SERMON CLVIII
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rte de l'église 38 - CH-1897 Le Bouveret (VS)

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SERMON CLVIII. CONFIANCE EN DIEU (1).

 

ANALYSE. — Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous ? L'important donc est de savoir si Dieu est pour nous. Or l'Apôtre enseigne qu'il est pour ceux qu'il a prédestinés, appelés, justifiés et glorifiés. Voyons ce qu'il y a déjà en nous de ces quatre caractères, afin de nous en faire un point d'appui pour obtenir de Dieu ce qui nous manque encore. — Avant même que nous ayons reçu l'existence, Dieu bous avait prédestinés et il nous a appelés en nous faisant chrétiens. Mais sommes-nous justifiés afin d'être un jour du nombre des glorifiés? Examinons ce que nous pouvons posséder de justice, car elle n'est pas complète ici-bas, et cherchons à acquérir ce qui nous manque. La justification comprend la foi, l'espérance et la charité. Si déjà nous avons en nous la foi et l'espérance, perfectionnons et développons sans relâche la charité, attendu qu'au ciel nous n'aurons plus ni la foi ni l'espérance, nous n'y conserverons que la charité. — Ainsi donc, Dieu nous a suffisamment témoigné sa bonté pour nous inspirer confiance en lui; c'est à nous de développer avec sa grâce la charité dans notre vie, pour affermir de plus en plus notre confiance.

 

1. Nous venons d'entendre le bienheureux Apôtre nous encourager et nous rassurer par ces mots : « Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous? » Pour qui est-il? L'Apôtre venait de le dire de la manière suivante : « Ceux qu'il a prédestinés, il les a appelés; et ceux qu'il a appelés, il les a justifiés; et ceux qu'il a justifiés, il les a glorifiés. Que dire après cela? Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous? » Dieu est pour nous, en nous prédestinant; Dieu est pour nous, en nous appelant; Dieu est pour nous, en

 

1.  Rom. VIII, 30, 31.

 

nous justifiant; Dieu est pour nous, en nous glorifiant. « Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous? » Il nous a prédestinés, avant notre existence; il nous a appelés, quand nous étions loin de lui; justifiés, quand nous étions pécheurs; glorifiés, quand nous étions mortels. « Si Dieu est pour nous, qui sera contre-nous ? » Pour essayer de nuire à ceux que Dieu a prédestinés, appelés, justifiés et glorifiés, il faudrait se disposer à lutter d'abord, si on le peut, contre Dieu même. Dès qu'on nous dit : « Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous? » n'est-il pas vrai qu'on ne peut nous atteindre sans triompher de Dieu? Mais qui triomphe du Tout-Puissant? Chercher à lui résister, c'est se meurtrir ; et c'est ce que le Christ criait du haut du ciel à l’Apôtre qui portait encore alors le nom de Saul : « Tu ne gagnes rien, lui disait-il, à regimber contre l'aiguillon (1) ». Qu'on frappe, qu'on frappe autant qu'on peut; frapper contre l'aiguillon, n'est-ce pas se frapper soi-même?

2. En examinant ces quatre caractères que l'Apôtre a mis en relief et qui distinguent les favoris de Dieu, savoir la prédestination, la vocation, la justification et la glorification, remarquons ceux que nous possédons déjà et ceux que nous attendons encore. En voyant ce que nous avons, nous louerons Dieu qui nous l'a donné; et en constatant ce qui nous manque, soyons sûrs que Dieu nous en est redevable. Il nous le doit, non pour avoir reçu de nous, mais pour nous avoir promis ce qu'il lui a plu. Nous pouvons dire à un homme : Tu me dois, car je t'ai donné; mais à Dieu : Vous me devez, car vous m'avez promis. Quand on peut dire : Tu me dois, parce que je t'ai donné, c'est qu'on a remis pour échanger plutôt que pour donner. Mais quand on dit : Vous me devez, parce que vous m'avez promis, on n'a rien confié et pourtant on exige; on exige parce que la bonté qui a promis donnera fidèlement, sans quoi elle ne serait plus bonté , mais plutôt méchanceté, attendu que pour tromper il faut être méchant. Or, disons-nous à Dieu : Rendez-moi , car je vous ai donné? Eh ! que lui avons-nous donné, puisque c'est de lui que nous tenons tout ce que nous sommes et tout ce que nous avons de bon? Non, nous ne lui avons rien donné; et nous ne pouvons à ce

