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LETTRE CCCXXI. A HENRI DE MURDACH (a), D'ABORD ABBÉ DE VAUCLAIR, PUIS DE WELLS, ET ENFIN ARCHEVÊQUE D'YORK.

LETTRE CCCXXII. AU NOVICE HUGUES QUI DEVINT PLUS TARD ABBÉ DE BONNEVAL (b).

LETTRE CCCXXIII. AU PAPE INNOCENT.

LETTRE CCCXXIV. A ROBERT, ABBÉ DES DUNES (a).

NOTES DE HORSTIUS ET DE MABILLON

LETTRE CCCXXV. AU MEME ABBÉ AU SUJET DU NOVICE IDIER.

LETTRE DE L'ABBÉ GUILLAUME (a) A GEOFFROY, ÉVÊQUE DE CHARTRES, ET A BERNARD, ABBÉ DE CLAIRVAUX.

LETTRE CCCXXVII. RÉPONSE DE SAINT BERNARD A L'ABBÉ GUILLAUME.

LETTRE CCCXXVIII. AU PAPE (a).

LETTRE CCCXXIX. A L'EVEQUE DE LIMOGES.

 

 

LETTRE CCCXXI. A HENRI DE MURDACH (a), D'ABORD ABBÉ DE VAUCLAIR, PUIS DE WELLS, ET ENFIN ARCHEVÊQUE D'YORK.

 

Saint Bernard l'engage à accepter la charge d'abbé de Wells.

 

A son très-cher frère et confrère l'abbé Henri, le frère Bernard, abbé de Clairvaux, salut et l'assurance de ses prières.

 

Je vous ordonne, mon frère Henri, d'accepter sans résistance la charge d'abbé de Wells, si les religieux de cette maison, d'accord avec le vénérable abbé de Ridal, s'entendent pour vous l'offrir; vous ferez en l'acceptant un acte de charité. C'est à mon corps défendant que je vous parle ainsi; car je sais que votre éloignement me privera d'une grande consolation; mais je n'oserais m'opposer à une élection unanime; il me semble que tant de religieux ne peuvent voter, tous d'une voix, sans que Dieu ait dirigé leur choix, car il est écrit: «Partout où deux ou trois personne se réuniront en mon nom, je serai au milieu d'elles (Matth., XVIII, 20). » Courage donc, mon cher frère, recevez leurs promesses

 

a Cet Henri était Anglais de naissance ; c'est à lui qu'est adressée la lettre cent sixième. Il commença par être simple religieux à Clairvaux; d'où il fut envoyé; en 1135, avec douze autres religieux, fonder dans le diocèse de Laon l'abbaye de Vauclair, qu'il gouverna jusqu'en 1138, époque de son élection à l'abbaye de Wells, dont il accepta la conduite sur l'ordre et les instances de saint Bernard. Il devint archevêque d'York en 1147, et mourut le 14 octobre 1153 d'après le Nécrologe de Vauclair. L'évêque de Laon, dans le diocèse du= q uel se trouvait l'abbaye de Vauclair était alors Barthélemy.

 

d'obéissance et veillez sur eux comme pasteur de leurs âmes. Ne refusez pas l'abbaye de Wells sous prétexte qu'il vous faudrait quitter la maison à la tête de laquelle vous vous trouvez en ce moment; j'en suis assez près, et si la volonté de Dieu est que vous la quittiez, j'aurai soin d'y établir un économe fidèle; ne faites pas non plus difficulté d'obéir sous cet autre prétexte que vous n'avez point encore l'agrément de votre évêque (a), reposez-vous sur moi du soin de pourvoir à cette formalité.

 

 

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LETTRE CCCXXII. AU NOVICE HUGUES QUI DEVINT PLUS TARD ABBÉ DE BONNEVAL (b).

 

L’an 1138

 

Saint Bernard le loue de son dessein de se faire religieux; il le prémunit contre les tentations qui l'attendent et l'exhorte à la persévérance.

 

A son très-cher fils en Jésus-Christ, Hugues, qui est devenu une nouvelle créature dans le Seigneur, frère Bernard, abbé de Clairvaux, salut et voeu sincère qu'il s'affermisse dans le service du Seigneur.

