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SERMONS DE SAINT AUGUSTIN.

PREMIÈRE SÉRIE. SERMONS DÉTACHÉS SUR DIVERS PASSAGES DE L'ÉCRITURE SAINTE. (SUITE).

 

SERMON CLI. LUTTER CONTRE LA CONVOITISE DE LA CHAIR (1).

 

ANALYSE. — Il importe de bien comprendre le passage où l'Apôtre saint Paul enseigne qu'il ne fait pas le bien qu'il veut et qu'il fait le mal qu'il ne veut pas ; car plusieurs en abusent et se perdent. Rappelons-nous donc que pour être éternellement couronnés, nous devons faire maintenant la guerre. En quoi consiste cette guerre ? A ne pas consentir, à résister aux mouvements désordonnés que produisent en nous soit les habitudes mauvaises, soit le péché originel. Il serait mieux de ne sentir pas ces mouvements de convoitise, car en eux-mêmes ils sont pervers, ils sont un mal. Mais dans l'impossibilité de les éteindre ici-bas, il faut n'y pas consentir, à l'exemple de l'Apôtre ; car ce sont ces mouvements qu'il ressentait malgré lui et qu'il ne parvenait pas à étouffer. Or, pour les combattre il faut lutter et prier. Ainsi méritera-t-on la couronne.

 

1. Toutes les fois qu'on répète cette divine leçon de l'une des épîtres de saint Paul, il est à craindre qu'on ne la comprenne mal et qu'elle ne soit un sujet de scandale pour ceux qui en cherchent l'occasion. Les hommes, hélas ! sont si portés au mal, qu'ils y résistent difficilement. Aussi beaucoup s'y livrent-ils quand ils ont entendu ces paroles de l'Apôtre

Je ne fais pas le bien que je veux, et je fais le mal que je hais ». Humiliés ensuite d'avoir fait le mal, ils se rassurent au souvenir de ces mots apostoliques: « Je ne fais pas le bien que je veux, mais je fais le mal que je hais ». Comme on lit ces paroles de temps en temps, nous sommes alors obligés de les examiner à fond : on pourrait en les prenant mal changer

 

1. Rom. VII, 15-25.

 

en poison cet aliment salutaire. Que votre charité se montre donc attentive, pendant que je vous dirai ce que le Seigneur me suggérera; et si vous me voyez embarrassé dans l'explication de quelques paroles difficiles et obscures, secondez-moi par vos sentiments de piété.

2. Rappelez-vous d'abord, comme on vous le répète souvent par la grâce de Dieu, que la vie présente du juste est un combat et non pas encore le triomphe. Plus tard viendra le triomphe assuré à cette guerre. Aussi lit-on dans l'Apôtre et les cris de guerre et les chants de triomphe. Les cris de guerre, nous venons de les entendre encore: « Je ne fais pas le bien que je veux, mais je fais le mal que je hais. Or, si je fais le mal que je hais, j'acquiesce à la loi comme étant bonne. Le vouloir (2) réside en moi, mais en moi je ne trouve pas à accomplir le bien. Et je vois dans mes membres une autre loi qui combat la loi de mon esprit et me captive sous la loi du péché, laquelle est dans mes membres». Ces mots de combat et de captivité ne désignent-ils pas la guerre?

Ce ne sont donc pas encore les chants de triomphe, mais ils viendront un jour, et c'est ce que nous apprend l'Apôtre en ces termes : « Il faut que ce corps corruptible revête l'incorruptibilité, et que ce corps mortel revête l'immortalité. Alors », voici le chant de triomphe, s'accomplira cette parole de l'Ecriture : La mort est abîmée dans sa victoire ». Criez, triomphateurs: « O mort, où est ton ardeur guerrière (1)? » Ainsi nous prononcerons ces mots, nous les prononcerons un jour, et ce jour n'est pas éloigné , car le monde ne durera plus autant qu'il a duré.

Tel sera alors notre langage; mais aujourd'hui, pendant que nous sommes en guerre, il est à craindre que ce langage mal compris ne soit pour l'ennemi et non pour nous le cri de la trompette et n'excite son ardeur au lieu de préparer sa défaite. Examinez-le donc avec soin, mes frères, et vous qui luttez, luttez toujours. Car pour vous qui ne combattez point, vous ne me comprendrez pas: je ne serai entendu que de ceux d'entre vous qui combattent. Ma voix se fera entendre au dehors; une autre voix vous parlera silencieusement au dedans.

