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APPENDICES

 

I. — NOTES CRITIQUES SUR J.-P. CAMUS

 

§ 1. — L'ABBÉ DE BAUDRY ET L'ESPRIT DU BIENHEUREUX FRANÇOIS DE SALES

 

L'abbé Dépery, vicaire général de Belley, depuis évêque de Gap, entreprit de publier à nouveau, en 1840, le texte intégral de l'Esprit du bienheureux François de Sales. Estimant que « la manie de corriger les vieux livres a déjà gâté bien des chefs-d'oeuvre », ne trouvant d'ailleurs rien de choquant ni d'hétérodoxe dans un ouvrage consacré par l'admiration universelle, il publia purement et simplement, et sans notes rectificatives, le texte primitif de Camus. Ce faisant, M. Dépery ne se doutait guère qu'il allait troubler le repos, alarmer la conscience de M. l'abbé de Baudry.

Celui-ci était un homme excellent. Très humble, sans ambition et du reste peu doué pour écrire, mais d'un zèle infatigable, il s'était consacré de bonne heure à l'apostolat de la plume. Les bibliophiles lui attribuent un petit roman : La pieuse paysanne, que je n'ai pu me procurer, A vrai dire, ce roman n'était pas de lui, l'abbé de Baudry s'étant contenté de refondre, d'augmenter et de baptiser à nouveau La vertueuse portugaise. Il préludait ainsi en 1820 au travail du même genre qu'il ferait plus tard sur Jean-Pierre Camus. Après d'autres essais littéraires, il s'était voué presque uniquement aux études salésiennes. Les fidèles de François de Sales doivent à l'abbé de Baudry beaucoup de gratitude. Très peu de chercheurs ont plus travaillé que lui sur ce beau sujet. Certes, on ne peut le comparer d'aucune façon à Dom Mackey. Il manquait de méthode et de flair critique. Il a néanmoins rendu de bons services. Ce qu'il y a de meilleur dans l'édition Migne, vient de l'abbé de Baudry. Ainsi fait, la publication de M. Dépery le bouleversa. « Les éditeurs, dit-il lui-même, encore sous le coup de cette émotion, assurent que Dieu a suscité Pierre Camus pour transmettre au public la vie entière du saint et le fidèle tableau de son esprit. J'avoue que je n'ai pu voir sans indignation qu'on induisit le public en erreur sur un objet aussi essentiel et qu'on présentât comme un résumé de tous les ouvrages de saint François de Sales un livre où sa doctrine est altérée en plusieurs endroits. » Nous discuterons bientôt cette indignation. Disons d'abord l'étrange projet qu'elle inspira à l'abbé de Baudry.

A sa place, qu'aurions-nous fait? Persuadés qu'il y a des livres que nul n'a le droit de refaire et que celui de Camus est du nombre, nous nous serions contenté de publier une brochure où nous aurions formulé les critiques diverses que nous aurait paru mériter ce confus et bizarre chef-d'oeuvre. Ou bien nous

 

(1) Louis-Joseph, comte de Baudry (1778-t854), d'abord sulpicien, puis chanoine et vicaire général d'Annecy, cf. Bertrand, Bibliothèque sulpicienne, II, pp. 221-225; III, pp. 288-292. Epouvanté par la Révolution de 1830, ii avait quitté Saint-Sulpice et la France, et s'était fixé à Genève qu'il ne quitta plus.

 

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aurions publié une nouvelle édition, renvoyant au bas des pages les corrections nécessaires. L'abbé de Baudry eut une autre idée que les juges les plus indulgents, M. Hamon par exemple, trouvent malheureuse. Il déchire Camus en mille morceaux, et, après avoir élagué, d'un côté les bavardages, de l'autre les pages défectueuses (soit un quart des six gros volumes), il dispose ce qui reste d'après un ordre nouveau, l'ordre même de l'Introduction à la vie dévote. Pour dédommager le lecteur des suppressions qu'il lui inflige, il remplace les pages proscrites par d'autres qu'il prend, de toutes mains, dans les oeuvres de François de Sales. Ces deux anthologies juxtaposées, ou plutôt confondues, forment donc quatre volumes qui ont pour titre : Le véritable esprit de saint François de Sales. Sont relégués à la fin du IVe volume les textes de Camus qui méritent une censure. Il va sans dire que l'abbé de Baudry modernise le style de sa victime. Les raisons qui avaient décidé l'abbé Dépery a reproduire le texte original, ne peuvent en effet « éblouir » qu' « un lecteur superficiel ». « Pour détruire le prestige, cette seule réflexion suffit: c'est que les mêmes reproches (adressés par Dépery aux traducteurs de Camus) pourraient, et avec beaucoup plus de raison, s'adresser aux traducteurs des oeuvres des Saints Pères », des grecs, par exemple, ou des syriaques ! Ce détail n'est rien, mais de tels raisonnements font connaître un homme. Quoi qu'il en soit, ce livre illisible est plein d'indications utiles. On le consultera, aujourd'hui encore, avec un véritable profit (1).

On se tromperait du tout au tout si l'on voyait dans l'abbé de Baudry un ennemi personnel de l'évêque de Belley. Il se montre au contraire non pas seulement respectueux, comme il le devait, mais tendre envers lui, très différent en cela du R. P. Navatel dont nous parlerons bientôt. Dans la longue et très intéressante notice qu'il lui consacre, il réduit à néant la plupart des calomnies que l'on a répandues contre l'évêque de Belley. Il ne devient farouche que lorsque les récits de Camus lui paraissent compromettre ou le caractère, ou surtout la science théologique de François de Sales. Bien entendue, cette prévention serait la sagesse même. Il est clair en effet que si Camus nous présentait quelque part un François de Sales hérétique, ou fâcheusement imprévu, nous aurions le devoir de mettre en quarantaine une affirmation déconcertante. Si l'abbé de Baudry pousse ou ne pousse pas plus loin qu'il ne faut cette juste prévention, c'est ce que nous examinerons bientôt, mais voyons auparavant les deux raisons qu'il croit avoir le droit d'opposer à l'ensemble du témoignage de Camus.

a) Celui-ci écrivait, comme on le sait, avec une facilité incroyable. Comment serait-il exact? Eh ! ne sait-on pas encore qu'il se piquait de ne jamais se relire, de ne jamais rien effacer de ce qu'il avait écrit? A cela nous répondons :

1° Lorsque J.-P. Camus nous dit qu'il ne prend pas la peine de corriger ses écrits, il entend par là manifestement qu'il n'a pas le moindre souci de leur toilette littéraire. Il se vante d'ailleurs un peu lorsqu'il parle ainsi. Qu'il se relise ou non, il a toujours devant les yeux, en écrivant, certains canons sinon littéraires, du moins lexicographiques, qu'il observe avec quelque scrupule. Comme François de Sales et plusieurs autres de cette époque fermentante, ii a des idées très arrêtées sur la langue et il s'y tient (2).

2° Camus écrit au petit bonheur, comme cela vient, mais ce défaut n'intéresse pas nécessairement la partie historique de son oeuvre, la seule qui nous touche présentement. Il rapporte un propos que lui a tenu François de Sales ; il délaie ensuite en vingt ou trente pages ce même propos. Qu'il y ait dans ce développement du verbiage et même parfois des formules plus ou moins heureuses, c'est fort possible, mais ce développement, il ne l'attribue pas au saint.

 

(1) Le livre fut publié, à Lyon, en 1846. Les passages que je viens de citer sont tirés de l’avertissement.

(2) « Je n'efface presque jamais rien, dit-il, que pour empêcher qu'il s'y glissât quelque terme écarté de l'usage commun. » Cf. Pétronille, p. 444. Qui efface, relit. Il suffit du reste d'étudier les périodes camusiennes pour se rendre compte qu'il n'écrit pas comme un hanneton, cf. les premières pages du Dessert au lecteur à la fin de la Pieuse Julie.

 

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C'est là son oeuvre propre qu'il faut lire comme un sermon de Camus. La sente question est donc celle-ci : lorsqu'il rapporte expressément, comme les ayant vus ou entendus, les gestes ou les propos de son ami, Camus s'abandonne-t-il à son imagination, à sa « facilité incroyable n ? Rien ne permet de répondre oui, en bonne critique : je suis au contraire persuadé que, la plupart du temps, il faut répondre non. Ceci du reste nous conduit à la seconde objection d'ensemble que propose M. de Baudry.

b)François de Sales est mort en 1622. Le livre de Camus n'a été publié qu'en 1639. Le moyen qu'après dix-sept ans, Camus puisse encore se rappeler tant de choses ? A quoi nous répondons :

1° La partie proprement historique dans le livre de Camus, je veux dire encore un coup, les anecdotes où le saint parait et les propos qu'on lui prête, est beaucoup moins étendue qu'on ne pourrait croire. Le livre est étonnamment grossi d'un côté, par les abondantes citations tirées des oeuvres de François de Sales, de l'autre, par les très nombreux passages où Camus parle en son propre nom.

2° Camus a vécu dans l'intimité du saint pendant près de quatorze ans. Il le consultait sur tout. Il lui disait dès lors qu'il conservait ses réponses comme autant d'oracles. Quoi qu'il fasse ou qu'il écrive, il se rapporte constamment aux souvenirs qu'il a gardés de ces longs entretiens.

