NATIVITÉ DE MARIE I
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TOUSSAINT
CANTIQUE

PREMIER SERMON POUR LA NATIVITÉ DE LA BIENHEUREUSE MARIE.

 

1. «Semblable à la vigne, j'ai donné des fruits d'une odeur suave (Eccle. XXIV, 23). » Nous célébrons la Nativité de la très-heureuse Vierge Mère de Dieu, de qui a voulu naître celui qui est le salut de tous, pour donner le pouvoir de renaître à la vie, à ceux qui étaient nés pour la mort. Aujourd'hui est née une nouvelle mère, qui a détruit la malédiction de la première, afin que ceux qui étaient nés sous le coup de la malédiction éternelle possédassent par elle l'héritage de la bénédiction. Mère tout-à-fait nouvelle, qui a donné une vie nouvelle à ses enfants vieillis et qui a guéri en eux le vice d'une vieillesse innée et surajoutée. Oui, c'est une mère nouvelle, car elle enfante par un prodige si nouveau, qu'elle est mère et vierge et qu'elle met au monde celui qui a tout créé, et sa mère au milieu de tout le reste. Admirable est le prodige de cette nouveauté féconde, mais plus étonnant encore, le miracle d'avoir mis au jour un tel enfant. Nul ne regardera comme incroyable qu'elle ait enfanté en restant Vierge s'il reconnaît que l'enfant, qui est né d'elle , est Dieu. Il ne cause, en effet, aucun dommage à l'intégrité de sa mère, celui qui a coutume de rétablir ce qui a été altéré, la vérité de la chair qu'il a prise ne cause aucun préjudice à la puissance du Créateur, et ne l'a point empêché de garder pour lui, ce qu'il a donné à plusieurs créatures. Vous trouverez, en effet, beaucoup de créatures engendrées sans corruption de ce qui les a produites, et rendre témoignage à leur auteur, comme par une sorte de voix, au sujet de leur production sans souillure.

2. Mais que la mère nous parle elle-même, elle qui est instruite de ce mystère, qu'elle nous dise ce qu'elle a produit et comment elle l'a produit. Qu'elle nous parle en empruntant les oracles des antiques prophètes, non point en recourant à des arguments nouveaux, parce que, comme s'exprime l'apôtre saint Pierre, «la parole prophétique » est plus « assurée que les miracles (II Petr. I, 19). » Qu'y a-t-il de moins exposé aux attaques, de plus à l'abri du soupçon de fausseté, que le témoignage divinement rendu à des choses qui n'existent pas encore ? Longtemps donc avant que Marie naquit, l'esprit qui devait résider en elle, empruntait sa voix, et défendait son oeuvre, c'est-à-dire tant la divinité du Fils que l'intégrité de la mère, contre les blasphèmes des impies, et c'est en son nom, si maintenant nous suivons l'interprétation commune, qu'il prononçait les paroles que vous avez entendues tout à l'heure : « Semblable à une vigne, j'ai donné des fruits d'une odeur suave (Eccle. XXIV, 23). » Le contexte rapporte  ce passage à la sagesse, comme vous le savez, vous qui connaissez les règles de la lecture des livres sacrés. Néanmoins cela n'empêche point notre explication, qui s'applique pareillement, ainsi que bien d'autres textes, à la personne de la Vierge Mère. Vous n'ignorez pas ce que d'autres témoignages, qui se rapportent plus manifestement et plus particulièrement à ce sujet, vous apprennent abondamment ; mais il ne faut point frustrer votre attente des détails que fournit le passage relatif à cette fête.

3. Que Marie réponde donc tant pour elle que pour son Fils à ces blasphémateurs , qu'elle extermine , par une seule parole , toutes les hérésies, et qu'elle dise : « Comme la vigne, j'ai donné un fruit d'une odeur suave. » C'est comme si elle disait ouvertement : mon enfantement n'a pas d'analogues parmi les femmes, mais il trouve des similitudes dans les autres créatures. Vous demandez comment la virginité a engendré le Sauveur? Comme la vigne donne son odeur. Si vous trouvez la fleur corrompue pour avoir livré son parfum, croyez que la pureté a été altérée quand elle a mis au jour le Sauveur. Que pouvez-vous attaquer dans l'exactitude de cette comparaison ? Qu'est-ce que le Fils de la virginité, sinon la fleur d'un corps sans souillure ? Qu'est-ce que le Fils de la virginité, sinon une suave odeur ? Prenez garde cependant à ne point mourir de cette agréable odeur. Car elle est une odeur de vie pour la vie, à ceux qui se sauvent, et une odeur de mort pour la mort à l'égard des autres, c'est-à-dire à l'égard de ceux qui périssent, comme l'est la fleur de la vigne pour les animaux venimeux. L'esprit du vieux patriarche était ranimé par la suavité de cette odeur, lorsqu'en touchant son fils il sentait le parfum du Christ, et exprimait en ces termes les retours qu'il éprouvait au souvenir de l'abondance de cette suavité : « Voici que l'odeur de mon fils est comme l'odeur d'un champ rempli que le Seigneur a béni (Gen. XXVII, 27).» Dieu le Père a respiré l'ambroisie de cette odeur, et, réjoui, il a fait grâce au genre humain, lorsque le Fils s'offrait lui-même, oblation et hostie à Dieu, en odeur de suavité. Nous sommes attirés par cette senteur agréable, lorsqu'en nous convertissant nous courons vers lui ; ce parfum entraîne les jeunes filles lorsque par la dévotion elles volent sur ses pas. Bien que l'odeur de la prédication soit autre et plus épaisse que celle qui s'exhale de ses vêtements, de ses essences ou peut-être de son corps. Elle n'est point autre que la vertu qui sort de lui, vertu qui excite, les paresseux, renouvelle la ferveur de l'amour, afin de le faire bondir pour avancer rapidement dans la voie des commandements.

