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LETTRE CCXCVII. A L'ABBÉ (Guy) DE MONTIER-RAMEY.

LETTRE CCXCVIII. AU PAPE EUGÈNE.

NOTES DE HORSTIUS ET DE MABILLON

LETTRE CCXCIX. AU COMTE D'ANGOULÊME (a), POUR LES RELIGIEUX DE SAINT-AMAND DE BOISSE.

NOTES DE HORSTIUS ET DE MABILLON

LETTRE CCC. A LA COMTESSE DE BLOIS.

NOTES DE HORSTIUS ET DE MABILLON

LETTRE CCCI. A SANCHE, SOEUR DE L'EMPEREUR D'ESPAGNE (a).

NOTES DE HORSTIUS ET DE MABILLON

 

LETTRE CCXCVII. A L'ABBÉ (Guy) DE MONTIER-RAMEY.

 

Saint Bernard le prie de recevoir un moine apostat qui témoignait du repentir de sa faute.

 

Celui qui doit vous remettre cette lettre a été assez fou et inconsidéré pour vous quitter et renoncer à porter l'habit que vous lui aviez donné, il y a longtemps, à ma prière; je crois qu'il regrette aujourd'hui ce qu'il a fait; il désire rentrer et vous prie humblement de vouloir bien lui ouvrir une seconde fois votre porte. Je joins mes prières aux siennes et vous demande, pour l'amour de Dieu et par considération pour moi, de le recevoir de nouveau et de lui rendre l'habit.

 

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LETTRE CCXCVIII. AU PAPE EUGÈNE.

 

L’an 1151

 

Saint Bernard lui découvre les impostures et les fourberies de Nicolas, son secrétaire.

Le moine Nicolas (b) n'est plus chez nous, il ne s'y trouvait pas avec ses pareils ; il a laissé en partant de tristes souvenirs parmi nous. Il y avait longtemps déjà que j'étais informé de sa conduite, mais je patientais toujours, dans l'espérance que Dieu toucherait son coeur ou que, nouveau Judas, il se découvrirait lui-même : c'est ce qui est arrivé. Je l'ai trouvé nanti à son départ, non-seulement de livres, d'or et d'argent, mais encore de trois sceaux, dont un à lui, le second au prieur et le troisième à moi: ce n'était pas l'ancien, mais le nouveau que j'avais été obligé de faire faire pour mettre un terme à l'usage frauduleux qu'il faisait du premier. Il me souvient que je fis allusion en termes couverts à cet abus de confiance en vous disant (lettre CCLXXXIV) : Moi aussi j'ai été exposé aux coups des faux frères. Qui sait toutes les personnes à

 

a Nicolas, religieux de Moutier-Ramey, diocèse de Troyes, avait été admis à Clairvaux pendant une absence de saint Bernard, vers l'année 1146. Il devint secrétaire du Saint; tuais, Imitateur de son style bien plus que de ses vertus, il finit par s'enfuir de Clairvaux accusé de crimes capables de couvrir un homme de honte et de confusion. hélas : les anges même du ciel sont tombés. Voir, pour plus de détails, la préface placée en tète des Sermons de saint Bernard.

 

qui il a pu écrire tout ce qu'il a voulu en mon nom, sans que je le susse? Fasse le ciel qu'au moins la cour de Rome ne conserve aucun souvenir des impostures qu'il lui a écrites! Que ne puis-je réhabiliter complètement la réputation des religieux qui vivent avec moi, dans l'esprit de tous ceux qu'il a trompés et séduits par ses impudents mensonges? Au reste, il a été en partie convaincu de vous avoir envoyé à vous-même, comme étant de moi, des lettres supposées, et il a en partie reconnu qu'il l'a, fait à plusieurs reprises. Mais je ne veux ni fatiguer vos oreilles ni souiller mes lèvres du récit de toutes ses infamies, toute la contrée les connaît et en a horreur. Tout ce due je vous demande s'il se présente devant vos yeux, car il se vante de compter de nombreux amis à votre cour, c'est de vous souvenir d'Arnaud de Brescia; or il y a en cet homme l'étoffe de plusieurs Arnauds. Je ne sache personne qui puisse être condamné à plus juste titre à la prison et contraint à garder un silence perpétuel.