 

1. La nouvelle de votre conversion m'a causé un bonheur extrême ; pourquoi ne serait-elle point une cause d'allégresse pour les hommes, quand elle en est une pour les anges? Oui, le ciel est en fête, il retentit de chants de joie et de cantiques d'actions de grâces à la vue d'un jeune homme de qualité élevé délicatement, qui triomphe de l’esprit malin, renonce au monde, sacrifie son corps, se montre insensible aux caresses de ses proches, et rompt enfin les mailles du filet que les richesses avaient jeté sur ses ailes. D'où vous vient cette sagesse, ô mon fils? c'est en vain qu'on en chercherait une pareille chez les vieillards de Babylone qui, selon ou plutôt malgré la parole de l'Apôtre (I Tim., VI, 9), n'ont qu'un désir, celui d'être riches en ce monde, quand la richesse doit les faire tomber dans la tentation et les conduire dans les piges du démon. Non, la sagesse dont notre cher Hugues a fait preuve n'est point de ce monde, il l'a reçue d'en haut. C'est un mystère, ô mon Dieu, que vous dérobez aux sages du siècle polar le révéler à un enfant. Pour vous, mon fils, montrez votre reconnaissance pour la grâce que le Sauveur vous a faite, devenez un homme de coeur à présent, ne restez enfant que pour être sans malice (I Cor., XIV, 20). Que votre jeunesse ne se laisse point décourager par l'austérité de la règle; si vous songez que les richesses sont de cruelles épines, vos vêtements

 

a Cet évêque était Barthélemy, évêque de Laon, dans le diocèse duquel était l'abbaye de Vauxclair.

 

b C'était une abbaye du diocèse de Besançon ; plus tard Hugues en devint abbé, et se montra, sous le rapport de la piété, un digne neveu de saint Hugues, évêque clé Grenoble, dont il est parlé dans la Vie de saint Bernard, livre IV, n. 40.

 

grossiers vous deviendront plus supportables; si vous pensez à la vie du monde, vous en estimerez davantage le prix d'une conscience paisible. Le Christ vous fera goûter combien il est doux, et le Prophète saura mêler, s'il le faut, un peu de sa farine aux mets les moins appétissants (IV Reg., IV, 41), et les rendre mangeables. Dès que vous sentirez l'aiguillon du tentateur, levez les yeux sur le serpent d'airain, baisez les plaies du Crucifié ou plutôt puisez la vie dans son sein, il vous tiendra lieu de mère et vous chérira comme un fils; j'aime à croire que les clous qui l'attachent à la croix vous perceront aussi les mains et les pieds comme ils ont percé les siens.

2. Mais, comme il est dit, l'homme a pour ennemis les gens de sa famille (Mich., VII, 7, et Matth., X, 36), ce n'est pas vous, mais eux-mêmes que vos proches aiment en vous, autrement ils vous entendraient dire avec joie : « Si vous m'aimiez, vous vous réjouiriez de ce que je vais à mon Père (Ioan., XIV, 28). » « Si votre père, dit saint Jérôme (lettre Ire à Héliodore ), se jette au travers de la porte pour vous empêcher de passer, si votre mère, les vêtements en désordre, essaie de vous retenir en vous montrant le sein qui vous a nourri; si vos jeunes neveux se suspendent à votre cou pour vous arrêter; foulez aux pieds votre père et votre mère, passez outre sans verser une larme et allez vous jeter dans les bras de la croix ; le triomphe. de la piété filiale est, en pareille circonstance, de se montrer sans-pitié. » Laissez donc couler, sans vous émouvoir, les larmes de parents insensés qui se désolent de voir que d'enfant du démon vous devenez enfant de Dieu. Les malheureux, pourquoi vous aiment-ils d'un amour si cruel, si redoutable et si injuste ? De plus, comme il est dit que les mauvais entretiens corrompent les bonnes moeurs (I Cor., XV, 33), évitez le plus possible le commerce des hommes du monde dont la conversation laisse l'esprit aussi vide que les oreilles remplies. Apprenez à faire oraison, à élever vers Dieu vos mains et votre coeur; apprenez à diriger, dans tous les besoins de votre âme, vos regards suppliants vers le Père des miséricordes et à attirer les siens sur vous : il y aurait de l'impiété à croire qu'il, vous fermera ses entrailles paternelles, et qu'il sera sourd à vos gémissements et à vos cris. D'ailleurs, vous ne sauriez pas perdre de vue qu'en toute circonstance vous devez écouter avec docilité les conseils de vos pères spirituels comme si vous les receviez de Dieu même. Suivez cette règle de conduite et vous aurez la vie; suivez mes conseils, Dieu voit bénira et vous rendra au centuple, même en ce monde, tout ce que vous avez quitté. Défiez-vous de ceux qui vous disent que vous précipitez trop les choses et que vous devez remettre l'exécution de vos desseins à un âge plus mûr et plus avancé; rapportez-vous-en plutôt au Prophète qui vous dit : « Il est avantageux à l'homme de porter le joug du Seigneur dès ses premières années s'il veut s'élever au-dessus de lui-même (Thren., III, 27). » Adieu; portez-vous bien, et n'oubliez pas que la couronne n'est due qu'à la persévérance; c'est une vertu digne de tous vos efforts.