3° Camus avait une mémoire prodigieuse.

4° C'est un honnête homme. Il a le mensonge en horreur et il se tiendrait lui-même pour sacrilège, s'il faisait dire à François de Sales ce que celui-ci n'aurait pas dit.

5° Qu'on prenne garde au danger de l'hypercritique. Si l'on rejette le témoignage de Camus, sous prétexte que ce témoignage n'a été rendu (publiquement rendu) qu'après dix-sept ans, que restera-t-il de la plupart des procès de béatification, de la plupart des récits que l'on s'accorde à regarder comme tout à fait certains? A se restreindre au procès de béatification et à l'histoire de François de Sales, combien de témoignages n'admet-on pas qui, devant n'importe quel tribunal sérieux, paraîtraient beaucoup plus douteux que le témoignage de Camus? C'est toujours le même paralogisme. Camus avait de l'esprit. Ses bons mots sont fameux ? Donc il n'est pas sérieux, Oublie-t-on que le Pape l'a choisi pour être un des trois commissaires du premier procès de béatification ? Il y a plus. Mon « prenez garde ! », M. de Baudry le répète constamment, lui coi nous avertit si souvent que les pages les plus défectueuses de Camus foulent de l'or, c'est-à-dire, de vivants et de précieux souvenirs de François de Sales. Lorsque Camus lui plaît, Camus a bonne mémoire après dix-sept ans, il n'a pas oublié : lorsque Camus le gène, voilà soudain le pauvre évêque frappé d'amnésie. Etrange méthode historique, et qui, je le répète, conduirait M. de Baudry et ses disciples où ni l'un ni les autres ne veulent aller !

Après cela, il ne m'en coûte rien de reconnaître, au risque de contrister le bon M. de Baudry, que, dans tous les souvenirs de Camus, tout, et même l'or, reste camusien. J'entends par là que Camus n'est pas un phonographe, et que tous les propos qu'il attribue à François de Sales n'ont pas été tenus, mot pour mot, comme on nous les rend. Les dix-sept ans ne sont pour rien dans cette adaptation fatale. Même au sortir d'une conférence avec son ami, Camus aurait raconté cette conférence à sa façon. C'est le cas de tous les témoins. Qu'y faire ? Nous résigner en pensant qu'après tout Camus reste un témoin privilégié. Avec sa miraculeuse mémoire, nous pouvons être assurés qu'il nous répète souvent quelques-unes des propres paroles du saint.

Reconnaissons enfin qu'il faut lire Camus les yeux bien ouverts et l'esprit au guet. Mais de quel autre mémorialiste n'en faut-il pas dire autant? C'est un bon témoin et tout à fait sincère; mais il a comme tout le monde ses manies, ses dadas, si j'ose dire, ses idées fixes, qui risqueront de l'amener parfois, non à inventer quoi que ce soit, mais, à tirer plus ou moins les plus authentiques de ses souvenirs vers une direction qui lui est chère. Tient-il à une doctrine théologique particulière, il ne dira pas que François de Sales a enseigné cette

 

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doctrine, si le fait n'est pas exact, mais il insistera sur tel propos du saint qui promet de favoriser cette doctrine. A-t-il une passion? Il ne la prêtera pas à son ami, mais, de ses entretiens avec celui-ci, il se rappellera volontiers tout ce qui, de près ou de loin, encourage ou justifie cette passion. Il en voulait, par exemple, à certains religieux qui se trouvaient avoir bataillé contre François de Sales ou l'avoir gêné en quelque façon. Le saint, quoique très bienveillant, a pu fort bien rappeler ses souvenirs devant un ami aussi intime, aussi dévoué que Camus. On peut croire que l'évêque de Belley aura écouté ce jour-là de toutes ses oreilles. Lisez-le de près néanmoins. Vous verrez qu'il reste, en somme, dans la juste mesure, lorsqu'il fait parler le saint.

Donnons un exemple que je n'emprunte pas à l'Esprit du B. François de Sales, mais au livre le plus violent peut-être que l'évêque de -Belley ait écrit contre ces mêmes religieux. En ce qui concerne ces derniers, dit-il dans son Directeur désintéressé, « je crois ne m'être point écarté des sentiments du saint prélat, de la bouche de qui j'ai ouï autrefois des choses qui avaient bien autant de pointe et de vigueur, que je ne die de rigueur, que celles que j'avarie, ici, quoiqu'il eût le lait et le miel sous la langue » (1). Que ferait M. de Baudry en présence de ce texte ? Il n'hésiterait pas à déclarer que J.-P. Camus dit ici une « fausseté ». Cependant 99 critiques sur 100, pour le moins, n'hésiteront pas non plus à reconnaître que lorsqu'il parle de la sorte, Camus fait appel à des souvenirs dont la véracité n'est pas douteuse. Oui, très certainement S. François de Sales lui a parlé avec vigueur des mêmes excès. Mais dans sa passion, il oublie que deux évêques, sûrs l'un de l'autre, parlent dans l'intimité autrement qu'ils ne le feraient en public. Il oublie aussi que François de Sales, même lorsqu'il portait sur quelques religieux des jugements sévères, restait maître de lui et paisible. S'il oublie cela, ou n'y prend pas garde, c'est que lui-même, il se croit paisible et maître de lui dans cette controverse. En tout cas, il a tort lorsqu'il se réclame de François de Sales. Si elle couvre plusieurs des idées de. Camus, l'autorité du saint ne couvre pas sa conduite. Qu'on me pardonne si j'enfonce ainsi des portes ouvertes, nous n'allons pas faire autre chose en répondant au réquisitoire de M. de Baudry. Ce réquisitoire existe. Le R. P. Navatel l'a cité récemment comme une oeuvre péremptoire. C'est là tout ce qui a été dit, là tout ce que sans doute on pourra jamais dire de plus fort contre la véracité de Camus. Bref, il convient, me semble-t-il, de l'examiner une bonne fois et d'en finir avec ce fantôme.

L'abbé de Baudry divise sa critique en deux parties : dans la première il relève les erreurs de Camus qui lui ont paru d'une gravité extrême ; dans la seconde, les erreurs ou les à peu près de moindre importance ; nous suivrons, une à une, toutes ces critiques.

 

§ I. — « Des doctrines fausses et des récits faux que Pierre Camus

met dans la bouche de saint François de Sales. »

 

1. Accord de la grâce et de la liberté. — Peu après son arrivée à Belley, le jeune évêque expose à François de Sales ses propres idées sur la grâce, désireux de savoir s'il est oui ou non sur la bonne voie. Le saint approuve cet exposé dans lequel M. de B. critique fort justement plusieurs expressions équivoques. Rien de mieux. Mais ce n'est pas là un e récit faux s. Rien ne permet de dire que Camus ait imaginé cet entretien, que d'ailleurs il rapporte d'une façon assez malheureuse. Ce qui importait dans la circonstance, était l'orientation générale de la pensée du jeune évêque. François de Sales ne lui a pas fait subir un examen théologique. Il l'a laissé dire, faisant peut-être quelques remarques de détail que Camus oublie de nous rapporter et approuvant grosso modo, comme il dit souvent, le fond, la couleur générale de ses idées. D'autres ouvrages de Camus nous présentent ces mêmes idées sous une

 

(1) Directeur désintéressé, 2° partie, chap. V.

 

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forme plus exacte. J'ai dit plus haut que Camus était moliniste. François de Sales l'était aussi (1).

2. Du nombre des élus. — François de Sales dit un jour à Camus « qu'il était persuadé qu'il y aurait peu de catholiques qui fussent damnés, parce qu'ayant la racine de la vraie foi, elle poussait ordinairement tôt ou tard son vrai fruit qui était le salut ». Sur quoi M. de B. : « La doctrine que lui attribue ici Pierre Camus est précisément le contraire de celle qu'enseignait le saint évêque. » Le contraire, juste ciel, en êtes-vous sûr? Oui, dit-il, parce qu'on lit dans un des sermons du saint : « Si l'on voit en toutes sortes d'états et de conditions, un si grand nombre de réprouvés, etc. ». D'où « récit faux ». Qui ne voit que M. de B. aurait dû opposer ici à Camus une vingtaine de textes du saint? Les aurait-il trouvés, nous n'aurions pas encore le droit de contester la véracité de Camus. C'est là une de ces questions sur lesquelles François de Sales pouvait avoir une opinion personnelle, une de ces opinions qu'on n'oserait pas trop affirmer en publie, mais sur lesquelles on s'explique librement dans l'intimité. François de Sales a pu dire : il y aura plus d'élus que de damnés, ou, beaucoup plus qu'on ne pense, ou que sais-je encore. Le sentiment que Camus lui prête paraît-il en désaccord avec la doctrine générale du saint qui disait : il n'y a que Dieu et moi qui aimions les pécheurs? Comme on le voit sur ce bel exemple, M. de B. est ordinairement victime de ce qu'on peut appeler : idola cathedrae. Il déclare inventé, « faux », tout propos de François de Sales qui ne présente pas la perfection, les sûres nuances doctrinales d'une définition conciliaire. Le saint ne parlait pas comme un livre et c'est de là que vient précisément l'extrême intérêt des souvenirs camusiens.

