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LETTRE CCXX. AU ROI LOUIS.

LETTRE CCXXI. AU MÊME PRINCE.

 

LETTRE CCXX. AU ROI LOUIS.

 

L’an 1142

 

Saint Bernard refuse au roi Louis d'appuyer auprès du Pape son injuste demande dans l'affaire du comte Raoul et l'engage en même temps à ne pas opprimer les innocents, s'il ne veut pas irriter le Roi du ciel contre lui.

 

1. Je n'ai jamais eu d'autre pensée que de concourir à la gloire de Votre Majesté et de travailler au bien de son royaume; elle me fait la grâce d'en convenir et sa propre conscience lui en rend témoignage; je lui proteste aussi que j'aurai toujours les mêmes sentiments. Mais je ne sais comment je puis satisfaire à ses sujets de plaintes et empêcher le pape d'excommunier de nouveau le comte Raoul malgré les suites funestes que Votre Majesté nie fait craindre de ce coup d'autorité qu'elle veut me faire conjurer par tous les moyens en mon pouvoir. Je ne puis le faire, et quand je le pourrais, je ne vois pas que raisonnablement je doive: le tenter; je suis peiné certainement des conséquences fâcheuses qui peuvent en résulter, mais on ne doit jamais faire le mal, même pour qu'il en arrive un bien. Il est plus sûr d'abandonner à Dieu les suites de cette affaire ; il est assez sage et assez puissant pour faire et maintenir le bien qu'il a résolu de faire et pour empêcher le mal que les méchants méditent, ou du moins pour le faire retomber sur ceux qui en sont les auteurs.

2. Ce qui m'afflige le plus, c'est que Votre Altesse me marque dans sa lettre que cette affaire va amener la rupture de la paix conclue entre elle et le comte Thibaut. Peut-elle ignorer qu'elle a fait une faute considérable en contraignant., les armes à la main, le comte Thibaut à s'engager par serment contre toutes les lois divines et humaines, non-seulement à prier le Pape de lever, sales raison et contre toute justice, l'excommunication dont Raoul et ses sujets avaient été frappés; mais encore à user de tous les moyens pour l'y déterminer? Pourquoi Votre Majesté veut-elle accumuler faute sur faute et pousser à bout la patience de Dieu? En quoi le comte Thibaut a-t-il mérité d'encourir une seconde fois votre disgrâce ? Ne s'est-il pas employé de toutes ses forces pour faire absoudre le comte Raoul contre les règles de toute justice ? Vous n'ignorez pas qu'il n'a reculé pour cela devant aucune difficulté. Or maintenant il ne fait et n'a fait aucune démarche pour le faire excommunier de nouveau, quelque juste que soit cette seconde excommunication, et il a tenu religieusement le serment que vous lui avez arraché par la crainte. Ne vous opposez donc point, Sire, aux ordres manifestes du Roi des rois, votre créateur ; ne poussez point l'audace jusqu'à l'attaquer si souvent sur son propre terrain et dans ses domaines; car ce serait vous en prendre à un rude et terrible adversaire que de déclarer la guerre à Celui qui tient la vie des princes dans sa main et fait trembler les rois de la terre eux-mêmes. Si je vous tiens un pareil langage, c'est que je redoute pour vous les plus grands malheurs. Ma crainte est une preuve de l'étendue de mon attachement à Votre Majesté.

 

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LETTRE CCXXI. AU MÊME PRINCE.

 

L’an 1142

 

Saint Bernard blâme sévèrement le roi de France de suivre de mauvais conseils et de repousser toutes les ouvertures clé paix qui lui sont laites, il lui déclare en même temps que si jusqu'à présent il n'a eu d'autre pensée que la gloire de son règne, désormais il n'aura plus qu'un souci, les intérêts de la vérité, et qu'un rôle, celui de témoin de ses méfaits.

 

1. Si Dieu m'est témoin de l'attachement que j'ai ressenti pour Votre Majesté dès l'instant que j'ai eu l'honneur de la connaître, et du zèle dont je n'ai cessé d'être animé pour sa gloire, vous savez aussi vous-même la peine et le mal que je me suis donnés l'année dernière, pour aviser avec vos plus fidèles serviteurs aux moyens de rétablir la paix dans votre royaume; mais je crains bien que vous n'ayez déjà rendu tous mes efforts inutiles, car il est évident pour tout le monde que vous avez renoncé avec une promptitude et une légèreté excessives, aux bonnes et sages résolutions que vous aviez prises. J'apprends même que je ne sais quel conseil inspiré par le démon vous pousse à renouveler des maux que vous vous repentiez d'avoir commis et à rouvrir des plaies à peine cicatrisées. Je ne crois pas qu'on puisse attribuer à d'autre qu'à Satan même le dessein clé mettre tout à feu et à sang (a),

 

a Voir à ce sujet ce qui est rapporté de l'incendie de Vitry et du grand nombre de personnes qui y périrent, dans les notes de la lettre 224. Vitry, depuis lors surnommé le Brûlé, est maintenant un village du Pertuis sur la Marine.

