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LETTRE LXXXI. A GÉRARD (a), ABBÉ DE POTTIÈRES.

NOTES DE HORSTIUS ET DE MABILLON

LETTRE LXXXII. A L'ABBÉ DE SAINT-JEAN (c) DE CHARTRES,

LETTRE LXXXIII. A SIMON, ABBÉ DE SAINT-NICOLAS (a).

LETTRE LXXXIV. AU MÊME.

NOTES DE HORSTIUS ET DE MABILLON

A GUILLAUME, ABBÉ DE SAINT-THIERRI.

 

LETTRE LXXXI. A GÉRARD (a), ABBÉ DE POTTIÈRES.

Vers l'an 1130 .

 

Saint Bernard repousse une fausse accusation dont on le chargeait.

 

Je ne me souviens pas d'avoir jamais écrit au comte de Nevers quoi que ce soit contre vous, et d'ailleurs il n'est pas vrai que je l'aie fait. Si ce prince a reçu de moi quelque lettre, ce n'a jamais été qu'en faveur de votre maison; ce n'est pas là, je pense, écrire contre vous, mais bien dans vos intérêts. J'avais entendu dire que sur votre conseil, et d'accord avec vous, il se proposait de vous faire une visite pour s'assurer par lui-même de ce qu'il y a de vrai dans les bruits désavantageux qu'on fait courir publiquement sur votre maison, en rechercher la cause et y apporter remède, s'il parvenait à force de soins et de zèle à la découvrir (b). Je ne vois pas que vous puissiez trouver mauvais que j'aie encouragé et fortifié même le prince dans ses pieuses dispositions, ni que vous ayez le droit de vous en montrer blessé et de vous en plaindre; bien plus, je trouve même que j'ai parfaitement agi dans l'intérêt de la maison de Dieu en réveillant le zèle de celui qui peut apporter remède au mal dont elle souffre. Vous me citez l'Ecriture sainte pour me convaincre que j'ai eu tort de ne pas commencer par vous avertir, mais je n'avais absolument rien contre votre personne; et dans tout ce que la charité m'a inspiré de faire, je n'ai eu en vue que le rétablissement de la paix dans votre maison. D'ailleurs, vous serez pleinement convaincu de la vérité de mes paroles si, comme vous nie l'annoncez, vous venez me montrer tout ce qui concerne cette affaire. Vous me trouverez  infailliblement ici tous les jours de la semaine prochaine,

 

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NOTES DE HORSTIUS ET DE MABILLON

 

LETTRE LXXXI.

 

60. A Gérard, abbé de Pollières. Horstius pensait qu'il fallait lire, abbé de Prully, mais c'est à tort,comme on le voit par les manuscrits et par les propres expressions de cette lettre ; il est clair, en effet, que saint Bernard ne s'adresse point à un abbé de l'ordre de Cîteaux, tel qu'était le monastère de Prully. D'ailleurs, s'il s'était agi d'une maison de Cisterciens, il n'aurait point eu recours, pour en faire disparaître les abus, au comte de Nevers. D'où il suit qu'on devrait rétablir le nom de Gérard parmi ceux des abbés de Pottières, où il a été omis jusqu'à présent. Pottières était une abbaye de Bénédictins que le comte Gérard, fonda dans le diocèse de Langres, non loin de son château, et dans laquelle il fut enterré avec Berthe son épouse. Voir les notes dont notre Acher a enrichi les oeuvres de Guibert de Nogent, page 653 et suiv. (Note de Mabillon.)

 

 

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LETTRE LXXXII. A L'ABBÉ DE SAINT-JEAN (c) DE CHARTRES,

 

Vers l'an1128.

 

Saint Bernard le dissuade de se démettre de son abbaye et d'entreprendre le pèlerinage de Jérusalem.

