SERMON CCLXVIII
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rte de l'église 38 - CH-1897 Le Bouveret (VS)

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SERMON CCLXVIII. POUR LE JOUR DE LA PENTECOTE. II. UNITÉ DE L'ÉGLISE.

 

ANALYSE. — En accordant aux premiers disciples le don de parler toutes les langues, le Saint-Esprit annonçait que 1'Eglise, sans rien perdre de son unité, allait se répandre dans tout l'univers. Aussi l'Esprit-Saint, qui en est la vie, maintient-il en elle  cette unité, comme notre âme maintient l'union entre tous les membres de notre corps. Cette même unité n'était-elle pas figurée dans le moment de la création, quand, au lieu de former d'abord un couple humain comme il avait formé deux à deux les autres êtres animés, Dieu forma d'abord Adam seul pour former de lui la femme ? Il n'est donc pas étonnant que Jésus-Christ ait insisté comme il l'a fait sur l'unité de l’Eglise, surtout après sa résurrection, au moment de son ascension et en envoyant le Saint-Esprit.

 

1. La descente de l'Esprit-Saint a fait pour nous de ce jour un jour solennel; c'est le cinquantième jour depuis la résurrection. Si cependant vous multipliez par sept les sept semaines qui se sont écoulées depuis, vous ne trouverez que quarante-neuf jours; on en ajoute un pour montrer le rôle que doit jouer l’unité.

Mais en descendant, qu'a produit le Saint-Esprit lui-même? Comment a-t-il prouvé, manifesté sa présence? Il a donné aux disciples de parler tous toutes les langues. Or, ils étaient dans un même local au nombre de cent vingt : nombre sacré et mystérieux, mais décuplé, des Apôtres du Christ. Est-ce que dire que chacun de ceux qui reçurent l’Esprit-Saint, parlait une langue étrangère différente et que tous réunis parlèrent ainsi les langues de tous les peuples? Non; mais chacun d'eux, chacun d'eux en particulier parlait toutes les langues. Le même homme le faisait comprendre de tous les peuples; et cette unité vivante s'adressant à tous représentait l'unité de l'Eglise au milieu de toutes les nations. Ici donc voilà encore une recommandation en faveur de l'unité de 1'Eglise catholique répandue par tout l'univers.

2. Ainsi avoir le Saint-Esprit, c'est faire partie de cette Eglise qui s'exprime dans toutes les langues; et n'en pas faire partie, c'est n'avoir pas le Saint.Esprit. Si effectivement l'Esprit-Saint a daigné se révéler par, ce, don des langues, c'est pour nous apprendre qu'on est son temple quand on vit en union avec cette Eglise qui les parle toutes. « Soyez un seul corps », dit l'apôtre saint Paul, « un seul corps et un seul esprit (1) ».

Considérez nos propres membres ; il y en a plusieurs dans notre corps, et tous reçoivent la vie d'un même esprit. Regardez, avec cet esprit humain qui fait que je suis un homme, je les mets tous au repos ; je leur commande

 

1. Eph. IV, 4.

 

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ensuite de se mouvoir, je dis à mes yeux de voir, à mes oreilles d'entendre, à ma langue de parler, à mes mains de travailler, à mes pieds de marcher. Les fonctions sont propres à chaque organe; mais un même esprit les maintient tous ; et si nombreux que soient les ordres donnés et les actes accomplis, il n'y a qu'un maître pour tout commander. Or, ce qu'est à nos membres notre esprit ou notre âme . l'Esprit-Saint l'est aux membres du Christ, à son corps où à son Eglise. Aussi l'Apôtre a-t-il eu soin en nommant ce corps, de nous faire entendre que ce n'est pas un corps mort. « Soyez un seul corps », dit-il. Mais, dites-nous, ô Apôtre, si ce corps est vivant? — Il l'est. — Pourquoi? — Parce qu'il y a en lui un esprit : « Et un seul esprit ».

