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SAINT MACHAIRE *
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Machaire vient de macha, génie, et ares, vertu, ou de macha, percussion et rio, maître. Il fut en effet ingénieux contre les tromperies du démon, vertueux dans sa vie; il frappa son corps pour le dompter, et il fut maître dans lexercice de la prélature.
L'abbé Machaire descendit à travers la solitude du désert et entra pour dormir dans un monument où étaient ensevelis des corps de païens; il en prit ail qu'il mit sous sa tête en guise d'oreiller. Or, les démons, voulant leffrayer, lappelaient comme on fait à, une femme, en disant : « Levez-vous et venez au bain avec nous.» Et un autre, démon qui était sous lui comme s'il élit été dans le corps mort, disait: « J'ai un étranger sur moi, je lie puis venir. » Machaire ne fut pas effrayé, mais il battait le cadavre en disant : « Lève-toi et va-t-en, si tu peux. » Et les démons, en entendant ces paroles, s'enfuirent en criant à haute voix: « Vous nous avez vaincus, Seigneur ! » Un jour labbé Machaire, traversant un marais pour aller à sa cellule, rencontra le diable qui portait une faux de moissonneur et qui voulait le frapper, sans pouvoir en venir à bout. Et il lui dit: « Machaire, tu me fais bien du mal, parce que je ne puis lemporter sur toi. Et cependant vois, tout ce que tu fais, je le fais aussi tu jeûnes et je ne mange absolument rien; tu veilles, et moi je ne dors jamais. Il n'y a qu'une chose en
* Tiré des Vies des Pères du désert.
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laquelle tu me surpasses. » « En quoi? lui dit labbé. » « C'est en humilité, répondit le diable; elle fait que je ne puis rien contre toi. » Comme les tentations venaient lassaillir, il alla prendre un grand sac qu'il emplit de sable, le mit sur ses épaules et le porta ainsi nombre de jours à travers le désert. Théosèbe layant rencontré, lui dit: « Père, pourquoi portez-vous un si lourd fardeau ? » Il lui répondit : « Je tourmente celui qui me tourmente.» L'abbé Machaire vit Satan passer sous la figure d'un homme couvert de vêtements de lin tout déchirés, et de chacun des trous, pendaient des bouteilles; et il lui dit: « Où vas-tu? » «Je vais, répondit-il, faire boire les frères. » Machaire lui dit : « Pourquoi portes-tu tant de bouteilles? » II répondit: « Je les porte pour les donner à goûter aux frères. Si lune ne leur plaît pas, j'en offre une autre, voire une troisième, et ainsi de suite, jusqu'à ce qu'il tombe à la bonne. » Et quand le diable revint, Machaire lui dit : « Qu'as-tu fait. » Il répondit : « Ils sont tous des saints; personne d'eux n'a voulu mécouter, si ce n'est un seul qui s'appelle Théotite. ». Machaire se leva aussitôt, et alla trouver le frère qui s'était laissé tenter,, et le convertit par son exhortation. Après quoi, Machaire rencontrant encore le diable lui dit: « Où vas-tu ? » « Chez les frères, répondit-il.' » A sou retour le vieillard, le voyant venir: « Que font-ils, les frères, dit-il? » Le diable: « Mal. » « Et pourquoi, dit Machaire? » « Parce que ce sont tous des saints, et le plus grand mal encore, c'est que le seul que j'avais, je lai perdu et c'est le plus saint de tous. » En entendant cela, le vieillard (171) rendit grâces à Dieu. Un jour, saint Machaire: trouva une tête de mort et, après qu'il eut prié, il lui demanda, de qui était la tête. Elle répondit, qu'il avait été païen. Et Machaire lui dit: « Où est ton âme? » Elle répondit: « Dans lenfer. » Comme il demandait s'il était beaucoup profond: Elle répondit que sa profondeur était égale à la distance qu'il y a de la terre au ciel. Machaire continua: « Y en a-t-il qui soient plus avant que toi ? » « Oui, dit-il, les juifs. » Machaire: « Et au-dessous des juifs, y en a-t-il? » Le diable: « Les plus enfoncés de tous sont les faux chrétiens, qui, rachetés par le sang de J.-C., estiment comme rien une . si. précieuse rançon. » Comme il traversait une solitude profonde; à chaque mille, il fichait un roseau en terré, pour savoir par où revenir. Or, ayant cheminé pendant neuf jours, comme il se reposait, le diable ramassa tous les roseaux, et les plaça auprès de sa tête; aussi eut-il beaucoup de peine pour rentrer. Un frère était singulièrement tourmenté par ses pensées, il se disait, par exemple, qu'il était inutile dans sa cellule, au lieu que s'il habitait parmi les hommes, il pourrait être utile à bien du monde. Ayant manifesté ces pensées à Machaire, celui-ci lui dit : « Mon fils, réponds-leur; : « Voici ce que « je fais, je garde les murailles de cette cellule pour «lamour de J.-C. » Un jour, avec la main, il tua un moucheron qui lavait piqué; et beaucoup de sang sortait de la piqûre; il se reprocha d'avoir vengé sa propre injure, et resta tout nu six mois dans le désert, d'où il sortit entièrement couvert de plaies que lui (172) avaient occasionnées les insectes. Après quoi, il mourut en paix et devint illustre par beaucoup de miracles.
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