 

 

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NOTES DE HORSTIUS ET DE MABILLON

 

 

LETTRE CCXCVIII.

 

196. Le moine Nicolas n'est plus chez nous. Pierre le Vénérable, abbé de Cluny, en faisait un cas tout particulier, comme on peut le voir dans ses lettres (voir plus haut la lettre deux cent soixante-quatrième). Il était venu de Montier-Ramey, et il devint le secrétaire de saint Bernard. Il écrivait élégamment non-seulement sous l'inspiration de notre Saint, mais aussi sous l'action de sa propre pensée. On a de lui des lettres qui se trouvent dans l'édition de Cologne de la Bibliothèque des Pères, publiée par Jean Picard de Saint-Victor de Paris. Mais c'était un homme double déguisant à merveille la nature du loup sous la peau de la brebis; pourtant il finit par se trahir lui-même ; car après plusieurs abus du sceau de saint Bernard, il fut reconnu pour faussaire et prit la fuite. C'est ce qui faisait dire à saint Bernard dans une précédente lettre au pape Eugène, la deux cent quatre-vingt-quatrième : Et moi aussi j'ai été exposé aux coups des faux frères.

On croit généralement qu'il s'en alla en Angleterre; ce qui donne à penser qu'il le lit, c'est qu'après la mort de saint Bernard, un certain Nicolas, moine de Saint-Alban, en Angleterre, attaqua notre Saint au sujet de la conception de la sainte Vierge. Mais Pierre de Celles, qui prit en main la défense de saint Bernard contre les attaques de Nicolas, fait de ce dernier un Anglais inconnu de lui jusqu'alors, et avec lequel il ne s'est trouvé en rapport que par ces sortes de discussions théologiques, comme on peut le voir par sa lettre vingt-troisième, livre VI, et sa neuvième, livre IX; tandis que l'autre Nicolas est Français, très-particulièrement connu et chéri de Pierre de Celles, comme on n'en peut douter en lisant les lettres qu'ils s'écrivaient, ce qui ne permet pas de n'en faire qu'un seul et même personnage.

Je ne parle pas là d'une autre preuve tirée de la différence du style; le Français n'aurait pas écrit d'une façon aussi mordante, il était trop bien élevé pour s'attaquer sans ménagement à Pierre de Celles, comme celui-ci se plaint que son adversaire anglais s'est permis de le faire (lettre neuvième, livre IX» et comme on peut se convaincre qu'il le fit en effet en lisant sa lettre qu' on a imprimée avant celle de Pierre de Celles.

D’ailleurs Nicolas passa de Montier-Ramey à Clairvaux vers l'an 1146 certainement après l'élévation du pape Eugène au souverain pontificat comme on peut en juger par la lettre septième qu'il écrivit aux religieux de cette dernière abbaye peu de temps avant d'y être reçu. Il s'enfuit en 1151, très-probablement après l'élection de l'évêque de Grenoble dont il a été parlé plus haut dans les notes de la lettre deux cent soixante-dixième, puisque dans la lettre trois cent quatre-vingt-neuvième de saint Bernard, qui fait mention de la deux cent soixante-dixième, il est dit qu'elle a été écrite par Nicolas. Pour plus de détails sur son compte, voir la préface du tome III (Note de Mabillon).

 

 

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LETTRE CCXCIX. AU COMTE D'ANGOULÊME (a), POUR LES RELIGIEUX DE SAINT-AMAND DE BOISSE.

 

Saint Bernard parle d'une redevance excessive que ce comte exigeait de ses religieux.

Ne trouvez pas mauvais que je regarde comme excessive la redevance que vous réclamez de nos religieux. pour le domaine de Boisse; je n'en vois nulle part exiger d'aussi forte. Nous avons fondé bien des abbayes, et il n'y en a pas une qui ait d'aussi grosses redevances à acquitter. Mais puisque vous en exigez le payement, et que Dieu aime mieux une offrande volontaire que contrainte et forcée, je souscris à la convention que nos frères ont passée avec vous, en attendant que Dieu vous inspire la pensée de les traiter avec moins d'exigence, ce qu'il fera un jour par sa grâce comme j'en ai l'espérance. En attendant, témoignez-leur que vous les aimez, et honorez-les non-seulement de votre faveur, mais encore de votre protection et de votre appui; il n'est pas, pour vous, de meilleur moyen de paraître un jour avec confiance au tribunal de Dieu que d'y avoir les pauvres pour amis et pour intercesseurs.

