DISCOURS SUR LE PSAUME XXIV.
ESPOIR EN DIEU.
Sentiments de confiance, dhumilité et de confiance avec lesquels on doit recourir à Dieu dans les adversités de la vie présente.
POUR LA FIN, PSAUME POUR DAVID
1. Cest Jésus-Christ qui parle ici, mais au nom de son Eglise. Car tout ce que renferme le psaume sapplique mieux au peuple chrétien converti à Dieu.
2. « Cest vers vous, Seigneur, que jélève mon âme », par de spirituels désirs, elle qui rampait sur la terre par ses charnelles
convoitises. « Mon Dieu, jai mis en vous mon espoir, et je nen rougirai point ». Seigneur, ma confiance en moi ma réduit à ces infirmités de la chair; jabandonnais Dieu pour être moi-même comme un Dieu, et voilà que le moindre animal me fait craindre la mort, et que jai dû rougir de mon orgueil dérisoire; maintenant que jespère en vous seul, plus de confusion pour moi.
(218)
3. « Que mes ennemis ne me tournent plus en dérision
». Quils ne me persiflent point, ceux dont les suggestions occultes et empoisonnées sont autant de piéges; et qui en me criant: Courage, courage, mont avili de la sorte. « Car la déception nest plus pour ceux qui espèrent en vous ».
4. « Que ceux-là soient couverts dopprobre, ceux qui font avec moi des actes futiles ». Honte à ceux qui font le mal pour acquérir les biens qui passent. « Mais vous, Seigneur, montrez-moi vos voies, ouvrez-moi vous-même vos sentiers »; qui ne sont point spacieux, et qui ne conduisent pas la foule à sa perte; enseignez-moi ces sentiers étroits qui sont les vôtres et que peu connaissent .
5. « Faites-moi marcher dans votre vérité», et fuir lerreur. « Enseignez-moi », puisque de moi-même je ne connais que le mensonge. « Cest vous, ô Dieu, qui êtes mon Sauveur, vous que jai attendu tout le jour ». Banni par vous du paradis , errant dans les régions lointaines , je ne puis retourner à vous si vous ne venez au-devant de moi ; et pendant le cours de cette vie terrestre, votre miséricorde attendait mon retour.
6. « Souvenez-vous, Seigneur, de vos miséricordes ». Souvenez-vous, Seigneur, de vos oeuvres miséricordieuses, car les hommes vous accusent doubli. « Souvenez-vous de ces bontés qui sont éternelles ». Noubliez point surtout que vos miséricordes ont commencé avec le monde. Car elles sont inséparables de vous, puisque vous avez assujéti lhomme pécheur à la vanité, mais dans lespérance, et que vous avez donné à votre créature de si nombreux et si grands sujets despérance.
7. «Ne gardez aucun souvenir des fautes de ma jeunesse, et de mon ignorance ». Ne réservez point de châtiment aux fautes que jai commises par une témérité audacieuse, et par ignorance, quelles soient effacées à vos yeux. « O Dieu, souvenez-vous de moi selon votre miséricorde ». Souvenez-vous de moi, non point selon cette colère dont je suis digne, nais selon cette miséricorde qui est digne de vous. « A cause de votre bonté », et non point à cause de mes mérites.
8. «Le Seigneur est plein de douceur et déquité ». De douceur, puisquil prend en
pitié les pécheurs et les impies, jusquà leur pardonner leurs fautes passées, mais aussi de justice, car après la grâce de la vocation et du pardon, grâce que nous navons point méritée, il exigera au jour du dernier jugement des mérites proportionnés à ces grâces. « Aussi fera-t-il connaître sa loi à ceux qui ségarent en chemin », car cest pour les conduire dans la voie, quil leur a fait miséricorde.
9. « Il dirige les humbles dans la justice ». Cest lui qui conduira les hommes doux, et qui, au jour du jugement, ne jettera point dans leffroi ceux qui suivent sa volonté, qui ne résistent pas à la sienne pour lui préférer la leur. « Il enseignera ses voies à ceux qui sont doux ». Il enseignera ses voies, non point à ceux qui les veulent dépasser, comme sils étaient eux-mêmes plus capables de se diriger, mais à ceux qui ne savent ni lever la tête, ni regimber quand on leur impose un joug doux et un fardeau léger .