 

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LETTRE CCCXXIII. AU PAPE INNOCENT.

 

L’an 1139

 

Saint Bernard défend l'archevêque de Trèves contre l'abbé de Saint Maximin.

 

1. J'ai reçu de vous mille témoignages de bienveillance et d'affection et je vous prie de m'en donner encore un dans la circonstance présente. La grâce que je vous demande, loin d'être contraire à la volonté de Dieu et à l'intérêt de votre gloire, eA si juste, et si raisonnable à mes yeux, due je me tiens à peu près pour certain que ce n'est pas en vain que je me serai adressé à vous; d'ailleurs c'est pour un fils que je m'adresse à un père, et c'est pour un innocent que je fais appel à Innocent. Il n'est pas nécessaire que je vous rappelle en détail le zèle et l'attachement dont l'archevêque de Trèves n'a cessé de faire preuve pour le saint Siège apostolique, les constants efforts qu'il a fait dès sa jeunesse pour la paix de l'Eglise, sa fermeté inébranlable à la défendre aux jours de l'épreuve , sa constance à supporter pour elle le poids du jour et de la chaleur quand les autres, retirés sous la tente, goûtaient, à l'ombre, un paisible bonheur; son courage, enfin, et son intrépidité à prendre devant les princes et les rois la défense de ses confrères . Vous avez certainement tout cela bien présent à l'esprit. Mais, pour ne parler que de ce que je sais par moi-même et ne citer que ce que j'ai vu  de mes propres yeux, je vous dirai, si vous faites quelque cas de mon témoignage, qu'il a fait preuve d'une sagesse et d'une prudence consommées dans la manière dont il a retiré les biens et les revenus de l'Eglise de mains étrangères qui s'en étaient emparées; qu'il est d'une générosité et d'une libéralité reconnues dans la manière dont il fait part de ses biens à tout le monde en général et surtout aux gens de bien; enfin, il s'est toujours conduit avec tant de sagesse et de circonspection que jamais la langue des méchants n'a osé porter la moindre atteinte à sa réputation.

2. En quoi donc a-t-il offensé Votre Paternité? Est-ce en arrachant l'abbaye de Saint-Maximin à l'autorité royale, pour la faire passer sous la sienne, ou bien en refusant pour abbé un homme qui n'était pas même religieux auparavant, et qui prétendait, comme on dit, être général avant d'avoir été soldat ? Mais en supposant qu'il vous ait blessé dans cette circonstance ou dans une autre, ne devait-il pas espérer qu'un père plein de tendresse n'oublierait pas si vite son ancienne affection pour lui, excuserait facilement une faute légère et ne laisserait pas effacer dans son esprit, par quelques torts sans gravité, le souvenir des services importants qu'il lui avait rendus en maintes occasions ? Or, très-saint Père, vous encouragez maintenant tous ceux qui lèvent la main contre lui et vous êtes cause que ses ennemis sont triomphants. On se demande avec surprise sur quelle réputation de vertu et de niérites on a confié la charge et la conduite des âmes à un homme qui a constamment négligé le salut de la sienne; comment conduira-t-il les autres quand il n'a pas su se laisser conduire; quel supérieur peut faire un homme qui n'a jamais lui-même connu de supérieur, et de quel front, enfin, exigera-t-il qu'on lui obéisse quand il n'a jamais appris à obéir lui-même? L'Apôtre des nations l'a dit : « Nul n'est capable de gouverner l'Église s'il ne sait pas au moins conduire sa propre maison (II Tim., III, 5). » Au reste, on peut bien dire: tel père, tels fils; n'ont-ils pas eu la cruauté, en effet, de déchirer le sein de leur mère par leurs propres discordes et leurs dissensions intestines? Mais il vaut mieux que je m arrête, la décence me défend de vous peindre la licence de leurs moeurs. Après tout, si je parle d'eux, ce n'est pas que je m'attribue le droit de juger les serviteurs d'autrui, il est de règle que s'ils se sauvent ou se perdent, c'est l'affaire de leur maître; mais ce que je puis bien dire, c'est que si leurs desseins pervers réussissent, tous les jeunes libertins secoueront à leur tour le joug de la discipline et deviendront à leur exemple errants et vagabonds sur la terre. En tout cas, lors même que leurs mauvais desseins n'aboutiraient pas à toutes ces conséquences, ils pourront, du moins, se glorifier d'avoir pu tenir tête à leurs prélats. Ah ! que de personnes de mérite qui pensent avoir quelque sujet de compter sur votre protection, verront toutes leurs espérances s'évanouir, si au premier souffle de la tempête qui le menace un fils autrefois si cher à votre coeur ne peut trouver ni refuge ni consolation dans votre sein paternel.

