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SERMON POUR LES ROGATIONS. Sur les trois pains.

 

1. « Si quelqu'un d'entre vous avait un ami, etc (Luc. XI, 5). » Que veut dire cet ami qui survient, et qui ne se contente point de demander un pain? Est-il donc si fort mangeur qu'il n'ait pas assez d'un pain pour assouvir sa faim? Car on ne s'explique pas qu'il faille servir trois pains à un homme. Je suppose qu'il était arrivé avec sa femme et un serviteur, et qu'il veut donner un pain à chacun. Quant à moi, dans l'ami qui vient à moi, je ne vois que moi, attendu que nul ne m'est plus cher, ni plus proche parent que moi. L'ami qui vient me voir en passant n'est donc autre que moi-même, lorsque, renonçant aux choses passagères, je rentre dans mon propre coeur, selon le conseil du Prophète : « Pécheurs rentrez dans votre coeur (Isa. XLVI, 9). » D'ailleurs, nul ne se montre plus ami de soi-même, que celui qui s'éloigne ainsi de sa voie, car quiconque aime l'iniquité hait soit âme (Ps. L, X, 6). C'est donc le jour où je me suis converti, que mon meilleur ami est venu chez moi, il arrivait d'une contrée lointaine, où il avait fait paître les pourceaux, et où, bien souvent, il avait désiré en vain partager leur ignoble pâture. Il mourait de faim en arrivant, il tombait même d'inanition, le jeûne l'avait exténué. Il  avait besoin de retrouver un ami en arrivant, et c'est chez moi, dans ma pauvre demeure, qu'il est descendu pour se loger. Hélas il est entré dans une hôtellerie dénuée de toute ressource. Que ferai-je donc pour cet ami malheureux et misérable! Je n'ai absolument rien à lui offrir : sans doute il est mon ami, mais moi, je suis un pauvre mendiant, je n'ai pas même un pain dans ma maison. Allons vite, me dit-il, courez en toute hâte chez cet ami puissant, que vous avez, dont l'amitié pour vous dépasse toute autre amitié, et dont les richesses sont plus considérables que celles de qui que ce soit; tirez-le de son sommeil. Cherchez, demandez, frappez; car celui qui cherche trouve, quiconque demande reçoit, et on ouvre à ceux qui frappent (Matth. VIII, 7). Criez à sa porte, et dites-lui : « Mon ami, prêtez-moi trois pains (Luc. XI, 5).»

2. Or, que faut-il entendre par ces trois pains, mes frères? Puissions-nous être assez heureux pour les recevoir. Peut-être nul ne les connaît-il qu'il ne les ait reçus. Pour moi, je crois que les trois pains que nous devons demander, ce sont ceux de la vérité, de la charité et de la force; car c'est ce dont j'ai le plus besoin, lorsque mon ami revient chez moi, après un long voyage, attendu, comme je le disais tout à l'heure, qu'il m'arrive avec sa femme et un serviteur. Ce qui en .moi représente l'homme, le mari, c'est ma raison, elle tombe en défaillance faute de connaître la vérité ; ma volonté languit faute d'affection, et ma chair tombe de faiblesse, tant les forces lui manquent. En effet, ma raison ne comprend guère ce qu'il faut faire, et si elle le comprend, ma volonté l'aime peu, et puis mon corps, qui est sujet à la corruption, appesantit mon âme et n'empêche de voir ce que je veux. Mon coeur et mon corps se sont desséchés également, parce que j'ai oublié de prendre ma nourriture; je ne tomberais pas ainsi en défaillance si ma raison était toujours occupée de la recherche de la vérité; si ma volonté était constamment ranimée par les ardeurs de la charité; si ma chair n'avait point perdu l'habitude de pratiquer la vertu. Prêtez-moi donc trois pains, ô mon ami, le pain de l'intelligence, celui de l'amour et celui de votre volonté, car la vie n'est que là, et mon esprit ne respire qu'en se nourrissant de ces pains-là, selon le langage même du Prophète qui dit : « La vie se trouve dans sa volonté (Psal. XXIX, 6). »

 

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