10. « Toutes les voies du Seigneur ne sont que miséricorde et vérité ». Quelles voies peut enseigner le Seigneur, sinon cette miséricorde qui se laisse fléchir, et cette vérité qui le rend incorruptible? Il exerce la première en nous pardonnant nos fautes, et la seconde en jugeant nos mérites. De là vient que toutes les voies du Seigneur se réduisent aux deux avènements du Fils de Dieu, lun pour exercer la miséricorde et lautre le jugement. Celui-là donc arrive à Dieu par le chemin tracé, qui reconnaît que sans aucun mérite il est délivré de ses fautes, qui renonce à lorgueil, et redoute le sévère examen dun juge dont il a éprouvé la secourable clémence. « Pour ceux qui recherchent son alliance et sa loi ». Car ils reconnaissent la miséricorde du Seigneur dans son premier avènement, sa justice dans le second, ceux qui recherchent avec douceur et mansuétude le testament par lequel il nous a rachetés pour la vie éternelle, au prix de son sang, qui étudient ses témoignages dans les prophètes et dans les évangélistes.
11. «A cause de votre nom, vous serez miséricordieux pour mes fautes qui sont en si grand nombre ». Non-seulement vous avez couvert du pardon les fautes que jai commises avant darriver à la foi; mais le sacrifice dun coeur contrit vous adoucira en faveur de mes péchés qui sont nombreux, car la véritable.
(219)
voie elle-même nest pas sans achoppement.
12. « Quel est lhomme qui craint le Seigneur » et qui sachemine ainsi vers la sagesse? « Le Seigneur lui dictera ses lois dans la voie quil a choisie ». Le Seigneur lui prescrira ses ordres dans la voie quil a choisie, volontairement choisie, et il ne péchera plus impunément.
13. « Son âme se reposera dans labondance des biens, et sa postérité aura la terre en héritage ». Ses oeuvres lui vaudront la possession solide dun corps renouvelé par la résurrection.
14. « Le Seigneur est la force de ceux qui le craignent ». La crainte ne paraît convenir quaux faibles, mais le Seigneur est la force de ceux qui le craignent. Et le nom du Seigneur, glorifié dans lunivers entier, fortifie ceux qui ont de la crainte pour lui. « Et il leur découvre son alliance ». Il leur fait connaître son alliance, car les nations et les confins de la terre sont lhéritage du Christ.
15. « Mes yeux sont constamment tournés vers le Seigneur; parce que cest lui qui retirera mes pieds du piége ». Je nai point à craindre les périls de la terre quand je ne la regarde point, et celui que je contemple dégagera mes pieds du piège.
16. « Jetez les yeux sur moi, et prenez-moi en pitié, parce que je suis pauvre et unique ». Je suis ce peuple unique, conservant lesprit dhumilité dans votre Eglise, qui est unique et ne souffre ni schisme ni hérésie.
17. « Les tribulations de mon coeur se sont multipliées ». Mon coeur sest fort affligé quand jai vu liniquité saccroître et la charité se refroidir. « Délivrez-moi de ces tristes nécessités». Comme il mest nécessaire de souffrir ainsi pour conquérir le salut par la persévérance finale, épargnez-moi ces nécessités.
18. « Voyez mon abaissement et mon labeur ». Voyez que je mabaisse, et que lorgueil de ma justice ne me jette point en dehors de lunité; voyez mon labeur à supporter les hommes déréglés qui menvironnent. « Et pardonnez-moi mes péchés». En considération de douloureux sacrifices, pardonnez-moi mes fautes, non-seulement celles de ma jeunesse et de lignorance avant que je crusse en vous, mais celles que mont fait commettre la faiblesse et les ténèbres de cette vie depuis que je marche dans la foi.
19. « Considérez combien sest accru le nombre de mes ennemis ». Non-seulement jen rencontre au-dehors, mais encore dans la communion de lEglise. « Ils mont poursuivi dune haine injuste». Ils mont haï quand je les aimais.
20. « Soyez le gardien de mon âme et délivrez-moi ». Gardez mon âme, de peur que je nen vienne à imiter les méchants, et délivrez-moi de la peine que jendure dêtre mêlé avec eux. « Je ne serai point confondu, parce que jai espéré en vous ». Quils ne sélèvent point contre moi à ma confusion, car cest cri vous et non en moi que jai mis mon espoir.
21. « Les hommes innocents et droits se sont attachés à moi, parce que je vous ai attendu, ô mon Dieu » Les coeurs purs et droits ne me sont pas unis comme les méchants par la seule présence corporelle, mais par leur inclination pour linnocence et la justice, parce que je ne vous ai point abandonné pour imiter les méchants; mais je vous ai attendu et vous attends encore, jusquà ce que vous passiez au van la dernière de vos moissons.
22. « Délivrez Israël, ô mon Dieu, de toutes ses afflictions . Seigneur, rachetez votre peuple que vous avez préparé à voir votre lumière, délivrez-le, non-seulement de toutes les tribulations du dehors, mais de celles quil endure à lintérieur.
(220)