3. Très-saint Père, si jamais Votre Excellence a daigné prêter l'oreille à quelqu'une de mes prières, je vous supplie ardemment, moi qui n'ai en vue que votre gloire et non pas vos faveurs, de ne point abandonner, maintenant que vous voyez luire des jours plus heureux, un homme qui vous est demeuré inviolablement attaché au milieu de vos adversités, et de ne pas souffrir qu'on affaiblisse son autorité quand il aurait plutôt lieu d'espérer de vous que vous l'augmentassiez encore. Mais si, contre toute attente et en dépit des mérites de ce prélat, on voit des étrangers lui ravir le fruit de ses travaux, ses services payés d'ingratitude et son dévouement, par l'abandon, il n'y aura presque personne qui ne ressente le coup que lui aura porté la main d'où il semblait qu'il ne devait rien attendre de pareil. Je prie l'Esprit de vérité qui procède du Père de vous apprendre à séparer la lumière des ténèbres dans toute votre conduite, afin que vous sachiez repousser le mal et choisir le bien.

 

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LETTRE CCCXXIV. A ROBERT, ABBÉ DES DUNES (a).

 

Vers l’an 1139.

 

Saint Bernard trouve dans l'union de leurs rimes et dans l'espérance de la résurrection, qui doit aussi rapprocher leurs corps, de quoi se consoler de leur séparation.

 

A son très-cher frère et ami, l'abbé Robert, le frère Bernard de Clairvaux, les sentiments de la plus tendre affection.

 

Je vous ai connu bien tard et vous ai perdu bien tôt, mon cher Robert ; mais ce qui me console, c'est qu'il n'y a que nos corps qui se trouveront séparés, car par l'âme vous ne cessez de m'être présent. Je dois pourtant avouer que cette pensée ne serait point une consolation pour moi, si, dans cette séparation, Dieu même n'était en cause. Mais un jour viendra où nous serons rendus l'un à l'autre, et où nous nous posséderons mutuellement comme nous nous posséderons nous-mêmes, et où nous serons présents l'un à l'autre en corps et en âme sans crainte de Bous voir de nouveau séparés par l'une ou l'autre des deux parties de votre être. Celui qui est aujourd'hui la cause de notre séparation passagère sera alors le lien puissant de notre éternelle réunion ; sans cesse présent à chacun de nous, il nous rendra constamment présents l'un à l'autre. Je salue vos enfants, que je regarde comme étant les miens, et je me recommande à leurs prières.

 

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NOTES DE HORSTIUS ET DE MABILLON

 

LETTRE CCCXXIV.

 

208. A Robert, abbé des Dunes, le même que celui qui devint abbé de Clairvaux, après saint Bernard; on dit même que notre Saint le désigna lui-même à son lit de mort pour son successeur. Voir la livre des Hommes illustres de Cîteaux, distinct. 2, chapitre XXIII; Meyer, livre des Annales de Flandre, et Manrique dans ses Annales.

On donne le nom de dunes en Belgique à des monticules d'un sable blanc que la mer rejette sur le rivage par l'effet du flux et du reflux de ses eaux. C'était au milieu de ces collines que s'élevait jadis l'abbaye florissante des Dunes; elle a complètement disparu aujourd'hui sous les sables dont la marche envahissante n'était plus arrêtée par la barrière en bois qu'on lui avait jadis opposée, et que la guerre empêche d'entretenir en bon état.

Cette abbaye a été reconstruite à grands frais, à Bruges, par le révérend abbé dom Bernard Campmans, que le saint Siège a fait visiteur de la Belgique.

 

 

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LETTRE CCCXXV. AU MEME ABBÉ AU SUJET DU NOVICE IDIER.

 

Vers l’an 1139.

 

Saint Bernard lui donne, à sa demande, des conseils sur la règle de conduite qu'il doit tenir envers un novice d'un caractère difficile nommé Idier.

 

A son très-aimé frère et confrère Robert, abbé des Dunes, le frère Bernard de Clairvaux, salut.