3. Invectives de Camus contre les détracteurs de l'Introduction à la vie dévote. — Camus parle ici en son nom et il orchestre avec vivacité les paroles que le saint a imprimées sur le sujet dans le Traité de l’amour de Dieu. M. de B. nous dit que François de Sales n'attaquait pas les intentions de ceux qui avaient cruellement bafoué sou livre de la Philothée? Camus dit-il le contraire? Il ne parle pas de cela. Il s'emporte contre ces accusateurs. Un peu de colère lui était permis.

4. Différence de conduite entre saint François de Sales et les religieux dans les travaux de la conversion du Chablais. — J'ai déjà touché ce point-là plus haut. Sauf quelques inexactitudes menues, tout ce que raconte ici Camus est confirmé par les documents, ou paraît du moins tout à fait vraisemblable, lorsque les documents se taisent. Pourquoi veut-on que François de Sales ait approuvé constamment tout ce que faisaient, auprès de lui, les autres missionnaires? Tel de ceux-ci, zélé mais un peu violent, a pu le choquer. Pourquoi le saint n'aurait-il pas fait cette confidence à Camus ? La mission du Chablais était un des événements de sa vie. La conversation a dû venir plusieurs fois là-dessus. M. de B. nous rappelle que « Pierre Camus n'a point été témoin oculaire » de cette mission. Lui non plus.

5. De la perfection et de l'état de perfection. — Cette discussion très spéciale et dans laquelle fourmillent les amorces d'équivoques, est présentée d'une façon tellement confuse, soit par Camus, soit par M. de B., que je n'entreprends pae de la résumer. Camus ne défend pas aux religieux d'être parfaits, mais il dit que, en tant que religieux, ils ne sont pas dans un état spécial de perfection. Son opinion, dont il est en effet très entêté, n'a pas cours, je crois, chez les bons théologiens. On peut donc estimer qu'il invoque ici à tort l'autorité de François de Sales. Il interprète inexactement des propos qui ont été sûrement tenus par le saint. Je dis « sûrement » et M. de B. semble le reconnaître lui-même.

6. Des directeurs. — François de Sales ayant écrit qu'il fallait choisir son directeur « entre dix mille », et Camus n'ayant pas dit « entre cent mille », son exagération sur ce sujet, ne me paraît pas si coupable. Il force la note, mais je ne crois pas du tout qu'il ait inventé la conversation qu'il rapporte.

(1) . Les plus sincères en la foi, dit-il lui-même, peuvent quelquefois donner dans les brisants de quelques termes ambigus », De la sindérese, p. 132.

 

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7. Sur la charité et le mérite des œuvres. — Il s'agit ici d'une opinion de Bellarmin vers laquelle Camus prétend que François de Sales « penchait beaucoup » et vers laquelle il penchait lui-même si fort qu'il l'embrassait. M. de B. reconnaît que ce sentiment de Bellarmin est « le plus généralement suivi par les théologiens n. Donc rien de bien inquiétant dans l'affirmation de Camus. François de Sales professait une doctrine moins exigeante. Cela est vrai, mais pourquoi, un jour ou l'autre, n'aurait-il pas penché vers la doctrine contraire?

8. Prétendu moyen de sanctifier les actions précédentes. — Quoi qu'il en soit de ce subtil problème, je note simplement que Camus ne fait pas ici appel aux entretiens qu'il a eus avec François de Sales, mais à un texte imprimé du saint. Camus interprète de la pensée écrite de celui-ci nous touche moins. Et voilà terminée la série des graves erreurs. A chacun d'apprécier. Quelques outrances de pensée sur des problèmes très spéciaux, quelques formules malheureuses, quelques emportements de plume, on a certes bien raison de redresser ces faux pas, mais il n'y a pas la matière à s'indigner. Encore est-il que sur plusieurs de ces huit points, les critiques de M. de B. me paraissent porter dans le vide.

 

§ 2. — « Divers points sur lesquels Pierre Camus présente les sentiments

de saint François de Sales d'une manière inexacte ou obscure. »

 

9. La tentation de François de Sales contre l'espérance. — Camus dit que la tentation a duré un mois. M. de B. dit : six semaines.

Camus dit encore que le jeune homme n'osa pas s'ouvrir à son confesseur d'une tentation qui, notons-le bien, n'était pas un péché. M. de B. affirme qu'il en a parlé à son confesseur parce qu'il était plus parfait d'en parler et que le saint, même à dix-huit ans, faisait toujours le plus parfait. Camus, ami intime de François de Sales, ajoute que le gouverneur du jeune homme ne fut pas non plus dans la confidence de cette même tentation. « Cela, répond M. de B., ne peut s'accorder avec la confiance que le saint évêque avait » pour son gouverneur. Soit, mais appliquons cette méthode historique à un autre fait. On raconte que François de Sales, prêchant un jour dans sa cathédrale, eut un fort mouvement d'impatience contre le sacristain, je crois, qui interrompait le sermon. M. de B. ne dirait-il pas ici qu'une telle vivacité a ne peut s'accorder » avec la patience et la douceur du saint évêque ? Nous savons néanmoins que le fait, raconté par François de Sales lui-même, est indiscutable.

10. Diversité de méthodes dans la conduite des âmes. — Simple anecdote sans importance. M. de B. la croit véridique, mais il aurait voulu plus de détails. Peut-être Camus nous a-t-il dit tout ce qu'il savait là-dessus.

11. Nombre des protestants convertis par le saint. — Camus dit une fois : 60.000; une autre fois : 60.000. La mère de Chaugy, dit 70.000, et elle « avait en main de nombreux documents ». 70.000 attestations en bonne et due forme, il est curieux que tout cela se soit perdu !

12. Moyen de procurer la conversion des protestants. — Camus prétend que François de Sales préférait la méthode pacifique à l'agressive. M. de B. sait bien que cela est vrai ; mais il a peur que quelque sot tire de là que le saint désapprouvait toute espèce de controverse. Camus, controversiste lui-même, n'avait pas songé à cette conclusion.

13. Que la sainteté est le plus grand des miracles. — Ici encore, on se contente de préciser la pensée du saint, d'ailleurs fidèlement rapportée par Camus.

14. Conseils sur le choix d'un état, même remarque.

15. De la véritable dévotion, même remarque.

16. Des trois degrés de ta charité. — Camus disserte ici en son propre nom.

17. Des soupçons contre le prochain. — Camus fait dire à François de Sales que s si une action pouvait avoir cent visages, il fallait la regarder toujours par celui qui était le plus beau a. M. de B. ne conteste pas l'authenticité du

 

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propos, mais il nous avertit que « Si une jeune fille prend toujours sous le beau côté la conduite et les paroles d'un jeune homme, elle risque peu à peu d'être entraînée dans le précipice ». Qui le nie ? Qui en doute ? Intelligenti pauca...

18. Si l'obligation de la résidence pour un évêque est de droit divin. — Oui, répond M. de B. mais de telle façon que le Pape a néanmoins le pouvoir de dispenser un évêque de la résidence. Camus ne fait pas cette distinction et raconte à ce sujet une anecdote qu'il dit tenir, et que certainement, il tient en effet de François de Sales. M. de B. nie tout cela en bloc et en détail. Je ne vois pas du tout à quelles enseignes.

19. Anecdote concernant le marquis d'Urfé. — François de Sales est à Belley, avec l'évêque. D'Urfé, voisin de celui-ci, vient les surprendre. a Il nous dit, raconte Camus, qu'il était venu chanter un trio et qu'il voulait être en tiers dans notre amitié, comme il l'était depuis longtemps dans celle qui existait entre l'évêque de Genève et Antoine Favre. Le B. François de Sales répondit que, sans faire tant de partage il valait mieux faire un carré ou quaternion d'amis ». (Lui-même, Camus, Favre et d'Urfé). Ecoutons maintenant M. de B. « L'intime amitié, dit-il, que Pierre Camus prétend avoir existé entre le marquis d'Urfé et saint François de Sales est un fait dénué de toute vraisemblance ». On pense rêver. Mais non. Ignorez-vous en effet que d'Urfé a écrit l'Astrée et que Céladon « n'est rien moins que chaste » ? Et puis, d'Urfé « était loin d'avoir dans le monde la réputation d'une grande sévérité de moeurs ». Je demeure bouche bée devant cette manière de raisonner. Je jurerais pourtant que J.-P. Camus n'a rien inventé de tout ce qu'il nous raconte, rien, et cette fois, pas même les mots de François de Sales, ce joli « quaternion », qui porte la marque du saint. Tout le récit ruisselle d'évidence, si j'ose parler ainsi. Remarquez d'ailleurs que Camus ne parle pas d'une amitié intimissime, il ne fait pas de d'Urfé un pénitent de François de Sales. Un ami tout bonnement. Quand le marquis vient à Annecy, il se plaît à rencontrer les deux gloires de cette ville, l'évêque et Antoine Favre. Voit-on le saint lui fermer la porte tant que d'Urfé n'aura pas brûlé son roman ? François de Sales est chez Camus. D'Urfé, grand ami de ce dernier qui ne lui ménage pas la morale, vient les rejoindre. Voit-on d'ici François de Sales refuser de lui parler? Après la mort du saint, raconte M. de B. lui-même e lorsque le convoi (de Lyon à Annecy) approchait de la ville de Saint-Rambert-en-Bugey, on vit arriver en poste le marquis d'Urfé qui avait fait trois lieues pour l'atteindre. Il se mit à genoux dans la boue, arrosa le cercueil de ses larmes et invoqua à haute voix l'intercession de l'homme de Dieu ». La belle scène ! Oui, dit M. de B. a ce seigneur partageait l'admiration générale pour les vertus du saint ». Mais comment voulez-vous que ces deux hommes se soient connus et aimés ? (1)

