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SERMON CCLXXXIX. NATIVITÉ DE SAINT JEAN-BAPTISTE. III. LE FLAMBEAU DU CHRIST.
ANALYSE. La naissance de saint Jean ayant été accompagnée de tant de merveilles, ce n'est pas sans raison qu'on la célèbre avec tant de solennité. Mais je voudrais pouvoir vous faire comprendre aujourd'hui ma pensée. Sans doute il n'y a point de comparaison à établir entre le Christ et saint Jean. Toutefois le Christ lui-même a enseigné que saint Jean est le plus grand de tous les hommes. Aux yeux même de ses contemporains il était si grand qu'on se demandait s'il n'était pas le Christ. Mais saint Jean répondit qu'il n'en était que la voix, qu'il n'était qu'un homme mortel et fragile, tandis que le Christ, comme Verbe de Dieu; subsiste éternellement. N'était-ce pas montrer les grandeurs du Messie, en être le flambeau, selon l'expression Messie lui-même ? Par lui-même et par ses actes il mérita encore ce titre de flambeau. En effet, s'il était le plus grand des hommes, quand on le voyait s'humilier si profondément aux pieds de Jésus, que devait-on penser de Jésus, sinon que Jésus était plus qu'un homme, qu'il était Dieu? Toutefois saint Jean n'est pas seul un flambeau ; les Apôtres sont aussi des flambeaux, des flambeaux élevés sur le chandelier, sur la croix, car ils nous prêchent le renoncement au monde et l'amour des souffrances. Montrons-nous dociles à leurs leçons.
1. Le motif qui réunit aujourd'hui cette grande assemblée est la nativité de saint Jean-Baptiste, dont l'Evangile vient de nous redire conception et la naissance merveilleuses. Quel éclatant prodige, mes frères ! La mère de tint Jean était tout à la fois stérile et fort avancée en âge ; son père aussi était un vieillard, et ni l'un ni l'autre ne pouvaient plus espérer de postérité; mais comme il n'y a rien d'impossible à Dieu, un fils leur fut promis. Le père ne crut pas, et pour avoir manqué de foi il perdit l'usage de la parole. Déjà en effet il (434) était écrit : « J'ai cru, c'est pourquoi j'ai parlé (1) » ; et lui n'ayant pas cru ne parla pas. Vers la même époque une Vierge conçut aussi : c'était un miracle de premier ordre et bien plus grand encore que celui-là. Si une femme stérile devient mère du héraut, une Vierge le devient du Juge. Jean naît d'un père et d'une mère ; le Christ, d'une mère seulement. Voudrions-nous comparer Jean au Christ ? Nullement, ce n'est pas sans raison toutefois qu'un si grand homme a précédé un personnage si grand. Ah ! si le Seigneur notre Dieu daignait bénir et rendre efficaces mes efforts, si je pouvais expliquer ce que je sens, ni ma misère n'échouerait, ni votre attente ne serait frustrée. Si cependant je ne puis rendre mes impressions, le Seigneur notre Dieu y suppléera dans vos coeurs, et vous accordera ce qu'il aura refusé à ma faiblesse. La raison pour laquelle je jette en avant ces réflexions, c'est que je sais, et non pas vous, ce que je voudrais dire; c'est que je sens toute la difficulté d'exposer clairement mon idée. Je devais vous en prévenir afin que tout en me prêtant une grande attention vous puissiez prier pour moi. 2. Elisabeth a conçu un homme, Marie en a conçu un; Elisabeth est devenue la mère de Jean, Marie, la Mère du Christ ; le fils d'Elisabeth n'est qu'un homme, le Fils de Marie est Dieu et homme. O merveille ! comment une créature a-t-elle pu concevoir son Créateur ? Ici donc, mes frères, dans Celui qui emprunte un corps à sa Mère seulement, ne faut-il pas reconnaître Celui qui a formé le premier homme sans lui donner ni père ni mère ? Notre chute première date du moment où la femme qui nous a fait mourir, reçut dans son coeur le poison du serpent ; car le serpent la portant au péché, elle s'abandonna à ce perfide. Si notre première chute vient de ce qu'une femme a reçu dans son coeur le poison du serpent, est-il étonnant que notre salut vienne de ce qu'une femme aussi a conçu dans son sein le corps du Tout-Puissant ? Chaque sexe étant tombé, il fallait les relever tous deux. Une femme était l'auteur de notre perte, une femme devint pour nous le principe du salut. 3. Mais pourquoi saint Jean ? Pourquoi intervient-il ici ? Pourquoi l'envoyer en avant ? Je le dirai si je puis.