 

Je vous donnerai au sujet du religieux dont vous nie parlez et que vous croyez devoir être non-seulement inutile, mais à charge à la

 

a C'était un monastère fondé par saint Bernard, près de Furnes, en Belgique. Il a complément disparu sous les sables, et l'abbaye a été transférée à Bruges. Robert, abbé de ce monastère, fut, d'après Horstius, désigné par saint Bernard lui-même pour lui succéder à Clairvaux.

 

communauté, sans parler des défauts secrets dont vous le soupçonnez atteint, le conseil que je suivrais moi-même si j'étais à votre place. D'après ce que vous me dites, il me semble que pendant le temps de son noviciat il s'est si mal conduit que non-seulement il n'y a pas lieu à l'admettre à faire profession, mais même que vous pouvez en toute sûreté de conscience le renvoyer du monastère. Si pourtant votre charité répugne à le traiter avec la rigueur qu'il mérite, vous pouvez l'autoriser à rester au milieu de vous, tout le temps que vous jugerez à propos, mais sans lui permettre de faire profession; car je vous engage très-fortement à ne le recevoir qu'après l'avoir éprouvé de nouveau, et vous être bien assuré qu'il peut faire un bon et digne religieux. Autrement, tranchez résolument dans le vif, vous savez qu'il suffit d'une seule brebis malade pour infester tout le troupeau.

 

 

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LETTRE DE L'ABBÉ GUILLAUME (a) A GEOFFROY, ÉVÊQUE DE CHARTRES, ET A BERNARD, ABBÉ DE CLAIRVAUX.

 

L'abbé Guillaume les prie de prendre en main la cause de l'Église contre Pierre Abélard, dont il cite quelques propositions erronées.

 

A ses révérends seigneurs et pères en Jésus-Christ, Geoffroy, évêque de Chartres, et Bernard, abbé de Clairvaux, salut et voeux ardents de jours longs et heureux.

 

1. Mes seigneurs et mes pères, Dieu sait toute la confusion que j'éprouve en me voyant contraint, malgré mon néant, d'attirer votre attention sur un sujet dont l'importance intéresse l'Église entière ; mais puisque vous gardez le silence, de même due tous ceux pour qui c'était en pareille circonstance un devoir de parler, je le romps et c'est à vous tlue je m'adresse. On porte à la foi sur laquelle reposent nos communes espérances, des coups redoutables; on tend à la corrompre, cependant personne n'essaie de parer les attaques dirigées contre elle, personne? même n'élève la voix pour la défendre; et pourtant Jésus-Christ a versé tout son sang pour nous la donner, les apôtres et les martyrs ont répandu jusqu'à la dernière goutte du leur pour la défendre; les Pères et les Docteurs de l'Église ont consacré peurs travaux et leurs veilles à l'affermir et à la transmettre sans tache et sans souillure à nos siècles dépravés; à ces pensées je me sens l'âme rongée de chagrin, mon

 

a Cette lettre se trouve placée en guise de préface en tète de la controverse de Guillaume, abbé de Saint-Thierry de Reims, avec Abélard. Cette controverse se trouve imprimée dans le tome IV de la Bibliothèque de Cîteaux. On voit aux premières lignes de cette lettre qu'elle est antérieure a tout ce que saint Bernard a écrit contre Abélard; c'est ce qui nous l'a fait placer avant l'année 1140.

 

coeur se brise, et, dans ma douleur, je veux au moins dire quelques mots en faveur de cette foi pour laquelle je verserais volontiers jusqu'à la dernière goutte de mon sang si cela était nécessaire. Ne croyez pas qu'il ne s'agisse que d'attaques sana portée. Il n'est question de rien moins que du mystère de la sainte Trinité, de la personne de notre divin Médiateur, et de celle du Saint-Esprit, de la grâce de Dieu et du sacrement de notre rédemption. Pierre Abélard recommence à professer et à publier des nouveautés : ses livres passent les mers et traversent les Alpes, ses nouveautés en matière de foi et ses nouveaux dogmes se répandent dans les provinces et les royaumes, on les publie, on les soutient librement partout, c'est au point qu'on prétend qu'il, comptent des partisans même à la cour de Rome. Je vous le dis, votre silence est aussi dangereux pour vous que pour l'Eglise de Dieu. Nous ne comptons pour rien les atteintes portées à la foi, quoique ce ne soit que par elle que nous nous soyons renoncés nous-mêmes, et nous noyons avec indifférence les coups dirigés contre Dieu, dès qu'ils ne le sont point contre nous. Je vous en avertis, le mal n'est encore qu'à sa naissance, mais si vous ne le tranchez dans sa racine, il ne tardera pas à s'accroître et à devenir semblable au basilic, que nul enchantement ne peut plus maîtriser. Laissez-moi vous dire pourquoi je m'explique ainsi.

