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HOMÉLIE VI. HOMMES D'ISRAEL, ÉCOUTEZ CES PAROLES. (ACT. II, 22, JUSQU'AU VERS. 36.)
ANALYSE. 1. Saint
2. Revenant ensuite sur l'explication des premiers versets de ce discours, l'orateur fait ressortir la force du témoignage qu'allègue l'apôtre en faveur de la résurrection de Jésus-
3. Mais si Dieu le Père a établi dans les cieux le règne de son Fils, c'est afin de nous faire part de son royaume; et cependant les chrétiens méprisent ce royaume, et courent encenser le démon qui les conduit à l'enfer. Ici l'orateur trace un éloquent parallèle entre la conduite du Seigneur et celle du démon; et entre l'homme doux et patient et celui qui habituellement se livre à tous les transports de la colère.
4. L'âme de l'un, calme et sereine, ressemble à ces montagnes qui jouissent d'une température toujours douce et toujours égale, et le coeur de l'autre rappelle le tumulte et les cris de la place publique. Le choix d'un chrétien ne saurait donc être douteux.
1. Ces paroles ne sont point, dans la bouche de saint Pierre , un langage d'adulation ; mais parce qu'il avait vivement pressé ses auditeurs, il prend un ton plus modéré et cite, avec opportunité, un passage du Psalmiste. Il répète aussi le début de son discours, afin de prévenir en eux le trouble de l'esprit, car il va leur parler de Jésus-
Jésus les eût soudain offusqués; c'est pourquoi l'apôtre ne l'a pas prononcé. Observez encore qu'il ne dit pas : Obéissez à ma parole, mais Ecoutez ces paroles ; et certainement, il n'y avait là rien qui pût les offenser. Enfin, remarquons qu'il évite de toucher tout d'abord aux mystères les plus sublimes et qu'il commence par ce qu'il y a de plus humble: « Jésus de Nazareth » , dit-il. Pierre nomme donc la patrie de Jésus ; et cette patrie n'était qu'une (2) obscure bourgade; et il ne révèle de lui rien de grand et d'élevé, pas même ce que tout autre prophète en eût annoncé. « Jésus de Nazareth, homme que Dieu a rendu célèbre parmi vous». Ces premiers mots annoncent déjà un grand mystère, et révèlent que Jésus a été envoyé de Dieu. Or, c'est ce que toujours et en toute circonstance le précurseur et les apôtres ont soin de prouver. Ecoutez la parole du précurseur: « Celui qui m'a envoyé baptiser dans l'eau, m'a dit : Celui sur qui tu verras l'Esprit descendre et se reposer, c'est celui-là». (Jean, I, 33.) Tel est aussi le témoignage que Jésus-
C'est pourquoi Pierre, le prince du collège apostolique, l'ami du
« Ce Jésus », dit-il, « qui vous a été livré par le conseil et la prescience de Dieu, l'immolant par la main des méchants, vous l'avez mis à mort ». Nous retrouvons ici le même langage et presque les mêmes expressions dont Joseph avait usé à l'égard de ses frères: « Ne craignez point, car ce n'est pas vous qui m'avez livré, mais c'est Dieu qui m'a envoyé ici ». (Gen. XV, 5.) Néanmoins, parce qu' il avait dit que la mort de Jésus était arrêtée dans les conseils divins, les Juifs eussent pu répliquer : Nous avons donc bien fait; c'est pourquoi il les convainc d'homicide par cette parole : « L'immolant par la main des méchants, vous l'avez mis à mort ». Il désigne ici Judas et montre que les Juifs n'eussent pu exécuter leur noir dessein, si Dieu ne le leur eût permis et si le traître ne leur eût livré Jésus. Car c'est ce que signifie ce mot « livré », et l'apôtre rejette ainsi tout l'odieux du crime sur Judas qui livra le Sauveur et le trahit par un baiser. Quant à ces mots: « Par la main des méchants », ils se rapportent à la trahison de Judas, ou aux soldats qui crucifièrent le Sauveur, en sorte que les Juifs l'ont,mis à mort, moins par eux-mêmes que « par la main des méchants ». Mais comme les apôtres ont toujours soin de prêcher d'abord la passion de Jésus-
Ici.l'apôtre nous révèle un grand et sublime mystère : car ce mot : « Il était impossible », signifie que Jésus-
Pierre voulant alors développer cette prophétie, commence ainsi.: « Mes frères ». C'est toujours ainsi qu'il s'exprime lorsqu'il veut annoncer quelques grandes vérités; et ce début est bien propre à rendre ses auditeurs attentifs et bienveillants. « Mes frères, qu'il soit permis de vous dire hardiment du patriarche David ». Quelle humilité ! et comme il parle modestement, dès qu'il peut le faire sans danger ! Il n'affirme donc pas que la prophétie concerne Jésus-