Rappelez-vous d'abord un passage de l'épître aux Galates qui peut jeter beaucoup de lumière sur celui-ci. L'Apôtre s'adresse aux fidèles à ceux qui ont reçu le baptême et dont par conséquent tous les péchés avaient été effacés dans ce bain salutaire; mais ils combattaient encore et saint Paul leur dit: « Je vous le déclare : marchez selon l'Esprit et n'accomplissez pas les désirs de la chair ». Il ne dit point: N'éprouvez pas; mais: « N'accomplissez pas ». Pourquoi « n'accomplissez pas? » Le voici dans ce qui suit: « Car la chair convoite contre l'Esprit, et l'Esprit contre la chair; ils sont opposés l'un à l'autre, et vous ne faites pas ce que vous voulez. Que si vous êtes conduits par l'Esprit, vous n'êtes plus sous la loi (2) » ; non, mais sous la grâce. « Si vous êtes conduits par l'Esprit »,

 

1. I Cor. XV, 53-55. — 2. Gal. V, 16-18.

 

qu'est-ce à dire? Etre conduit par l'Esprit, c'est suivre les ordres de l'Esprit de Dieu et non les convoitises de la chair. La chair toutefois continue à convoiter et à résister; elle veut une chose et tu n'en veux pas; continue à n'en pas vouloir.

3. Tu dois cependant désirer devant Dieu de ne ressentir pas cette concupiscence à laquelle il te faut résister. Remarquez bien cette pensée. Oui, tu dois désirer devant Dieu de ne ressentir plus cette concupiscence à laquelle tu es obligé de résister. Tu y résistes sans doute, et en n'y consentant pas tu es vainqueur: mieux vaudrait toutefois n'avoir pas d'ennemi que de le vaincre. Un jour tu n'auras plus celui-ci. Rappelle-toi, pour t'en convaincre, ce chant de triomphe: « O mort, où est ton ardeur guerrière?» Elle n'en aura plus. « O mort, où est ton aiguillon? » Tu en chercheras la place sans la trouver. Considérez, en effet, considérez avec grand soin que le mal n'est pas en nous une seconde nature, comme le rêve la folie manichéenne. Le mal est une maladie, un défaut de notre nature; ce n'est point quelque chose qui subsiste à part, car une fois guéri il n'existera nulle part.

« N'accomplissez donc pas les désirs de la chair ». Mieux vaudrait sans doute n'en avoir point, comme le recommande la loi (1), car cette absence de convoitise est la suprême vertu, la justice parfaite, la palme de la victoire. Mais puisqu'on ne peut maintenant y arriver, qu'on soit fidèle au moins à cette recommandation de l'Écriture: « Ne suis pas tes convoitises (2) » : il serait préférable de n'en pas avoir, mais comme tu en as, garde-toi d'aller à leur remorque. Elles refusent de te suivre ; ne les suis pas. Si elles voulaient t'obéir, c'en serait fait d'elles, puisqu'elles ne se soulèveraient plus contre ton esprit. Elles se soulèvent, soulève-toi: elles t'attaquent, attaque-les: elles luttent, lutte aussi; prends garde seulement d'être vaincu par elles.

4. Pour jeter plus de lumière sur ce sujet, je vais faire une supposition. Vous savez qu'il y a des hommes sobres, hier, peu, il est vrai, mais pourtant il en est. Vous savez aussi qu'il y a des ivrognes, trop nombreux, hélas ! Un homme sobre vient de recevoir le baptême; sous le rapport de l'ivrognerie il n'a point de combat à livrer; mais il en a sous d'autres

 

1. Rom. VII, 7. — 2. Eccli. XVIII, 30.

 