 

1 . Je suis si peu de chose que j'avais résolu d’abord de ne pas vous faire connaître ma façon de penser sur les points sur lesquels vous

 

a Pottières, au diocèse de Langres, abbaye de Bénédictins de la congrégation de Saint-Victor; on a omis le nom de Gérard dans la liste de ses abbés. Voir la note de Mabillon.

b Car il avait succédé aux droits du comte Gérard, fondateur de Pottières.

c Il s'agit certainement ici de l'abbé Etienne qui fut d'abord abbé de Saint-Jean de Chartres, de l'ordre des Augustins, et qui devint patriarche de Jérusalem vers le commencement  de l'année 1128, après Germond, ainsi que le rapporte Orderic Vital, à la fin de son livre douzième. C'est lui aussi qui fit, dit-on, parvenir une lettre, par le moyen de Guillaume de Buzy, à Foulques, comte d'Anjou (voir tome III des Analect., page 335, lettres 35 et 82, et préface de Papebroche, sur les patriarches de Jérusalem, au tome III de mai.

 

voulez bien me demander mon avis. Je trouvais aussi superflu que présomptueux de faire entendre un conseil à un homme qui est si capable d'en donner; mais, en faisant réflexion que la plupart, pour ne pas dire toutes les personnes de sens, se défient de leurs propres lumières et s'en rapportent volontiers à celles des autres dans les choses douteuses, et d'autrui même, dans leurs propres affaires, cette sûreté de coup d'oeil qui les distingue dans celles des autres, même les plus obscures, il m'a semblé que je devais revenir sur ma première résolution et vous dire toute ma pensée, sans préjudice d'un meilleur avis. Si j'ai bien compris ce que vous avez chargé le pieux abbé Ours (a) de Saint-Denis de Reims de me dire de votre part, vous avez conçu le projet de quitter votre patrie, ainsi que la maison à la tête de laquelle Dieu vous a placé, pour entreprendre le voyage de la terre sainte, ne plus vous occuper ensuite que de Dieu et du salut de votre âme. Peut-être si vous aspirez à la perfection est-il à propos que vous quittiez votre patrie, selon cette parole du Seigneur: « Renoncez à votre patrie; éloignez-vous de toute votre famille (Gen., XII, 1). » Mais je ne vois pas sur quoi vous vous fondez pour exposer, par votre départ, le salut des âmes qui vous ont été confiées. Certainement il est doux de respirer après avoir déposé son fardeau, mais la charité ne recherche pas ses intérêts ; peut-être cédez-vous à l'attrait du repos et de la tranquillité, mais c'est au détriment de la paix pour vos frères. Adieu ne plaise que je recherche jamais un avantage quelconque, si grand qu'il soit même pour mon , si je ne puis l'acquérir qu'au prix d'un scandale ! car ce serait le payer de la charité même, Or à ce prix je ne sais quel avantage spirituel on peut jamais trouver en quoi que ce soit. Enfin, s'il est permis à chacun de préférer sa propre tranquillité au bien général, je me demande qui est-ce qui pourra dire avec vérité : « Pour moi, vivre et mourir pour Jésus-Christ, ce m'est un véritable profit (Philipp.,  I, 21) , » et ce que deviennent ces paroles de l'Apôtre : « Personne tic vit pour soi et ne meurt pour soi ( Rom., XIV, 7) ; » ainsi que ces autres : « Ce qui me préoccupe, ce n'est pas mon intérêt, mais l'intérêt général (I Cor., X, 33), » ou bien celles-ci encore : « Il ne faut pas vivre pour soi, mais pour celui qui est mort pour tous les hommes (II Cor., V, 15). »

 

a Ours ou Ursion, cinquième abbé des chanoines de Saint Denis de Reims, de l'ordre des Augustins, devint plus tard évoque de Verdun ; il est tait mention de lui dans le tome XII, du Spicilége, page 312. Quand il fut promu au siège de Verdun en 1129, il eut pour successeur à Saint-Denis l'abbé Gilbert. Mais s'étant plus tard démis de sa charge épiscopale pour rentrer dans son monastère, il en reprit la direction, comme on peut le voir dans Marlot, tome II, page 152 de la Métropole de Reims. Le Nécrologe de son abbaye l'appelle Ursion de pieuse mémoire, à la date du 4 février.