 

a La première édition lyonnaise des lettres de saint Bernard en 1194 porte : Au contre Engelbert, peut-être le même que celui dont il est parlé dans la lettre cent vingt-troisième pour les religieux de Brixia. Dans une autre édition de 1330 on lit: Au comte Engelbert pour les religieux de Brixia. Une autre édition, également de Lyon, de 1520, et toutes les suivantes, excepté une, portent pour suscription : Au comte d'Angoulême pour les religieux de Boisse. Les modernes préfèrent cette suscription , par la raison que Guillaume, surnommé Taillefer, comte d'Angoulême, céda aux Cisterciens, en 1143, un endroit situé dans le territoire de Boisse, où se trouvait l'abbaye de Bénédictins de Saint-Amand de Boisse, fondée au dixième siècle par le comte Arnaud. Mais ces derniers ayant protesté contre la concession faite aux Cisterciens, saint Bernard renonça, par esprit de paix, aux droits de ces religieux sur le terrain concédé. Voir aux notes de la fin du volume.

 

 

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NOTES DE HORSTIUS ET DE MABILLON

 

LETTRE CCXCIX.

 

197. Pour les religieux de Boisse, non pas de Brixia. Boisse est une forêt située à trois milles d'Angoulême. Saint Amand de Bordeaux s'étant retiré dans cette forêt, y vécut en solitaire; mais sa solitude ne tarda pas à se peupler et à se changer en un monastère d'hommes qui furent appelés les religieux de Boisse, du nom de l'endroit où ils s'étaient établis. Telle est la remarque de Picard sur plusieurs titres de ce monastère, par lesquels on voit que ce furent les religieux de Clairvaux qui commencèrent à construire en cet endroit un monastère qu'ils cédèrent ensuite aux religieux de Saint-Armand, en 1153. Comme ces derniers demeurèrent environ dix ans  en cet endroit, ainsi qu'on le voit dans les titres mentionnés plus haut, on pense que la lettre , deux cent quatre-vingt-dix-neuvième est de l'année 1143 époque où ils entrèrent en jouissance de la maison de Boisse (Note de Horstius).

198. D'ailleurs rien ne s'oppose à ce que nous rapportions ici tout au long la note de Picard lui-même « Les moines de Saint-Amand, dit-i1, à qui cet endroit appartenait et à qui on en contesta la propriété, comme hoirs l'avons vit plus haut, se rendirent audit lieu, nommé Boisse. Là, en présence de Hugues, évêque d'Angoulême, qui avait convoqué tous les religieux en Let endroit pour ce jour-là, et qui avait l'intention de bénir le cimetière du monastère; les religieux de Saint-Amand refusèrent à tout autre le droit de célébrer l'office  divin en cet endroit. Choqués de ces restrictions, les religieux de Clairvaux se plaignirent de ceux de Saint-Amand et se réunirent dans le petit bourg de Saint-Amand avec plusieurs autres religieux, tant simples moines qu'abbés et un certain nombre de barons du pays, et là, ceux de Clairvaux et ceux de saint-Amand, s'engagèrent à observer religieusement ce que l'abbé de Clairvaux déciderait comme étant juste. »

Les choses étant ainsi convenues, Pierre, abbé de Saint-Amand, et les religieux de la maison de Clairvaux se rendirent en cette dernière abbaye, où ils exposèrent l'affaire à saint Bernard. Celui-ci, après avoir entendu les deux parties, remit de lui-même le monastère de Saint-Amand entre les mains de Pierre, qui en était alors abbé, en présence de mon

seigneur Hugues, évêque d'Angoulême , de Junius, abbé de la Couronne, et de Gancelin, archiprêtre de Saint-Cyr, mais à condition que les religieux de Saint-Amand donneraient soixante marcs d'argent à ceux de Clairvaux pour les indemniser des bâtiments et autres constructions qu'ils avaient faites en cet endroit. Voici en quels termes il consigna cet arrangement: «Au nom du Seigneur, moi Bernard, abbé de Clairvaux, je veux qu'on sache que J'ai cédé à l'abbaye de Saint-Amand l’endroit nommé Boise, que nous tenons de la libéralité du comte d'Angoulême et de Pierre Austent, ainsi que tout ce qui nous appartient en ce lieu.

