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DISCOURS SUR LE PSAUME CXXXV.LES DIVINES MISÉRICORDES.
Dieu exerce envers ceux quil a délivrés une miséricorde éternelle, non quil reste quelque misère dont il les délivre continuellement, mais la félicité, dont il les a mis en possession, sera sans fin. Bénissons le Seigneur sans attendre de lui rien de temporel, puisque les bienfaits de sa miséricorde sont sans fin. Ces dieux et ces seigneurs que surpasse le véritable Dieu sont les hommes à qui la parole de Dieu a été adressée, et les démons qui sont les dieux des nations. Les anges ne sont point appelés dieux, afin de nous détourner de leur rendre un culte. Parmi les oeuvres de Dieu, ce qui appartient à sa miséricorde, cest notre délivrance ; les autres oeuvres de la création appartiennent à sa bonté. Seul il fait les oeuvres merveilleuses, comme les astres et les cieux, avec intelligence, cest-à-dire avec son Verbe. Il affermit la terre au-dessus des eaux qui lenvironnent. Ces cieux avec lintelligence peuvent désigner les saints qui sélèvent bien haut par la spiritualité, les astres marqueraient les différents dons chez les saints, et la terre, la foi solide. Il a détruit Pharaon, ou nos péchés, en nous faisant traverser ta mer Rouge du baptême ; pour nous encore il renverse les puissances diaboliques, Seon, roi des Amorrhéens, ou la tentation et le murmure; Og, roi de Basan, ou la confusion des damnés ; il nous introduit dans lhéritage du Christ, qui nous donne sa chair comme une nourriture.
1. « Rendez grâces au Seigneur , parce quil est bon, parce que sa miséricorde est éternelle 1». Ce psaume est une hymne de louanges, et un même refrain termine chaque verset. Quoique lon accumule tous les motifs de bénédictions, cest toujours la miséricorde de Dieu qui est relevée particulièrement, et à laquelle a voulu rendre un solennel hommage en terminant chaque verset, celui qui a
1. Ps. CXXXV, 1.
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été lorgane de lEsprit-Saint, dans la composition du psaume. Or, il me souvient que dans le psaume cent quinzième,, qui commence comme celui-ci, comme lexemplaire que javais sous les veux ne porte pas que sa miséricorde est éternelle, mais quelle est dans les siècles, jai demandé ce quil nous fallait entendre de préférence. Le grec pprte en effet eis ton aiona, que lon peut traduire par dans le siècle, ou par éternellement. Mais il serait long de répéter ici ce que je vous ai dit alors selon mon pouvoir. Dans ce psaume, au contraire, au lieu de porter dans le siècle, comme beaucoup dautres, mon manuscrit porte, sa miséricorde est dans léternité. Sans doute après le jugement que Dieu exercera à la fin des siècles suries vivants et sur les morts, qui mettra les justes en possession de la vie éternelle et assignera la flamme éternelle aux méchants, il ny aura plus personne à qui Dieu fasse: miséricorde; et néanmoins on peut comprendre comme éternelle celte miséricorde que Dieu fait à ses saints et à ses fidèles: non point quils soient ta proie dune misère éternelle, et quils aient éternellement besoin de miséricorde, mais parce que la félicité que Dieu dans sa miséricorde départit aux malheureux, afin de mettre un terme à leur misère,et commencer