 

2. Vous me demanderez peut-être d'où vous vient un pareil désir, si ce n'est pas de Dieu ? Si vous me permettez de vous dire ce que j'en pense, je vous répondrai par ces paroles de l'Ecriture: « Les eaux dérobées semblent meilleures (Prov., IX, 17). » Pour quiconque connaît les ruses du démon, il n'est pas douteux que l'ange de ténèbres ne puisse se changer en ange de lumière et faire tomber lui-même, goutte à goutte, dans votre âme altérée, ces eaux dont la douceur est pire que l’amertume de l'absinthe même. En effet, qui peut fomenter le scandale, semer la discorde, troubler la paix et l'union, si ce n'est l'éternel adversaire de la vérité, l'ennemi de la charité, l'antique fléau du genre humain, la haine vivante de la croix du Sauveur, le diable enfin, pour l'appeler par son nom? Si la mort est entrée dans le monde parce qu'il portait envie à notre félicité, il jette de même aujourd'hui, sur le bien qu'il vous voit faire, un regard jaloux, et, le mensonge sur les lèvres, il vous trompe comme il a trompé les hommes dans le principe, et il vous montre le bien là où il ne le voit pas lui-même. En effet, la vérité peut-elle se trouver dans une parole opposée à celle-ci: « Etes-vous lié avec une femme, ne cherchez pas à rompre vos liens (I Cor., VII, 27) ? » Comment croire aussi que la charité, qui se trouve comme sur des charbons embrasés à la vue d'un scandale, ira conseiller une démarche d'où le scandale ne peut manquer de naître ? Non, non! il n'y a que cet implacable ennemi de la charité et de la vérité qu'il sape par la haine et le mensonge qui ait pu mêler ainsi pour vous, de faux miel au miel véritable, vous promettre l'incertain pour le certain, et, par un mélange habile de mensonges et de vérités, vous faire renoncer d'abord au bien que vous faites maintenant, pour ne point vous laisser atteindre celui qu'il vous montre dans l'avenir. Il rôde autour du troupeau et cherche comment il pourra d'abord lui enlever son pasteur, parce qu'il sait bien qu'ensuite c'en est fait des brebis, que personne ne défendra plus contre ses attaques, et du pasteur lui-même que foudroieront ces terribles paroles : « Malheur à celui par qui le scandale arrive (Matth., XVIII, 7). » Mais j'ai pleine confiance dans la sagesse que vous avez reçue de Dieu; les ruses du malin ne réussiront point à vous séduire et à vous persuader de. renoncer à un bien dès maintenant assuré pour vous jeter dans un mal certain en vue d'un bien qui l'est fort peu.

 

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LETTRE LXXXIII. A SIMON, ABBÉ DE SAINT-NICOLAS (a).

 

Vers l'an1129.

 

Saint Bernard le console de la persécution dont il est l'objet, Les tentatives les plus honorables ne réussissent pas toujours. Quelle conduite doit tenir envers ses inférieurs tout prélat qui détire les soumettre à de plus sévères observances.

 

1. J'ai appris avec bien de la peine par votre lettre tout ce que vous avez à souffrir v à cause de la justice; et, quoique la parole de Jésus-Christ qui vous promet le royaume de Dieu, suffise amplement pour adoucir vos peines, je ne vous offre pas moins toutes les consolations qu'il est en mon pouvoir de vous donner, ainsi que les conseils dont je suis capable. Qui pourrait voir d'un oeil indifférent un frère en détresse, tendre les mains du milieu des flots, et entendre sans être péniblement ému la colombe du Christ, non pas chanter, mais gémir, comme si elle disait: « Pourrai-je chanter les cantiques du Seigneur sur la terre étrangère (Psalm. CXXXVI, 4) ? » Quel oeil, dis-je, refuserait une larme à celles du Christ lui-même, qui du fond de l'abîme lève encore aujourd'hui ses regards vers les montagnes du haut desquelles il espère voir descendre du secours ? C'est vers nous, vers notre néant que vas yeux se dirigent, me dites-vous. Hélas ! loin d'être des montagnes de secours, nous luttons nous-mêmes et faisons de pénibles efforts dans la vallée des

