|
|
AVANT QUE SAINT JEAN CHRYSOSTOME PARTIT EN EXIL.
PREMIÈRE HOMÉLIE.
AVERT1SSEMENT.
Le conciliabule du Chêne ayant prononcé une sentence de déposition contre saint Chrysostome en 403, l'empereur Arcade, qui l'avait confirmée, donna ses ordres pour le faire chasser de la ville. Dès que les fidèles en furent informés, ils se soulevèrent avec beaucoup de chaleur et veillèrent pendant trois jours à la garde de leur pasteur, passant tout ce temps en prières, et oubliant même le soin de leur corps. Le saint évêque, à qui on avait signifié l'ordre d'Arcade, refusa les deux premiers jours d'y, obéir, attendant qu on lui fit violence. Le second jour, il fit à son peuple réuni un discours plein d'édification et de consolation pour tous ceux qui souffrent pour la justice. Nous l'avons encore en grec, mais on y a ajouté plusieurs choses qui ne sont point dignes de saint Chrysostome, et dans lesquelles on ne reconnaît point son style ; elles sont plutôt de quelque mauvais déclamateur, et d'ailleurs elles n'ont aucune liaison avec ce qui précède.
Ces choses indignes de saint Chrysostome remplissent les deux derniers numéros du texte grec , nous n'en donnons pas la traduction.
1. Les flots s'amoncèlent et la tempête devient sinistre; mais nous ne craignons pas d':être engloutis, car c'est sur la pierre que nous sommes établis. Que la mer se livre à ses fureurs, elle ne peut pas dissoudre la pierre; que les flots redoublent de violence, les flots n'ont pas assez de force pour faire Sombrer la barque de Jésus. Que pouvons-nous craindre? répondez-moi. La mort? Ma vie, à moi, c'est le Christ; et mourir est mon gain. (Philip. I, 21.) Est-ce lexil? répondez-moi. C'est au Seigneur qu'appartient la terre, et tout ce qui la remplit. (Ps. XXIII, 1.) Est-ce la confiscation de nos biens? Nous n'avons rien apporté en venant au monde, il est évident que nous n'en pouvons rien emporter (I Tim. VI, 7), et ce que le monde trouve de terrible excite mon mépris, et ses biens sont pour moi un objet de risée. Je ne crains pas la pauvreté; je ne désire pas la richesse; je ne m'effraye pas de la mort; je ne souhaite pas la vie, à moins que ma vie ne serve à votre avancement. Aussi, en vous parlant des choses présentes, j'exhorte votre charité à la confiance. Personne ne peut nous séparer; car ce que Dieu a joint, l'homme ne peut le désunir. En effet, si au sujet de la femme et de l'homme, Dieu a dit : Pour leur union, l'homme quittera son père et sa mère; et il s'attachera a sa femme; et à eux deux, ils ne seront qu'une seule chair. (Gen. II, 24.) Ce que Dieu a joint, que l'homme ne le sépare pas. (Matth. XIX, 5, 6.) Si vous ne pouvez pas rompre le mariage, combien vous est-il, à plus forte raison, impossible de rompre l'union de lEg
Rien n'a plus de force que l'Eg
2. Si vous n'en croyez pas la parole, croyez-en l'expérience. Que de tyrans ont voulu dominer l'Eg
3. Que personne ne vous trouble : priez. Le démon a fait ces choses pour interrompre votre application à la prière. Mais il sagite en vain; au contraire, nous vous trouvons plus zélés, plan fervents. Demain je viendrai me joindre à vos prières. Où je suis, vous êtes; où vous êtes, je suis; nous ne sommes qu'un même corps; le corps ne se sépare pas de la tête; la .tête ne se sépare pas du corps. Les lieux nous divisent, mais la charité nous unit; la mort même ne pourra pas nous désunir. Quand mon corps viendrait à mourir, mon âme vit, elle garde le souvenir de mon peuple. Vous êtes mes pères, comment puis-je vous oublier? vous êtes mes pères, vous êtes ma vie; vous êtes ma gloire. Vos progrès sont ma gloire, si bien que ma vie, ma richesse, réside dans ce trésor qui est le vôtre. Je suis prêt à subir pour vous mille morts, et je ne vous fais en cela aucune faveur, je vous paire une dette : Le bon pasteur donne sa vie pour ses brebis (Jean, X,11), il se laisserait mille fois égorger, mille fois trancher la tête. Cette mort, c'est le fondement de l'immortalité; ces assauts, c'est la voie qui mène à la vie pour jamais tranquille. Ce n'est pas l'amour des richesses qui m'expose à ces attaques, pour que je m'afflige; ce ne sont pas mes péchés, pour que je verse des larmes. Est-ce là ce qui cause mes épreuves? C'est l'amour que j'ai pour vous; je fais tout pour vous maintenir inébranlables, pour prévenir toute invasion dans la bergerie, pour conserver mon troupeau intact. La cause de mes combats me suffit pour la couronne. Que ne souffrirais-je pas pour vous? Vous êtes mes concitoyens, vous êtes mes pères, vous êtes mes frères, vous êtes mes enfants, vous êtes mes membres, vous êtes mon corps, vous êtes ma lumière, ou plutôt, vous êtes plus doux pour moi que cette lumière. Les rayons du soleil ont-ils pour moi une douceur égale à celle de votre amour? Ces rayons me servent pour la vie présente, mais votre amour me tresse une couronne pour l'avenir. Je dis ces paroles pour les oreilles de ceux qui m'écoutent. Qu'y a-t-il de plus prompt à écouter que vos oreilles? Il y a tant de jours que vous veillez, sans que rien ait pu votas abattre, ni la longueur du temps vous amollir, malgré les sujets de crainte, malgré les menaces ; devant tous les dangers, vous êtes devenus des hommes forts. Que dis-je? Vous êtes devenus ce que j'ai toujours désiré, vous avez méprisé les choses du siècle, vous avez dit adieu à la terre, vous vous êtes élancés jusqu'au ciel. Vous vous êtes affranchis des liens du corps, vous combattez pour atteindre à cette sagesse qui est la félicité ! Voilà mes couronnes, voilà ce qui m'encourage, voilà ma consolation, voilà l'onction polir moi, pour moi la vie, pour moi le fondement de l'immortalité. Voilà ce dont nous rendons grâces à Dieu, à qui appartient la gloire dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il.
|