ainsi leur bonheur, sera sans fin; et dès lors sa miséricorde sera éternelle. Quen nous la justice vienne succéder à liniquité, la santé à la maladie, le bonheur à la misère, la vie à la mon, limmortalité à la mortalité, cest là un effet de sa miséricorde. Or, comme létat où nous devons arriver sera éternel, sa miséricorde sera donc éternelle aussi. Dès lors, « confessez au Seigneur», cest-à-dire, louez le Seigneur en confessant « quil est bon ». Et de cette confession nattendez rien de temporel ; car « sa miséricorde est éternelle », cest-à-dire que le bienfait quil vous accordera dans sa miséricorde sera sans fin. Quant à cette bonté dont parle notre psaume: Quoniam bonus, on lit agathos dans le grec, au lieu que dans le psaume cent quinzième, ce qui est exprimé par bonus, lest en grec par Xrestos. Cest pourquoi quelques-uns lont traduit, parce quil est doux. Toutefois agathos ne veut pas dire une bonté quelconque, mais la bonté par excellence. 2. Le Psalmiste continue: « Confessez au Dieu des dieux que sa miséricorde est éternelle. Confessez au Seigneur des seigneurs que sa miséricorde est éternelle 1 ». Quels sont ces dieux et ces seigneurs, qui ont pour Dieu et pour Seigneur celui qui est le vrai Dieu, voilà ce quil convient de rechercher. LEcriture nous montre dans un autre psaume que des hommes sont appelés dieux, ainsi: « Dieu sest assis dans lassemblée des dieux, et du milieu il juge les dieux » ; et un peu après: « Jai dit : Vous êtes des dieux, vous êtes tous les fils du Très-Haut, et toutefois vous mourrez de même que les hommes, vous tomberez comme un des princes 2 » .Tel est,le passage que le Seigneur nous cite dans lEvangile quand il dit : « Nest-il pas écrit dans votre loi: Jai dit, vous êtes des dieux? Si elle a nommé dieux ceux à qui la parole du Seigneur fut adressée, et lEcriture ne saurait être vaine, comment moi que le Père a sanctifié, et envoyé au monde, maccusez-vous de blasphème, parce que j ai dit : Je suis le Fils de Dieu 3? » Si donc ils sont appelés des dieux, ce nest point que tous soient bons, cest que la parole de Dieu leur a été adressée. Sils étaient ainsi nommés à cause de leur bonté, Dieu ne les jugerait pas ainsi. Car aussitôt quil a dit : « Dieu a pris séance dans lassemblée des dieux », le Psalmiste ne dit point : Du milieu deux il discerne les hommes des dieux, comme pour assigner une différence entre Dieu et l homme; mais il dit : « Au milieu il juge les dieux ». Puis il ajoute : « Jusques à quand vos jugements seront-ils injustes 4 ? » et le reste: ce qui évidemment, ne sadresse pas à tous, mais à quelques-uns, puisquil ne parle que daprès son discernement; et pourtant cest au milieu des dieux quil fait ce discernement. 3. Mais, dira-t-on, si lon appelle dieux ces hommes à qui la parole de Dieu a été adressée, faut-il appeler de ce même nom les anges, puisque légalité avec les anges est la plus grande récompense que lon ait promise aux justes et aux saints? Je ne sais pas si dans toutes les Ecritures on pourrait trouver ou du moins trouver facilement un passage qui nomme clairement dieux les anges; mais quand il est dit du Seigneur Dieu, quil est «terrible sur tous les autres dieux 5», le Psalmiste semble vouloir justifier cette expression
