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QUATRIÈME SÉRIE.DISCOURS SUR LES PSAUMES.DISCOURS SUR LE PSAUME I.
Lhomme céleste et lhomme terrestre. Le premier est Jésus Christ, le second est Adam pécheur. Jésus-Christ ayant évité les piéges dans lesquels Adam trouva la mort, aura dans lEglise une postérité que formeront les saints. Adam pécheur sera le père des impies.
1. « Bienheureux lhomme qui ne sest point laissé aller au conseil des impies (Ps. I, 1 ) » Cette bénédiction doit sappliquer à Jésus-Christ Notre-Seigneur, qui est lhomme divin (Rétract. XIX). « Bienheureux lhomme qui ne sest point laissé aller au conseil des impies », comme lAdam terrestre, qui écouta sa femme séduite par le serpent, et méprisa le précepte du Seigneur (Gen. III, 6 ). « Et qui ne sest pas arrêté dans la voie des pécheurs ». A la vérité, Jésus-Christ est venu dans la voie du péché, puisquil est né comme les pécheurs, mais il ne sy est pas arrêté, car il ne sest pas épris des attraits du monde. « Et ne sest point assis dans la chaire de pestilence ». Car il ne voulut point avoir sur la terre un trône fastueux, et voilà ce qui est justement appelé trône pestilentiel; de même en effet que lamour de la domination, que lappétit de la vaine gloire se glisse dans presque toute âme humaine; de même la peste est cette maladie qui se répand au loin, attaquant tous les hommes ou à peu près. Une chaire de pestilence se dirait mieux néanmoins dune doctrine perverse, dont lenseignement est envahissant comme la gangrène (II Tim. II, 17 ). Voyons ensuite la gradation de ces termes : « Sen aller, sarrêter, sasseoir ». Lhomme sen est allé, quand il sest retiré de Dieu; il sest arrêté, quand il a pris plaisir au péché; il sest assis, quand affermi dans son orgueil, il na pu retourner sans avoir pour libérateur celui qui ne sest point laissé aller au conseil de limpie, ne sest point arrêté dans la voie des pécheurs, ni assis dans la chaire de pestilence. 2. « Mais qui sest complu dans la loi du Seigneur, et qui méditera cette loi jour et nuit (Ps I, 2 )». La loi nest pas établie pour le juste (I Tim. I, 9 ), a dit lApôtre. Mais être dans la loi nest pas être sous la loi. Etre dans la loi, cest laccomplir; être sous la loi, cest en recevoir limpulsion. Dans le premier cas, cest la liberté, dans le second, cest lesclavage. Autre encore est la loi écrite qui simpose à lesclave, et autre la loi que lit, dans son coeur,. celui qui na pas besoin de loi écrite. «Méditer la loi jour et nuit», signifie la méditer continuellement, ou bien « le jour » sentendra de la joie, et « la nuit», de la tribulation; car il est dit: « Abraham vit mon jour et il en tressaillit de joie (Jean, VIII, 56 ) » ; et à propos de la tribulation, le Psalmiste a dit: « Bien avant dans la nuit, mon coeur a été dans langoisse (Ps. XV, 7 ). 3. « Il sera comme larbre planté près du courant des eaux », cest-à-dire près de la Sagesse elle-même, qui a daigné sunir à lhomme pour notre salut, afin que lhomme fût un arbre planté près du courant des eaux; car cest ainsi quon peut entendre cette autre parole du Psalmiste : « Le fleuve de Dieu (122) est rempli deau (Ps. LXIV, 10 ) ». On peut encore entendre par les eaux, lEsprit-Saint, dont il est dit : « Cest lui qui vous baptisera dans lEsprit-Saint (Matt. III, 11 ) » ; et cette autre : « Quil vienne, celui qui a soif, et quil boive (Jean, VII, 37 ) »; et encore « Si tu connaissais le don de Dieu, et qui est celui qui te demande à boire, tu lui en aurais u demandé toi-même, et il taurait donné cette eau vive qui étanche pour jamais la soif de celui qui en a bu; et qui devient en lui une source deau jaillissante jusquà la vie éternelle(Id. IV, 10-14 ) » . Ou bien, « près du courant des eaux »signifiera près des péchés des peuples; dans lApocalypse, en effet, les eaux désignent les peuples (Apoc. XVII, 15 ), et le courant se dirait de la chute qui est le propre du péché. Cet arbre donc, cest Notre-Seigneur, qui prend les eaux courantes, ou les peuples pécheurs, et se les assimile par les racines de son enseignement; » il « donnera du fruit », cest-à-dire établira des églises, « en son temps », quand il aura été glorifié en ressuscitant et en montant au ciel. Ayant alors envoyé lEsprit-Saint aux Apôtres, quil confirma dans la confiance en lui-même, et dispersa parmi les peuples, il recueillit pour fruits les églises. « Et son feuillage ne tombera point », car sa parole ne sera point inutile : « Toute chair, en effet; nest quune herbe, toute beauté de lhomme est comme la fleur des champs; lherbe sest fanée, la fleur est tombée, mais la parole de Dieu demeure éternellement(Isa. XI, 6-8 ) ». « Et tout ce quil établira, sera dans la prospérité », cest-à-dire tout ce que portera cet arbre; car cette généralité embrasse les fruits et les feuilles, ou les actes et les paroles. 