 

1. Act. IX, 5.

 

titre réclamer ce qu'il nous doit. L'Apôtre d'ailleurs ne dit-il pas avec beaucoup de raison: « Quia connu la pensée du Seigneur? ou qui a été son conseiller? ou qui le premier lui a donné et sera rétribué (1) ? » Voici donc comment nous pouvons poursuivre le Seigneur notre Dieu; il faut lui dire : Accordez-nous ce que vous avez promis, car nous avons fait ce que vous avez prescrit ; et encore est-ce vous qui l'avez fait en nous, puisque vous nous avez aidés à le faire.

3. Que personne donc ne dise : Dieu m'a appelé, parce que je l'ai servi. Comment l'aurais-tu servi, s'il ne t'avait appelé ? S'il t'avait appelé pour avoir été servi par toi, il t'aurait donc rendu pour avoir reçu de toi le premier. Mais l'Apôtre n'interdit-il pas ce langage quand il s'écrie : « Qui lui a donné le premier et sera rétribué? » Au moins tu existais déjà quand il t'a appelé; mais aurait-il pu te prédestiner, si déjà tu avais l'être? Qu'as-tu donné à Dieu, puisque, pour donner, tu n'existais même pas? Et qu'a fait Dieu en te prédestinant avant ton existence? Ce que dit l'Apôtre : « Il appelle ce qui n'est pas comme ce qui est (2) ». Non, il ne te prédestinerait pas, si tu existais, et ne t'appellerait pas, si tu n'étais éloigné; si tu n'étais impie, il ne te justifierait pas, et ne te glorifierait pas, si tu n'étais de terre et de boue. « Qui donc lui a donné le premier et sera rétribué? Puisque c'est de lui, par lui et en lui que sont toutes choses » ; que lui rendrons-nous? « A lui la gloire (3) ». Nous n'étions pas, quand il nous a prédestinés; nous étions éloignés, quand il nous a appelés; quand il nous a justifiés, nous étions pécheurs : donc rendons-lui grâces et ne demeurons pas ingrats.

4. Nous nous étions proposé d'examiner ce que nous avions déjà et ce qu'il nous restait à acquérir encore des quatre caractères énoncés par saint Paul. Or,. dès avant notre naissance, nous avons été prédestinés; et nous avons été appelés, lorsque nous sommes devenus chrétiens. Voilà ce que nous avons déjà. Mais sommes-nous justifiés? Où en sommes-nous sous ce rapport? Oserons-nous dire de ce troisième caractère que nous l'avons aussi? Y aura-t-il parmi nous un seul homme pour oser dire : Je suis juste? Je suis juste, signifie, selon moi, je ne suis pas pécheur.

 

1. Rom. XI, 34, 35.  — 2. Ib. IV, 17. — 3. Rom. XI, 36.

 

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Mais si tu oses tenir ce langage, voici devant toi l'Apôtre Jean : « Si nous affirmons », dit-il, « que nous sommes sans péché, nous nous séduisons nous-mêmes et la vérité n'est point en nous  (1) ». Eh quoi ! sommes-nous étrangers à toute justice? Ou bien sommes-nous un peu justes, sans l'être complètement? C'est ce qu'il nous faut examiner; car si nous sommes justes sans l'être complètement, il nous suffira, pour le devenir, d'ajouter à ce que nous sommes déjà.

Voici des hommes baptisés, tous leurs péchés sont remis, ils en sont justifiés, nous ne pouvons le nier : il leur reste néanmoins à lutter encore contre la chair, à lutter contre le monde, à lutter contre le démon. Or, quand on lutte, on frappe et on est frappé, on triomphe et on est renversé; mais il faut voir dans quel état on quittera l'arène. Oui, « si nous affirmons que nous sommes sans péché, nous nous illusionnons nous-mêmes et la vérité n'est point en, nous ». D'un autre côté, si nous nous disons absolument étrangers à la justice , c'est un mensonge qui s'élève contre les dons divins. En effet, être entièrement étranger à la justice, c'est n'avoir même pas la foi; mais si nous n'avons pas la foi, nous ne sommes pas chrétiens; si au contraire nous l'avons, nous sommes un peu justes. Veux-tu savoir la valeur immense de ce peu ? Le juste vit de la foi (2) ; — oui le juste vit de la foi », en croyant ce qu'il ne voit pas.