2. Dernièrement le hasard fit tomber sous mes yeux un opuscule de, cet homme, ayant pour titre: Théologie de Pierre Abélard. J'avoue que ce titre piqua ma curiosité et me fit lire cet ouvrage. J'en avais deux exemplaires à peu prés semblables, sauf quelques développements qui manquaient dans l'un et se. trouvaient tout au long dans l'autre. Comme j'y ai trouvé plusieurs choses qui m'ont particulièrement choqué, je les ai notées en ajoutant les raisons pour lesquelles elles m'avaient blessé; je vous envoie mes remarques et mes notes avec les livres eux-mêmes, afin que vous jugiez si j'ai eu raison d'être choqué de ce quedit fauteur. Les termes insolites dont il fait usage dans les choses de la foi, et le sens tout àfait nouveau pour moi qu'il donne aux expressions reçues, ont jeté un tel trouble dans mon esprit que, n'ayant personne à qui m'en ouvrir, je n'ai vu due vous à qui m'adresser en cette occasion et confier la cause de Dieu et de l'Église. Cet auteur vous craint et vous redoute; si vous fermez les yeux sur ses écrits, je ne vois pas qui peut lui imposer. A quels excès ne se laissera-t-il pas aller, s'il ne craint plus personne ? L'Église ayant vu la mort lui enlever presque tous les maîtres de la saine doctrine (a), cet ennemi domestique la prend au

 

a C'est à peu près dans les mêmes termes que Hugues Metellus s'exprime dans sa quatrième lettre au pape Innocent contre le même Abélard: « Après la mort d'Anselme de Laon et de Guillaume de Champeaux, il semble que le feu de la parole de Dieu perdit de son éclat sur la terre… etc. »

 

dépourvu en fondant sur elle, et profite de la pénurie de docteurs où il la trouve, pour s'arroger, dans son sein, l'autorité de ceux qui lui manquent. Traitant l'Ecriture sainte comme il a traité la dialectique, il la remplit de ses inventions, il y sème ses nouveautés que chaque année voit renaître sous un nouvel aspect. Au lieu de prendre la foi pour guide, il s'en fait le censeur, il se permet de la redresser, au lieu de se soumettre à ses décrets.

3. Voici la liste des propositions que j'ai extraites de ses oeuvres dans la pensée de vous les soumettre: 1° Il définit la foi: le sentiment des choses invisibles. 2° Il dit que les noms de Père, Fils et Saint-Esprit sont impropres en Dieu et ne servent qu'à rendre la plénitude du souverain bien. 3° Le Père est la toute-puissance, le Fils une certaine puissance, et le Saint-Esprit n'est point une puissance. 4° Le Saint-Esprit n'est pas consubstantiel au Père et au Fils comme le Fils l'est au Père. 5° Le Saint-Esprit est l'âme du monde. 6° Nous pouvons vouloir le bien et le faire par les seules forces du libre arbitre sans le secours de la grâce. 7° Ce n'est pas pour nous délivrer de la servitude du démon que le Christ s'est incarné et qu'il a souffert la mort. 8° Jésus-Christ, Dieu et homme, n'est pas une des trois personnes de la sainte Trinité. 9° Au sacrement de l'autel, la forme de la substance antérieure demeure dans l'air. 10° Le démon inspire ses suggestions aux hommes par des moyens physiques. 11° Ce que nous tirons d'Adam ce n'est pas la coulpe, mais la peine du péché originel. 12° Il n'y a péché que dans le consentement au péché et le mépris de Dieu. 13° On ne commet aucun péché par la concupiscence, la délectation ou l'ignorance; il n'y a pas de péché en cela, mais seulement un fait naturel.

4. Il m'a semblé que je devais extraire ces propositions des livres d'Abélard pour les mettre sous vos yeux, afin de réveiller votre zèle et de vous convaincre que je ne me suis pas ému sans raison en les lisant; et même avec la grâce de celui entre les mains duquel sont nos personnes et nos discours, je me permettrai de les réfuter ainsi que quelques autres qui en dépendent, sans me préoccuper de vous charmer par. mon style, pourvu que je vous plaise par l'exposé de ma foi. J'espère, en vous montrant que ces propositions ne m'ont que trop justement ému, vous émouvoir à votre tour, et vous inspirer le courage, pour sauver la tête, de sacrifier, s'il le faut, un pied, une main ou même un oeil, comme on pourrait appeler cet homme pour lequel j'ai ressenti autrefois une bien grande affection et que je voudrais pouvoir aimer encore; je prends Dieu même à témoin de ce que je vous écris là, mais dans une pareille doctrine il n'y a plus pour moi ni prochain, ni ami. Puisqu'il s'est dévoilé lui-même en rendant ses erreurs publiques, il ne saurait plus être question maintenant de chercher à remédier au mal en prenant à part celui qui en est l'auteur pour le reprendre en secret. D'ailleurs, j'ai appris due, sans compter les opuscules qu'il a intitulés le Oui et le Non et Connais-toi toi-même, il en a composé plusieurs autres encore dont les titres étranges me font craindre des doctrines plus étranges encore. On dit, il est vrai, que ces oeuvres craignent la lumière; toujours est-il que je les ai fait chercher partout sans pouvoir me les procurer. Mais revenons à notre sujet.... etc.

