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SERMON XXXIV. Prononcé à Carthage devant les Anciens. LE CANTIQUE NOUVEAU ET LA VIE NOUVELLE (1).

 

ANALYSE — Le but de saint Augustin est d'exciter puissamment à la charité. Pour y parvenir il rappelle 1° que la charité est un don si précieux que Dieu seul peut nous le faire; 2° la charité est Dieu même, d'où il suit que pour posséder. Dieu il suffit d'avoir la charité. — Donc, conclut-il, et ceci peut être considéré comme une seconde partie, ne devez-vous pas pratiquer la charité en servant Dieu de tout votre coeur, en vous donnant entièrement à lui? Estimez-vous que ce soit le payer trop cher que de vous donner à lui sans réserve pour trouver en lui votre bonheur? Ne demandez pas comment vous pourrez. vous aimer encore si vous aimez Dieu de tout vous-mêmes. L'amour véritable de vous-mêmes n'est autre chose que l'amour de Dieu.

 

1. Nous sommes invités à chanter au Seigneur un cantique nouveau. L'homme nouveau connaît ce nouveau cantique. Un cantique est l'expression de la joie, et si nous y regardons de plus près, l'expression de l'amour. Celui donc qui sait aimer la vie nouvelle, sait chanter le cantique nouveau. Mais qu'est-ce que la vie nouvelle? Ce cantique nouveau nous oblige de le rechercher. Car tout ici se rapporte au même empire; l'homme nouveau, le nouveau cantique, le Testament nouveau; et l'homme nouveau chantera le cantique nouveau et en même temps il appartiendra au nouveau Testament.

2. Il n'est personne qui n'aime; mais qu'aime-t-on? On ne nous invite donc pas à ne pas aimer, mais à choisir l'objet de notre amour. Mais que choisir si d'abord on ne nous choisit nous-mêmes, puisque nous n'aimons pas si nous ne sommes aimés les premiers?

Ecoutez l'Apôtre Jean ; c'est celui qui reposait sur le coeur de son Maître, et qui y puisait, dans ce banquet mémorable, la connaissance des secrets

 

1. Ps. CXLIX, 12.

 

célestes (1). Après avoir ainsi puisé et tout entier encore à son heureuse ivresse, il s'écria « Au commencement était le Verbe (2). » Quelle haute humilité ! quelle sobre ivresse! Or parmi les secrets dont il puisa la connaissance sur le coeur de son Maître, en voici un que révèle ce grand prédicateur:« Nous l'aimons, parce qu'il nous a aimés le premier (3). » N'était-ce pas beaucoup attribuer à l'homme que de dire en parlant de Dieu : « Nous aimons?» Oui? Quoi? Hommes, nous aimons Dieu; mortels, nous aimons l'immortel; pécheurs, le juste; fragiles, l'immuable; créatures, le Créateur. Nous avons aimé; et pourquoi? « Parce que lui-même nous a aimés le premier. » Cherche comment l'homme peut aimer Dieu; tu ne pourras l'expliquer qu'en disant c'est que Dieu a aimé l'homme le premier. Celui que nous aimons s'est donné à nous; il s'est donné pour que nous l'aimions. Voulez-vous apprendre plus clairement ce que Dieu nous a donné pour que nous l'aimions? Ecoutez l'Apôtre Paul: « L'amour de Dieu, dit-il; est répandu

 

1. Jean, XIII, 23. — 2 Ib. I, 1. — 3. I Jean, IV, 10.

 

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dans nos coeurs » Par qui ? Serait-ce par nous? Non. Par qui donc? « Par l'Esprit-Saint qui nous a été donné (1). »

3. Après un témoignage aussi digne de foi, aimons Dieu par Dieu; oui, puisque le Saint-Esprit est Dieu, aimons Dieu par Dieu. Que puis-je dire de plus? Aimons Dieu par Dieu. Je l'ai dit: « L'amour de Dieu a été répandu dans nos « coeurs par l'Esprit-Saint, qui nous a été donné; » donc, et c'est une conséquence rigoureuse, puisque l'Esprit-Saint est Dieu et que nous ne pouvons aimer Dieu que par l'Esprit-Saint, aimons Dieu par Dieu. Encore une fois, n'est-ce pas une conséquence légitime?