            Ont été témoins Mgr Hugues, évêque d’Angoulême ; Mgr Geoffroy, évêque de Langres; Junius, abbé de la Couronne ; le frère Philippe, notre prieur, ainsi que les frères Gérard et Geoffroy, religieux de notre maison.

«Fait à Clairvaux, l'an de l'incarnation de Notre-Seigneur Jésus-Christ 1153 (Note de Picard).

 

 

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LETTRE CCC. A LA COMTESSE DE BLOIS.

 

Vers l’an 1152

 

Saint Bernard console la comtesse des emportements de son fils, qu'il impute à sa jeunesse, et lui fait espérer un meilleur avenir; il l'engage en conséquence à le traiter avec douceur et bonté plutôt qu'avec rigueur.

 

Si votre fils s'est laissé aller à quelque emportement à votre égard, j'en éprouve autant de peine pour lui que pour vous; mais après tout la jeunesse peut bien excuser sa faute, car les fautes des jeunes gens trouvent précisément leur cause et leur excuse dans leur âge, qui cède plus facilement à la pente qui les sollicite. Ignorez-vous que l'homme a, dès ses premières années, une inclination malheureuse qui le pousse au mal ? Consolez-vous dans l'espérance que les aumônes et les vertus de son père a lui obtiendront la grâce de sa conversion, et, dans cette pensée, redoublez vos vaux et vos prières; peut-être un fils peut oublier quelquefois qu'il est fils, mais une mère ne saurait et ne doit oublier qu'elle est mère. Vint-elle, par impossible à ne plus songer au fruit de ses entrailles (Isaï., XLIX, 15), moi, dit le Seigneur je ne vous oublierai pas. Prions ensemble et gémissons devant Dieu; j'espère, quant à moi, qu'il permettra dans sa. miséricorde, qu'un jeune homme né avec de si belles qualités marche enfin sur les traces de son vertueux père. Vous devez le traiter avec beaucoup de prévenance, d'affection et de douceur, c'est le meilleur moyen de le porter au bien; les réprimandes et les reproches ne serviraient qu'à l'exaspérer davantage. En suivant cette méthode-là, nous ne tarderons certainement pas beaucoup à nous réjouir l'un et l'autre du changement qui se fera en lui. Vous ne doutez pas que je ne désire aussi vivement que vous de le voir revenir à des sentiments meilleurs; que n'est-il seulement avec vous ce qu'il a toujours été avec moi, car je ne pense pas qu'il se soit jamais refusé à se soumettre au moindre de nos désirs. Je prie Dieu de l'en récompenser.

D'ailleurs, vous pouvez croire que pour vous obéir je n'ai jamais perdu l'occasion de lui faire des remontrances quand elle s'est présentée; c'est ce que je ne cesserai de faire.

 

a C'était Thibaut le Grand, dont il a été parlé dans les notes de la lettre trente-septième. Ses aumônes et ses bienfaits remplissent l'histoire de la Vie de saint Bernard, de saint Norbert et d'autres saints personnages. II en est encore reparlé dans la quatre cent seizième lettre de saint Bernard. Horstius, dans ses notes, croit que cette lettre a rapport à lainé des enfants du comte, nommé Henri, à qui est adressée la lettre deux cent soixante-dix-neuvième.

 

 

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NOTES DE HORSTIUS ET DE MABILLON

 

LETTRE CCC.

 

199. A la comtesse de Mois, Mathilde de Flandre, épouse de Thibaut le Grand, comte de Champagne.

Consolez-vous dans l’espérance que les aumônes et les vertus de son père... On ne saurait nier l'influence du bon exemple des pis, pour donner aux jeunes gens l'amour du bien, de même qu'on ne peut disconvenir que les dérèglements des parents ne soient que trop souvent la cause des désordres dans lesquels tombent ensuite les enfants : de même qu'il faut que les parents soient forts et bien portants pour que les enfants le soient aussi, de même il faut qu'ils aiment la vertu pour que leurs fils s'y sentent portés. Il en est de cela dans l'homme comme  de la vigueur et de la race dans les boeufs et les chevaux. Il est vrai qu'on trouve quelquefois des enfants de héros qui ne sont rien moins qu’héroïques.