C'est tout, et comme on le voit, ce n'est rien. L'abbé de Baudry a épluché le livre de Camus avec une patience et une attention surhumaines. Il est prévenu. Tout ce qui, dans les souvenirs de Camus, contrariera peu ou prou l'idée qu'il s'est faite lui-même de la sainteté en général, et de François de Sales en particulier, tout cela sera déclaré faux, douteux ou mêlé. C'est là néanmoins tout ce qu'il a pu trouver de répréhensible. Dix-neuf corrections et l'ouvrage a six volumes in-8°. Encore faut-il faire un choix dans ces corrections. On a vu, je crois, jusqu'à l'évidence que le sens critique de notre censeur n'était pas à la hauteur de son zèle. Plusieurs de ces critiques n'ont pas d'importance, quelques-unes sont insoutenables. Qui admet pareille méthode peut, à bon droit, refuser de croire aux vérités historiques les plus certaines. Mettons les choses au pire. Donnons-lui raison sur tous ces points. Déchirons, du livre de Camus, trente ou cinquante pages. Ce qui reste, c'est-à-dire, en somme, le livre entier demeure plus solide que l'airain.

 

(1) Dans son livre sur d'Urfé. M. le chanoine Reure, impressionné par l'unique autorité de M. de Baudry, dit bien aussi qu'il ne faut pas lire Camus sans défiance ; néanmoins, le même auteur affirme sur les relations entre Francois de Sales et d'Urfé, exactement ce qu'avait affirmé Camus. Cf. La vie et les ouvres d'honoré d'Urfé, par le chanoine Reure, Paris, 1909, pp. 133, 185. 331.

 

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§ 2. — LA VISITATION D'ANNECY ET JEAN-PIERRE CAMUS

 

Il est longuement et durement parlé de J.-P. Camus, au XIV° volume de la grande édition de François de Sales, soit dans l'Introduction, soit dans une note infinie qui ressemble à un véritable manifeste. Cette introduction porte la signature du R. P. Navatel ; la note doit être du même savant (2). Quoi qu'il en soit, c'est lui qui a dirigé la préparation de ce volume, lui qui en prend la responsabilité devant le public. On peut croire toutefois que le R. P. Navatel ne parle ici ni en son nom propre, ni avec une conviction bien profonde. L'embarras, les négligences trop apparentes de ces pages le disent assez. Le R. P. appartient à une compagnie que l'évêque de Belley a chèrement aimée, qu'il a défendue avec la crânerie que nous avons dite, et qu'il a maintes fois publiquement célébrée. D'un autre côté, il ne semble pas que le R. P. lui-même ait eu à souffrir de J.-P. Camus et que, par exemple, la lecture de ce dernier l'ait beaucoup fatigué. De toute manière, cette proclamation, car c'en est une, nous fait connaître, non sans quelque solennité, les sentiments que les visitandines d'Annecy nourrissent aujourd'hui à l'endroit de J.-P. Camus et qu'elles désirent nous imposer.

« Camus, nous dit le R. P. Navatel à la fin de cette note, Camus fut un ami de la Visitation, mais un de ces amis contre lesquels il faut se défendre parfois ». Oui, sans doute, et nous le savions, mais il fut un ami, tendrement, efficacement dévoué. Imagine-t-on l'intime de François de Sales hostile à sainte Chantal, hostile à l'oeuvre préférée du saint? Qu'on lise du reste tout ce qui a trait à la Visitation, dans l'Esprit du B. Fr. de Sales, qu'on lise la Mémoire de Darie, et surtout l'exquise, l'admirable lettre que sainte Chantal écrivit à l'évêque de Belley, pour supplier celui-ci de ne plus attaquer les capucins. On n'écrit de la sorte qu'à un homme dont on est tout à fait sûr, que l'on estime grandement, que l'on sait profondément bon et à qui l'on peut tout dire (3). Mais enfin Camus avait ses défauts. Il lui prit un jour fantaisie de s'immiscer dans lss affaires intérieures du couvent de visitandines installé par lui dans sa ville épiscopale. Manque de tact, excès de zèle et qui fit souffrir sainte Chantal. Nous n'atténuerons pas cette faute, nous demandons seulement s'il y, avait grand avantage à en réveiller le souvenir. D'autres que lui et plus redoutables, le P. Binet, par exemple, ont causé à la même sainte des ennuis beaucoup plus graves. Je ne vois pas néanmoins que les éditeurs d'Annecy, lorsqu'ils ont à nous parler du P. Binet, se complaisent à diminuer cet illustre et saint personnage. Je vois au contraire que les visitandines d'Annecy ont soigneusement effacé, dans les lettres de la sainte fondatrice, nombre de passages qui auraient inutilement peiné les amis d'un grand Ordre religieux. Leur reprochons-nous cette délicatesse que nous avons imitée nous-mêmes lorsque nous avons eu à raconter sainte Chantal ? A Dieu ne plaise, il nous semble en effet qu'il faut une raison majeure pour compromettre, par des publications de ce genre, la réputation de qui que ce soit. Mais pourquoi deux mesures? Le seul Camus parmi les intimes du saint, n'aurait-il droit qu'à ce summum jus qui frôle souvent l'injustice ?

Au reste, le prudent P. Navatel a-t-il omis un autre souvenir que nous livre la candeur de M. de Baudry et qui, peu ou prou, pourrait expliquer les étranges sentiments que nous discutons. a Quelque joie, nous dit M. de B., qu'eut l'évêque de Belley d'avoir obtenu pour son diocèse des religieuses de la Visitation, il suivit son goût pour les mauvaises plaisanteries, et s'en permit une à l'occasion

 

(1) Oeuvres de saint François de Sales, pp. XX. XXI, 139, 140, 141.

(2) Simple conjecture de critique interne ; l'auteur de la note écrit : François de Sales, tout court, ce que les visitandines, je crois, ne font jamais. Elles écrivent : saint François de Sales.

(3) On la trouve dans la grande édition, t. XIV, pp. 417-411. Elle présente un contraste pénible avec l'introduction et la note que nous discutons présentement.

 

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de cet établissement. Il avait destiné quatre jeunes personnes du pays pour être le premier noyau de cette communauté naissante. On envoya d'Annecy cinq religieuses pour commencer l'établissement. Pierre Camus dit qu'on avait envoyé cinq filles pour en gouverner quatre. Le souvenir de cette raillerie se conserva longtemps parmi les religieuses de la Visitation et il en est fait mention dans une lettre écrite trente-sept ans après par la Mère de Chaugy. Voici comment elle parle : « Quand l'évêque ancien de Belley dit que l'on envoya cinq filles pour en gouverner quatre, il fut aussi déraisonnable et satirique qu'il l'a été pour tous les Ordres de l'Eglise de Dieu (rappelons en passant que ce « tous » ne peut se défendre) ; car s'il avait eu tant soit peu d'intelligence des maximes d'une vie régulière comme la nôtre, il aurait bien vu... que l'on ne peut pas mettre d'abord les prétendantes portière, sacristine, économe, maîtresse des novices. Dieu fasse paix à ce bonhomme ! Plus d'une fois il n'a été ni prophète, ni évangéliste» (1). Tantae ne animis caelestibus... ! Tant de flammes pour un bon-mot que très certainement Camus n'aurait pas craint de faire devant François de Sales lui-même, et que celui-ci aurait trouvé fort plaisant' A la vérité, je ne reconnais pas ici la Mère de Chaugy, si sage, si modérée et spirituelle ! Que si nous voulions l'imiter, prendre au tragique une plaisanterie manifestement inoffensive, noua lui ferions remarquer que bien qu'il soit très vrai qu'une prétendante ne peut être ni sacristine, ni économe, ni quoi que ce soit, on comprend moins pourquoi une ou deux religieuses formées, n'ayant à gouverner que quatre prétendantes, ne pourraient s'acquitter provisoirement de tous ces emplois. Mais qu'allons-nous parler de cela ? Camus n'a pas cherché si loin. Il n'a pas voulu renverser les « maximes de la vie régulière », trancher de l'évangéliste ou du prophète. C'est un parisien qui ne peut se tenir de rire, voyant quatre recrues commandées par cinq officiers. Et cependant, nous dit tristement le bon abbé de Baudry « le souvenir de cette raillerie se conserva longtemps parmi » les visitandines. S'y conserverait-il aujourd'hui encore ?