 

a Il était abbé de Saint-Nicaise de Reims, quand il le devint de Saint-Nicolas-aux-Rois, dans le diocèse de Laon. Hermann religieux de Laon, en parle dans son IIIe livre des Miracles de Marie, chap. 18. Il était frère de Guillaume, abbé de Saint-Thierri, dont il est question plus loin dans les quatre-vingt-cinquième et quatre-vingt-sixième lettres.

b Il s'agit ici de la persécution que Simon eut à souffrir de la part de ses religieux pour avoir résigné entre les mains de l'évêque d'Arras certains autels, (c'est le nom qu'on donnait aux cures de paroisses), parce que la possession en était entachée de simonie. Nous trouvons sur ce sujet une lettre de Samson, évêque de Reims et de Josselin, évêque de Soissons, au pape Innocent II, qui les avait chargés de juger cette affaire. Il existe également une lettre du pape Eugène III, à l'évêque de Laon, Barthélemy, pour lui faire savoir qu'il veut prendre connaissance de la difficulté survenue entre l'évêque d'Arras et l'abbé de Saint-Nicolas. Dans la lettre de Samson au pape Innocent, nous voyons que l'abbé Simon a ne pouvant se mettre d'accord avec ses religieux pour résigner ces autels, s'était, pour un temps, éloigné de son monastère et retiré dans un pays lointain ; mais qu'il fut rappelé plus tard par ses religieux qui préféraient renoncer à ces autels qu'à leur abbé; « ce qui permet d'apprécier l'intégrité et le désintéressement de Simon, sous le gouvernement duquel le monastère de Saint-Nicolas a jeté un vif éclat, non moins par sa régularité que par sa prospérité matérielle, au dire d'Hermann. On peut donc sans hésiter placer la date de cette lettre avant l'avènement du pape Innocent, c'est-à-dire avant l'année 1130. Pour ce qui est de Gilbert, son successeur, on peut consulter la lettre trois cent quatre-vingt-dix-neuvième,

 

larmes pour échapper aux piéges de l'ennemi, aux violences d'un monde pervers, et nous nous écrions avec vous: «Nous ne pouvons attendre de secours que du Seigneur, qui a fait le ciel et la terre (Psalm. CXX, 2).»

2. « Tous ceux qui se proposent de vivre avec piété en Jésus-Christ doivent s'attendre à des persécutions (II Tim., III, 12). » L'intention de mener une vie pieuse en Jésus-Christ ne les quitte pas, mais il ne leur est. pas toujours possible de la mettre à exécution; car si les impies ne cessent d'entraver les pieux desseins des gens de bien, ceux-ci ne perdent rien de leurs vertus en cédant quelquefois au nombre de leurs adversaires et en renonçant dans de certaines circonstances à suivre leurs pensées, quoique justes et saintes. Ainsi vit-on Aaron céder, contre son gré, aux vociférations criminelles d'une multitude soulevée; Samuel, contraint par les voeux insensés du même peuple, lui donner Saül pour roi, et David renoncer à construire un temple au Seigneur, comme il en avait l'intention, à cause des guerres nombreuses que cet homme belliqueux eut constamment à soutenir pour repousser les attaques continuelles de ses ennemis. Aussi, vénérable; père, mous conseillé je, sauf meilleur avis de personnes plus sages que moi, de céder un peu, et, dans l'intérêt des faibles, de renoncer pour quelque temps à vos projets de réforme, quoique plusieurs les partagent, car vous ne devez pas contraindre mais seulement engager à les embrasser, tous ces religieux de Cluny dont vous avez accepté le titre d'abbé. Je crois qu'il faut également conseiller à ceux qui désirent s'astreindre à une observance plus étroite, de condescendre par charité, autant due cela se peut sans offenser Dieu, à la faiblesse des autres, en leur permettant de conserver leurs habitudes dans le monastère, s'il n'en doit résulter de scandale ni pour les uns ni pour les autres, ou bien de quitter la maison et d'aller se réunir à d'autres religieux qui vivent comme eux.

 

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LETTRE LXXXIV. AU MÊME.