Si on veut savoir au juste quel homme était le comté Thibaut de Champagne, et quel fut son amour pour les pauvres et pour les religieux, il suffit de parcourir la Vie de saint Bernard. On peut voir encore les notes de la lettre trente-septième et d'autres. Saint Bernard montré assez clairement dans cette lettre que le fils était loin de marcher sur les traces de son père, puisqu'il ne peut consoler cette mère qu'en faisant qu’en faisant luire à ses yeux l'espérance d'une conversion que son fils devra aux vertus et aux aumônes de son père.

Le Saint donne en passant aux parents un conseil excellent sur l’éducation de leurs enfants, et aux maître un avis digne d'être noté sur la manière de se conduire envers leurs élèves. « Vous devez leur dit-il, les traiter avec beaucoup de prévenances, d'affection et de douceur, c'est le meilleur moyen de les porter au bien; les réprimandes et les reproches ne serviraient qu'à les exaspérer davantage.» En effet, il y a dans l’homme un sentiment de noblesse qui fait qu'il aime mieux être conduit comme il convient à sa nature, que traîné comme le demande celle des animaux. C'est l'opinion qu’exprime le Comique dans le passage suivant: « Je tiens qu'il vaut mieux retenir les enfants de condition libre par la honte du mal et par le point d'honneur que par la crainte..., et celui - là se trompe fort, à mon avis, qui croit que le commandement a plus de poids et de fermeté quand il s'appuie sur la force; que lorsqu'il peut compter sur l'affection..., » etc. (Térence).

Saint Bernard ne semble pas avoir flatté le coeur de cette mère d'une vaine espérance ou plutôt d'une prédiction sans cause. Le comte de Champagne, Thibaut le Grand, eut quatre fils : Henri, comte de Blois, succéda à son père en 1154; Thibaut, successivement écuyer tranchant de Louis le Jeune et de Philippe Auguste; il avait remplacé dans sa charge Raoul, comte de Vermandois; Etienne Surcésar, puis Chartreux; et enfin Guillaume, dont il est question dans la lettre deux cent soixante et onzième, et que saint Bernard refusa de concourir par son crédit à élever aux honneurs et aux dignités ecclésiastiques pendant qu'il était encore en bas âge.

Il semble que dans cette lettre saint Bernard parle du fils aîné du comte, nommé Henri qui, se trouvant à son retour de Syrie investi de toute l'autorité qu'il héritait de son père, se laissa aller à quelques excès faciles à comprendre à cet âge. Or parmi les reproches qui lui sont faits dans une autre lettre de notre Saint se trouve celui « d'avoir annoncé, pour après les fêtes de Pâques, des foires maudites, de concert avec Robert, frère du roi de France. »

Grâce aux avis de saint Bernard et aux larmes de sa pieuse mère, il ne tarda pas à se convertir et mérita d'être compté, par tous les historiens de ce temps-là, au nombre des hommes illustres de son siècle (Note de Horstius).

 

 

 

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LETTRE CCCI. A SANCHE, SOEUR DE L'EMPEREUR D'ESPAGNE (a).

 

Vers l’an 1149

 

Saint Bernard la prie d'user de son influence pour apaiser un différend v survenu entre des religieux de son ordre et d'autres religieux, à l'occasion de la fondation d'un monastère.

 

