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PRÉFACE DE LA TRADUCTION DU LIVRE SUR LE SAINT-ESPRIT DE DYDYME. A PAULINIEN.
Lorsque je demeurais à Babylone, que j'étais nouvel habitant de la prostituée couverte de pourpre, et que je jouissais du droit de bourgeoisie chez les Romains, j'entrepris de dire quelque chose de la divinité du. Saint-Esprit, et j'avais résolu de dédier l'ouvage à l'évêque de cette ville; mais à peine avais-je commencé que je vis, comme un autre Jérémie, un grand pot de terre du côté d'Aquilon, qui me parut être tout en feu; j'entendis en même temps que le sénat des pharisiens avait prononcé la sentence de ma condamnation. Et ne croyez pas que ce filt quelque savant dans la loi, quelque homme d'esprit et grand politique, ce fut la faction de tous les ignorants qui conspira pour me perdre, comme si je leur avais déclaré hautement une guerre littéraire. Cela m'obligea de retourner aussitôt à Jérusalem, comme pour reprendre mon ancienne habitation qu'on m'avait enlevée. Ainsi, après avoir été quelque temps le spectateur de la cabane de Romulus et des jeux de Lupercal, j'ai été assez heureux pour revoir l'hôtellerie de Marie et la caverne où naquit le Sauveur du monde. Or donc, mon cher frère Paulinien, comme l'évêque Damase, qui m'avait demandé le premier cette traduction, repose maintenant en Jésus-Christ; il faut, avec le secours de vos prières et de celles des vénérables servantes de Jésus-Christ, Paula et Eustochia, que je chante ici le cantique que je n'ai pu chanter dans une terre étrangère, estimant infiniment plus grande la gloire et la dignité du lieu de la naissance de Jésus-Christ que celle de la ville impériale de Romulus, souillée par un fratricide. Mais pour ne pas m'attribuer l'ouvrage d'un autre auteur et devenir semblable à ceux qui se parent des belles plumes des autres oiseaux, j'ai mieux aimé prendre la qualité d'interprète que de faire quelque livre de mon chef. J'ai lu depuis quelque temps les traités d'un anonyme sur la divinité du Saint-Esprit, et j'y ai remarqué ce qu'a dit une fois un poète comique, je veux dire «une méchante traduction latine d'un excellent original grec. » Il n'y a rien dans cet ouvrage qui se ressente de l'art de la logique, rien de fort ni d'embarrassant pour obliger le lecteur, comme malgré lui, à se. rendre à ce que l'on dit; au contraire, tout y est faible et languissant; et s'il s'y trouve quelque beauté, elle est affectée, fardée et empruntée. Or mon Didyme, ayant les yeux de l'épouse des Cantiques, porte sa vue bien plus loin, et par sa pénétration il nous fait remonter su temps où les prophètes étaient appelés « les voyants. » Ceux qui voudront le lire reconnaîtront infailliblement que les Latins ont tout dérobé à cet auteur; et, comme ils pourront puiser dans la source même, ils se mettront peu en peine d'aller chercher l'eau dans les ruisseaux. Il est vrai que louvrage de Didyme n'est pas éloquent, mais il a un grand fond de science, et par là il nous fait assez voir qu'il imite le style des hommes apostoliques, tant dans la simplicité des termes que dans la majesté et la profondeur des pensées.
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