent le Christ, nouvel Adam, prototype de l'homme, jusqu'au bout, de la crèche au calvaire, -acceptant les humiliations et les souffrances, et buvant son calice plein de fiel et de vinaigre jusqu'à la lie : ne perdent point de vue la lumière ; et noyés dans ses clartés éternelles, perdus dans l'extase de l'amour, ils aspirent au triomphe de leur Maître ressuscité et glorieux : Ego sum Resurrectio et Vita.
Les amants de la Gloire sont aussi lès amants de la Douleur : Ils la recherchent avec passion, car ils savent que la couronne d'épines doit précéder la couronne de gloire ; et que les roses empourprées se mêlent aux lis éblouissants de blancheur. D'ailleurs l'amour se délecte dans la souffrance, avant de se pâmer dans la joie In eo quod ainatur, non laboratur, aut si laboratur, labor amatur. C'est l'allégresse de la douleur: Potius pati quanz mori.
Aimer, c'est le tout de l'homme, comme, c'est la raison de Dieu... Un Dieu qui ne serait pas amour est incompréhensible : Il lui manquerait, quelque chose : la faculté de se donner comme il aime, c'est-à-dire sans mesure. Or, tout est à lui, tout émane de lui, et il n'est rien sans lui. L'Amour explique donc le Créateur prodigue de lui-même, comme il explique l'a créature qui ne serait pas sans le don de Dieu : In ipso vivimus movemur et sumus.
De là, la nécessité absolue pour l'homme de rester inséparablement uni à Dieu, et de trouver ses délices dans son amour, s'il veut vivre éternellement, comme Dieu lui-même se plaît parmi les enfants des hommes: Delicioe meoe esse cum filiis hominum. S'écarter de lui c'est s'éloigner de la Vie, et tomber dans la Mort, qui n'est autre que la séparation d'avec Dieu: Discedite a me, maledicti !
Mais, peut-on ne pas aimer l'Amour ? Tout converge vers lui, dans le ciel et sur la terre, parce que tout aspire au bonheur, et que le bonheur n'est pas en dehors de l'Amour. La haine engendre la malédiction et creuse les abîmes. Ne pas aimer l'Amour, c'est donc se séparer de la Vie, et se vouer à la Mort éternelle.
Eh ! qui donc est l'Amour ? L'Arnour c'est l'Etre parfait qui, se suffisant à lui-même, attire à lui ce qui vient de lui et ne peut vivre sans lui. Il se répand hors de lui, parce qu'il est bon et veut faire profiter sa créature de la surabondance de ses dons : Bonum sui diffusivum. Et il se donne, dans la mesure de sa bonté, qui est sans mesure. De là, la nécessité de le connaître. Mais le connaître et le voir, c'est l'aimer, car l'amour attire l'amour. Et c'est de lui qu'émanent la joie et le bonheur, comme de leur source ; et il les communique à ceux qui venus de lui, se sentent attirés vers lui, le recherchent parce qu'ils ont soif de lui, et que cette soif qui n'est autre que l'appétit de l'amour, leur procure le bonheur initial, bien qu'elle ne soit et ne puisse être pleinement étanchée et satisfaite dans cette vie.
Et, quand ils ont goûté de cette eau vive qui jaillit jusqu'à la vie éternelle, c'est alors le désir insatiable de la possession, qui donne à l'âme éprise d'amour divin, quelque chose du bonheur séraphique, en attendant que, par la vision béatifique, elle puisse jouir pleinement de Celui qui est l'Amour et la joie essentielle.
Chercher Dieu, le connaître ; et quand on l'a trouvé, se complaire dans sa vision ineffable et lui rendre amour pour amour... Voilà l'objet de la Contemplation.
C'est la possession anticipée et partielle de Celui qui remplit l'univers de sa gloire, nous vivifie de sa propre vie, nous fait participants de son être, nous illumine de sa lumière, nous réchauffe de sa flamme, et nous entraîne, à travers l'espace et le temps, au-dessus et au-delà des mondes et des cieux, jusqu'à ces régions suprêmes, où Dieu un et trois réside éternellement dans sa gloire.
Voir Dieu sur la terre à travers les voiles du mystère, comme dans un miroir où se reflète sa face : per speculum et in enigmate, avant de le contempler à découvert dans les demeures éternelles, se nourrir de sa chair divine, afin de vivifier sa faiblesse et de résister aux illusions du monde, entretenir par la prière, le sacrifice, le désir et l'amour, l'union indissoluble avec Celui dont la possession est inséparable de la béatitude : c'est là le but de l'homme sur la terre.
Les Saints l'ont compris, et ils se sont élevés si haut dans la Contemplation, que le passage du temps à l'éternité n'a été pour eux que la déchirure du voile à travers lequel ils voyaient déjà Dieu. Un éblouissement de lumière a succédé à cette demi-clarté, et leurs soupirs, leurs élans d'amour, leurs extases mêmes, ont fait place à des transports d'allégresse infinie... dans la pleine possession de Dieu.