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rapports. Afin de te faire une idée de ces luttes à soutenir contre d'autres passions, assistons ici à la guerre que te fait l'une d'elles. Un ivrogne donc vient aussi de recevoir le baptême ; il a appris et appris avec crainte qu'au nombre des vices qui ferment aux pécheurs l'entrée du royaume de Dieu, figure l'ivrognerie. En effet dans le passage où il est dit « que ni les fornicateurs, ni les idolâtres, ni les adultères, ni les efféminés, ni les abominables, ni les voleurs ne posséderont le royaume de Dieu », il est dit aussi : « Ni les ivrognes (1) ». Il a donc entendu cela avec frayeur. Le voilà baptisé; tous ses anciens péchés d'ivrognerie lui sont pardonnés: mais il lui reste la mauvaise habitude et il doit après sa régénération lutter contre elle. Tout dans le passé lui est remis : à lui maintenant d'être sur ses gardes, de veiller et de combattre pour ne plus s'enivrer. Mais voici de nouveau le désir de boire, il frappe au coeur, il dessèche le palais, il se fait sentir partout, il veut même, s'il le peut, franchir la muraille sous laquelle le baptisé se tient à l'abri, afin de l'entraîner captif. Il t'attaque, attaque-le à ton tour. Ah ! si seulement il n'était plus ! C'est l'habitude mauvaise qui l'a formé, l'habitude contraire le détruira. Garde-toi de le satisfaire, de lui rien céder pour l'apaiser: résiste plutôt pour l'abattre. Tant qu'il existera, c'est un ennemi pour toi. Si tu ne l'écoutes pas, si jamais tu ne t'enivres, il ira s'affaiblissant chaque jour. C'est en t'y soumettant que tu le fortifies ; oui, si tu cèdes et que tu te laisses aller à l'ivresse, tu lui donnes des forces; est-ce contre moi et non contre toi ?

Pour moi, je crie, j'avertis, j'instruis du haut de ce siège, je préviens les ivrognes des maux qui les menacent. Tu ne pourras pas dire: Je n'ai pas entendu ; tu ne pourras pas dire: A celui qui ne m'as pas averti de rendre compte de mon âme à Dieu. Il est vrai, tu as du mal pour avoir donné de la vigueur à ton ennemi par l'habitude perverse à laquelle tu t'es laissé aller. Pour le nourrir tu n'as point pris de peine : prends-en pour le vaincre; et si tu n'es pas de taille à lutter contre lui, adresse-toi à Dieu. Si néanmoins il ne triomphe pas de toi, si tout en combattant contre toi l'habitude perverse ne parvient pas à te vaincre, en toi se réalise cette recommandation

 

1. I Cor. VI, 9-10.

 

de l'apôtre Paul: « N'accomplissez point les désirs de la chair». La convoitise s'est bienfait sentir en toi; mais en ne buvant pas tu n'as point accompli ses désirs.

5. Ce que j'ai dit de l'ivrognerie s'applique à tous les vices, à toutes les passions. Il en est que nous avons apportées en naissant, la coutume nous en a formé d'autres. C'est à cause des premières qu'on baptise les enfants; on veut les décharger de la culpabilité transmise par la naissance et non pas contractée par l'habitude perverse, puisqu'ils ne l'ont point. Aussi faut-il combattre toujours, attendu que cette funeste convoitise originelle ne saurait jamais disparaître durant la vie présente: on peut l'affaiblir chaque jour, on ne saurait l'anéantir. C'est elle qui fait nommer notre corps un corps de mort; c'est d'elle que parle l'Apôtre quand il dit : « Je me complais dans la loi de Dieu selon l'homme intérieur; mais je vois dans mes membres une autre loi qui combat la loi de mon esprit et me captive sous la loi du péché, laquelle est dans mes membres ».

Or cette loi s'est produite à la transgression de la loi première. Je me répète: cette loi s'est produite quand on a méprisé et transgressé la loi première. Qu'est-ce que la loi première? C'est la loi que reçut l'homme dans le paradis. Ce couple n'était-il pas nu, sans en rougir? Mais pourquoi était-il nu sans en rougir, sinon parce qu'il ne sentait pas encore dans ses organes cette loi qui combat la loi de l'esprit? L'homme, hélas ! a fait un acte digne de châtiment, et voilà aussitôt des mouvements qui le couvrent de confusion. Ces deux premiers humains violèrent la défense divine en mangeant; aussitôt leurs yeux s'ouvrirent. Est-ce donc à dire qu'ils erraient auparavant dans le paradis en aveugles ou les yeux fermés? Nullement. Comment en effet Adam aurait-il pu donner des noms aux oiseaux et aux animaux des champs, lorsqu'ils furent amenés en sa présence (1) ? Comment leur donner des noms, s'il ne les voyait pas? De plus, il est dit que « la femme regarda l'arbre et qu'à ses yeux il était agréable à voir ». Ils avaient donc les yeux ouverts ; et pourtant ils étaient nus sans en rougir. Si donc leurs yeux s'ouvrirent, c'est qu'ils sentirent quelque chose de nouveau, quelque chose qui ne leur avait pas fait peur