1. Ps. CXV, 10.
Jésus-Christ Notre-Seigneur disait de lui « Parmi les enfants des femmes nul ne s'est élevé au-dessus de Jean-Baptiste (1) ». Si donc on compare Jean aux autres hommes, il l'emporte sur tous, et pour l'emporter sur lui il n'y a que l'Homme-Dieu. Jean précède le Christ; et il y a en lui tant de grandeur, tant de grâce, qu'on le prend pour le Christ. Alors en effet les Juifs attendaient l'avènement du Christ, promis dans les ouvrages des prophètes qu'ils avaient entre les mains. Hélas ! ils l'attendaient quand il était absent, et présent ils le mirent à mort; ils ne voulurent pas le reconnaître et disparurent, tandis que lui se maintint avec son empire, Tous cependant ne lui manquèrent point, et beaucoup d'entre eux crurent en lui. Au milieu de cette attente où ils étaient du Christ, voyez éclater la gloire de Jean. Comme on remarquait en lui une grâce extraordinaire, comme il donnait le baptême de la pénitence et que semblable aux courriers envoyés en avant, il préparait la voie au Seigneur, les Juifs envoyèrent lui demander : « Qui êtes-vous ? Etes-vous Elie ou un prophète, ou bien êtes-vous le Christ ? Je ne suis, répondit-il, ni le Christ, ni Elie, ni un prophète. Qui êtes-vous donc ? Je suis la voix de Celui qui crie dans le désert (2)». Ainsi lorsque les Juifs lui demandaient qui il était et commençaient à croire qu'il était le Christ, il répondit : « Je suis la voix de Celui qui crie dans le désert ». Si vous étiez attentifs, vous avez remarqué le passage du prophète qu'on a lu d'abord; il y est dit : « Voix de Celui qui crie dans le désert : Préparez la voie au Seigneur, rendez droits ses sentiers. Toute vallée sera comblée ; toute montagne et toute colline abaissée, les tortuosités seront redressées et les aspérités aplanies, et toute chair verra le Salut de Dieu ». Le Seigneur dit ensuite par l'organe du prophète : « Crie. Je repris: Que crierai-je ? » Le Seigneur continue: « Toute chair n'est que de l'herbe, et tout léclat de la chair n'est que comme une fleur des champs. L'herbe s'est desséchée et la fleur est tombée, mais le Verbe du Seigneur subsiste éternellement (3) ». Ainsi donc quand saint Jean disait : « Je suis la voix de Celui qui crie dans le désert : Préparez la voie au