 

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LETTRE CCCXXVII. RÉPONSE DE SAINT BERNARD A L'ABBÉ GUILLAUME.

 

Vers l’an 1139.

 

Saint Bernard approuve son écrit sur Abélard et lui promet d'eau conférer avec lui après Pâques.

 

A son très-cher Guillaume, le frère Bernard.

 

A mon avis, vous vous êtes ému, avec raison, vous ne pouviez même. pas ne pas l'être, et de plus je vois que votre indignation n'est pas demeurée oisive puisqu'elle vous a fait prendre la plume pour réfuter et confondre les blasphèmes des impies. Je n'ai pas encore eu le temps de lire votre écrit avec toute l'attention que vous demandez, je n'ai fait que le parcourir un peu à la hâte; néanmoins je le goûte fort et je le crois très-propre à confondre les dogmes pervers que vous attaquez. Mais vous savez qu'eu pareilles matières je ne m'en rapporte pas trop à mon propre jugement; aussi, vu l'importance du sujet, je crois qu'il est bon qu'en temps opportun, nous nous donnions rendez-vous pour discuter ensemble de toutes ces choses. Je ne crois pas que cela puisse se faire avant Pâques, si nous voulons vaquer sans trouble à l'oraison comme ce saint temps le demande. Souffrez, en attendant, que je garde patiemment le silence sur toutes ces questions, d'autant plus que la plupart, pour ne pas dire toutes (a), me sont encore un peu étrangères; mais pt Dieu est assez puissant pour accorder à mon esprit la sagesse et la lumière que vous lui demandez pour moi dans vos prières. Adieu.

 

a On voit,à la manière dont s'exprime saint Bernard,que l'abbé Guillaume fut un des premiers à signaler les erreurs d'Abélard, ce que d'ailleurs il fait lui-même assez clairement entendre dans la lettre précédente, où il reproche à Geoffroy et à saint Bernard, le silence qu'ils ont gardé jusqu'alors.

 

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LETTRE CCCXXVIII. AU PAPE (a).

 

Contre l'élection d'un évêque de Rodez.

 

Jusqu'à présent je n'ai pas hésité à vous écrire à temps et même à contre-temps, pour obliger mes amis; si je balançais à vous écrire aujourd'hui, la religion elle-même m'y contraindrait, en me répétant le mot du Prophète: « Malheur à celui qui ne fait point usage de son épée lorsqu'il doit frapper (Jerem., XLVIII, 10) ! » La malice fait tous les jours de nouveaux progrès, les desseins des méchants prospèrent, et personne ne s'y oppose, personne ne se lève pour servir de rempart à la maison d'Israël. On voit aux jours de votre pontificat des hommes corrompus qui ont fait un pacte avec la mort et se sont alliés à l'enfer, faire des pieds et des mains pour entrer de force dans le saint des saints. Jusqu'à quand le souffrirez-vous avec cette patience? Ainsi le clergé de Rodez (b), après avoir élu pour évêque un homme qui ne le troublera pas dans ses désordres, a porté l'audace jusqu'à vous déguiser la vérité à vous-même, et à vous en imposer tant sur la personne de l'élu que sur la forme de l'élection. Cet homme que les hommes ont choisi, mais que Dieu n'a point appelé, compte de nombreux témoins de la vie infâme qu'il a menée, on n'en cite pas un seul de la pénitence qui aurait dû la suivre ; mais je ne veux point déchirer le voile qui cache sa conduite, ni courir le risque de manquer à la décence en en disant davantage. Mais que Dieu nous préserve de voir promus, sous votre pontificat, à la garde des âmes; de pareils monstres qui foulent aux pieds le sang du Sauveur et ne font aucun cas de leur âme dont il fut le prix ! Que signifient ces insinuations subtiles par lesquelles ils espèrent se rendre la cour de Rome favorable, quand ils allèguent en faveur de leur cause qu'on s'est moqué et qu'on n'a tenu aucun compte de l'appel qu'ils avaient interjeté à votre tribunal? Il y a dans tout ce qu'ils disent à ce sujet autant de mensonges que de mots, car, au rapport

