|
|
TROISIÈME SERMON POUR LE JOUR DE LA PURIFICATION DE LA SAINTE VIERGE. L'enfant Jésus, Marie et Joseph.
1. Nous. célébrons aujourd'hui la purification de la Sainte Vierge qui eut lieu, selon la loi de Moïse (Levit. XII, 2) quarante jours après la naissance du Seigneur. D'après la loi, toute femme qui, devenue grosse des oeuvres d'un homme, avait mis un fils au monde, était impure l'espace de sept jours, son enfant devait être circoncis le huitième; à partir de ce jour, toute entière au soin de se laver et de se purifier, elle devait se tenir un mois entier éloignée 'du temple, après quoi elle allait offrir son fils au Seigneur avec des présents. Mais qui ne comprend que, par les premiers mots de cette loi, la mère du Seigneur se trouvait exemptée de s'y soumettre? En effet, ne pensez-vous pas que Moïse eut peur en disant simplement, toute femme qui mettra un fils au monde, sera impure, de passer pour blasphémer contre la mère du Seigneur, et que c'est pour cela qu'il ajoute ces mots : «Toute femme devenue grosse des oeuvres d'un homme? » S'il n'avait pas prévu qu'une vierge concevrait un jour sans le secours de l'homme, pourquoi aurait il parlé de celles qui conçoivent par ce moyen ? Il est donc évident que la loi de Moïse ne regardait pas la sainte Vierge, car elle n'a pas mis au monde un fils conçu par l'opération d'un homme, ainsi d'ailleurs que Jérémie l'avait annoncé en disant : « Le Seigneur doit faire un nouveau prodige sur la terre (Jorem. XXXI, 22). » Vous me demandez de quel nouveau prodige il veut parler? Le voici « Une femme enceindra, un homme. » Elle ne recevra pas dans son sein un homme par l'opération d'un autre homme, elle ne recevra pas un fils selon les lois de la nature, mais elle renfermera un homme dans son sein demeuré intact et vierge, si bien que, soit en entrant, soit en sortant, selon le mot d'un autre prophète (Ezech. XLIV, 2), le Seigneur laissera la porte de l'Orient constamment close. 2. Ne vous semble-t-il point, par conséquent, que Marie aurait pu protester dans son coeur et s'écrier : Qu'ai-je besoin de purification? Pourquoi m'abstiendrais-je d'aller au temple, moi dont le sein que l'homme n'a point touché, est devenu le temple du Saint-Esprit ? Pourquoi enfin, ne pourrais-je entrer au temple du Seigneur même du temple ? Dans cette conception, dans cet enfantement, il n'y eut rien, absolument rien d'impur, car le fruit de mes entrailles est là source même de la pureté, et n'est venu que pour laver la souillures des péchés. Qu'est-ce que la purification légale purifiera en moi, qui suis devenue parfaitement pure par mon enfantement immaculé ? C'est vrai, ô Vierge bienheureuse, oui il n'y a pour vous aucun motif de vous purifier, nul besoin de purification. Mais votre fils avait-il besoin d'être circoncis ? Soyez donc parmi les femmes comme l'une d'entre elles, puisque votre Fils a été comme l'un d'entre nos enfants. Il a voulu être circoncis, pourquoi ne voudrait-il pas plus encore être offert? Offrez donc votre fils, Vierge consacrée, et présentez au Seigneur le fruit béni de votre ventre; oui, offrez pour notre réconciliation à tous, cette hostie Sainte et agréable à Dieu. Certainement Dieu le Père aura pour agréable cette victime nouvelle, cette hostie infiniment précieuse dont il a dit lui-même: «celui-ci est mou Fils bien aimé, en qui j'ai mis toute mes complaisances (Matt. III, 17). » Mais il me semble, mes frères, que cette offrande est bien douce, car on se contente de le présenter au Seigneur, puis on le rachète pour quelques oiseaux et on le remporte. Un jour viendra où il ne sera point racheté par un sang étranger, mais où il cachettera les autres par son propre sang, car son Père l'a envoyé pour être la rédemption de son peuple. Cette seconde oblation sera celle du sacrifice du soir, celle d'aujourd'hui est l'offrande du sacrifice du matin, celle-ci est plus douce, celle-la sera plus complète. L'une se fait aux premiers jours de sa vie, l'autre se trouve dans la plénitude de l'âge, mais dans l'un et l'autre cas on peut dire avec le Prophète . « Il a été offert parce qu'il l'a bien voulu (Isa. LIII, 7). » En effet, il est offert aujourd'hui, non parce qu'il avait besoin de l'être, non parce que la loi l'atteignait, mais uniquement parce qu'il l'a bien voulu; et sur la croix, il n'en fut pas moins offert également parce qu'il l'a bien voulu encore, non pas parce qu'il avait mérité de l'être, ou parce que le Juif avait le moindre pouvoir sur lui. Aussi, je vous offrirai volontiers mon sacrifice, Seigneur, parce que vous vous êtes vous-même offert volontairement pour mon salut, non point pour votre propre nécessité. 3. Mais qu'offrons-nous à Dieu, mes frères, et que lui rendons-nous pour tous les biens qu'ils nous a donnés? Pour nous, il a offert l'hostie la p,us précieuse qu'il y ait, et même il n'aurait pu en trouver de plus précieuse que celle-là; faisons donc aussi de notre côté tout ce que nous pouvons, offrons-lui ce que nous avons de meilleur, offrons-lui tout ce que nous sommes. Il s'est offert : qui êtes-vous donc, mon frère, pour hésiter à vous offrir de même ? Ah, qui me fera la grâce de voir mon offrande acceptée d'une si grande Majesté ? Seigneur, je n'ai que deux choses, mon corps et mon âme, elles sont de bien peu de valeur, plaise au ciel que je puisse vous les offrir, parfaitement, en sacrifice de louange ! Car, s'il est quelque chose de bon, de glorieux, d'avantageux pour moi, c'est bien que je vous sois offert, plutôt que de nie voir laissé par vous à moi-même. Abandonnée à elle-même, mon âme est dans le trouble, mais, en vous, Seigneur, si elle vous est véritablement offerte, elle est au comble du bonheur. Mes frères, au Seigneur qui devait être immolé un jour, le Juif n'offrait que des victimes immolées, mais aujourd'hui, dit le Seigneur, « je suis vivant, et je ne veux point la mort du pécheur, je veux plutôt qu'il se convertisse et qu'il vive (Ezech. XXXIII, 11). » Le Seigneur ne veut donc point ma. mort, et ce ne serait qu'à regret que je lui offrirais ma vie? C'est là pourtant une hostie propitiatoire, agréable à Dieu et vivante. Mais dans l'offrande du Seigneur, nous trouvons trois choses, de même le Seigneur veut rencontrer trois choses aussi dans les nôtres. Ainsi, à la présentation de Jésus, se trouvait Joseph, l'époux de la mère du Seigneur, celui dont Jésus passait pour être le fils ; il y avait aussi la Vierge mère, et enfin on y voyait l'enfant Jésus lui-même qu'ils venaient offrir. Qu'il y ait ainsi dans notre offrande une constance virile, une chair continente, et une humble conscience. Oui, qu'on y retrouve la résolution virile de persévérer dans l'état que nous avons embrassé, une chasteté virginale dans la continence, et dans notre conscience, une simplicité et une humilité d'enfant. Ainsi-soit-il.
|