 

Saint Bernard lui renvoie un religieux qui l'avait quitté et lui conseille de le traiter avec plus de douceur et de bonté après son retour.

 

Nous avons agi avec autant de succès que de prudence, comme vous le voyez, en recevant contre notre habitude, non pour nous, mais pour vous et pour elle, cette pauvre brebis fugitive (a), puisque nous avons réussi par notre accueil et par d'utiles conseils à contenter son désir d'une vie plus austère, et à vous donner en même temps une complète satisfaction

 

a saint Bernard la manne dans son Apologie, adressée à Guillaume, au paragraphe 4°, c'est Nicolas.

 

par son retour auprès de vous. Je ne vous dis pas cela pour vous montrer de quelles dispositions nous sommes animé à votre égard, tout ce que nous pourrions faire dans ce but ne vous le dira jamais assez ; mais pour vous convaincre de la vérité de ce que je vous ai déjà dit, si j'ai bonne mémoire, c'est que l'essai d'une règle un peu plus austère suffit bien souvent pour calmer ces esprits inquiets qui ne sont pas contents du genre de vie qu'ils mènent. Vous me demandez, dans votre lettre, mes conseils au sujet de ce religieux qui est retourné maintenant auprès de vous; ils deviennent superflus dès qu'il vous est revenu avec l'intention de faire votre volonté, comme de juste, et non pas la sienne Quant à la difficulté qu'il redoute le plus, je vous prie avec lui et pour lui d'user à, son égard d'une condescendance et d'une douceur plus grandes qu'avec les autres fugitifs; car on ne saurait juger de la même manière. deux conduites qui, pour être semblables dans leurs résultats ne le sont nullement dans leurs motifs. Il est évident qu'on ne peut mettre sur la même ligne un religieux qui a quitté son couvent parce qu'il est fatigué de ses devoirs et dégoûté de son état, et celui qui ne le quitte, pour entrer dans une autre maison, que par amour de sa vocation et avec le désir d'en mieux pratiquer les devoirs.

 

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NOTES DE HORSTIUS ET DE MABILLON

 

 

LETTRE LXXXIV.

 

61. Qui pour être semblables dans leurs résultats, etc. Car d'après les philosophes, ce sont les causes finales et les causes déterminantes qui font la différence des actes. Ainsi ils sont semblables au point de vue de l'être pour emprunter leur langage et différents au point de vue moral. Écoutons la manière élégante dont saint Augustin développe cet axiome : « Puisque les bons et les méchants font et supportent les mêmes choses, ce n'est donc point par les actes ou par le châtiment qu'il faut les distinguer, mais par les causes qui les font agir. Ainsi Pharaon accablait le peuple de Dieu de pénibles travaux, .et Moïse, de son côté, réprimait avec une grande sévérité les écarts impies de ce même peuple; ils ont agi l'un comme l'autre, mais ils ne se proposaient pas le même but; l'un était mu par l'ambition et l'autre par un esprit de zèle. Jézabel tue les prophètes de même qu'Élie fait périr les faux prophètes. Selon moi, il y a le mérite de celui qui souffre et le mérite de ce qu'il souffre..... Dieu n'a pas épargné son propre Fils et l'a livré à la mort pour nous; car on dit aussi de Judas que Satan entra clans lui et le poussa à livrer le Seigneur. Le Père a donc livré son Fils, et Judas son maître; qu'est-ce qui fait que dans un acte identique Dieu le Père est bon et l'homme est mauvais? N'est-ce pas la cause qui les a fait agir l'un et l'autre, et qui n'a point été la même pour tous les deux ? » Après avoir cité plusieurs autres exemples, il ajoute : « Sachons dans des actes semblables discerner la pensée dont ils procèdent. » Voir saint Augustin, lettre quarante-huitième. (Note de Horstius.)

 

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A GUILLAUME, ABBÉ DE SAINT-THIERRI.

 

On trouve ici, dans quelques éditions, une lettre de saint Bernard à Guillaume, abbé de Saint Thierri, que nous avons placée, en guise de préface, en tête de l'apologie du Saint, adressée au même Guillaume.

 

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