2. Pierre s'exprime ainsi afin que du moins; par honneur pour David et pour ses descendants, les Juifs accueillissent le dogme de la résurrection. Car si Jésus-
Quant au péché des Juifs, Pierre l'a laissé entrevoir comme dans l'ombre, et sans parler du châtiment que ce péché méritait, il s'est borné à déclarer que les Juifs avaient mis à mort le
Mais revenons sur l'explication des premiers versets. « Jésus de Nazareth que Dieu a rendu célèbre parmi vous ». Ainsi, le doute n'est plus permis à son égard parce qu'il s'est fait connaître par ses oeuvres. Aussi, Nicodème disait-il à Jésus-
Nous apprenons également du discours de l'apôtre quelle est la signification de ce mot « être retenu ». Car celui qui retient une chose avec souffrance, cherche moins à en conserver la possession qu'à s'en décharger et à soulager ainsi sa douleur. C'est aussi avec une admirable justesse que saint Pierre dit : « David parlant au nom du
« Et sa chair n'a point vu la corruption ». Cette parole n'exprime pas moins fortement le dogme de la résurrection que celle-ci : « Dieu a ressuscité ce Jésus ». Et voyez-vous comme maintenant il le désigne par son nom? « Et nous en sommes tous témoins. Après donc qu'il a été élevé, de la main de Dieu » ; Pierre en revient encore à Dieu le Père, quoique déjà il ait suffisamment , montré son action, parce qu'il sait combien cet argument est puissant. Il laisse également comprendre, sans le dire ouvertement, que ce même Jésus est monté au ciel, et qu'il y réside. « Et après qu'il a reçu la promesse du Saint-Esprit ». Observez ici que l'apôtre attribue l'envoi de cet Esprit divin au Père, et non au
Quelle doctrine se cachait donc sous ces paroles? Mais à cause même de sa sublimité, l'apôtre la voile aux regards de ses auditeurs, et attribue au Père l'envoi du Saint-Esprit; c'est pourquoi il se borne à énumérer les biens que nous a procurés l'incarnation du Fils, les miracles que celui-ci a opérés, la royauté qu'il a fondée, le peuple au milieu duquel il a paru , et il ajoute comme incidemment que lui aussi donne l'Esprit-Saint. Toute parole qui ne tend pas à l'utilité de ceux qui l'écoutent, est une parole vaine et inutile. C'est ce que témoigne le saint précurseur quand il dit: « Le
3. Ici la parole de l'apôtre se relève noblement, et il parle avec fermeté. Il n'a donc plus recours à ces précautions oratoires : qu'il me soit permis de vous dire; mais il s'exprime en toute franchise. « Le Seigneur a dit à mon Seigneur : assieds-toi à ma droite, jusqu'à ce que je réduise tes ennemis à te servir de marche-pied ». Or, si le
« Que toute la maison d'Israël sache donc ». Voyez comme il prévient le doute et l'hésitation, et comme il continue avec autorité. «Que Dieu a fait Seigneur et
C'est là véritablement aimer Jésus-
Cependant, à ne considérer même que le royaume qui nous est promis, et le Dieu qui veut nous le donner, il est beau de recevoir un tel don, et de le recevoir de telles mains. Hélas ! nous agissons comme ces insensés à l'égard desquels un roi veut couronner mille bienfaits en les associant à l'héritage de son fils, et qui ne savent que mépriser ses offres généreuses. Mais, au contraire, que le prince des méchants, celui qui, plein de malice, a précipité nos premiers parents et toute leur postérité dans un abîme de maux, nous présente une obole, et soudain nous courons l'adorer. Dieu nous promet un royaume, et nous le méprisons; le démon nous entraîne vers l'enfer, et nous l'honorons. Ainsi, d'un côté le Seigneur, et dé l'autre le démon. Mais quelle différence encore dans leurs commandements ! Oui, supposons qu'il n'existe ni Dieu, ni démon, ni ciel, ni enfer, cette différence seule suffirait à éclairer notre choix. Et, qu'ordonnent-ils donc l'un et l'autre ? Le démon, tout ce qui souille l'homme; et Dieu, tout ce qui fait sa gloire et on honneur. Le démon, tout ce qui nous rend malheureux et infâmes; et Dieu, tout ce qui nous apporte la paix et la tranquillité. Ecoutez en effet les paroles de l'un : « Apprenez de moi que je suis doux et humble de coeur, et vous trouverez le repos de vos âmes ». (Matth. XI, 29.) Quel est, au contraire, le langage de l'autre? Soyez dur et inhumain, furieux, et moins homme que bête féroce. Quant aux résultats de ces commandements, de quel côté est l'utilité et l'opportunité? Mais, à part toutes ces considérations, il suffit de savoir que l'un des deux est le démon; et, si nous en sommes bien persuadés, nous le vaincrons avec plus de gloire. Car l'utilité du précepte, et non sa facilité, nous doit faire connaître celui qui nous porte un (6) véritable intérêt. C'est ainsi que les pères donnent à leurs enfants des ordres sévères, et les maîtres à leurs esclaves; mais ils n'en sont pas moins pères et maîtres, tandis que les autres sont dépendants et serviteurs.
