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LETTRE V. (Fin de l'année 388.)
Nébride déplore que les affaires des gens de la ville (1) détournent trop souvent Augustin de la contemplation.
NÉBRIDE A AUGUSTIN.
Est-ce vrai, mon cher Augustin? vous prêtez-vous aux affaires de vos compatriotes avec tant de constance et de patience, que ce loisir, tant recherché, vous échappe? Dites-moi, je vous prie,
1. Saint Augustin était retiré aux environs de Thagaste. Nous ne pensons pas, comme on l'a dit, qu'il ait exercé alors quelque charge municipale, un peu dans le genre des fonctions de curial que son père avait remplies ; le jeune Augustin n'habitait pas la ville, mais vivait dans une solitude qu'il n'avait pas le courage de fermer aux importuns; l'hypothèse d'une charge municipale s'accorde peu avec le renoncement au monde qui était déjà pour Augustin une résolution définitive. Dans l'Histoire de saint Augustin et dans notre Voyage en Algérie (Etudes africaines), nous avons dit que Souk-Arras occupe l'emplacement de Thagaste ; cette opinion, quoique vraie, manquait de preuves; depuis ce temps une inscription trouvée sur un dé de piédestal a tranché les doutes , et c'est en toute certitude que Souk-Arras nous représente la position de la ville natale de saint Augustin. Voyez un intéressant travail de M. Léon Rénier dans la Revue archéologique, XIVe année.
quels sont ceux qui osent ainsi abuser de votre bonté? Ils ne savent donc ni ce que vous aimez ni ce à quoi vous aspirez! il n'y a donc pas auprès de vous un seul ami qui le leur dise! où est Romanien? où est Lucinien? Qu'ils m'entendent: moi je crierai, moi j'attesterai que c'est Dieu que vous aimez et que vous désirez servir, que c'est à Dieu que vous songez à vous attacher. Je voudrais vous emmener dans ma maison des champs et vous y mettre en repos; je ne craindrais pas de passer pour un ravisseur auprès de tous ces gens que vous aimez trop et qui vous aiment tant.
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