 

1 Gen. II, 25, 19, 20.

 

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encore dans les mouvements de leur corps. Ainsi leurs yeux s'ouvrirent pour remarquer et non pour voir; et sitôt qu'ils sentirent la confusion, ils s'empressèrent de la couvrir. « Ils entrelacèrent des feuilles de figuier et s'en firent des ceintures (1) ». Le mal était dans ce qu'ils couvrirent. De là vient le péché originel; de là vient que personne ne naît exempt de péché. De là vient que le Seigneur ne voulut pas être- conçu comme nous, mais d'une Vierge. Exempt de ce péché, il nous en délivre, car il ne vient pas de ce principe. Voilà pourquoi deux Adams : l'un donne la mort et l'autre donne la vie; le premier tue et le second ressuscite. Pourquoi le premier tue-t-il ? parce qu'il n'est qu'un homme. Pourquoi le second rend-il la vie? parce qu'il est un Homme-Dieu.

6. C'est ainsi que l'Apôtre ne fait pas ce qu'il veut. Il voudrait ne sentir pas de convoitise, il en sent; ce qu'il veut, il ne le fait donc pas. Mais cette convoitise funeste traînait-elle l'Apôtre, comme un esclave, aux fornications et à l'adultère? Loin de là; ah ! que de telles pensées ne s'élèvent pas dans notre coeur. Il combattait, mais il ne portait pas le joug; et s'il disait : « Je ne fais pas ce que je veux », c'est qu'il aurait voulu n'avoir pas à lutter. Je ne veux pas de convoitise et j'en ressens. Ainsi je ne fais pas ce que je veux, et pourtant je ne consens pas aux désirs coupables. Dirait-il : « N'accomplissez pas les désirs de la chair, » si lui-même les accomplissait? » Il t'a donc mis devant les yeux la lutte qu'il soutenait, afin de te préserver de la peur quand tu combats toi-même. Si ce bienheureux Apôtre ne l'avait pas f,iit, peut-être qu'en voyant, tout en n'y consentant pas, la convoitise s'élever dans tes organes, tu te désespérerais et tu t'écrierais : Ah ! je n'éprouverais pas cela, si j'appartenais à Dieu. Considère l'Apôtre : il combat; garde-toi du découragement. « Dans mes membres, « dit-il, je vois une autre loi qui combat la loi de mon esprit». Mais je voudrais qu'elle ne combattît point ; car c'est ma chair, c'est moi, c'est une partie de moi-même. De là vient que je ne fais pas ce que je veux, mais le mal que je hais » ; je ressens la concupiscence.

7. Quel est alors le bien que je fais ? C'est de ne consentir pas à la passion. Je fais le bien, sans l'accomplir; et sans accomplir le

 

1. Gen. III, 1-7.

 

mal aussi, la passion qui me persécute fait le mal. Comment puis-je dire que je fais le bien sans l'accomplir? Je fais le bien en ne consentant pas à la passion déréglée; mais je ne l'accomplis pas, puisque je ressens encore la passion. Comment, à son tour, cette passion ennemie fait-elle le mal sans l'accomplir? Elle fait le mal, puisqu'elle l'excite en moi; elle ne l'accomplit pas, puisqu'elle ne me le fait pas commettre.