1. Ps. CXXXV, 2, 3. 2. Id. LXXXI, 1, 6, 7. 3. Jean, X, 31-36. 4. Ps. LXXXI, 12. 5. Id. XCV, 4.
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en ajoutant : « Cest que les dieux des nations sont des démons ». Cest à propos de ces dieux que le Psalmiste a dit que Dieu est terrible dans ses saints, dont il a fait des dieux, et qui doivent effrayer les démons. Cest en effet ce quon lit ensuite: « Quant au Seigneur, il a fait les cieux ». Ils ne sont donc point appelés des dieux, sans aucune addition ; mais les dieux des nations : toutefois le Prophète a dit plus haut: « Il est terrible par-dessus tous les dieux », et non par-dessus tous les dieux des nations, bien quil lait voulu faire entendre, en, disant aussitôt : « Car tous les dieux des nations ». On dit, il est vrai, que lhébreu ne lexprime point ainsi, mais quil est dit : « Les dieux des nations sont des simulacres ». En ce cas, mieux vaut en croire les Septante, qui ont traduit avec lassistance de ce même Esprit qui avait dit dabord ce qui est dans le texte hébreu. Cest en effet sous laction du même Esprit-Saint quil a fallu traduire ainsi cette parole : « Les dieux des nations sont des démons », afin de nous faire mieux comprendre ce qui est dans lhébreu : « Les dieux des nations sont des simulacres», et de nous montrer quil ny a dans les idoles rien que des démons. Le simulacre, en effet, qui sappelle en grec, idole, et dont le nom a passé dans le latin, a des yeux, mais ne voit point, et tout ce quénumère le psaume au sujet de ces idoles privées, de tout sens ; doù vient, quon ne saurait les effrayer, puisque leffroi nest que pour les êtres sensibles. Comment donc est-il dit à propos du Seigneur: « Il est terrible sur tous les autres dieux, car les dieux des nations sont des idoles » ; si ce nest que, par idoles, il faut comprendre les démons que lon peut effrayer? De là cette parole de saint Paul : « Nous savons que lidole nest rien 1» : restreignant lidole à la matière qui est privée de sens. Et comme on aurait pu se persuader que nulle nature vivante et sensible ne fait ses délices des sacrifices des païens, lApôtre ajoute : «Mais les sacrifices des païens sont offerts aux démons et non à Dieu. Or, je ne veux point que vous ayez part aux sacrifices des démons ». Si donc nul endroit des saintes Ecritures ne nous prouve que les anges ont été appelés des dieux, la raison qui men vient présentement à lesprit, cest afin que
1. I Cor. VIII, 4. 2. Id. X, 20.
ce nom ne puisse porter les hommes à rendre aux anges te culte souverain, quon nomme en grec liturgie ou latrie. Aussi eux-mêmes ont-ils soin den détourner les hommes, puisque cet honneur nest dû quà celui qui est leur Dieu et le Dieu des hommes. Le nom danges, en latin messagers, leur convient donc beaucoup mieux, ce nom qui a plus danalogie à leur emploi quà leur nature, et nous fait comprendre quils dirigent notre culte vers le Dieu dont ils sont les ambassadeurs. Ainsi lApôtre a tranché en, quelques mots la question qui nous occupe, quand il a dit : « Sil est en effet des êtres appelés dieux dans le ciel et sur la terre, de manière à constituer plusieurs dieux et plusieurs seigneurs, pour nous néanmoins il nest quun seul Dieu, Père doù procèdent toutes choses, qui nous a faits pour lui, et un seul Seigneur Jésus-Christ, par qui tout a été fait, et nous sommes par lui 1». 4. Confessons donc au Dieu des dieux, et au Seigneur des seigneurs, que sa miséricorde est éternelle; « à lui seul qui fait les grands miracles 2». De même que tout verset se clôt par ces mots : « Parce que sa miséricorde est éternelle », de même à la tête de chacun, bien quon ne lait point mis, il faut sous-entendre: «Confessez au Seigneur»; ce que le texte grec nous fait voir clairement, Le latin nous le montrerait également si nos traducteurs avaient pu rendre la même expression. Ils lauraient fait dans ce verset, en disant : « A celui qui fait des miracles 3». Car si nous disons : « Celui qui fait des miracles », on lit dans le grec : « A celui qui fait des miracles» ; ce qui nous force à sous-entendre : « Confessez ». Sils ajoutaient seulement le pronom et nous disaient : « A celui qui fait des miracles », ou « qui a fait», ou qui a « affermi » , on comprendrait facilement quil faut sous-entendre : « Confessez ». Mais le texte est devenu tellement obscur que celui qui ne saurait examiner le texte grec, ou qui néglige de te faire, est porté à penser, quil y a dans le texte : « Qui a fait les cieux, qui a affermi la terre, qui a fait les grands flambeaux, parce que sa miséricorde est éternelle » ; en ce sens que Dieu aurait fait ces oeuvres précisément par un effet de cette éternelle miséricorde, tandis quil ny a pour appartenir à sa miséricorde que ceux quil