4. Que Marie se glorifie donc d'avoir donné un fruit si odoriférant, et qu'elle dise : « Semblable à la vigne, j'ai produit un fruit à l'odeur suave. » C'est bien dit « comme la vigne : » car son bien-aimé est pour elle une grappe de vigne de Chypre dont le pressoir de la passion a fait sortir la liqueur rouge de ce sang généreux dont le brillant calice enivre les âmes; et de plus, tous les jours, la sainte dévotion s'en exprime un vin qui réjouit le coeur de l'homme et l'enivre de la volupté de la joie et de l'amour. Cependant il n'enivre l'âme que lorsque sa suavité se fait sentir : l'allégresse, causée par la vision, ne la réjouit que lorsque la piété de la doctrine l'a pénétrée, parce que si nous ne croyons pas, nous ne comprendrons jamais (Isa. VII, 9), nous ne goûterons point combien le Seigneur est doux. En effet, c'est la foi qui perçoit les odeurs, c'est l'expérience qui goûte et qui jouit. Voilà pourquoi Marie, décrivant son Jésus par ses vertus et ses effets, l'appelle d'abord une suave odeur; c'est que Jésus commencé à habiter en nous, lorsque l'odeur de ses saints parfums nous attire à lui. Mais quel est le fruit d'où nous vient cette odeur, le terme vers lequel elle nous appelle! Elle nous le dit lorsqu'elle ajoute : « Et mes fruits sont des fruits d'honneur et de sainteté (Eccl. XXIV, 23). » Oui, Jésus est une odeur suave qui invite, une vertu qui sanctifie, un honneur qui glorifie. Odeur suave qui nous attire comme dans le chemin : vertu par laquelle nous sommes conduits, honneur auquel nous parvenons à la fin. Ce mot d'honnêteté est beau, c'est comme si on disait : état d'honneur, cet honneur de la dignité et de la gloire souveraine du ciel ne pourrait trouver place plus tard en nous, si l'honnêteté de la vie et des moeurs ne lui préparait maintenant un siège. Alors on ne verra point, comme aujourd'hui on l'aperçoit çà et là, un homme honoré qui suit sans honnêteté , mais aussi nulle honnêteté ne sera sans être honorée. Jésus est donc premièrement une odeur suave pour ceux qu'il appelle; ensuite il est honnêteté pour ceux qu'il justifie ; enfin il est honneur pour ceux qu'il glorifie. « Car ceux qu'il a prédestinés, il les a appelés, et ceux qu'il a appelés, il les a justifiés, et ceux qu'il a justifiés, il les a glorifiés (Rom. VIII, 29). »

5. Tel est donc mon bien-aimé, s'écrie Marie, tel est mon Fils, ô filles de Jérusalem. Voilà le fruit béni de mes entrailles, c'est lui que mes fleurs ont fait fructifier. Elle ne dit pas ma fleur, mais mes fleurs; parce que lorsqu'une vierge est sainte , la fleur de la virginité revêt plu sieurs formes dans son âme. Cette grâce spéciale fleurit cependant en beaucoup de manières dans Marie plus que dans les autres, dans Marie qui, toute belle au dedans et au dehors, était revêtue tout entière de l'éclat printanier d'une sorte de floraison et de beauté virginale. En vous aussi, si la chasteté est parfaite, non-seulement votre chair refleurira, mais encore une sorte de sanctification divine s'épanouira sur vous tout entier. Votre regard ne sera ni impur ni égaré, mais fleuri par son expression de modestie; vos paroles ne seront ni lascives ni ineptes, mais agréables par leur ton de réserve, ou bien assaisonnées de sagesse. Vos oreilles ne seront pas démangées d'entendre des choses nouvelles ou honteuses, ni votre palais tourmenté de l'envie de choses douces. Votre démarche ne sera pas désordonnée, mais modeste : votre extérieur ne sera pas, je ne dis pas celui d'une femme impudique, ne sera pas superstitieux, mais religieux ; tout l'ensemble de votre être sera florissant de la grâce de la sainteté, en sorte que vous pourrez dire avec raison à l'Époux, lorsque vous l'inviterez à entrer dans le secret de votre coeur : « Notre lit est couvert de fleurs (Cant. X, 15). » Bien plus, vous serez vous-même en votre entier, comme une très-belle fleur, comme une de ces fleurs dont l'Épouse désire qu'on fortifie ou qu'on soulage la langueur de son amour, lorsqu'elle dit : «Fortifiez-moi de fleurs, entourez-moi de fruits , parce que  je languis d'amour (Cant. II, 5). » Un. juste semblable, quand même sa racine aurait vieilli dans la terre, et son tronc serait mort dans la poussière, fleurira comme le lis, à l'odeur de l'eau vive, dans la résurrection, c'est-à-dire, quand les justes refleuriront, et il fleurira à jamais devant le Seigneur, cette fleur; issue d'une fleur, née de la vierge, fils de la vierge, époux et couronne des vierges, fleur , dis-je, qui couronnera non-seulement l'intégrité des vierges. mais encore la chasteté de ceux qui sont continents, à qui soit la gloire dans tous les siècles des siècles. Amen.

 

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