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SERMON CCLXXI. POUR LE JOUR DE LA PENTECOTE. V. UNITÉ DE L'ÉGLISE.
ANALYSE. En accordant aux premiers disciples le don des langues, le Saint-Esprit a voulu rétablir dans l'humanité chrétienne l'unité rompue à la tour de Babel. Combien donc sont à plaindre ceux qui se séparent de l'Église de Jésus-Christ ! et combien sont heureux ceux qui lui demeurent inviolablement attachés !
Voici, mes frères, un beau jour ; c'est le jour où la lumière de la sainte Eglise brille aux yeux des fidèles, où la charité embrase leurs murs; c'est le jour solennel où après sa résurrection et après la gloire de son ascension, Jésus-Christ Notre-Seigneur a envoyé l'Esprit. Saint. « Si quelqu'un a soif, disait-il au rapport de lEvangile, qu'il vienne à moi et qu'il boive. Celui qui croit en moi, des fleuves d'eau vive couleront dans son sein». Or l'Evangéliste explique ainsi les paroles du Sauveur :« Il disait cela, observe-t-il, de l'Esprit que devaient recevoir ceux qui croîtraient en lui ; car l'Esprit n'avait pas encore été donné, parce que Jésus n'avait pas encore a été glorifié (1) ». Une fois donc que Jésus fut
1. Jean, 37-39.
glorifié par sa résurrection d'entre les morts et son ascension aux cieux, il devait donner le Saint-Esprit, lenvoyer après l'avoir promis. C'est ce qui eut lieu. Après avoir effectivement passé avec ses disciples les quarante jours qui suivirent sa résurrection, le Seigneur monta au ciel, et le cinquantième jour, le jour dont nous célébrons aujourd'hui la mémoire, il envoya. l'Esprit-Saint, comme l'atteste lEcriture. « Soudain, dit-elle, il se fit un bruit du ciel, comme celui d'un vent impétueux qui s'élève ; et il leur apparut comme plusieurs langues de feu, et ce feu se reposa sur chacun d'eux, et ils se mirent à parler toutes les langues, comme l'Esprit-Saint leur donnait de parler (1) ».
1. Act. II, 1-4.
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Ce souffle emportait la paille sous laquelle étaient ensevelis leurs coeurs ; ce feu consumait en eux l'antique concupiscence, et ces langues que parlaient tous ceux que remplissait l'Esprit-Saint, annonçaient que l'Eglise se répandrait partout où les Gentils parlent leurs langues diverses. De même donc qu'après le déluge l'impiété superbe voulut bâtir malgré le Seigneur une tour fort élevée et que le genre humain mérita alors que lui fût infligé le supplice de la division des langues, chaque nation parlant un idiome que ne comprenaient pas les- autres nations (1) ; ainsi l'humble piété des fidèles assujettit cette diversité de langage à l'unité de l'Eglise, la charité réunissant ce qu'avait séparé la discorde, et le genre humain s'attachant au Christ comme à la tête s'attachent les membres d'un même corps, pour être comme fondus dans cette unité sainte par le feu de la charité. A ce don de l'Esprit-Saint demeurent donc étrangers ceux qui ont en horreur la grâce de
1. Gen. XI, 1-9.
la paix, ceux qui ne restent pas en communion avec l'unité. S'ils sont aujourd'hui solennellement rassemblés, s'ils entendent ces leçons sacrées où il est question de la promesse et de l'envoi du Saint-Esprit; ils les entendent pour leur condamnation et non pour leur sanctification. Qu'importe de prêter l'oreille quand le coeur repousse, et de fêter le jour de Celui dont on rejette la lumière ? Pour vous, mes frères, pour vous, membres du corps du Christ, enfants de l'unité et fils .de la paix, célébrez ce jour avec joie, célébrez le sans inquiétude; car en vous s'accomplit ce que promettait l'Esprit-Saint quand il des. tendit alors. 'De même en effet que chacun de ceux qui recevaient en ce moment le Saint Esprit parlait toutes les langues : ainsi s'exprime aujourd'hui dans tous les idiomes l'unité de l'Eglise répandue parmi toutes les nations; et c'est dans son sein que vous possédez le Saint-Esprit, vous, qui n'êtes séparés par aucun schisme de cette Eglise du Christ qui parle toutes les langues.
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