1. Matt. XI, 11. 2. Jean, I, 21-23. 3. Isaïe, XL, 3-8.
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Seigneur », c'était comme s'il avait tenu ce langage : C'est de moi que le prophète a prédit que je crierais dans le désert. Le rôle de Jean est donc aussi de dire : « Toute chair n'est que de l'herbe, et tout l'éclat de la chair n'est que comme la fleur des champs. L'herbe s'est desséchée et la fleur est tombée, mais le Verbe de Dieu subsiste éternellement »: Ce Verbe est conçu dans le sein d'une Vierge, et une voix le fait retentir au milieu du désert. Quand la voix ne fait pas entendre une parole ou un verbe, elle n'est qu'un bruit qui retentit aux oreilles; est-elle même un bruit véritable ? Toute parole est une voix, mais toute voix n'est pas une parole. Qu'un homme ouvre la bouche et crie de toutes ses forces, il fait entendre une voix, non pas une parole. Quand la voix prend-elle le nom de parole ? Quand la voix exprime une idée, elle prend le nom de parole. Supposons que ma voix ne se fasse pas encore entendre ; je veux cependant dire quelque chose,: la parole est alors dans mon esprit; la parole est dans mon esprit, quand la voix n'est pas encore dans ma bouche. Par conséquent la Parole peut exister indépendamment de la voix, et la voix indépendamment de la parole. Mais unis la voix à la parole ; la parole alors se manifeste. Par rapport à Marie, qu'est-ce que le Christ ? La Parole cachée. Une voix vient de se faire entendre devant cette Parole. Qu'est-ce que Jean? «La voix de Celui qui crie dans le désert ». Qu'est-ce que le Christ? « Au commencement était le Verbe (1)». Et toi, ô voix? Et toi, mortel? « Toute chair n'est que de l'herbe, et toute la gloire de l'homme n'est que comme la fleur des champs. L'herbe s'est desséchée, et la fleur est tombée; mais la Parole du Seigneur subsiste éternellement ». Attache-toi à cette Parole, car le Verbe est pour toi devenu de l'herbe. Le Christ est le Verbe incarné. Ah ! puisque «toute chair n'est que de l'herbe, et » puisque « tout l'éclat de la chair ressemble à la fleur des champs», dédaignons les biens présents et portons vers l'avenir nos espérances. « Toute vallée sera remplie» toute humilité sera élevée : « toute montagne et toute colline sera abaissée » : tout orgueil sera déprimé. Abats les montagnes, comble les vallées, tu obtiens une plaine.
1. Jean, I, 1.
Donne-moi des riches et des hommes qui brillent de tout l'éclat de l'herbe; qu'ils prêtent l'oreille à ces mots : « Dieu résiste aux superbes, et il donne aux humbles sa grâce (1) ». Donne-moi des pauvres découragés, qui aient conscience de leur faiblesse : qu'ils ne désespèrent point, qu'ils croient en Celui qui est venu pour tous les hommes. Que les uns donc s'élèvent et que les autres s'abaissent. Que Celui qui doit venir trouve.ainsi une plaine et non des pierres où il se heurte le pied. C'est pour écarter ces obstacles que saint Jean disait : « Préparez la voie au Seigneur»; au Seigneur et non au serviteur. 4. Pourtant « n'es-tu pas le Christ? » poursuivent les Juifs. Si Jean n'était pas une de ces vallées qu'il faut combler, mais une montagne à abattre, quelle occasion pour lui de tromper! Quand on l'interrogeait, c'était pour ajouter foi à sa réponse; car on avait tant d'admiration pour la grâce qui éclatait en lui, qu'on croyait sans hésitation ce qu'il disait. Il pouvait donc alors tromper aisément le genre humain; on l'aurait cru, s'il avait dit : Je suis le Christ. Mais en se parant d'un titre étranger, il aurait perdu son propre mérite. D'ailleurs, s'il s'était vanté d'être le Christ, ne se serait-il pas dit lui-même : Pourquoi t'élever ainsi? «Toute chair n'est que de l'herbe, et son éclat ressemble à la fleur des champs. L'herbe s'est desséchée et la fleur est tombée». Sache que « ce qui demeure éternellement, c'est le Verbe du Seigneur». Ainsi Jean se connaissait, et c'est avec raison que le Seigneur l'a nommé un flambeau. « Il était un flambeau ardent et luisant, disait de Jean-Baptiste le Sauveur même ; et vous avez voulu un moment vous réjouir à sa lumière (2) ». Que dit de lui toutefois Jean l'Evangéliste? « Il y eut un homme envoyé de Dieu; il se nommait Jean. Il vint en témoignage, pour rendre témoignage à la lumière. Il n'était pas la lumière». Qui n'était pas la lumière? Jean-Baptiste. Qui dit cela? Jean l'Evangéliste. « Il n'était pas la lumière, mais il vint pour rendre témoignage à la lumière». Comment ! de celui dont la Lumière dit elle-même : « Il était un flambeau ardent et luisant», tu dis : « Il n'était pas la lumière? » Mais je sais, répond l'Evangéliste, de quelle lumière j'entends parler; je sais en