1. I Cor. VIII, 4-6 . 2. Ps. CXXXV, 4 . 3. To poiesanti.
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délivre de la misère; et que la création du ciel, de la terre, et des astres 1, loin dêtre une oeuvre de miséricorde, est une oeuvre de bonté pour celui dont toutes les créatures sont excellentes. Créer, en effet, cétait donner la vie à toutes choses; mais loeuvre de sa miséricorde est de nous purifier de nos péchés, et de nous délivrer dune misère éternelle. Cest donc à nous que sadresse le Psalmiste quand il dit: « Confessez au Dieu des dieux, confessez au Seigneur des seigneurs ». Confessez « à celui qui seul fait de grandes merveilles »; confessez « à celui qui a fait le ciel par son intelligence »; confessez « à celui qui a affermi la terre sur les eaux » ; confessez « à celui qui seul fait les grands flambeaux » ; et à la fin de chaque verset, il nous dit pourquoi nous devons le confesser, « cest que sa miséricorde est éternelle ». 5. Mais pourquoi dire qu « il a fait seul de grandes merveilles ? » Est-ce parce quil a fait de nombreux prodiges par le moyen des hommes et des anges? Il y a certaines merveilles que Dieu fait lui seul, et que nous énumère le Psalmiste en disant: « Qui a fait le ciel par son intelligence, qui a affermi la terre sur les eaux, qui a fait seul de grands corps de lumière 2». Le Psalmiste a mis ici le mot seul, parce que Dieu a fait les autres oeuvres par lintermédiaire des hommes. Après avoir dit que Dieu a fait seul les grands corps de lumière, il nous les énumère en disant : « Le soleil pour présider au jour, la lune et les étoiles pour présider à la nuit». Ensuite il commence lénumération des oeuvres que Dieu a faites par les anges, ou par les hommes. « Il a frappé lEgypte avec ses premiers-nés 3 », et le reste. Dieu donc a fait toutes les créatures, non par lintermédiaire dune autre créature ; mais lui seul. Le Prophète rapporte seulement ici quelques-unes des créatures les plus excellentes, les cieux spirituels, la terre visible, pour nous faire juger du reste. Or, comme il y a aussi des cieux visibles, après avoir spécifié les flambeaux, il nous avertit de regarder comme loeuvre de Dieu tout ce quil y a de corporel dans le ciel. 6. Toutefois cette expression : « Il a fait les cieux dans la raison », ou comme dautres ont traduit, «dans lintelligence », a fait
1. Ps. CXXXV, 5. 2. Id. 3-7. 3. Id. 8-10.
demander si le Prophète voulait dire que Dieu a fait les cieux intelligibles, ou sil les a faits dans sa raison ou son intelligence, cest-à-dire dans sa sagesse, ainsi quil est dit ailleurs : « Vous avez tout fait dans votre sagesse 1», nous insinuant que cest par le Verbe, son fils unique. Mais sil en est ainsi, sil nous faut comprendre que Dieu a tout fait dans son intelligence, pourquoi le Prophète ne parle-t-il ainsi que du ciel, taudis que Dieu a tout fait dans sa sagesse? Ou bien le Prophète ne voulait-il lexprimer ici seulement, que pour nous faire comprendre quil est sous-entendu ailleurs; en sorte que le sens serait : « Il a fait les cieux avec intelligence, il a affermi la terre sur les eaux », en sous-entendant aussi, «avec intelligence». « Lui qui a fait seul les grands corps de lumière, le soleil pour présider au jour, la lune et les étoiles pour présider à la nuit » ; encore « avec intelligence », Mais alors pourquoi dire seul, si cest avec la raison ou lintelligence, cest-à-dire dans la sagesse qui est le Verbe unique? Ne serait-ce point parce que la Trinité, au lieu dêtre trois dieux, nest quun seul Dieu, et qualors, dire que Dieu a fait seul toutes ces choses, signifierait que Dieu les a faites sans le secours daucune créature? 7. Mais que signifie : « Il a affermi la terre sur les eaux? » Voilà qui est obscur; car la terre a plus de poids que leau, en sorte que lon peut croire quau lieu dêtre portée par les eaux, cest elle au contraire qui les porte. Mais, sans vouloir minutieusement défendre nos Saintes Ecritures contre ceux qui simaginent avoir trouvé sur ce point des raisons péremptoires, quoi quil en soit, nous avons toujours sous la main ce sens facile à comprendre, que la terre habitée par les hommes, qui contient les animaux terrestres, et que lEcriture appelle aussi laride, ainsi quil est écrit : « Que laride paraisse, et Dieu appela laride du nom de terre 2 », que cette terre est fondée sur les eaux, en ce sens quelle domine les eaux qui lui forment une ceinture . Quand on dit, en effet, dune ville maritime, quelle est bâtie sur la mer, on nentend point dire par là quelle est sur la mer comme la voûte dun pont est au-dessus des eaux, ou comme le vaisseau qui court sur les flots ; mais on dit quelle est sur la mer,