Et maintenant , voulez-vous examiner la question sous le rapport du bonheur? La solution en est facile et évidente. Et en effet, y a-t-il parité de satisfaction entre l'homme irascible et furieux et l'homme doux et patient ? L'esprit de ce dernier possède le calme d'une paisible solitude et l'âme du premier ressemble à ces places publiques où se presse une foule importune et où les gens qui conduisent des chameaux, des mulets et des ânes, crient à tue-tête pour avertir les passants de se garer. Oui, je comparerai le méchant à ces villes où l'on n'entend que le bruit de l'enclume et du marteau et où l'encombrement est si grand qu'à chaque pas on risque de heurter les autres ou d'en être soi-même heurté. Mais le juste est semblable à une montagne dont le sommet jouit de la douce haleine des zéphyrs et s'illumine des rayons d'une pure lumière. Des sources jaillissantes abreuvent mille fleurs qui en font un délicieux jardin ; l'on dirait une prairie que le printemps a émaillée de plantes et de fleurs et qu'il arrose de limpides ruisseaux. Ajoutez au plaisir des yeux celui de l'oreille que charment de suaves mélodies. Car, ou les oiseaux chantent sur les cimes élevées des grands arbres, ou la cigale, le rossignol et l'hirondelle harmonisent leurs voix et leurs concerts: D'autres fois c'est le zéphyr qui se joue dans les hautes branches des arbres et qui, agitant les pins et les mélèzes, imite les chants mélodieux du cygne; ou ce sont les lis et les roses de la vallée qui s'inclinent comme dans un fraternel embrassement et présentent l'image d'une.mer calme et tranquille. Les fleurs nous offrent d'autres emblèmes non moins gracieux. Ainsi la rose symbolise l'arc-en-ciel, la violette la mer azurée, et le lis le ciel.. Mais cet admirable spectacle de la nature qui réjouit l'oeil, récrée également le corps. On y respire en effet un tel bien-être qu'on se croit plutôt dans les cieux que sur la terre.
4. Dirai-je encore que le murmure des eaux qui se précipitent en cascade et frémissent sur un lit de cailloux, détend nos membres fatigués et provoque un doux sommeil? Cette description vous charme et vous ferait aimer la solitude ; ruais combien plus délicieux est L'état d'une âme humble et patiente. Et ne croyez pas que ma parole se soit égayée dans cette description pour le seul plaisir de peindre la nature et d'en tracer un riant tableau ; non, non. J'ai voulu vous montrer quels sont les charmes de la patience, et vous faire comprendre qu'il est plus doux et plus utile de vivre avec un homme vraiment patient, que d'habiter ces lieux enchanteurs. Et en effet, jamais il ne déchaîne autour de lui le souffle violent de l'aquilon, et son langage doux et modéré ne rappelle que les brises légères d'un paisible zéphyr. Ses reproches eux-mêmes sont pleins de bienveillance et imitent le chant des oiseaux. Comment donc ne pas trouver auprès de lui le véritable bonheur? Si sa parole ne peut rien sur le corps, du moins elle calme et récrée l'âme; et les soins habiles d'un médecin coupent moins vite la fièvre que la parole d'un homme patient n'apaise un esprit furieux et emporté. Eh ! pourquoi parler du médecin, puisqu'un fer rouge qu'on plonge dans l'eau, perd sa chaleur moins promptement qu'un coeur courroucé ne se calme au contact d'un homme patient? Mais de même qu'on ne fait sur la place publique aucune attention au chant des oiseaux, ainsi mes paroles frappent inutilement l'oreille d'un esprit furieux et irascible. Combien donc la douceur est préférable à la colère et à l'emportement. D'ailleurs Dieu nous commande la première et le démon la seconde. Aussi, quand même il n'existerait ni Dieu, ni démon, n'oubliez point que nos propres intérêts nous prescriraient encore de cultiver cette vertu et de fuir ce vice.
