FAUSTE XXXI
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LIVRE TRENTE-UNIÈME. ABSTINENCE DE CERTAINS ALIMENTS.

 

Fauste revient à la charge pour prouver que l'abstinence de certains aliments est un crime. — Vision de saint Pierre. — Augustin explique le texte de saint Paul : « Tout est pur pour ceux qui sont purs». Argument ad hominem adressé aux Manichéens.

 

CHAPITRE PREMIER. MOÏSE ET LES PROPHÈTES N'ONT PU VOIR DIEU, ÉTANT SOUILLÉS PAR L'ABSTINENCE DE CERTAINS ALIMENTS.

CHAPITRE II. FAUSTE REVIENT A SES OBJECTIONS CONTRE L'ABSTINENCE DES CATHOLIQUES.

CHAPITRE III. OBJECTION TIRÉE DE LA VISION DE PIERRE.

CHAPITRE IV. EXPLICATION DU TEXTE DE SAINT PAUL : TOUT EST PUR ETC. APPLICATION AUX MANICHÉENS.

 

CHAPITRE PREMIER. MOÏSE ET LES PROPHÈTES N'ONT PU VOIR DIEU, ÉTANT SOUILLÉS PAR L'ABSTINENCE DE CERTAINS ALIMENTS.

 

Fauste. « Tout est pur pour ceux qui sont purs; mais, pour les impurs et pour ceux qui sont souillés, rien n'est pur; leur esprit et leur conscience sont souillés ». — Il y a encore à examiner si vous gagnez à ce que Paul ait dit cela: car jusqu'ici il reste établi, non-seulement que Moïse et les Prophètes étaient inspirés des démons, pour avoir porté tant de lois relatives à la distinction des aliments, mais encore qu'ils étaient eux-mêmes immondes, que leur esprit et leur conscience étaient souillés, au point qu'on peut à bon droit leur appliquer la suite du texte : « Ils confessent qu'ils connaissent Dieu, et ils le nient par leurs oeuvres (1)». A qui, en effet, ces paroles peuvent-elles mieux s'appliquer qu'à Moïse et aux Prophètes qui ont vécu (c'est chose prouvée) bien autrement qu'il ne convenait à des hommes qui connaissaient Dieu? Jusqu'ici, cependant, je ne voyais d'autres souillures dans leur conscience que des adultères, des fraudes et des homicides ; mais maintenant, grâce à ce chapitre, je vois clairement qu'ils ont encore été souillés pour avoir cru qu'il y a quelque chose de souillé. Sur quel fondement pouvez-vous donc vous imaginer qu'ils aient été honorés de l'aspect de la Majesté divine, puisqu'il est écrit que personne ne peut voir Dieu que ceux qui ont le coeur pur (2) ? Mais, eussent-ils été d'ailleurs irréprochables, la pratique superstitieuse de l'abstinence de certains aliments eût suffi, si elle souille l'âme, à les rendre indignes de voir la divinité. C'en est donc fait à tout jamais de la gloire de Daniel et des trois enfants de la fournaise. Jusqu'au moment où l'on a annoncé qu'il n'y a rien d'impur, ils passaient chez les Juifs pour des hommes très-purs et très-vertueux, pour avoir observé les traditions paternelles,

 

1. Tit. I, 15, 16. — 2. Matt. V, 8.

 

en s'abstenant rigoureusement de la nourriture des Gentils et surtout des viandes immolées (1). Mais maintenant, il est clair que leur esprit et leur conscience étaient souillés, notamment pour s'être abstenus de sang et de la chair des victimes.

 

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CHAPITRE II. FAUSTE REVIENT A SES OBJECTIONS CONTRE L'ABSTINENCE DES CATHOLIQUES.

 

Mais peut-être l'ignorance les excusait-elle; la foi chrétienne n'existant pas encore pour leur apprendre que tout est pur pour ceux qui sont purs, ils ont pu croire qu'il existait des choses immondes. Mais vous, comment vous excuser, quand Paul, s'écriant qu'il n'y a rien d'impur, qualifiant de doctrine de démons l'abstinence des aliments (2), et appelant souillés ceux qui croient qu'il y a quelque chose de souillé, non-seulement vous vous abstenez, comme je l'ai dit, mais vous en tirez même gloire et vous croyez d'autant plus agréables au Christ que vous portez plus loin cette abstinence, c'est-à-dire que votre esprit et votre conscience sont plus souillés, à s'en tenir du moins au texte de l'Apôtre ? Et j'ajoute que trois religions se partageant le monde, à savoir le Judaïsme, le Christianisme et le Paganisme, et que toutes les trois faisant consister la purification de l'âme dans la chasteté et l'abstinence, quoique sous des formes très-différentes, il est impossible de savoir de laquelle des trois provient ce principe qu'il n'y a rien d'impur? Car ce n'est certainement pas du Judaïsme, ni du Paganisme, puisqu'il établit aussi des distinctions entre les aliments, et qu'il importe peu qu'il soit, sur certains animaux, en désaccord avec la loi hébraïque. Reste donc la foi chrétienne : or, si tu penses qu'il n'y a réellement rien de souillé pour elle, tu es tout d'abord forcé de convenir qu'il n'y a pas de chrétiens chez vous. Car, pour ne rien dire du reste, vous regardez tous

 

1. Dan. 1, 12. — 2. I Tim. IV, 1, 3.

 

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comme une grande souillure de toucher à des chairs d'animaux étouffés ou sacrifiés aux idoles (1); ou si la loi chrétienne vous autorise à le faire, il faut donc encore chercher en dehors d'elle le principe qui supprime absolument toute abstinence d'objets immondes. Comment donc Paul a-t-il pu émettre un principe qui ne convient à aucune religion? En effet, l'Apôtre, en passant du Judaïsme au Christianisme, a moins changé de religion que de rite. Mais l'auteur de ce chapitre me semble ne s'être appuyé sur aucun système religieux.