1. Ps. CIII, 24. 2. Gen. I, 9, 10.
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parce quelle domine la mer qui est moins élevée. Cest ainsi quil est dit que Pharaon sélança « sur les eaux 1 » ; tel est le texte grec traduit par les latins, « vers les eaux » ; ainsi encore il est dit que le Seigneur « était assis sur le puits 2», parce que lun et lautre dominaient le puits et le fleuve, lun près du fleuve, lautre près du puits. 8. Si cette expression du Prophète : « Dieu fit les cieux par son intelligence », peut avoir un sens qui nous regarde plus spécialement, comme si les cieux étaient les saints de Dieu, parvenus à cette spiritualité qui nest plus seulement la foi aux choses divines, mais lintelligence même; ceux qui ne peuvent sélever jusque-là, et qui sen tiennent lune foi très-ferme, auraient pour symbole cette terre qui est inférieure aux cieux. Et comme ils demeurent inébranlables dans cette foi quils ont reçue au baptême, il est dit : « Il a affermi la terre sur les eaux». De même il est écrit quen Jésus-Christ Notre-Seigneur sont cachés tous les trésors de la sagesse et de la science 3. Or, quil y ait une différence entre la sagesse et la science, nous en avons dautres preuves dans les saintes Ecritures, et surtout dans les saintes paroles de Job, qui nous définit en quelque sorte lune et lautre: voici en effet ces paroles : « Il dit à lhomme : La sagesse consiste dans la piété, et la science à sabstenir du mal 4 ». Nous sommes autorisés, dès lors, à faire consister la sagesse dans la connaissance et dans lamour de celui qui subsiste toujours, qui est toujours immuable, cest-à-dire Dieu, Cette piété, en effet, en laquelle consiste la sagesse, se nomme en grec Theosebeia, que lon pourrait traduire en latin par culte de Dieu. Et cette science qui consiste à sabstenir du mal 5, quest-ce autre chose que vivre avec précaution et prudence, au milieu dune nation dépravée et corrompue, et comme dans les ténèbres de ce monde, afin que tout fidèle, sabstenant de liniquité, ne soit point confondu dans les ténèbres, mais quil sen éloigne par sa propre lumière ? Saint Paul, afin de faire ressortir quelque part lharmonie qui se trouve entre les différents dons que Dieu fait aux hommes, met ceux-ci en avant: « Lun reçoit de lEsprit-Saint le discours de la sagesse »; cest là, je crois, « Le soleil pour présider au jour :