Et en effet, l'homme doux et patient est débonnaire pour lui-même et utile aux autres, tandis que l'homme violent et irascible devient ennuyeux à lui-même et inutile aux autres. Eh 1 y a-t-il rien de moins aimable et de plus triste, de plus fatigant et de plus insupportable que de vivre avec un esprit de ce caractère, tandis que nos relations avec un esprit pacifique sont empreintes de charmes et de douceurs ! Il vaut mieux habiter avec une bête féroce qu'avec le premier; car celle-ci s'apprivoise et devient soumise, mais celui-là s'irrite des démarches mêmes que vous faites pour l'apaiser, tant la colère est son état habituel ! Les jours joyeux et sereins de l'été et les tristes frimas de l'hiver sont moins opposés que ces deux hommes.
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Mais, avant d'exposer tous les maux dont la colère est le principe à l'égard du prochain, examinons ceux qu'elle nous attire. Sans doute c'est déjà un grand mal que de nuire à ses frères, et j'en parlerai plus tard. Pour le moment je vous demande quel bourreau déchire les côtés comme la colère et l'emportement , quel dard transperce le corps aussi cruellement, et quel accès de folie ébranle aussi complètement la raison? J'en ai connu plusieurs que la colère a rendus malades; et, de toutes les fièvres, celles-ci sont les plus dangereuses. Mais si tels sont les ravages que cette passion porte dans le corps, que seront ceux dont elle afflige l'âme? Eh ! ne dites point qu'on ne les voit pas au dehors, mais pensez que si l'homme furieux et emporté se nuit ainsi à lui-même, il ne peut amener pour les autres que de terribles malheurs. Plusieurs en effet ont perdu la vue par suite d'un accès de colère, et plusieurs autres sont tombés dans de graves maladies. Mais l'homme vraiment patient soutient sans fléchir le poids de l'adversité. Et cependant, malgré, toute la rigueur de ses commandements et en dépit des supplices de l'enfer où ils nous conduisent, le démon, cet ennemi juré de notre salut, se voit obéi avec plus d'empressement que le Sauveur Jésus, qui est notre bienfaiteur et qui ne nous intime que des préceptes faciles, salutaires, et non moins utiles à nous-mêmes qu'à nos frères.
Rien de plus dangereux, mon cher frère, que la colère et l'emportement. Si sa violence ne dure qu'un instant, les suites en sont bien graves. Car souvent toute la vie ne suffit pas pour réparer un mot prononcé dans la colère ; et un seul acte d'emportement brise souvent toute une carrière. Mais ce qui est plus déplorable encore, c'est que souvent un instant , une action et une parole nous font perdre les biens éternels et nous dévouent aux plus affreux supplices. Je vous en conjure donc, muselez cette bête féroce. Mais c'est assez parler de la douceur et de la colère, et si vous voulez poursuivre ce parallèle entre l'avarice et la générosité, l'impureté et la chasteté, la jalousie et la bienveillance, vous trouverez entre elles la même différence. Il me suffit de vous avoir montré à reconnaître par le seul énoncé du précepte quel en est l'auteur, Dieu ou le démon. Ah ! obéissons à Dieu et ne nous précipitons point dans l'enfer; et tandis que nous en avons le temps et la facilité, purifions notre âme de la tache du péché, afin que nous obtenions les biens éternels, par la grâce et la miséricorde de Notre-Seigneur Jésus-
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