 

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CHAPITRE III. OBJECTION TIRÉE DE LA VISION DE PIERRE.

 

Ainsi donc, quand il vous arrivera, à l’avenir, de trouver dans les Ecritures quelque passage opposé à notre croyance, prenez bien garde de chercher à le faire valoir contre nous, avant de vous être assurés qu'il ne vous contrarie pas vous-mêmes. Tel est, par exemple, ce texte que vous citez souvent, où l'on raconte que Pierre vit un jour un vase descendu du ciel, dans lequel étaient renfermés des animaux et des reptiles de tout genre, et que, frappé d'étonnement et d'admiration, il entendit une voix d'en haut qui lui disait : « Pierre, tue » tout ce que tu vois dans ce vase, « et mange ». A quoi il répondit : « Seigneur, je ne toucherai à rien d'impur ni de souillé ». Et la voix reprit : « Ce que j'ai sanctifié ne s'appelle pas impur (2) ». Bien que ces paroles aient un sens allégorique et ne se rapportent point à l'indifférence des aliments, cependant, puisque c'est en ce sens qu'il vous plaît de l'interpréter, vous voilà donc obligés de manger de toute espèce d'animaux, voire même des- vipères, des couleuvres et de tout autre genre de reptiles, suivant la vision de Pierre. Par là, vous ferez voir que vous obéissez réellement à la voix qu'il a, diton, entendue. Et pourtant, n'oubliez jamais que, par là aussi, sont condamnés Moïse et les Prophètes qui ont regardé comme immondes un grand nombre des animaux que Dieu a sanctifiés, d'après cette parole descendue du ciel.

 

1. Act. XV, 29. — 2. Id. XX-11, 15.

 

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CHAPITRE IV. EXPLICATION DU TEXTE DE SAINT PAUL : TOUT EST PUR ETC. APPLICATION AUX MANICHÉENS.

 

Augustin. En disant : « Tout est pur pour a ceux qui sont purs », l'Apôtre a voulu parler des natures mêmes que Dieu a créées, suivant le témoignage de Moïse dans la Genèse : « Dieu -fit toutes choses, et voilà que tout était très-bon (1) », et non les significations symboliques en vue desquelles, par l'entremise du même Moïse; il établit une distinction entre les animaux mondes et les animaux immondes (2). Comme j'ai déjà traité ce sujet avec détail et en plus d'un lieu, il suffit que j'en dise un mot en passant. Donc c'étaient ceux qui, au temps de la révélation du Nouveau Testament, s'imaginèrent qu'il fallait conserver ces ombres de l'avenir et prétendaient que les Gentils ne pouvaient sans elles profiter du salut qui est dans le Christ : c'étaient ceux-là, dis-je, que l'Apôtre appelait immondes, parce qu'ils avaient des goûts charnels, et infidèles, parce qu'ils ne distinguaient pas le temps de la grâce du temps de la loi c'est pour eux qu'il- prétend que rien n'est pur, parce qu'ils n'usaient saintement et convenablement ni de ce qu'ils rejetaient; ni de ce qu'ils mangeaient, comme tous les infidèles, il est vrai, et comme vous surtout, Manichéens, pour qui rien n'est pur. Car la nourriture même que vous prenez, et que vous mettez le plus grand soin à préserver de tout contact avec la chair, n'est pas pure pour vous, qui la dites créée par le démon. Vous prétendez- même, en la mangeant, purifier votre dieu qui est enchaîné et souillé. Tout au moins vous devriez vous croire purs, puisque ce dieu a l'honneur d'être purifié par vos estomacs. Mais non : vous affirmez encore que vos corps sont la nature et l'oeuvre du peuplé des ténèbres, et que vos âmes sont souillées par vos corps. Qu'y a-t-il donc de pur pour vous? Ce n'est pas ce que vous prenez, ce n'est pas l'estomac où vous le faites descendre, ce n'est pas même vous, qui cependant purifiez ce que vous prenez. Vous voyez donc à qui s'adresse cette sentence de l'Apôtre ; c'est évidemment à tous ceux qui sont infidèles et impurs. Mais il a surtout et principalement en vue de vous confondre. « Tout est donc pur pour ceux qui

 

1. Gen. I, 31. — 2. Lev. XI.

 

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sont purs», au point de vue de la nature dans laquelle chaque chose est créée; mais tout n'était pas pur pour le peuple juif, au point de vue du sens figuré; ni tout n'est pas convenable pour nous, au point de vue de la santé du corps ou des usages de la société humaine; seulement, quand chaque chose est attribuée à qui elle convient et placée dans son ordre naturel, « tout est pur pour ceux qui sont purs; mais pour les impurs et les infidèles», :surtout tels que vous, a rien a n'est pur n ; vous vous appliqueriez avec grand profit la suite des paroles de l'Apôtre, si vous vouliez guérir votre conscience cautérisée ; car il dit : « Mais leur esprit et leur conscience sont souillés » .

 

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