5. Lorsque nos pères, lorsque les chefs du troupeau sacré, lorsque les saints apôtres annonçaient l'Evangile, ils publiaient non-seulement ce qu'ils avaient vu, mais encore ce qu'ils avaient touché de leurs mains; et pourtant, comme un de ses disciples le touchait de la main, cherchant à s'assurer et s'assurant effectivement de la réalité, comme il s'écriait en le pressant : « Mon Seigneur et mon Dieu ! » ce Seigneur et ce Dieu, qui nous réservait le don de la foi, répondit d'abord : « Tu as cru pour avoir vu » ; puis jetant les yeux sur ce que nous ferions : « Heureux, continua-t-il, ceux qui ont cru sans avoir vu (3) ! » Nous donc qui n'avons pas vu et qui avons cru pour avoir entendu, nous avons été d'avance proclamés bienheureux, et nous serions complètement étrangers à la justice ! Le Seigneur s'est

 

1. Jean, I, 8. — 2. Hab. II, 4 ; Rom. I, 17. — 3. Jean, XX, 28, 29.

 

montré avec son corps aux yeux des Juifs, et ils l'ont mis à mort ; il ne s'est pas montré visiblement à nous, et nous l'avons reçu. « Un peuple que je ne connaissais pas m'a servi ; il a prêté à ma voix une oreille docile (1) ». Nous sommes ce peuple, et il n'y aurait en nous aucune trace de justice ! Certes il y en a. Soyons reconnaissants pour ce que nous avons reçu; ainsi nous obtiendrons encore, sans rien perdre de ce qui nous a été donné.

Il résulte que maintenant encore se forme en nous le troisième caractère. Nous sommes justifiés, mais la justice progresse en nous avec nous. Je vais vous exposer ses développements et conférer en quelque sorte avec vous. Chacun de vous, quoique déjà justifié en ce sens qu'il a reçu la rémission de ses péchés dans le bain de la régénération, qu'il a reçu encore l'Esprit-Saint pour avancer de jour en jour, pourra reconnaître où il en est, marcher, progresser et croître jusqu'à ce qu'il arrive, non pas au terme, mais à la perfection.

6. On commence par la foi. En quoi consiste la foi ? A croire. Cette foi néanmoins doit se distinguer de celle des esprits immondes. Elle consiste, avons-nous dit, à croire. « Mais, observe l'apôtre saint Jacques, les démons croient aussi et ils tremblent (2) ». Tu crois et tu vis sans espérance ou sans amour? mais les démons croient aussi et ils tremblent ». Tu estimes avoir beaucoup fait en proclamant le Christ Fils de Dieu. Il est vrai, Pierre l'a proclamé, et il lui a été dit : « Tu es heureux, Simon, fils de Jona » ; mais les démons l'ont publié aussi, et il leur a été dit : « Taisez-vous ». Pierre parle et on lui dit : « Ce n'est ni la chair ni le sang qui t'ont révélé ceci, mais mon Père, qui est dans les cieux (3) ». Les démons parlent de même, et on leur dit de se taire (4), et on les repousse ! Sans doute la parole est la même; mais le Sauveur porte son regard sur la racine et non sur la fleur. De là cette recommandation adressée aux Hébreux : « Veillant à ce qu'aucune racine amère, poussant en haut ses rejetons, n'importune et ne souille l'âme d'un grand nombre (5) ». Songe donc avant tout à rendre ta foi différente de celle des démons.

Par quel moyen ? Les démons confessaient le Christ avec crainte, Pierre avec amour. Ajoute donc l'espérance à la foi. Mais comment

 

1. Ps. XVII, 45. — 2. Jacq. II, 19. — 3. Matt. XVI, 17. — 4. Marc, I, 25. — 5. Héb. XII, 15.

 

