XIII

ANDREAS A STELLA

Deux mots pour te dire une histoire, chère Stella.

Il y avait avec nous, pendant une excursion, un de ces professionnels charmeurs de serpents appelés soupadhas; c'était un vieil homme silencieux qu'on nommait Hamira Bhangorr; né à Bahowal, dans le Hashiarpar, il avait rôdé un peu partout et rendu pas mal de services, disaient les Saïs, à Nana-Sahib.

Il vit un cobra mordre notre cornac; aussitôt se précipitant sur le serpent, il lui présenta un morceau de résine rouge sombre, ovale, qu'il portait constamment sur lui ; le reptile s'enfuit dans les hautes herbes ; Hamira appliqua d'abord sa résine sur la plaie qui était déjà noire, puis un morceau de racine sèche et, en quelques minutes, l'enflure disparut, quelques gouttes de sang perlèrent sur la peau, et le cornac put reprendre la marche. Hamira se tourna vers moi pour m'expliquer que sa résine était la bave solidifiée du Markhôr, le cerf tueur de serpents, et la racine était celle de la plante dont le Markhôr se sert comme contrepoison. Je savais par expérience qu'il ne faut jamais sourire d'un Oriental si on tient à ne pas perdre pour toujours sa confiance; j'écoutai son histoire sérieusement.