Dès son introduction — et on y revient dans la note — le R. P. Navatel se demande avec une stupeur inquiète, inquiétante, comment François de Sales et Camus, « deux natures aussi disproportionnées » — différentes aurait suffi — ont bien pu s'accorder ainsi. Cruelle énigme! On nous tire de peine en remarquant que François de Sales avait besoin d'une « amusette » et que d'ailleurs son amitié pour J.-P. Camus était « au service du Maître », c'est-à-dire, ramenée à la gloire de Dieu.

Les autres amitiés du saint ne l'étaient donc pas ? Si elles l'étaient, à quoi bon cette remarque? On défendait tantôt à François de Sales de serrer la main du marquis d'Urfé. Au tour de Camus maintenant. Tout au plus lui seras t-il permis d'être le bouffon du saint. Nous avons pourtant une autre raison, parait-il, de nous résigner à cette demi-faiblesse du saint. Tant que celui-ci vécut, « l'évêque de Belley prêcha, confessa, visita (son diocèse) avec une piété, un zèle qui nous étonne ». Juste ciel ! un évêque pieux et zélé vous étonne! — Après la mort de son ami, Camus a continué de prêcher, de confesser, de visiter ses diocèses (Belley, Rouen). Où le R. P. a-t-il appris que dès lors et dans ces diverses fonctions, l'évêque ait manqué de piété ou de zèle? Les contemporains affirment le contraire. On n'apporte aucune preuve à l'appui de ce que l'on semble insinuer. Le R. P. juge Camus inconstant parce que celui-ci, après vingt ans d'épiscopat, fatigué, surmené, s'est démis de son évêché. Ignore-t-on que François de Sales, de son côté, méditait très sérieusement une résolution toute semblable ? Mais il y a, nous dit-on, dans les romans de Camus des « peintures plus que profanes ». Nous avons déjà répondu à cette accusation. Ici encore, ignore-t-on que François de Sales, loin de condamner Camus pour ces romans, l'encourageait au contraire dans cette voie, ou bien a-t-on la preuve qu'après 1622, ces mêmes romans soient devenus encore plus profanes ? Quant aux écrits « furibonds » de Camus, pendant ses démêlés avec certains religieux, nous n'y reviendrons pas non plus. C'est un

 

(1) Le véritable esprit... I, XXVII, XXVIII.

 

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sujet très délicat et sur lequel les adversaires de Camus feraient bien de ne pas trop s'étendre. Que l'évêque ait eu de graves torts, nous le confessons, affirmant seulement que ses intentions furent droites. Pour le reste, si l'on veut m'en croire, qu'on laisse dormir les petits papiers.

Jusqu'ici, comme on le voit, nous piétinons. Ce n'est pas du tout notre faute. Je n'ai rien omis de ce que l'on a cru devoir alléguer contre la mémoire de Camus. Mais enfin où le manifeste veut-il en venir? A ceci, je crois, qui serait beaucoup plus grave, à disqualifier l'auteur de l'Esprit du Bienheureux François de Sales. « Eh bien ! s'écrie le R. P. Navatel, il faut le dire pour en finir avec une légende : (l'auteur de ce livre) ne mérite pas tant de sympathie et de confiance, de la part surtout des historiens qui le citent si complaisamment. » On n'est pas plus clair. Ce qui est en cause, c'est la valeur de Camus considéré surtout comme historien de François de Sales. Il s'agit de reléguer l'Esprit du Bienheureux François de Sales quelque part entre l'histoire et le roman. J'avoue que j'ai tremblé à la lecture de ces dernières lignes : « il faut le dire pour en finir avec une légende ! » La suite m'a rassuré pleinement.

Bien loin en effet de faire appel, pour prouver son dire, à tels documents inédits jusqu'à cette heure et écrasants pour la véracité ou le caractère de Camus, le R. P. Navatel se contente de nous renvoyer à un livre, vieux de soixante ans, que nous savions par coeur et que lui-même, chose étrange, il a lu très rapidement.

« Après, nous dit-il (puisqu'il faut le dire), après le consciencieux travail de M. l'abbé de Baudry : Le véritable esprit de saint François de Sales (Lyon, 1846) on ne peut plus regarder l'évêque de Belley comme l'interprète fidèle de la doctrine du saint et le peintre exact de son âme. En des points notables, il travestit ses pensées en lui prêtant les siennes propres et cela n'a rien d'étonnant chez un écrivain qui se pique, en mainte préface, de ne jamais rien relire ni effacer de ce qu'il écrit et qui citait de mémoire, dix-sept ans après la mort de François de Sales, les propos qu'il lui attribue ». En un mot, M. de Baudry a parlé et la question est si bien résolue qu' « on ne peut plus » la reprendre, causa finita est.

Nous ne sommes pas de cet avis et nous avons dit pourquoi. non sans avoir suivi ligne à ligne le réquisitoire de M. de Baudry. Ai-je eu tort de croire que le R. P. Navatel a peu pratiqué ce réquisitoire qu'il déclare irréfutable. Je ne pense pas. Je l'estime trop pour croire un seul instant qu'il approuve et fasse sienne l'invraisemblable méthode critique de M. de Baudry. L'homme qui repousse avant tout examen comme extravagante la seule idée que François de Sales ait pu converser amicalement avec l'auteur de l'Astrée et qui, fort d'une telle évidence, ne craint pas de donner un démenti formel à J.-P. Camus, ami personnel de l'un et de l'autre, cet homme-là, il n'y a pas deux façons de le juger dans la République des lettres. Le R. P. Navatel le sait comme moi. Que n'a-t-il donc lu M. de Baudry ou même Camus ? Il serait aujourd'hui convaincu plus que personne du sérieux et de la véracité du bon évêque.

 

II. — BIBLIOGRAPHIE

 

Je me borne à mentionner ici les textes dévots que j'ai directement utilisée — et de ces textes, j'indique seulement les éditions que j'ai eues sous la main. Je ne donnerai de bibliographie relativement complète que du seul Yves de Paris.

 

Alexis DE Jésus. — Miroir de toute sainteté en la vie du saint merveilleux Bernard de Menton... par révérend messire Roland Viot avec le Cours de la vie spirituelle sous le nom de Théopneste ou l'Inspiré par Alexis de Jésus, prédicateur français, Lyon, 1627.

 

(AMELOTE). La vie du P. Charles de Goudron... refaite et augmentée par l'auteur... Paris, 1657.

 

ANDRIEU. — L'antidotaire sacré de l'âme pieuse... disposé premièrement par M. Nicolas Salicete... et derechef revu, corrigé et augmenté par le R. P. F. Pierre Andrieu, angevin, Paris, 1607.

 

(Antoine DE SAINT-PIERRE). La vie du R. P. Dom Eustache de Saint-Paul Asseliae Religieux de la Congrégation des Feuillants, ensemble quelques opuscules spirituels, le tout recueilli par un religieux de la même congrégation. Paris, 1646.

 

D'ATTICHY. — Histoire générale de l'Ordre sacré des Minimes... par le P. Louis Dony d'Attichy, Paris, 1624.

 

BALZAC. — Oeuvres de J.-L. de Guez, sieur de Balzac, publiées sur les anciennes éditions par L. Moseau, Paris, 1854.

 

DE BARRY. — La dévotion à la glorieuse sainte Ursule... par le R. P. Paul de Barry, Lyon, 1645. L'année sainte ou l'Instruction de Philagie... par le P. Paul de Barry, Lyon, 1653.

La mort de Paulin et d'Alexis, illustres amants de la mère de Dieu et leurs lettres à diverses personnes par le P. Paul de Barry, Lyon, 1658.

Les cent illustres de la maison de Dieu... par le R. P. Paul de Barry, Lyon, 1660.

 

BEDEL. — La vie du très révérend Père Pierre Fourier, dit vulgairement le Père de Mataincourt (fac simile de l'édition de 1657 publié à Mirecourt en 1869).

 

BÉNARD. — Paroeneses chrétiennes... par Dom Laurent Bénard, prieur du collège de Cluny à Paris, Paris, 1616.

De l'esprit des ordres religieux... par Dom Laurent Bénard, Paris, i6i6.

Instructions monastiques sur la règle de saint Benoit. . par Dom Laurent Bénard, Paris, 1618.

 

BERTAUT. — Les oeuvres poétiques de M. Bertaut, évêque de Sées, dernière édition, Paris, 1620.

 

DE BESSE. — L'Héraclite chrétien, c'est-à-dire les regrets et les larmes du pécheur pénitent par M. Pierre de Besse, limousin, Paris, 1615.

Le Démocrite chrétien, c'est-à-dire le mépris et moquerie des vanités du monde par M. Pierre de liesse, limousin, Paris, 1615.

La Royale prêtrise... par M. Pierre de Besse (Cf. l'abbé Pierre de Beses, prédicateur du roi Louis XIII, étude littéraire par Emile FAGE, notice biographique par le Dr E. Longy, Tulle. 1885 ).

 

BINNET. — Ou trouvera la bibliographie complète dans Sommervogel, et la plupart des ouvrages de Binet à la Bibliothèque nationale. Pour moi, ne pouvant tout lire, je me suis borné aux ouvrages, suivants qui, après quelques autres incursions malheureuses, m'ont paru suffire au but que je me proposais.