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espérer si la conscience n'est en bon état? A l'espérance joins donc aussi la charité. C'est la voie suréminente dont parle ainsi l'Apôtre Voici la voie suréminente: quand je parlerais les langues des hommes et des anges, si je n'ai pas la charité, je suis semblable à un airain sonore ou à une cymbale retentissante ». L'Apôtre poursuit ensuite son énumération et assure que sans la charité tous les avantages ne sont rien. Conservons donc la foi, l'espérance et la charité (1). La charité l'emporte sur tout; appliquez-vous à la charité, et par là rendez votre foi différente, vous qui êtes du nombre des prédestinés, des appelés et des glorifiés. Saint Paul dit encore: « Ni la circoncision, ni l'incirconcision ne servent de rien, mais la foi ». O Apôtre, ne vous arrêtez pas, parlez encore, signalez la différence, car les démons croient aussi et ils tremblent » ; indiquez donc la différence qui doit distinguer notre foi de celle des démons, qui tremblent parce qu'ils haïssent; parlez, Apôtre, distinguez ma foi et séparez ma cause de celle des impies (2). Il le fait clairement et voici en quels termes : « La foi qui agit avec amour», dit-il (3).

7. A chacun donc, mes frères, de s'examiner intérieurement, de se peser, de se juger, dans tous ses actes et dans toutes ses bonnes oeuvres, pour reconnaître ce qu'il fait avec charité, sans attendre de récompense temporelle, mais seulement ce que Dieu a promis, le bonheur de le voir. Quelles que soient en effet les promesses de Dieu, sans lui tout n'est rien. Non, Dieu ne me satisferait point, s'il ne se promettait lui-même à moi. Qu'est-ce que toute la terre ? Qu'est-ce que toute la mer? Qu'est-ce que le ciel entier, et tous les astres, et le soleil et la lune et tous les choeurs des anges ? C'est du Créateur de toutes ces merveilles que j'ai soif; c'est de lui que j'ai faim. J'ai soif de lui et je lui dis: « En vous est la source de vie (4), » il me dit de son côté: « Je suis le pain descendu du ciel ! (5) ». Ah ! que j'aie faim et soif dans mon pèlerinage, pour être rassasié quand je serai au terme. Le monde me sourit par une variété immense de créatures éclatantes en beauté et en force: mais que le Créateur est à la fois bien plus beau, bien plus fort, bien plus éclatant et bien plus agréable ! « Je serai rassasié, lorsqu'apparaîtra votre gloire dans son éclat (6) ». Si donc vous avez cette foi qui agit avec

 

1. I Cor. XII, 31; XIII. — 2. Ps. XLII , 1. — 3. Gal. V, 6. — 4. Ps. XXXV, 10. — 5. Jean, VI, 41. — 6. Ps. XVI, 15.

 

amour, vous êtes du nombre des prédestinés, des appelés, des justifiés : faites-la donc croître en vous. Cette foi qui agit par amour est inséparable de l'espérance. L'aurons-nous encore lorsque nous serons au terme ? Alors encore nous dira-t-on de croire ? Assurément non ; car nous verrons alors et nous contemplerons face à face. « Mes bien-aimés, nous sommes les enfants de Dieu, et ce que nous serons n'a point paru encore ». Cela n'a point paru, car c'est encore la foi. « Nous sommes les enfants de Dieu », prédestinés, appelés, justifiés par lui. « Nous sommes enfants de Dieu, et ce que nous serons n'a point paru encore ». Avant donc de voir ce que nous serons; croyons aujourd'hui. « Nous savons que lorsqu'il se montrera nous lui serons semblables ». Est-ce parce que nous croyons? Non. Pourquoi donc? « Parce que nous le verrons tel qu'il est (1) ».

8. Et l'espérance? y en aura-t-il encore? Non, puisque nous posséderons la réalité. L'espérance est nécessaire au voyageur, c'est elle qui le soutient sur la route ; car s'il supporte courageusement les fatigues de la marche, c'est qu'il compte arriver au terme. Qu'on lui ôte cette espérance, ses forces s'affaissent aussitôt. Ce qui fait voir que l'espérance actuelle nous est nécessaire pour pratiquer la justice durant notre pèlerinage. Ecoute l'Apôtre: « En attendant l'adoption, dit-il, nous gémissons encore en nous-mêmes ». Quand il y à encore gémissement, peut-on reconnaître la félicité dont il est dit dans l'Ecriture : « Plus de fatigue ni de gémissements (2) ? » Ainsi, dit saint Paul, « nous gémissons encore en nous-mêmes, attendant l'adoption et la délivrance de notre corps ». Nous gémissons encore. Pourquoi ? C'est que nous sommes sauvés en espérance. Or, l'espérance qui se voit, n'est pas de l'espérance. Qui espère ce qu'il voit? Mais si nous espérons ce que nous ne voyons pas, nous attendons avec patience ». C'est avec cette patience que les martyrs méritaient la couronne, aspirant à ce qu'ils ne voyaient pas et dédaignant ce qu'ils souffraient; et ils disaient, avec cette espérance: « Qui nous séparera de l'amour du Christ? l'affliction? l'angoisse ? la persécution ? la faim ? la nudité ? le glaive ? Car c'est à cause de vous ». Et où est-il celui à cause de qui? Car c'est à cause de vous que nous sommes mis. à mort