Mais entendez plus explicitement Jean lui-même. « Dieu est charité; et qui demeure dans la charité demeure en Dieu, et Dieu en lui (2). » C'est peu de dire: La charité vient de Dieu. Qui de nous oserait faire cette autre assertion : « Dieu est charité?» Elle vient d'un homme qui connaissait ce qu'il possédait. — Pourquoi donc l'imagination humaine, pourquoi l'esprit volage cherche-t-il à se représenter Dieu et se fabrique-t-il une idole dans son coeur ? Pourquoi se le figure-t-il comme son imagination se le peut former, et non comme il a mérité de le posséder? Est-ce là Dieu? Non, le voici. Pourquoi cette esquisse? Pourquoi ces membres? Pourquoi cette attitude qui te charme? Pourquoi cette beauté corporelle? « Dieu est charité. » Quelle couleur a la charité? Quelles lignes? Quelle figure? Nous ne voyons rien de tout cela; et cependant nous aimons.

4. J'oserai m'expliquer devant votre charité voyons en bas pour découvrir en haut. L'amour bas et terrestre lui-même, l'amour souillé et corrompu qui s'attache aux beautés corporelles, nous fournit le moyen de nous élever à des considérations plus hautes et plus pures. Un débauché aime une belle femme: sans doute il est excité par la beauté extérieure, mais, il cherche au dedans un retour d'affection. S'il vient à apprendre que cette femme le hait, à l'instant même toute son ardeur pour ce corps charmant ne se refroidit-elle pas? Il se détourne de ce qu'il recherchait d'abord, il s'en offense et commence même à haïr ce que d'abord il aimait. Mais les formes sont-elles changées ? Tout ce qui le séduisait n'y est-il pas encore? Oui; mais s'il était passionné pour ce qu'il voyait, il exigeait du coeur ce qu'il ne voyait pas. Connaît-il au contraire que son amour est payé de retour? Comme il

 

1. Rom. V, 16. — 2. I Jean, V, 16.

 

aime avec plus d'ardeur! Il voit cette femme, cette femme le voit, personne ne voit l'amour; c'est néanmoins cet invisible amour que l'on aime.

5. Elevez-vous au dessus de cette passion fangeuse et demeurez dans la pure et lumineuse charité. Tu ne vois pas Dieu; aime-le et tu le possèdes. Combien les passions coupables n'aiment-elles point de choses sans les posséder? Elles les recherchent avec une sordide avidité sans pouvoir se les procurer sur le champ. Suffit-il d'aimer l'or pour avoir de l'or? Beaucoup l'aiment et n'en ont pas. Suffit-il, pour les avoir, d'aimer les grands et riches domaines! Beaucoup les aiment et n'en ont pas. Aimer l'honneur est-ce l'avoir? Beaucoup n'en ont pas, et le désirent avec un amour brûlant; ils le cherchent et meurent souvent avant de l'avoir trouvé. Ah! Dieu se donne à nous plus parfaitement. Aimez-moi, dit-il, et vous me posséderez; car vous ne pouvez m'aimer sans me posséder.

6. O mes frères, ô mes enfants, ô enfants catholiques, ô saintes et célestes plantes, ô vous qui êtes régénérés dans le Christ et nés dans le ciel, écoutez-moi, ou plutôt « chantez avec moi le cantique nouveau.» Oui, dis-tu, je chante. Tu chantes, c'est vrai. Je l'entends: mais que ta vie ne contredise pas ta voix. Chantez de la voix, chantez du coeur, chantez de la bouche, chantez par la conduite:« Chantez au Seigneur un cantique nouveau. » Vous cherchez quelques louanges! « Sa louange est dans l'assemblée des saints. » Le chantre lui-même est le sujet de cette louange. Vous voulez chanter les louanges de Dieu? Soyez ce que vous voulez exprimer. Oui, vous êtes sa gloire si votre vie est bonne. Sa louange n'est pas dans les synagogues des Juifs ; elle n'est point au milieu des folies païennes; elle n'est point dans les erreurs des hérétiques; elle n'est point dans les applaudissements du théâtre. Où donc est-elle! Considérez-vous, soyez-la vous-mêmes. « Sa louange est, dans l'assemblée des « saints.» Et si tu cherches en chantant un sujet de joie. « Qu'Israël se réjouisse en Celui qui l'a formé.» Israël ne trouve à se réjouir qu'en Dieu.

7. Interrogez-vous avec soin, mes frères; visitez le sanctuaire intérieur; considérez attentivement ce que vous possédez de charité, et augmentez ce que vous en aurez découvert. Ayez l'oeil sur ce trésor et devenez riches intérieurement.