 

de forcer de nouveau les pauvres, les captifs et ceux que le fer moissonne à pousser vers le père et le vengeur de la veuve et de l'orphelin leurs cris plaintifs, leurs gémissements et leurs sanglots (Psalm. LXVII, 6)? Qui ne sait que l'antique ennemi du genre humain se complaît à de semblables victimes? N'est-il pas appelé le premier homicide (Joan., VIII, 44) ? » Que Votre Majesté ne cherche point d'excuse en faisant peser sur le comte Thibaut la cause de tous ces malheurs (Psalm. CXL, 4), car ce prince déclare qu'il veut la paix, il la demande avec toutes sortes d'instances et aux conditions dont vous étiez précédemment tombés d'accord ensemble; il est prêt à vous donner satisfaction entière pour toutes les contraventions que les négociateurs du premier arrangement intervenu entre vous et lui jugeront avoir été faites au traité. or vous savez qu'ils sont entièrement dévoués à votre personne, et il s'engage à vous faire toutes les réparations convenables dans le cas où il l'aurait violé en quelque point, ce qu'il ne croit pas.

2. Cependant, au lieu de prêter l'oreille à ces propositions de paix d'observer les conventions et d'acquiescer à de sages conseils, Votre Majesté se forme, par un secret jugement de Dieu, de fausses idées de toutes choses; elle regarde comme indigne d'elle ce qui l'honore, et se fait un point d'honneur de ce qui la couvre d'infamie; elle redoute ce qui n'est pas à craindre, et ne craint pas ce qu'elle devrait le plus redouter; de sorte qu'on peut lui faire le même reproche que Job au saint et glorieux roi David, d'aimer ceux qui lui veulent du mal et de n'avoir que de l'éloignement pour ceux qui lui veulent du bien (II Reg., 6). En effet, ne croyez pas que ceux qui poussent Votre Majesté à recommencer la guerre contre un prince qui n'a rien fait pour cela, se préoccupent de votre gloire; ils ne songent qu'à leur avantage ou plutôt ils ne servent que les intérêts du démon, car ces ennemis de votre couronne et ces perturbateurs manifestes de la paix de votre royaume, se sentant trop faibles pour exécuter leurs propres desseins, essaient de faire servir votre puissance royale à l'accomplissement de leurs projets. Dieu veuille qu'ils n'y réussissent pas!

3. Pour moi, quelque résolution que vous preniez contre le bien de votre royaume, le salut ale votre âme et l'intérêt de votre couronne, je ne puis, comme enfant de l'Eglise, me montrer insensible aux injustes traitements, aux mépris et aux humiliations dont on veut de nouveau abreuver ma mère; n'est-ce point assez des maux dont le souvenir fait encore couler nos larmes ? Faut-il que nous les voyions se renouveler maintenant et que l'avenir nous en fasse craindre de semblables? Je suis résolu à tenir bon et à combattre jusqu'à la fin, sinon l'épée à la main et le bouclier au bras, du moins avec les armes qui me conviennent, c'est-à-dire avec mes prières et nies larmes. Hélas! jusqu'à présent, j'en atteste le Ciel qui a reçu mes voeux, je n'ai cessé de prier pour la paix de votre royaume et pour le salut de votre âme, j'ai plaidé votre cause auprès du saint Siège par mes lettres et par mes agents, au point, je le confesse, au point, dis-je, que j'ai indisposé le Pape contre moi et presque blessé ma propre conscience. Mais à la vue des violences que vous ne cessez d'exercer, je commence à me repentir d'avoir toujours voulu n'imputer vos torts qu'à votre jeunesse; c'était folie de ma part, désormais je suis résolu à ne plus défendre, selon mon faible pouvoir, que le parti de la vérité.

4. Je ne dissimulerai donc plus que vous cherchez à renouer vos rapports et à renouveler votre alliance avec des excommuniés, que vous conspirez avec des voleurs et des brigands, comme on dit, pour répandre le sang humain, incendier la demeure des hommes, détruire celle de Dieu, et ruiner les pauvres, et que, selon le langage du Prophète: « Vous courez au pillage avec les voleurs et faites alliance avec les adultères (Psalm. XLIX, 18), » comme si vous n'étiez pas assez puissant vous-même pour faire le mal tout seul. Je proclamerai que, non content d'avoir imprudemment fait contre l'Eglise de Bourges, ce serment illicite qui a été la source de si grands et si nombreux malheurs, vous expiez maintenant votre péché en ne laissant pas à l'Eglise de Châlons-sur-Marne la liberté de s'élire un pasteur, et en permettant contre toutes les lois de la justice que votre frère a envoie en garnisaires, ses hommes d'armes, ses archers et ses arbalétriers, dans les maisons épiscopales, et que les biens des églises soient audacieusement pillés et employés à des fins profanes et criminelles. Si vous continuez, j'ose vous prédire que votre conduite ne demeurera pas longtemps impunie; aussi je vous exhorte, Sire, avec le zèle d'un sujet fidèle et dévoué, à sortir au plus vite de la voie mauvaise où vous vous êtes engagé, à vous convertir et à vous humilier à l'exemple du roi de Ninive, afin de détourner de vous le bras de Dieu déjà levé pour vous frapper. Je crains pour vous les plus grands malheurs. Voilà pourquoi je vous fais entendre un langage aussi sévère; mais souvenez-vous de ces paroles du Sage: « Les coups d'un ami valent mieux que les baisers d'un ennemi (Prov., XXVII, 6). »

 

a C'était Robert, dont il est parlé dans la lettre deux cent vingt-quatrième, n. 2, et dans la trois cent quatrième. Les Pères du chapitre de Cîteaux se plaignent au roi Louis le Jeune, dans la deux cent quatre-vingt-treizième lettre de Duchesne, que le comte Robert, son frère, « mange de la viande dans leurs granges » contre la règle de leur ordre. Pour ce qui concerne l’église de Châlon-sur-Marne, on peut consulter la lettre deux cent vingt-quatrième.

 

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