1. Exod. VIII, 15. 2. Jean, IV, 6. 3. Colos, II, 3. 4. Job, XXVIII, 28 . 5. Philipp. II, 15.
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« lautre, du même Esprit, le discours de la science», ce qui marque la lune. Les étoiles aussi pourraient être désignées dans ces paroles: « Un autre reçoit le don de foi, par le même Esprit, un autre reçoit le don de guérir les malades, un autre le don des miracles, un autre le don de prophétie, un autre le don de parler diverses langues, un autre le don de les interpréter, un autre le discernement des esprits 1 ». Il ny a en effet aucun de ces dons qui ne soit nécessaire, dans cette nuit du monde; une fois quelle sera écoulée, ils ne seront daucune utilité ; de là vient lexpression « pour éclairer la nuit ». Le texte porte in potestatem, et dit « au pouvoir de la nuit », ou « du jour », cest-à-dire la puissance déclairer le jour ou la nuit ; ce qui convient parfaitement aux dons spirituels, puisque Dieu a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu 2. « Il a frappé lEgypte avec ses premiers-nés»; il a frappé le monde avec tout ce qui paraît éclatant dans le monde. 9. « Il a tiré Israël du milieu de IEgypte ». Il a tiré du milieu des méchants ses saints et ses fidèles. « Avec une main puissante, et un bras élevé 3 ». Quel bras plus puissant et plus élevé que celui dont il est dit: « A qui le bras du Seigneur a-t-il été montré 4 ? Lui qui a séparé la mer Rouge en deux parts ». Il fait encore aujourdhui cette division, puisque le même baptême donne aux uns la vie, aux autres la mort. « Il a conduit Israël par le milieu de cette mer». Il conduit aussi à travers le bain de la régénération son peuple renouvelé. « Il a renversé Pharaon et toute sa puissance dans la mer Rouge ». Par le baptême, il donne la mort au péché de ses serviteurs, et à toutes ses traces. « Il a conduit son peuple par le désert ». Il nous fait aussi traverser le désert et les aridités de cette vie, de peur que nous ny périssions, « Il a frappé de grands rois et mis à mort des rois puissants ». Il frappe, il met à mort par nous les puissances diaboliques, les esprits de malice. « Seon, roi des Amorrhéens »; cest-à-dire, ce germe inutile, ce foyer de tentation, que signifie Seon, le roi des Amorrhéens ou de lamertume « Et Og, roi de Basan ». Og, ou celui qui amasse, roi de Basan ou de la confusion. Que peut amasser le diable, sinon la
1. I Cor. XII, 8-l0. 2. Jean, I, 12. 3. Ps. CXXXV, 11-12. 4. Isa. LIII, 1.
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confusion? « Il a donné leur terre en héritage, en héritage à Israël son serviteur ». Ceux que le démon possédait, Dieu les donne en héritage à la race dAbraham qui est le Christ. « Il sest souvenu de nous dans notre humiliation, et nous a rachetés de nos ennemis 1 », par le sang de son Fils unique. « Il donne la nourriture à toute chair » ; cest-à-dire à tout le genre humain, non-seulement aux Israélites, mais encore aux Gentils ; et cest de cet aliment quil est dit : « Ma chair est vraiment une nourriture 2. Confessez au Dieu du ciel que sa miséricorde est éternelle. Confessez au Seigneur des seigneurs que sa miséricorde est éternelle 2». Cette expression, « ami Dieu du ciel », me paraît en
1. Ps. CXXXV, 13-2424. 2. Jean, VI, 56. 3. Ps. CXXXV, 26.
dautres termes la répétition de cette autre, « au Dieu des dieux », car le Prophète ajoute ici précisément ce que déjà il avait ajouté plus haut: «Confessez au Seigneur des seigneurs ». Quels que soient ceux que lon nomme « dieux », confessez au Seigneur des seigneurs; car «sil est des êtres appelés dieux, soit dans le ciel, soit sur la terre, et quainsi il y ait plusieurs dieux et plusieurs seigneurs, néanmoins il ny a pour nous quun seul Dieu, le Père doù procèdent toutes choses, et qui nous a faits pour lui; et un seul Seigneur Jésus-Christ, par qui toutes choses ont été faites, et nous sommes par lui » : et auquel nous confessons que « sa miséricorde est éternelle ».
1. I Cor. VIII, 5, 6.
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