1. Jacq. IV, 6. 2. Jean, V, 35.
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comparaison de quelle lumière un flambeau n'est pas lumière. Ecoute ce qui suit : «Celui-là était la vraie lumière, qui éclaire tout homme venant en ce monde (1) ». Ce n'est pas Jean, c'est le Christ qui éclaire tous les hommes. Aussi pour ne s'éteindre pas au souffle de l'orgueil, Jean reconnut-il qu'il n'était qu'un flambeau. Un flambeau peut s'allumer et s'éteindre : le Verbe de Dieu ne peut s'éteindre jamais, un flambeau le peut toujours. 5. Le plus grand des hommes a donc été envoyé pour rendre témoignage à Celui qui est plus qu'un homme. Quand en effet celui que nul ne surpassa parmi les enfants des femmes, s'écrie: « Je ne suis pas le Christ », et que devant le Christ il s'humilie, c'est que sûrement le Christ est plus qu'un homme. Veux-tu aller à Jean, le plus grand des hommes? Mais le Christ est plus qu'un homme. Ainsi donc en voyant le précurseur, cherche le Juge; crains le Juge en entendant la voix de son héraut. Jean est un envoyé; il a prédit l'apparition prochaine du Messie. Quel témoignage lui rend-il? Ecoute : « Je ne mérite pas, dit-il, de dénouer les courroies de sa chaussure (2)». Comprends-tu bien, ô homme, ce que tu ferais alors? « Quiconque s'abaisse sera élevé (3)». Que dit-il encore du Christ? « Nous avons tous reçu de sa plénitude (4)». Tous, qu'est-ce à dire? C'est que patriarches, prophètes ou apôtres sacrés, envoyés avant ou après l'Incarnation, « nous avons tous reçu de sa plénitude ». Nous sommes . comme des vases; il est lui, la Fontaine. Si donc nous avons bien compris ce mystère, Jean, mes frères, n'est qu'un homme, et le Christ est Dieu. Que l'homme donc s'humilie; c'est Dieu qui doit être élevé. Pour apprendre à l'homme à s'humilier, Jean est né le jour où commencent à décroître les jours; et pour enseigner qu'il faut exalter Dieu, le Christ est né le jour où les jours commencent à croître. Mystère profond ! Si nous célébrons la naissance de Jean comme celle du Christ, c'est que cette naissance aussi est remplie d'enseignements sacrés. De quels enseignements? De ceux qui nous montrent en quoi consiste notre grandeur. Afin de croître divinement, diminuons humainement. Humilions-nous en nous-mêmes pour grandir en