Par conséquent, mes frères, en jetant les yeux sur notre corps, plaignez les membres retranchés de l'Eglise. Nos membres, tant que nous avons la vie et la santé, accomplissent toutes leurs fonctions. Un d'entre eux souffre-t-il quelque part? Tous les autres souffrent avec lui. Mais s'il souffre, il ne saurait, expirer tant qu'il reste uni au : corps. Et qu'est-ce qu'expirer, sinon rendre l'esprit D'un autre côté si on retranché ce membre du corps, entraîne-t-il avec lui l'esprit qui l'anime? On reconnaît sans doute encore la nature de ces organes; on voit si c'est un doigt, une main, un bras, une oreille; séparé du corps, il conserve sa forme, mais non sa vie. Ainsi en est-il de l'homme séparé de l'Eglise. Tu cherches en lui les sacrements, ils sont; le baptême, l'y voilà; le Symbole, il y est encore, C'est la forme; mais si l'Esprit ne t'anime intérieurement; c'est en vain qu'extérieurement tu te glorifies de ta forme.

3. Mes très-chers frères, Dieu insiste singulièrement sur l'unité. Voici un trait qui doit vous frapper. Quand, à l'origine du monde, Dieu forma toutes choses, quand il créa les astres dans le ciel, et sur la terre les plantes et les arbres, il dit: « Que là terre produise» ; et à l'instant furent produits les arbres et tout ce qui verdit; il dit aussi : « Que la terre produise toute âme vivante de tous les troupeaux et de tous les bestiaux» ; ce qui s'accomplit. Dieu a-t-il fait sortir d'un même oiseau tous les autres oiseaux; d'un poisson tous les poissons, d'un cheval tous les chevaux, et d'une bête toutes les bêtes? La terre n'a-t-elle pas produit à la fois plusieurs animaux de même espèce, et ne s'est-elle pas couverte au loin d'une infinité de mêmes plantés? Mais quand il s'est agi de former le genre humain, Dieu n'a créé qu'un homme pour en être la tige; il n'a pas même voulu créer séparément l'homme et la femme, il n'a créé que l'homme pour en tirer la femme (1). Pourquoi cela? Pourquoi le genre humait commence-t-il avec un seul homme, sinon pour inspirer au genre humain l'amour de l'unité? Aussi le Christ Notre-Seigneur est-il né d'une femme seulement; la Vierge est le symbole de l'unité, et, en conservant comme sa virginité, l'unité demeure incorruptible.

4. D'ailleurs il prêche lui-même à ses Apôtres l'unité de l'Eglise. Il se présente à eux, et eux croient voir un fantôme, ils ont peur, ils se raffermissent et lui leur dit: «Pourquoi vous troublez-vous et pourquoi ces pensées montent-elles dans votre coeur? Voyez mes mains, palpez et reconnaissez, car un esprit n'a ni os ni chair comme vous m'en voyez ». Comme ils étaient troublés encore, mais de joie, il prend de la nourriture, non qu'il en ait besoin, mais parce qu'il en a le pouvoir, il en prend sous leurs yeux; et, en défendant ainsi contre les impies la réalité de son corps, il soutient l'unité de son Eglise. Que dit-il en effet? « N'avais-je pas raison de vous déclarer, quand j'étais encore avec vous, qu'il fallait que s'accomplît tout ce qui est écrit de moi dans la loi de Moïse, dans les prophètes et dans les psaumes ? Alors il leur ouvrit l'intelligence», c'est l'Evangéliste qui parle, « pour qu'ils comprissent les Ecritures, puis il leur dit : Ainsi est-il écrit et ainsi fallait-il que le Christ souffrît et ressuscitât d'entre les morts le troisième jour ».

