SERMON VII
Précédente ] Accueil ] Remonter ] Suivante ]

Accueil
Remonter
SERMON I
SERMON II
SERMON III
SERMON IV
SERMON V
SERMON VI
SERMON VII
SERMON VIII
SERMON IX
SERMON X
SERMON XI
SERMON XII
SERMON XIII
SERMON XIV
SERMON XV
SERMON XVI
SERMON XVII
SERMON XVIII
SERMON XIX
SERMON XX
SERMON XXI
SERMON XXII
SERMON XXIII
SERMON XXIV
SERMON XXV
SERMON XXVI
SERMON XXVII
SERMON XXVIII
SERMON XXIX
SERMON XXX
SERMON XXXI
SERMON XXXII
SERMON XXXIII
SERMON XXXIV
SERMON XXXV
SERMON XXXVI
SERMON XXXVII
SERMON XXXVIII
SERMON XXXIX
SERMON XL
SERMON XLI
SERMON XLII
SERMON XLIII
SERMON XLIV
SERMONS XLV-CXXV

SEPTIÈME SERMON (a). Des trois sortes de gloires, à propos de ces paroles de l'Apôtre : « Que celui qui se glorifie, le fasse dans le Seigneur (I Cor. I, 31). »

 

1. « Que celui qui se glorifie, le fasse dans le Seigneur (Cor. 1, 31).» L'Apôtre, savait que la gloire appartient en propre au Créateur, nullement à la créature, selon ces paroles : « Je ne donnerai point ma gloire à un autre (Isa. XLII, 8), » et ces autres : « Gloire à Dieu au plus haut des cieux, et paix sur la terre aux hommes de bonne volonté (Luc. II, 14). » et celles-ci encore . « Non, Seigneur, non, ne nous donnez point la gloire, mais attribuez-la à votre nom (Psal. CXIII, 8). » L'Apôtre vit que la créature raisonnable désire tellement la gloire, que c'est à grand'peine, si tant est quelle y réussisse, qu'elle peut maîtriser ce désir, car elle est faite à l'image de son créateur; mais avec la sagesse qu'il a reçue de Dieu, il a trouvé un expédient, on ne peut plus salutaire, il se dit : puisqu'on ne saurait persuader à l'homme de ne point se glorifier, que du moins celui qui se glorifie ne le fasse que dans le Seigneur. Or, voyez combien la sagesse de Paul l'emporte sur celle des sages du inonde qui n'est en effet que folie aux yeux de Dieu. En effet, les philosophes ayant remarqué que bien des hommes s'enivraient des louanges de leurs semblables, et en réclamaient les uns des autres, les principaux d'entre eux furent assez sages pour comprendre que cette sorte de gloire est vaine et méprisable. Priais considérant ensuite et recherchant avec soin quel genre de gloire était digne de l'ambition du sage, ils commencèrent alors à s'égarer dans leurs pensées, en se figurant que chacun pouvait se contenter de sa propre gloire, comme si l'âme qui ne tient pas l'être d'elle-même pouvait en tenir le bonheur. Aussi, comme dans leurs désirs de la gloire d'autrui, ils s'adonnaient avec toute la sollicitude possible à faire des choses que le public admirât, de même, les vrais sages pensèrent qu'on ne devait rechercher que le genre de gloire que la conscience, notre juge intérieur, peut approuver.

2. Telle est en somme toute la philosophie des sages de ce monde, elle est bien peu de chose, quoique bien près de la vérité. Aussi, l'Apôtre, s'élevant par une sublime contemplation, au dessus de l'une et l'autre gloire, s'écrie : « Que celui qui se glorifie, le fasse,» non dans un autre, non pas même en soi, mais « dans le Seigneur. » Puis, s'en prenant avec une sollicitude plus grande à celle qui semblait plus être plus

 

a Ce sermon fait aussi suite à ceux de Nicolas de Clairvaux; mais il rappelle très bien la manière de saint Bernard, et d'ailleurs, il se trouve au nombre ses sermons de notre saint, de même que le précédent, dam tous les manuscrits et dans toutes les éditions des oeuvres de notre saint Docteur.

 

voisine de la vérité, il la condamne par le jugement certain de la vérité elle-même, en disant : « Ce n'est pas celui qui se rend témoignage à lui-même qui est vraiment estimable; mais celui à qui Dieu même rend témoignage (II Cor. X, 18). » Au fait, pourquoi donc me mettre si fort en peine du jugement des autres, ou même de mon propre jugement sur moi, quand ce n'est point le blâme ni la louange venant de ce côté qui peuvent faire que je sois approuvé ou désapprouvé! Certainement, mes frères, si j'avais à comparaître devant votre tribunal, j'aurais raison de me glorifier de vos louanges, de même, si je' ne devais subir que mon propre examen et être jugé en conséquence , j'aurais droit de m e montrer satisfait de mon propre témoignage, et d'être heureux de mes propres louanges. Mais comme ce n'est ni à votre tribunal ni au mien que je dois comparaître, quelle déraison, disons plus, quelle folie de me glorifier de votre témoignage ou dit mien ? Surtout quand on pense que mon juge est tel que, pour lui, tout est à nu et à découvert, et qu'il n'a pas besoin que personne lui rende témoignage sur qui que ce soit. Aussi, est-ce avec raison que l'Apôtre, en réprouvant la gloire vaine et trompeuse, s'écrie : « Pour moi, je me mets fort peu en peine d'être jugé par vous, ou par quelque homme que ce soit ; je n'ose pas me juger moi-même. Car, encore que ma conscience ne me reproche rien, je ne suis pas justifié pour cela. C'est le Seigneur qui me juge (Cor. IV, 34). » On voit dans ce langage, si on pèse avec soin toutes les paroles de l'Apôtre, que s'il fait fort peu de cas du jugement des hommes, il ne veut point s'en tenir au sien propre, bien qu'il en fasse un peu plus de cas que de l'autre. En effet, il n'y a personne qui sache ce   qui est en l'homme, sinon l'esprit de l'homme qui est en lui (Cor. II, 11), en sorte qu'en comparaison du témoignage qu'il reçoit de l'intérieur, tout témoignage, venant du dehors, n'est absolument plus rien. En effet, que m'importait à moi les louanges de ceux qui ne me connaissent point ? L'esprit de l'homme, qui seul e:t à même de connaître tout ce qui est en lui, pourrait sans doute lui rendre un témoignage suffisant; mais le coeur de l'homme est mauvais, il est insondable même pour lui (Jer. XVII, 9), au point qu'il ignore en grande partie le présent, et ne peut en aucune façon savoir quel sera l'avenir qui l'attend ; toutefois comme notre conscience voit son état présent, si elle ne nous reproche rien, nous pouvons, sinon nous glorifier, « du moins avoir confiance en lui (Joan. II, 21), » comme dit saint Jean. Mais nous ne pourrons nous glorifier pleinement et avec une entière sécurité que le jour où nous aurons mérité d'entendre une sentence, favorable de celui qui est la vérité même, et à qui rien n'est caché.