 

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On appelle cher et non sans motif, ce qui est de grand prix. Ne dites-vous pas ordinairement Ceci est plus cher que cela ? Que signifie : Est plus cher? N'est-ce pas : Est de plus haut prix? Or si l'on appelle plus cher ce qui est de plus haut prix, quoi de plus cher que la charité même? A combien, mes frères, en évaluons-nous le prix ? Où le trouver? Tu paies le blé avec de ta monnaie; une terre, avec ton argent; une perle, avec ton or; et la charité, avec toi-même. Tu cherches à acheter un domaine, une perle, une bête de somme, et pour en trouver le prix, tu cherches dans tes terres, tu cherches chez toi. Mais pour acheter la charité, c'est toi-même qu'il faut chercher, toi-même qu'il faut trouver. Eh! Craindrais-tu de te perdre en te donnant! Tu te perds, au contraire, en ne te donnant pas.

La Charité même s'exprime par l'organe de la Sagesse, et elle te dit une chose propre à te rassurer sur cette parole: Donne-toi. Si un homme voulait te vendre un champ, il te dirait: Donne-moi ton or; et si un autre voulait te vendre quelque autre chose, il te dirait également Donne-moi ta monnaie, donne-moi ton argent. Ecoute ce que te dit la Charité par la bouche de la Sagesse: « Mon fils, donne-moi ton coeur (1). Donne-moi dit-elle; donne-moi, mon fils. » Quoi? « Ton coeur. » Il était mal chez toi, il était mal quand il était à toi. Car tu te traînais au milieu des frivolités, des amours impures et pernicieuses. Ote ton coeur de là? Où l'élever? Où le mettre? Donne-le moi. Qu'il soit entre mes mains et il ne périra point dans les tiennes. Dieu veut-il en effet laisser en tonde quoi aimer même toi, puisqu'il te dit : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton coeur, de toute ton âme et de tout ton esprit?» Et de ton coeur que te reste-t-il pour pouvoir t'aimer toi-même? Que te reste-t-il de ton âme? Que te reste-t-il de ton esprit? « De tout, » dit le Seigneur. Après t'avoir créé il te veut tout entier. Mais ne t'attriste pas, comme si le foyer de toute joie était éteint dans

 

1. Prov. XXIII, 26.

 

toi-même. « Qu'Israël se réjouisse, » non en soi, mais en « celui qui l'a formé. »

8. Tu insisteras et tu diras : Si Dieu ne me laisse rien pour m'aimer; si je suis obligé d'aimer de tout mon coeur, de toute mon âme et de tout mon esprit, Celui qui m'a créé, comment m'est-il commandé par le second précepte d'aimer mon prochain comme moi-;même ? — C'est ce qui fait que tu dois davantage à ton prochain l'amour de tout ton coeur, de toute ton âme et de tout ton esprit. — Comment ? — « Tu aimeras ton prochain comme toi-même (1). » Dieu donc de tout moi-même, et mon prochain comme moi-même. Mais comment m'aimer? comment t'aimer? — Veux-tu savoir comment tu peux t'aimer? C'est précisément en aimant Dieu de tout ton être que tu t'aimes toi-même. Penses-tu faire à Dieu quel, qu'avantage en l'aimant? Que lui revient-il de ton amour? Que perdra-t-il si tu ne l'aimes pas? C'est toi qui gagnes à l'aimer; tu te tiens alors où tu ne saurais périr.

Mais, répliques-tu, fut-il jamais un temps où j'ai manqué de m'aimer ? — Non tu ne t'aimais pas lorsque tu n'aimais pas Dieu qui t'a donné l'être. Mais en te haïssant alors, tu croyais t'aimer. «Qui aime l'iniquité hait son âme (2). »

Prière après le sermon. — Tournons-nous avec un coeur pur vers le Seigneur notre Dieu, le Père tout-puissant; rendons-lui, dans la mesure de notre petitesse, d'immenses et abondantes actions de grâces; supplions de toute notre âme son incomparable bonté de daigner agréer et exaucer nos prières; qu'il daigne aussi, dans sa force, éloigner de nos actions et de nos pensées l'influence ennemie, multiplier en nous la .foi, diriger notre esprit, nous donner des pensées spirituelles et nous conduire à sa propre félicité

Au nom de Jésus-Christ, son Fils et notre Seigneur, qui étant Dieu vit et règna avec lui dans l'unité du Saint-Esprit et durant les siècles des siècles. Ainsi-soit-il.

 

1. Matt. XII, 37, 39. — 2. Ps. X, 6.

 

 

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