Les saints passent toute leur vie dans ces combats. Que penser alors des pécheurs qui ne luttent même pas ? Ce sont des esclaves qu'on entraîne : ou plutôt on ne les entraîne pas, car ils suivent avec plaisir. Les saints donc s'appliquent à ces combats, et jusqu'à son dernier soupir, chacun est exposé dans cette mêlée. Mais à la fin de la vie, au moment où on triomphera après avoir remporté la victoire, que dira-t-on, ou plutôt que dit l'Apôtre en vue de ce triomphe ? Alors s'accomplira cette parole de l'Ecriture : La mort est anéantie dans sa victoire. O mort, « où est ton ardeur guerrière?» C'est le chant des triomphateurs. « O mort, où est ton aiguillon? Le péché est l'aiguillon de la mort » , puisque sa blessure a causé la mort. Le péché est comme un scorpion, il nous a percés de son dard, et nous sommes morts. Mais quand on s'écriera : « O mort, où est ton aiguillon? » l'aiguillon qui t'a engendrée et non l'aiguillon que tu as produit; quand donc on criera : « O mort, où est ton aiguillon? » il n'y en aura plus, puisqu'il n'y aura plus de péché. « Le péché est l'aiguillon de la mort ». Dieu a donné sa loi pour le combattre; mais la loi est la force du péché (1) ». Comment la loi  la force du péché? « C'est que la loi est venue pour multiplier le péché ». De quelle manière? Avant la loi l'homme sans doute était pécheur; la loi donnée, il la transgressa et devint ainsi prévaricateur. Le péché rendait les hommes coupables; la prévarication de la loi les rendit plus coupables encore.

8. Où espérer encore, sinon dans ce qui suit : « Où le péché a abondé, a surabondé la grâce (2) ». Aussi considère cet habile soldat, ce soldat pleinement exercé à ce genre de lutte et si expérimenté qu'il est devenu général : au moment où il faisait effort dans la mêlée contre l'ennemi et qu'il disait : « Je

 

1. I Cor. XV, 54-56. — 2. Rom. V, 20.

 

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vois dans mes membres une autre loi qui combat contre la loi de mon esprit et qui m'assujettit sous la loi du péché, laquelle est dans mes organes », loi honteuse, loi dégradante, espèce de langueur et de plaie livide; il ajoutait : « Misérable homme, qui me délivrera du corps de cette mort? » Ses gémissements furent entendus, on vint à son aide. Comment? Le voici : « Ce sera la grâce de Dieu, par Jésus-Christ Notre-Seigneur». Oui tu seras délivré de la loi de cette mort, en d'autres termes, du corps de cette mort, par la grâce de Dieu au nom de Jésus-Christ

Notre-Seigneur ». Et quand auras-tu un corps complètement exempt de toute concupiscence ? Lorsque ce corps se sera revêtu, « mortel, d'immortalité, corruptible, d'incorruptibilité », et qu'il sera dit à la mort : « O mort, où est ton ardeur guerrière? » sans qu'elle en ait encore; ô mort, où est ton aiguillon?» sans qu'elle en ait jamais plus (1).

Mais aujourd'hui que dire? Ainsi j'obéis moi-même par l'esprit à la loi de Dieu, et par la chair à la loi du péché ». — « J'obéis

 

1. I Cor, XV, 53-55.

 

par l'esprit à la loi de Dieu », en ne consentant pas au mal; « et par le corps à la loi du péché », en ressentant la convoitise. Oui, par l'esprit à la loi de Dieu, et par la chair à a la loi du péché ». Je me complais dans l'une et je convoite conformément à l'autre, sans toutefois être vaincu par elle; elle excite les désirs, elle tend des piéges, elle pousse et cherche à y faire tomber : « Malheureux homme, qui me délivrera du corps de cette mort?» Je n'aspire pas à vaincre toujours, je voudrais enfin obtenir la paix.

Désormais donc, mes frères, suivez cette ligne de conduite : obéissez par l'esprit à la loi de Dieu et par la chair seulement à la loi du péché, mais parce que vous y êtes forcés; en ce sens seulement que vous ressentez la convoitise sans y consentir. Perfide convoitise qui fait quelquefois éprouver aux saints durant leur sommeil ce dont elle est incapable pendant qu'ils veillent. Pourquoi tous applaudissez-vous, sinon parce que vous comprenez tous? J'aurais honte d'en dire davantage, mais n'hésitons pas à prier Dieu pour ce sujet.

Tournons-nous vers le Seigneur, etc. (Voir tom. VI, serm. 1.)

 

 

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