3. Mais en attendant l'Apôtre nous dit : « Ne jugez pas avant le temps où le Seigneur viendra, et fera pénétrer la lumière au sein des plus épaisses ténèbres (I Cor. IV, 5). » La gloire qu'on recevra alors de Dieu sera une gloire parfaite et complètement sûre. Dès maintenant, si nous ne pouvons nous glorifier pleinement, sans aucune crainte, sans nul souci, nous nous glorifions cependant dans une certaine mesure, dans le Seigneur, quand le Saint-Esprit rend témoignage à notre propre esprit, que nous sommes les enfants de Dieu. Nous pouvons, en effet, nous glorifier d'avoir un tel Père, et d'être un objet de sollicitude pour une aussi ineffable majesté. C'est ce qui faisait dire au Prophète : « Qu'est-ce que l'homme, Seigneur, pour mériter que vous le regardiez comme quelque chose de grand, et que vous incliniez votre coeur vers lui (Job. VII, 7) ? » Que celui donc qui se glorifie, ne se glorifie point dans ses propres intérêts. Qu'avons-nous que nous ne l'ayons reçu ? Que celui donc qui a reçu quelque chose, se glorifie en cela, non pas comme s'il était grand par lui-même; mais parce que Dieu l'a grandi, c'est là ce qu’il faut entendre pour ne point se glorifier en ce qu'on a reçu, comme si on ne l'avait point reçu. L'Apôtre ne dit pas : Si vous l'avez reçu, pourquoi vous en glorifiez-vous ? Mais « pourquoi vous en glorifiez-vous, comme si vous ne l’aviez point reçu. » il ne veut donc point nous défendre de mous glorifier; mais seulement nous apprendre à le faire.

4. Mais quelle est sa pensé, quand il dit : « Ce n'est pas celui qui se rend témoignage à soi-même qui est vraiment estimable , mais bien celui à qui Dieu rend témoignage (Cor. X, 17) ? » A qui Dieu rend-il témoignage en ce monde ? Comment la Vérité même pourra-t-elle rendre témoignage à celui en qui il se trouve encore quelque chose de répréhensible? D'ailleurs, ne dit-elle pas : « Je reprends et châtie ceux que j'aime (Apoc. III, 19) ? » Est-ce là toute sa manière de rendre témoignage à l'homme? Oui, à mon avis, le témoignage qu'elle nous rend est là tout entier. Eu effet, où trouver un témoignage meilleur et plus efficace que la preuve que Dieu nous aime ? Or, la preuve d'amour la plus croyable et la plus certaine que nous puissions recevoir de lui en cette vie, est celle que le Prophète désire pour lui, quand il dit . « Le juste me reprendra avec miséricorde, et me corrigera avec charité (Psal. CXL, 5). » En effet, la réprimande par laquelle l'esprit de vérité nous reproche ce qui nous manque, met en fuite l'orgueil, la négligence et l'ingratitude. L'état religieux, presque tout entier, est travaillé par ce triple mal, parce que beaucoup ne prêtent point une oreille du coeur assez attentive à ce que leur dit, au dedans d'eux-mêmes, celui qui ne flatte personne, je veux parler de l'esprit de vérité. Cela vient, je crois, de ce que la plupart, arides de leur propre gloire , ne peuvent se tenir en repos pour aucun motif , parce qu'ils ne trouvent absolument rien en eux qui les autorise à se glorifier. Or, notre gloire n'est sûre et parfaite, que lorsque nous craignons tout ce que nous faisons, comme le saint homme Job dit qu'il craignait lui-même (Job. IX, 28), et que nous regardons avec le Prophète Isaïe toutes nos justices comme les litiges souillés d'une femme à son époque (Isa. LXIV, 6). Néanmoins, nous nous confions, et nous nous glorifions dans le Seigneur , dont la miséricorde est si grande à notre égard, qu'il nous garde dis fautes les plus graves, qui vont jusqu'à la mort, et qui daigne nous remettre sous les yeux, et nous pardonner avec tant de bonté les fautes échappées à notre faiblesse, et les souillures de notre vie, après nous les avoir fait connaître, afin que nous étant enracinés plus profondément dans l'humilité , la sollicitude est l'action de grâce, nous nous glorifiions , non plus en nous, mais dans le Seigneur.

 

Haut du document

 

 

Précédente Accueil Remonter Suivante