 

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Recueil des œuvres spirituelles du R. P. Estienne Binet.., dédiées à Jésus-Christ et à sa très Sainte Mère et à la Reine, Mère du Roi, 2e édition, revue et augmentée, Rouen, 1637. Ce recueil — qui n'est pas un livre de poche — contient :

 

1. La fleur des psaumes de David.

2. La seconde partie de la fleur des psaumes.

3. La consolation aux malades.

4. La marque de prédestination,

5. L'oraison funèbre du feu Roi.

6. La vie du B. Amédée...

7. Un traité de la perfection.

8. Une épître d'un abbé à un religieux défroqué.

9. Un traité si chacun se peut sauver en sa religion.

 

Les attraits tout puissants de l'amour de Jésus-Christ et du paradis de ce monde par le R. P. Et. Binet, Paris, 1631.

Du gouvernement spirituel doux et rigoureux. Livret pour les supérieurs de religion... Paris, 1637. (Ce livre a paru sans nom d'auteur, et, chose plus curieuse, sans approbation (du moins dans les exemplaires que j'ai consultés).

Le grand chef-d'oeuvre do Dieu et les souveraines perfections de la Sainte Vierge, sa mère. Par L. R. P. Estienne Binet, Lyon, 1649. (La 1ère édition qui est de 1634 est dédiées Séguier. )

Le riche sauvé par la porte dorée du ciel et les motifs sacrés et grande puissance de l'aumône, par le R. P. Estienne Binet... Paris, 1629.

Essai des merveilles de nature et des plus nobles artifices, pièce très nécessaire à tous ceux qui font profession d'éloquence par René François, prédicateur du Roi, 11° édition, Paris, 1639.

 

(J. DE BLÉMUR). — Eloges de plusieurs personnes illustres en piété de l'ordre de Saint-Benoît décédées en ces derniers siècles... Paris, 1679 (je reviendrai dans le volume suivant sur la bibliographie difficile de cet ouvrage).

 

BONAL. — Le chrétien du temps en quatre parties. La première de l'origine du christianisme, la deuxième de la vocation de tous au salut des chrétiens, la troisième de la pureté primitive du christianisme, la quatrième du relâchement des chrétiens du tempe, par le R. P. François Bonal de l'Observance de Saint-François, Lyon. 1672. (La lot édition est de 1655.)

 

(BOUHOURS). — La vie de Mm. de Selleront, supérieure et fondatrice du monastère des religieuses bénédictines de N.-D. des Anges, établi à Rouen, Paris, 1691.

 

BRANCHE. — La vie des saints et saintes d'Auvergne et du Velay par messire Jacques Branche, au Puy, 1652.

 

BRÉBEUF. — Entretiens solitaires ou prières et méditations pieuses en vers français par M. de Brébeuf, Paris, 1660.

 

(BREUCHÉ DE LA CROIX). — Le divertissement d'Ergaste, Liège, 1642.

 

CAMARET. — Le pur et parfait christianisme ou l'imitation de N.-S, Jésus-Christ, par le R. P. Louis Camaret, de la compagnie de Jésus, Paris, 1675.

 

CAMUS 

On trouvera une bibliographie, à peu près complète, mais peu critique, à la suite de la notice de Mg, Dépery, sur Camus (Histoire hagiologique du diocèse de Belley); et une foule d'indications dans le catalogue imprimé de la Bibliothèque nationale; mais cette bibliothèque ne possède pas toua les Camus L'abbé Dépery, alors vicaire-général de Belley et Mg, Devie, évêque de ce diocèse, avaient réuni 196 ouvrages de Camus à l'évêché de Belley. Le gouvernement, en s'emparant de cet évêché, a t-il veillé à la conservation de cette collection unique, je l'ignore. Je ne vais indiquer ici que les ouvrages de Camus qui m'ont été le plus utiles.

 

1. Traités spirituels.

 

Les devoirs du bon paroissien par Jean-Pierre Camus... à Paris, par Gervais Al-Bot... 1641. (Ce livre se présente dans des conditions typographiques assez curieuses : ni privilège, ni approbations doctorales. Il n'a peut-être circulé que sous le manteau.)

Homélies panégyriques de saint Ignace do Loyola... par Jean-Pierre Camus... Lyon, 1633. Homélies spirituelles sur le cantique des cantiques prêchées à Paris en l'Eglise de la congrégation de l'Oratoire, par messire Jean-Pierre Camus... Paris, 1620.

De l'unité vertueuse, secret spirituel pour arriver par l'usage d'une vertu au comble de toutes les autres... par Jean-Pierre Camus... Paris, 1631.

De la sindérèse, discours ascétique... par Jean-Pierre Camus... Paris, 1631.

La lutte spirituelle ou encouragement à une âme tentée de l'esprit de blasphème et d'infidélité, par Jean-Pierre Camus... Paris, 1631.

 

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Traité de la réformation intérieure.., par Jean-Pierre Camus, Paris, 1631,

La Caritée ou le portrait de la vraie charité... par M. Jean.Pierre Camus, Paris, 1641

Catéchisme spirituel, par Jean-Pierre Camus... Paris, 1641.

L'esprit du B. François de Sales (édition Depery, Paris. 1840).

 

2. Romans.

 

Hellénin et son heureux malheur ; ensemble Callitrope ou le changement de la droite de Dieu ; par M. l’évêque de Belley, Lyon. 1628.

La pieuse Julie. Histoire parisienne, par M. l'évêque de Belley, Paris, 1625. La mémoire de Darie... par M. l'évêque de Belley, Paris, 1620.

Roselis ou l'histoire de sainte Suzanne, par Jean-Pierre Camus... Paris, 1823.

Palombe ou la femme honorable, par Jean-Pierre Camus, précédée d'une étude littéraire sur Camus et le roman chrétien au XVIIe siècle par H. Rigault, Paris, 1853.

Les événements singuliers de M. de Belley, Paris, 1632. (Réimpression : le privilège est de 1628. Quatre parties en deux volumes. La première partie comprend 9 nouvelles; la seconde, 17 ; la troisième, 17 ; la quatrième, 27).

 

CHARLES DE SAINT-PAUL. — Tableau de la Madeleine en l'état de parfaite amante de Jésus par le R. P. Dom Charles de Saint-Paul, abbé et supérieur général de la congrégation des Feuillants, Paris, 1628.

 

CHEVILLARD. — Le Petit-Tout dans lequel l'homme aura la connaissance de soi-même... par M. François Chevillard, curé de Saint Germain d'Orléans, Paris, 1654.

 

CONSTANTIN. — La vie du révérendissine évêque Claude de Granier... prédécesseur du B. François de Sales en l'évêché de Genève, par le P. Boniface Constantin, de la Compagnie de Jésus, Lyon, 1660.

 

CORNEILLE. — Les quatre livres de l'imitation de Jésus-Christ traduits et paraphrasés en vers français par Pierre Corneille, Rouen, 1656.

 

CORTADE. — Octave du Saint Sacrement ou le Soleil de justice caché sous la nuée des espèces, par le R. P. G. Cortade,religieux augustin, Toulouse, 1661.

Les sept saints tutélaires de l'Agenais ou ce qu'a recueilli d'assuré de leurs vies dans les auteurs fidèles le R. P. Germain CORTADE... avec les sept sonnets du sieur D. P. L. S... Agen, 1664.

 

DE COSTE. — Les éloges et vies des reines et princesses, dames et damoiselles, illustres en piété, courage et doctrine qui ont fleuri de notre temps ou du temps de nos pères par F. Hilarion de Coste, Paris, 1630.

La vie du R. P. Marin Mersenne, Paris, 1649.

 

DESMARETS. — Marie-Madeleine ou le triomphe de la grâce : poème composé par Jean Desmarets, sieur de Saint-Sorlin, Paris, 1669.

 

DESPORTES. — Cent psaumes de David mis en vers par Philippe Desportes, Rouen, 1600. Oeuvres de Philippe Desportes, dernière édition, revue et augmentée, Paris, 1600.

 

DINET. — Cinq livres des hiéroglyphiques où sont contenus les plus rares secrets de la nature et propriétés de toutes choses... oeuvre de feu M. P. Dinet, Paris, 1614.

 

DUPONT. — La philosophie des esprits... par feu M. René du Pont... recueillie et mise en lumière par Le Heurt, Paris, 1606.

 

FAVRE. — Les entretiens spirituels d'Antoine Favre, divisés en trois centuries de sonnets, Paris, 1602.

 

FICHET. — Les saintes reliques de l'Erothée... en la sainte vie de Mère J.-Fr. de Frémyot, baronne de Chantal, excellent original de sainteté et vrai pourtraict de l'épouse de Jésus par le P. Alexandre Fichet, Paris, 1643.

 

FILÈRE. — La sage Abigaïl mariée malheureusement à Nabal et très heureusement à David... par le R. P. J. Filère,... Lyon, 1641.

 

FONSECA. — Traité de l’Amour de Dieu par le R. P. Christophe Fonsèque, de l'Ordre de Saint-Augustin... (traduit) par le Fr. Nicolas Maillard, célestin de Parie, Paris, 1604.

 

GABASSE. — Les recherches des recherches et autres oeuvres de M. Estienne Pasquier.,. Paris, 1622.

La doctrine curieuse des beaux esprits de ce temps ou prétendus tels.., combattue et renversée par le P. François Garassus... Paris, 1624.