1. Jean, I, 6-9. 2. Ib. I, 27. 3. Luc, XIV, 11. 4. Jean, I, 16.
Dieu. Les morts différentes de Jean et du Christ nous montrent aussi cette grande vérité d'une manière frappante. Pour dire à l'homme de diminuer, Jean a perdu la tête; pour lui dire aussi combien il doit exalter Dieu, le Christ a été élevé en croix. Jean a été envoyé pour nous servir de modèle et pour nous attacher au Verbe. Tant que puisse se vanter l'orgueil humain, si éminente que soit la sainteté dont il se flatte, qui jamais égalera Jean ? Toi qui t'estimes grand, jamais, qui que tu sois, tu ne seras ce qu'il était. Il n'était pas né encore, et déjà par son tressaillement dans le sein maternel il prédisait la prochaine naissance du Seigneur. Est-il rien de plus sublime que cette sainteté? Imite-la, écoute ce qu'il dit du Christ : « Nous avons tous reçu de sa plénitude». C'est le flambeau qui te montre durant la nuit la source où lui-même a bu : « Nous avons tous reçu de sa plénitude. Nous tous » : il est la Fontaine, nous sommes des vases; il est le Jour, nous sommes des flambeaux. Triste faiblesse humaine ! c'est avec un flambeau qu'on cherche le jour. 6. Mais les Apôtres sont aussi, mes frères, des flambeaux de ce jour. Ne vous imaginez point que Jean seul était un flambeau à l'exclusion des Apôtres. Le Seigneur ne dit-il pas à ceux-ci: « Vous êtes la lumière du monde? » Ils ne devaient pas toutefois se croire lumière au même titre que Celui dont il écrit: « Celui-là était la lumière véritable qui éclaire tout homme venant en ce monde » ; aussi le Sauveur s'empresse-t-il de leur enseigner quelle est la vraie lumière. Après avoir dit : «Vous êtes la lumière du monde » ; il ajoute: «Nul n'allume un flambeau pour le mettre sous le boisseau ». Si j'ai dit que vous êtes lumière, j'entendais par là un flambeau; gardez-vous donc de tressaillir d'orgueil, pour ne pas éteindre cette petite flamme. Je ne veux pas vous mettre sous le boisseau; mais pour que vous répandiez la clarté vous serez sur le chandelier. Quel est ce chandelier? Apprenez-le, et pour y être placés soyez des flambeaux. La croix du Christ est comme un grand chandelier. Celui qui veut répandre la lumière ne doit pas rougir de ce chandelier de bois. Veux-tu comprendre que le chandelier est réellement la croix du Christ? Prête l'oreille : « Nul n'allume un flambeau pour le placer sous le boisseau; on le met sur un chandelier pour éclairer tous ceux qui sont dans la (437) maison. Que votre lumière brille donc devant les hommes de manière qu'ils voient vos bonnes oeuvres et qu'ils glorifient» , non pas toi, car en cherchant à te glorifier tu cherches à t'éteindre; «mais votre Père qui est dans les cieux (1)». Que vos bonnes oeuvres servent ainsi à faire glorifier votre Père. Vous n'avez pu, pour devenir des flambeaux, vous; allumer vous-mêmes ni vous placer, sur le chandelier; faites donc glorifier Celui qui vous a accordé cette faveur. Ecoute aussi l'apôtre saint Paul, écoute ce flambeau qui pétille en quelque sorte sur la croix. « A Dieu ne plaise », dit-il (ici applaudissent ceux qui connaissent la suite du texte) «à Dieu ne plaise », quoi? « que je me glorifie dans autre chose que dans la croix de Notre-Seigneur Jésus-Christ». Je me glorifie d'être sur le chandelier; si on me l'ôte, je tombe. « A Dieu ne plaise que je me glorifie d'autre chose que de la croix de Notre-Seigneur Jésus-Christ, par qui le monde m'est crucifié comme je le suis au monde (2)». Vous venez d'applaudir, de montrer vos bonnes
1. Matt. V, 14-16. 2. Gal. VI, 14.
dispositions. Que le monde vous soit donc crucifié et soyez vous- mêmes crucifiés au monde. Qu'est-ce à dire? Ne demandez point la félicité au monde; abstenez-vous du bonheur du monde. Le monde vous flatte, évitez ce corrupteur; il vous menace, ne redoutez point cet ennemi. Ne te laisses-tu corrompre ni par les biens ni par les maux du monde? Le monde t'est crucifié et tu l'es au monde. Sois heureux d'être sur le chandelier; pour n'y pas perdre ton éclat, ô flambeau, conserves-y toujours l'humilité; prends garde que l'orgueil ne vienne à t'éteindre. Garde avec soin ce que tu es devenu, pour te glorifier de Celui qui t'a fait ce que tu es. Qu'étais-tu en effet, ô homme? Qui que tu sois, ô homme, considère ce que tu étais en naissant. Fusses-tu noble de naissance, tu étais tout nu en venant au monde qu'est-ce donc que la noblesse? Le pauvre et le riche sont également nus à leur naissance. Pour être noble d'origine, vis-tu autant qu'il te plaît? C'est à ton insu que tu es entré dans la vie, et malgré toi que tu en sors. Regarde enfin dans les tombeaux; y distingueras-tu les ossements des riches?
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