Voilà bien notre Chef ; voilà le Chef, où sont les membres ? Voilà l'Epoux, où est l'épouse ? Lis l'acte matrimonial. Ecoute l'Epoux. Tu veux connaître l'épouse ? Ecoute-le ; personne ne la lui enlève, personne ne la lui remplace par une étrangère. Ou cherches-tu à connaître le Christ ? Est-ce dans les fables écrites par les hommes du dans la vérité des Evangiles ! L'Epoux a souffert, il est ressuscité le troisième jour, il s'est montré à ses disciples. Le voilà, Mais elle? Interrogeons-le. « Ainsi fallait-il que le Christ souffrît et ressuscitât d'entre les

 

1. Gen. I, 11.

 

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morts le troisième jour». C'est chose faite, on le voit. Parlez encore, Seigneur; parlez, afin que nous ne nous égarions pas. — «Et qu'on prêchât en son nom la pénitence et la rémission des péchés au milieu de tous les peuples, à commencer par Jérusalem (1) ». Or la prédication a commencé à Jérusalem et elle est arrivée jusqu'à nous ; la vérité est là et ici en même temps ; pour arriver jusqu'à os contrées elle n'a pas dû quitter celles-là ;  elle s'est étendue sans émigrer. Voilà comment le Sauveur prêchait l'unité, aussitôt après sa résurrection.

Mais il vécut ensuite quarante jours avec ses disciples ; puis avant de monter au ciel, il leur recommanda de nouveau son Eglise. C'est nu Epoux qui avant de partir recommande à ses amis son épouse ; non pour qu'elle s'attache à aucun d'eux, non pour qu'elle en aime aucun comme son Epoux, mais pour qu'elle l’aime, lui, à titre d'Époux, et eux à titre d'amis de l'Époux. C'est d'ailleurs ce que veulent avec ardeur des amis véritables, ils ne souffrent pacque l'épouse se souille d'impurs amours ; ils en ont horreur, quand eux-mêmes en sont l’objet. Contemplez ici un ami zélé de l'Époux divin. Il voyait l'épouse se prostituer en quelque sorte à des amis de l'Époux: « J'apprends, dit-il, qu'il y a des scissions parmi vous, et je le crois en partie (2). — J'ai été averti, mes frères, par ceux qui sont de la maison de Chloé, qu'il y a des contestations entre

 

1. Luc, XXIV, 36-47. — 2. I Cor. XI, 18.

 

vous, et que chacun de vous dit : Moi je suis à Paul, et moi à Apollo, et moi à Céphas, et moi au Christ. Le Christ est-il divisé ? Est-ce Paul qui a été crucifié pour vous? ou bien est-ce au nom de Paul que vous avez reçu le baptême (1)? » Oh ! le vrai ami ! Il repousse loin de lui l'amour de l'épouse d'autrui. Afin de pouvoir régner avec l'Epoux, il ne veut pas être aimé à sa place. Le Christ ainsi leur a recommandé, son Eglise, et, quand il est monté au ciel, voici ce qu'il leur a dit. Eux cherchaient à connaître .la fin du monde : « Apprenez-nous, demandaient-ils, quand arriveront ces choses, et quelle sera l'époque de votre avènement (2). — Il ne vous appartient pas, répondit-il, de savoir les temps que le Père a réservés pour sa puissance». Ecoute, ô disciple, ce que veut te faire connaître le Maître. « Mais vous recevrez, poursuit-il, la vertu de l'Esprit-Saint, qui descendra en vous ».

C'est ce qui est arrivé. Le quarantième jour il est monté au ciel, et l'Esprit-Saint, descendant aujourd'hui même; remplit tous ceux qu'il trouve réunis et leur fait parler toutes les langues, pour prêcher à tous l'amour de l'unité.

Cette unité nous est donc tout à la fois recommandée par le Seigneur ressuscité et par le Christ montant au ciel, puis recommandée de nouveau par l'Esprit-Saint descendant aujourd'hui.

 

1. I Cor. I, 11-13. — 2. Matt. XXIV, 1

 

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