4. « Il nen est pas ainsi de limpie, vaine poussière que le vent soulève de la surface de la terre (Ps. I, 4 ) ». Terre se dit ici de la permanence qui est le propre de Dieu, et dont il est écrit : « Le Seigneur est la part de mon héritage, et cet héritage mest glorieux (Id. XV, 7 ) ». Et ailleurs : « Attends le Seigneur, garde ses voies, et il télèvera jusquà te mettre en possession de la terre (Id. XXXVI, 34 )» ; et encore : « Bienheureux ceux qui sont doux, parce quils posséderont la terre (Matt. V, 4 ) ». Voici, en effet, le point de comparaison: cest que la terre invisible sera pour lhomme intérieur ce quest pour lhomme extérieur cette terre visible qui lui donne laliment et lespace. Cest de la surface de cette terre invisible que le vent ou lorgueil qui enfle (I Cor. VIII, 1 ), chassera limpie. Mais celui qui senivre de labondance qui règne en la maison de Dieu, qui sabreuve au torrent de ses voluptés, se prémunit contre lorgueil et dit: « Loin de moi le pied de lorgueilleux (Ps. XXXV, 9, 12». De cette terre encore lorgueil a banni celui qui disait : « Je placerai mon trône vers lAquilon, je serai semblable au Très-Haut (Isa. XIV, 13, 14 ) ». Enfin, de cette terre lorgueil a expulsé celui qui osa goûter du fruit défendu, afin de devenir semblable à Dieu, et voulut se dérober à la présence du Seigneur (Gen. III, 6-8 ). Voici des paroles de lEcriture qui nous font bien comprendre que cette terre est lapanage de lhomme intérieur, et que lorgueil en a expulsé lhomme du péché : « De quoi tenorgueillir, cendre et poussière? pendant ta vie, tu as rejeté loin de toi ton intérieur ( Eccli. X, 9, 10 )» ; doù lon peut dire avec raison que sil est rejeté, cest par lui-même. 5. «Aussi, limpie ne doit-il point ressusciter pour le jugement (Ps. I, 5 )», puisquil est balayé de la terre comme une vaine poussière. Cest avec justice que le Psalmiste dit ici que lorgueilleux sera frustré de ce quil ambitionne, ou du pouvoir de juger : aussi nous fait-il mieux comprendre cette parole dans la phrase suivante : « Ni le pécheur dans lassemblée des justes ». Il est dordinaire, dans lEcriture, que la seconde partie du verset explique la première, en sorte que « par limpie » on doit entendre le pécheur, et par « le jugement », lassemblée des justes. Ou du moins, sil y a entre limpie et le pécheur cette différence que tout impie soit pécheur, quoique tout pécheur ne soit pas toujours impie, « limpie ne ressuscitera point pour le jugement », cest-à-dire quil ressuscitera, sans aucun doute, mais non pour être jugé, car il est déjà condamné à des peines indubitables. « Mais le pécheur ne se relèvera point dans lassemblée des justes » , ou pour juger, mais bien pour être jugé, comme il est dit de lui : « Le feu doit éprouver loeuvre de chacun : celui dont louvrage pourra résister, en recevra la récompense; celui dont louvrage sera consumé en subira la peine ; lui cependant sera « sauvé, mais comme par le feu (I Cor. III, 13-15 ) ». (123) 6. « Le Seigneur, en effet, connaît la voie des justes (Ps. I, 6 ) ». Comme on dit : « La médecine connaît la guérison, mais non la maladie », et toutefois la maladie elle-même est connue par lart médical; on peut dire dans le même sens que Dieu connaît la race des justes, et non la race des impies; non pas que Dieu ignore quelque chose, bien quil dise aux pécheurs : «Je ne vous connais-point (Matt. VII, 23 ) ». « Mais la voie de limpie doit périr», se dit dans le même sens que si on lisait: Le Seigneur ne connaît point la voie de limpie. Mais nous voyons clairement par là que celui qui est ignoré de Dieu doit mourir, comme celui qui en est connu doit subsister. En Dieu, être connu, cest être; être ignoré, cest nêtre pas. Il a dit en effet: «Je suis celui qui suis», et « Celui qui est, ma envoyé (Exod. III, 14 ) ».
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