 

a Cette lettre était placée immédiatement après celle d'un certain A... A l'abbé de Rieti, et était précédée de ces mots Au même; maison voit parla lettre suivante, qui traite également de l'élection d'un successeur d'Adémare au siége de Rodez, que celle-ci est aussi de la main de saint Bernard et fut adressée au pape Innocent ou au pape Eugène. Dans sa deux cent quarantième lettre, n. 1, saint Bernard félicite le pape Eugène d'avoir enfin terminé la cause de l’Eglise de Rodez en déposant, comme il le donne à entendre, le sujet indigne dont l’élection avait fait un évêque de Rodez. C'est précisément de cette élection qu'il est question dans cette lettre et dans la suivante.

 

b Il est évident qu'il est ici question du clergé de Rodez et non pas des religieux de Rutila, près de Trèves, dont il est parlé n, 47 du livre IV de la Vie de saint Bernard.

 

de gens dignes de foi, il n'y a jamais eu d'appel, par conséquent on n'a pas pu s'en moquer. Il est important que vous confirmiez du poids de votre autorité ce que le métropolitain a a fait de concert avec les religieux du diocèse. Je vous prie en même temps d'affectionner de plus en plus ce prélat, ce que je ne vous demanderais certainement pas s'il ne faisait honneur à son ministère par la manière dont il en remplit les devoirs.

 

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LETTRE CCCXXIX. A L'EVEQUE DE LIMOGES.

 

Vers l’an 1140.

 

Contre l'élection d'un évêque de Rodez.

 

Je ne viens pas vous parler de moi ni vous entretenir de vos intérêts, c'est pour vous que je vous écris. Vous savez que la vie de l'homme est bien courts, remplissez donc vos devoirs d'évêque pendant que vous occupez la chaire épiscopale de Limoges, de manière à nous édifier par le spectacle de vos bonnes oeuvres. J'ai eu la consolation d'apprendre que le souverain Pontife vous a renvoyé l'affaire de l'élection de l'évêque de Cahors b avec plein pouvoir de la terminer selon les canons, sans qu'il pût être fait appel du jugement que vous aurez porté. Voilà pour vous une belle occasion de montrer à l’Eglise que son chef suprême a en une bonne inspiration en prenant ce parti ; on va voir si la crainte de Dieu vous inspire, si les saints canons sont une règle pour vous et quelle estime vous faites de la justice. Il s'agit de donner à l'Eglise de Rodez un vrai pasteur des âmes, un véritable évêque, un digne successeur de Jésus-Christ, un prélat enfin dont les oeuvres fécondes fassent oublier la stérilité de celui qui l'a précédé dans la chaire de cette Eglise. Qui choisira-t-on pour cela? Sera-ce un homme dont la vie n'est qu'une infamie, la conscience un remords, et la réputation une honte

un homme qui est tombé d'abbaye en abbaye, ou plutôt d'abîme en abîme, et qui n'a pas eu honte de violer les vierges auxquelles il avait lui-même donné le voile? Serait-ce là tenir compte de la recommandation de l'Apôtre disant: « Il faut qu'un évêque soit exempt de crime, attendu qu'il est le dispensateur des trésors de Dieu (Tit., I, 7) ? » Ne vous mettez pas en contradiction avec vous-même en parlant d'une manière et en agissant d'une autre; que vos actes répondent constamment

 

a C'était l'archevêque de Bourges, dont Rodez était suffragant.

 

b Le texte porte Catane, nous préférons Cahors. II est probable en effet que c'est plutôt de cette dernière ville qu'il est question dans cette lettre que de la première. Si on partage notre manière de voir, il semble que l'élection dont il est ici question n'est autre que celle de Raymond que Guillaume de la Croix aurait eu tort, par conséquent, de rayer de la liste des évêques.

 

 

à vos paroles si vous ne voulez qu'on ne vous applique ce que le Psalmiste disait de certaines gens : « Leur langue s'est contredite (Psalm. LXIII, 9). » Toute l'affaire est maintenant entre vos mains, gardez votre âme exempte de souillures et ne vous chargez point des péchés d'autrui. Vous êtes le maître de confirmer ou d'annuler cette élection, mais en prenant ce dernier parti, vous consacrerez vos mains au Seigneur.

 

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