Apologie du Père Frauçois Garassus... pour son livre contre les athéistes et libertins de notre siècle... Paris, 1624.

Histoire des jésuites de Paris pendant trois années (1624-1626) écrite par le P. François

 

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Garasse... et publiée par le P. Auguste Carayon, Paris, 1864. ( Les Mémoires de Garasse... publiés par Ch. Nisard, Paris, 1861, donnent un texte moins correct du même ouvrage.)

 

FRÉDÉRIC LACHÈVRE, un mémoire inédit de François Garassus... Paris, 1912 (R. H. L. oct.-déc. 1911).

 

GAZET . — Le consolateur des âmes scrupuleuses avec un recueil des consolations du R. P. Louis de Blois et autres anciens Pères... par M. Guillaume Gazet, chanoine d'Aire.... Arras, 1610.

 

GODEAU. — Paraphrase des psaumes de David par Antoine Godeau, Paris, 1659.

Poésies chrétiennes d'Antoine Godeau, évêque de Grasse, nouvelle édition, revue et augmentée. Paris, 1646.

 

HAYNEFVE. — L'ordre de la vie et des moeurs qui conduit l'homme à son salut et le rend parfait en son état, sur ce qu'a dit saint Augustin que l'Ordre est le guide qui nous mène à Dieu. Discours travaillé à la gloire de Jésus-Christ, chef de l'Ordre et divisé en trois parties par le P. Julien Hayneufve, de la C. de J., Paris, 1639. 1640.

 

HENRYS. — L'Homme-Dieu ou le parallèle des actions divines et humaines de Jésus-Christ par le sieur Henrys, conseiller et premier avocat du Roi au Prés deal de Forestz, Lyon, 1645.

 

JACQUES D'AUTUN. — Les justes espérances de notre salut opposées au désespoir du siècle, par le P. Jacques d'Autun, prédicateur capucin, Lyon, 1619.

 

JACQUINOT. — Adresse chrétienne pour vivre selon Dieu dans le monde, par le P. Barthélemy Jacquinot, de la Compagnie de Jésus... Lyon, 1638. (La 1re édition est de 1614.)

 

LABARDE. — Le théâtre sanglant de sainte Catherine, martyre, sur lequel sa vie et sa mort sont représentés par 14 divers actes, composé par le R. P. I. Jean Labarde, Paris, 1618.

 

LAURENT DE PARIS. — Le Palais d'Amour divin par le P. Laurent de Paris, Paris, 1604.

 

LA CEPPÈDE. — Les théorèmes de messire Jean de la Ceppède, seigneur d'Aygalades, chevalier conseiller du roi.. et premier président en sa Cour des Comptes de Provence, sur les sacrés mystères de notre Rédemption, Paris, 1613.

 

LA FAYOLLE. — Le génie de Tertullien par M. Nicolas de La Fayolle, avocat au Parlement, Paris, 1660.

 

LA SERRE. — Les oeuvres chrétiennes de M. de La Serre... historiographe de France... Paris, 1647. (Ce Martin Puget de La Serre n'est pas le Jean Puget de La Serre, ridiculisé par Boileau.)

 

LA RIVIÈRE. — L'Adieu du monde ou les mépris de ses vaines grandeurs et plaisirs périssables par Dom Polycarpe de la Rivière. Paris, 1611.

Le mystère sacré de notre Rédemption, par Dom Polycarpe de La Rivière, Lyon, 1641.

 

LE BOUCHER. — Le pèlerinage de Notre-Dame-de-Moyen-Pont près la ville de Péronne en Picardie par le R. P. F. Jean le Bouclier, péronnais, religieux minime, Paris, 1623.

 

LE MOYNE. — Les peintures morales où les passions sont représentées par tableaux, par caractères et par questions nouvelles et curieuses, par le P. Pierre Le Moine..., Paris, 1640.

Les peintures morales, seconde partie de la doctrine des passions où il est traité de l'amour naturel et de l'amour divin..., Paris, 1643.

La dévotion aisée, par le P. Pierre Le Moine..., Paris, 1652.

 

LÉON. — Le portrait de la sagesse universelle avec l'idée générale des sciences, par le P. Layes carme... Paris, 1655.

 

LE PORCQ. — Les sentiments de saint Augustin sur la grâce opposés à ceux de Jansénius par le P. Jean Leporcq, 2° édition, Paris, 1700.

 

LE ROUX. — La tourterelle gémissante sur Jérusalem par Claude le Roux, lyonnais, Paris, 1631.

 

MARCEL. — La vie du R. P. César de Bus... par le P. i. Marcel, Lyon, 1619.

 

MARILLAC. — Les psaumes de David et les X cantiques insérés en l'office de l'Eglise, traduits en vers français par Mre Michel de Marillac, Paris, 1630.

 

MARTIAL DE BRIVES. — Les oeuvres poétiques et saintes du R. P. Martial de Brises... augmentée. de nouveau et recueillies par le sieur Depuis, Lyon, 1655.

Le Parnasse séraphique et les derniers soupirs de la muse du R. P. Martial de Brives, capucin, Lyon, 1660.

 

MÉRODE. — La vie admirable de sainte Brigide, vierge thaumaturge aux royaumes d'Hiberme par M. Noël de Méraude, Tournay, 1653

 

MOLINIER. — Les politiques chrétiennes ou tableau des vertus politiques considérées en l'état chrétien.., par E. Molinier, toulousain, prêtre et docteur, Paris, 1631.

Le banquet sacré de l'Eucharistie... par M. Etienne Molinier... Toulouse, 1635.

 

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Le lys du Val de Onaralsou... par M. E. Molinier, 2° édition, Auch. s. d. (l'approbation est de 1646).

 

MOREL. — La vie du vénérable serviteur de Dieu, le Père Paul Tronchet, religieux de l'Ordre des Minimes par le P. F. Antoine Morel, religieux du mémo Ordre, Avignon, 1856.

 

MORELL. — Traité de la vie spirituelle par saint Vincent Ferrier... traduit du latin en français avec des remarques et annotations... par soeur Julienne Morel, religieuse à Sainte-Praxède en Avignon, Lyon, 1617.

 

MUGNIER. — La véritable politique du prince chrétien à la confusion des sages du monde et pour la condamnation des politiques du siècle... par le R. P. Hubert Mugnier, de la Compagnie de Jésus, Paris, 1647.

 

NERVÈZE. — Les épîtres morales du sieur de Nervèxe, Paris. 1603.

Le jardin sacré de l’âme solitaire par A. de Nervèze, Paris, 1603.

 

PERRIN. — Le paradis terrestre ou emblèmes sacrés de la solitude (par P. Martin). La retraite d'Alcippe et la Chartreuse ou la sainte solitude par M. Perrin, 3° édition, Paris, 1655.

 

RAPINE. — Le christianisme fervent dans la primitive église et languissant dans celle de nos derniers siècles, t. I, la face de l'Eglise universelle, t. II, la face de l'Eglise primitive, par le R. P. Rapine, récollet, Paris, 1871.

 

REGNAULT. — La vie et miracles de sainte Pare, fondatrice et première abbesse de Fare-Moustier en Brie, par Fr. Robert Regnault, religieux minime, Paris, 1626.

 

DE RÉGNIER — L'homme intérieur ou l'idée du parfait chrétien par le P. Timothée de Régnier, Aix, 1662.

 

RICHEOME. — Les oeuvres spirituelles du R. P. Louis Richeome, provençal de la Compagnie ne Jésus, revues par l'auteur avant sa mort et augmentées de plusieurs pièces non encore imprimées, Paris, 1688. (C'est à cette édition que je renvoie pour les deux ouvrages suivant. dont je n'ai pas pu me procurer les éditions séparées. Catéchisme royal dédié à Ms' le Dauphin en la cérémonie de son baptême. La peinture spirituelle en l'art d'admirer, aimer et louer Dieu en toutes ses oeuvres et tirer de toutes profit sanitaire.)

 

1. Oeuvres polémiques ou apologétiques.

 

Très humble remontrance et requête des religieux de la Compagnie de Jésus présentée au très chrétien roi de France et de Navarre Henri IV l'an 1598 et réimprimée de nouveau 1602, à Bordeaux.

Plainte apologétique au roi très chrétien de France et de Navarre par la Compagnie de Jésus contre le libelle de l'auteur sans nom intitulé : le franc et véritable discours et avec quelques notes sur un autre libelle dit : le catéchisme des jésuites, par Louis Richeome... à Bordeaux... 1603.

Consolation envoyée à la reine mère du roi et régente en France sur la mort déplorable du feu roi très chrétien de France et de Navarre, son très honoré seigneur et mari, par le P. Louis Richeome... Lyon, 1810.

 

2. Oeuvres spirituelles.

 

L'adieu de l'âme dévote laissant le corps avec les moyens de combattre la mort par la mort et l'appareil pour heureusement se partir de cette vie mortelle composé par R. P. Louis Richeome... Rouen, 1602 (réimpression tardive et lamentable ; la dédicace de l'édition originale est datée de Tournon, 4 août 1590).