 

1. I Jean, III, 2. — 2. Isaïe, XXXV, 10.

 

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durant tout le jour (1) ». Où est enfin celui à cause de qui? « Heureux ceux qui ont cru sans avoir vu (2) ». Voilà qui indique où il est. Il est en toi, puisque ta foi y est aussi. L'Apôtre nous tromperait-il quand il dit « que par la foi le Christ habite en nos coeurs (3) ? » Il y est aujourd'hui par la foi, il y sera alors sans voiles; il y est par la foi, tant que nous sommes voyageurs, tant que nous poursuivons notre pèlerinage ; car tant que nous sommes dans ce corps, nous voyageons loin du Seigneur, « puisque nous marchons par la foi et non par la claire vue ( ) ».

9. Si la foi nous donne tant, que nous donnera la vue même? Le voici: « Dieu sera tout en tous (5) ». Que signifie tout? Il veut dire que tu posséderas alors tout ce que tu recherchais, tout ce que tu estimais ici. Que voulais-tu? Que cherchais-tu ? Tu voulais manger et boire? Dieu sera pour toi nourriture et breuvage. Que voulais-tu? La santé du corps, toute fragile et toute éphémère qu'elle lut? Dieu sera pour toi l'immortalité même. Que cherchais-tu? Des richesses? O avare, de quoi te contenteras-tu, si Dieu ne te suffit pas ? Qu'aimais-tu? La gloire, les honneurs? Dieu même sera ta gloire, et dès aujourd'hui tu lui dis : « C'est vous qui êtes ma gloire et qui élevez mon Chef (6) ». Déjà, en effet, il a exalté mon Chef, mon Chef qui est le Christ. Pourquoi enfin ton étonnement? Les membres comme

 

1. Rom. VIII, 23, 25, 35, 36. — 2. Jean, XX, 29. — 3. Eph. III, 17. — 4. II Cor. V, 6, 7. — 5.  I Cor. XV, 28. — 6. Ps. III, 4.

 

le Chef seront un jour élevés en gloire et Dieu alors sera tout en tous.

Voilà ce que nous croyons aujourd'hui, ce qu'aujourd'hui nous espérons ; mais une fois arrivés, nous le posséderons, et ce ne sera plus la foi, mais la vue; une fois arrivés nous le posséderons, et ce ne sera plus l'espérance, mais la réalité. Et la charité ? Elle aussi existe-t-elle aujourd'hui pour disparaître alors ? Mais si nous aimons maintenant, que nous croyons sans voir; comment n'aimerons-nous pas alors, que nous verrons et que nous posséderons? Ainsi donc la charité subsistera encore alors, et elle sera parfaite. Aussi l'Apôtre dit-il : « Nous avons aujourd'hui la foi, l'espérance et la charité, trois vertus; mais la charité l'emporte (1) ». Conservons-la, nourrissons-la en nous, persévérons-y avec confiance et avec le secours divin, et disons : « Qui nous détachera de l'amour du Christ », avant qu'il ait pitié de nous et qu'il mène notre charité à sa perfection ? L'affliction? l'angoisse? la faim ? la nudité? les dangers? le glaive? Car pour vous nous sommes mis à mort tous les jours, nous sommes considérés comme des brebis de boucherie ». Or, qui peut souffrir, qui supporte tout cela? En tout cependant nous triomphons ». Par quel moyen ? Par le secours de Celui qui nous a aimés (2) ».

N'est-il donc pas vrai de dire : « Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous? »

 

1. I Cor. XIII, 13. — 2. Rom. VIII, 36, 37:

 

 

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