Le pèlerin de Lorette accomplissant son voeu fait à la glorieuse vierge Marie mère de Dieu par Louis Richeome, Paris, 1611 (réimpression et très négligée : le livre est de 1602). Tableaux sacrés des figures mystiques du très auguste sacrifice et sacrement de l'Eucharistie dédiés à la très chrétienne reine de Francs et de Navarre par Louis Richeome, Paris, 1601.

L'académie d'honneur dressée par le fils de Dieu au royaume de son église sur l'humilité selon les degrés d'icelle opposés aux marches de l'orgueil composé par le R. P. Louis Richeome, Lille, 1615 (réimpression, l'édition originale est de 1614).

Le jugement général et dernier état du monde divisé en cinq livres et dédié à nos seigneurs de la Cour du Parlement de Bordeaux par Louis Richeome, Paris, 1680.

 

ROSSET. — Les délices de la poésie française ou recueil des plus beaux vers de ce temps.. recueillis par Fr. de Rosset, Paris, 1618.

 

SAINT-PÉ. — Le nouvel Adam, première partie où sont expliquées en dix dialogues l'excellence de la Rédemption des hommes par Jésus-Christ, l'obligation qu'ils ont de l'aimer; deuxième partie, contenant la vie de Jésus-Christ, par un prêtre de l'Oratoire de Jésus, Paris, 1667.

 

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FRANCOIS DE SALES. — Oeuvres de saint François de Sales, évêque et prince de Genève et docteur de l'Eglise. Edition complète d'après les autographes et les éditions originales publiée... par les soins des religieuses de la Visitation du premier monastère d'Annecy, Annecy Lyon (1898...)

 

SANS DE SAINTE-CATHERINE. — Oeuvres spirituelles du R. P. D. Sans de Sainte-Catherine, Paris, 1650 (la 1ère édition est de 1628).

 

SAUTEL. — Lusus poetici allegorici... auctore P. Petro Justo Sautel societatis Jesu, Paris, 1754 (une des innombrables réimpressions).

 

(SÉGUIRAN). — Sermons sur la parabole de l'enfant prodigue... prêchée par un docte et célèbre personnage de notre temps, Paris, 1612.

 

DE SELVE. — Les oeuvres spirituelles sur toutes les évangiles des jours de carême et sur les fêtes de l'année de Mr Lazare de Selve... président pour Sa Majesté es villes et pays de Metz Toul et Vendun, Paris, 1620.

 

SURIN. — Cantiques spirituels de l'amour divin... composés par un Père de la Compagnie de Jésus... dernière édition, Paris, 1664.

 

TRELLON. — La muse guerrière dédiée à M. le comte d'Aubijoux. Rouen, 1604.

 

VALENTIN DE SAINTE-DOROTHÉE. — Le grand saint Augustin docteur de l'église par le R. P. Valentin de Sainte-Dorothée, Paris, 1655.

 

YVES DE PARIS (1).

 

1. Les heureux succès de la piété ou les triomphes que la vie religieuse a emportés sur le monde et sur l'hérésie (1ère édit.), Paris, 1632. (Bibi. Nat. D. 7061) cf. Le Rabat-Joie du triomphe monacal ou examen du livre de la vie religieuse du P. Yves (Camus) l'Isle,1634. Suite du Rabat-Joie, 1634.

2. Eclaircissement de quelques propositions extraites du livre des heureux succès de la piété, Paris, 1634.

(Il a été publié, en 1643, une 5e édition des heureux succès, mais seulement du 1er volume.)

3. La Théologie naturelle, Paris, t. I, 1633 ; t. II, 1635 ; t. III, 1635 ; t. IV, 1636. (Traduction latine par Yves lui-même, Paris, 1638, in-folio que je n'ai pu rencontrer). (Bibi. Nat. D. 341.)

4. Les morales chrétiennes, Paris, t. I, 1638; t. II, 1639 ; t. III, 1641; t. IV, 1642. (Traduction latine en 1677 ?). (Bibi. Nat. D. 4286.)

5. De l'indifférence des actes humains, Paris, 1640. (Bibi. Nat. D. 4587.)

6. Les progrès de l'amour divin, Paris, t. I, l'amour naissant, 1642; t. II, l'amour souffrant, 1642 ; t. III, l'amour agissant, 1643 ; t. IV, l'amour jouissant, 1643. (Le t. IV est à l'Arsenal.)

7. De Potestate Romani Pontifcis adversus lutheranos, calvinistas et alios hoereticos, Paris, 1613.

8. Très humbles remontrances présentées à la Reine contre les nouvelles doctrines de ce temps, Paris 1614. (Bibi. Nat. D. 1785.) Cf. Réponse à la remontrance (attribuée à Hermant). (Bibl. Nat. D. 1786.)

9. Des miséricordes de Dieu en la conduite de l'homme avant, durant et après le péché, Paris, 1645.

10. Le Souverain Pontife, Paris, 1645.

11. Digestum sapientia in quo habetur scientiarum omnium rerum divinarum atque humanaram nexus et ad prima principia reductio... Paris, t. 1, 1648 ? ; t. II, 1660 ; t. III, 1661; t. IV, 1673.

12. Des oeuvres de miséricorde en général et en particulier, Paris, 1650.

13. La conduite du religieux, Rennes, 1653.

14. Traité de la nécessité où l'on démontre que notre liberté est indépendante de toute nécessité morale, Paris, 1654.

15. Francisci Allaei arabis christiani astrologie nova methodus, Rhedonis, 1654,

16. L'agent de Dieu dans le monde, Paris, 1656. (Bibi. de Calais.)

17. Jus naturale rebus creatis a Deo constitutum ex observations P. Yvonis... Parisiis, 1658. (Bibi. Sainte-Geneviève, A. 800.)

18. Instructions religieuses tirées des annales et chroniques de l'ordre de Saint-François, Paris, 1661. (Arsenal.)

 

(1) Je transcris en les complétant les notes bibliographiques du P. Apollinaire de Valence qu'a bien voulu nie communiquer le R. P. Edouard d'Alençon et j'indique les bibliothèques de France où quelques-uns de ces divers ouvrages, aujourd'hui très rares, peuvent se trouver. Du reste, cette bibliographie est très compliquée. Pour tel ouvrage, v. g. La Théologie naturelle, les éditions se suivent à quelques moi, de distance. Rien n'avertit le lecteur qu'il a affaire à une édition nouvelle et cependant la pagination est toute différente.

 

19. Les vaines excuses du pécheur, Paris, 1662. (Bibi. Nat. D. 4563.)

20. Le gentilhomme chrétien, Paris, 1666.

 

Publications posthumes.

 

21. Les oeuvres françaises du P. Yves de Paris, capucin, nouvellement imprimées, revues, corrigées et augmentées, Paris, t. I, 1675 (théologie naturelle ; le Souverain Pontife ; les progrès de l'amour divin; pratiques de piété); t. II, 1880 (de la nécessité; de l'indifférence humble remontrance ; agent de Dieu ; miséricorde ; vaines excuses; heureux succès). (Bibl. de Vesoul.)

22. Le pénitent chrétien, Paris, 1880.

23. Les fausses opinions du monde ou le monde combattu dans ses maximes criminelles... Par le R. P. Yves de Paris, capucin, conservées et mises en ordre par les soins du P. Yves de Paris, son neveu, prédicateur capucin, Paris, 1688. (Arsenal.)

24. Le magistrat chrétien, par le R. P. Yves de Paris... conservé et mis en ordre par les seins du P. Yves de Paris, son neveu... Paris, 1688. (Bibi. Nat. D. 7099.)

 

ZACHARIE DE Lisieux. — De la Monarchie du Verbe Incarné ou de l'immense pouvoir du plus grand des rois, des hautes maximes politiques, et du merveilleux ordre qu'il observe dans le gouvernement de son Estat, par le R. P. Zacharie de Lisieux prédicateur capucin. Deuxième édition, Paris, 1643. (2)

 

Anonymes non identifiés.

 

Nouveau recueil de vies des saints propres pour servir d'exemple à toutes sortes de personnes de quelque vacation qu'elles soient dans la campagne... par un docteur de théologie de la Faculté de Paris, 2e édition, Paris, 1668 (Méjanes D. 2397). Ce livre, ayant été vendu en feuilles volantes, doit être assez rare.

La vie de l'hermite de Compiègne décédé le 18 septembre 1691, Paris, 1692.

L'Anatipophile bénédictin aux pieds du roi et de la reine pour la réformation de l'ordre de Saint-Benoit, nécessaire en ce royaume, Paris, 1615 (Méjanes). D'après Féret (la Faculté, de Paris, époque moderne, III, p. 396-398). l'Anatipophile, condamné par la Sorbonne en 1615 serait du célestin Charles de Campigny, provincial de son ordre, déposé en 1618, enfermé chez les Chartreux, puis admis à Saint-Maur.

 

(1) Je n'ai pu voir de mes yeux que les numéros 1, 3, 4, 5, 6 (t. I et IV), 8, 9, 11, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 23, 24. Pour les autres numéros, je m'en rapporte aux notes du P. Apollinaire de Valence.

(2) J'ai indiqué ici que le seul livre proprement dévot du P. Zacharie que j'aie pu me procurer. On trouvera une bonne bibliographie de lui dans les articles de M. l'abbé Guéry cités plus haut cf. p. 512.

 

 

 

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