1. Je vous déclare que non-seulement je ne me suis pas mêlé de l'établissement du monastère de Tholdanos (b), mais, de plus, que toute cette affaire s'est faite à mon insu et pendant mon absence : ce sont des religieux de mon ordre, je l'avoue, qui l'ont conduite, mais ils ont eu soin de s'entourer, en cette circonstance, des conseils de plusieurs personnes de piété, de s'assurer du consentement et du concours de l'évêque du lieu, et n'ont agi qu'à la requête d'une noble dame qui a fondé cette maison sur ses propres terres. Tout cela, m'a-t-on dit, s'est fait publiquement, au su et au vu de tout le monde. Ils ont cru qu'ils pouvaient accepter sans difficulté un monastère que la fondatrice leur offrait spontanément, en le déclarant libre et indépendant de toute autre maison religieuse; on dit même qu'elle en avait les preuves en mains. Mais puisque vous me faites savoir que les religieux de Carracca se plaignent qu'en cette affaire on a lésé leurs droits, et comme, au lieu de suivre le conseil de Salomon qui leur dit : « Non-seulement ne vous opposez point au bien que d'autres veulent faire, mais faites-en vous-mêmes si vous le pouvez (Prov., III, 27), » ils s'opposent en cette circonstance à celui qu'on a l'intention de nous faire, nous sentons qu'il ne convient pas à des serviteurs de Dieu de plaider (II Tim., II, 24), et j'ai eu la pensée de remettre toute cette affaire entre vos mains, afin que vous assoupissiez, par tous les moyens en votre pouvoir, un procès qui est, dit-on, mal fondé et injuste, et que, pour la gloire de Dieu et le salut de votre âme, vous rendissiez le calme et la paix à un ordre reconnu par l'Eglise.

 

2. Mon frère (c) Nivard, qui se loue beaucoup de vos bontés, m'engage

 

a C’était Alphonse, surnommé le Bon, roi ou empereur de Castille et de Léon. Les rois d'Espagne prenaient volontiers le titre d'empereur.

 

b Ce monastère, situé dans le royaume de Léon, venait d'être fondé par l'infante Elvire pour des religieux Bénédictins de l'abbaye de Carracca quand il se donna aux Cisterciens, malgré les réclamations des religieux de Carracca. On verra, dans les notes de la fin du volume, ce que devint cette affaire.

 

c C'était le plus jeune frère de saint Bernard ; il est souvent parlé de lui dans la Vie de notre Saint.

 

à compter entièrement sur vous en cette occasion, tant à cause de votre bienveillance particulière pour notre ordre qu'à cause de la promesse que vous avez eu la bonté de lui faire. Je n'ose croire que nos contradicteurs refusent de se rendre à vos salutaires avis et à vos bons conseils ; si pourtant ils le font, il faudra remettre le jugement de cette affaire à la décision des évêques des deux parties intéressées, suivant le diocèse oit se trouvent les lieus en question, afin qu'ils la jugent en dernier ressort; vous n'aurez plus ensuite qu'à ratifier et faire exécuter la sentence qu'ils auront portée d'un commun accord. Si vous craignez Dieu, ne souffrez point qu'on empêche une si sainte œuvre ni qu'on frustre une si sainte dame de ses pieuses intentions, ces bons religieux du fruit de leur vertu et Dieu même du sacrifice d'agréable odeur que lui offre cet ordre. réformé (a). Je vous supplie encore de montrer toute votre affection maternelle à votre nouvelle maison d'Espina (b), qui vous compte parmi ses fondateurs: puissent les religieux de ce monastère, avec l'appui de votre protection, servir Dieu selon les observances de leur règle.

 

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NOTES DE HORSTIUS ET DE MABILLON

 

LETTRE CCCI.

 

200. A Sanche, sœur de l'empereur d'Espagne, Alphonse de Castille, à qui on donnait généralement alors le titre d'empereur. Sanche sa sœur se sentait un grand attrait pour saint Bernard, et avait fondé en 1147, dans le diocèse de Palence, une maison de religieux de Cîteaux, appelée Saint-Pierre d'Espina. Saint Bernard y envoya une colonie de religieux, sous la conduite de son frère Nivard. Peu de temps après, les religieux noirs du monastère de Toldanos, au royaume de Léon, récemment fondé par l'infante Elvire, se détachèrent des religieux de Carracetta dont ils dépendaient et se mirent sous l'autorité des Cisterciens. Aussitôt les Carracettiens réclamèrent et pressèrent Sanche de mettre à leur service, en cette circonstance, tout le crédit dont elle jouissait auprès de saint Bernard. Manrique a publié dans ses Annales, à l'année 1148, chapitre 8, un ancien titre où l'on voit comment se termina cette affaire. Voici ce qu'on y lit: « Après la mort de l'abbé dom Florent, Ferdinand, abbé de Toldanos, se déclara sans raison contre le couvent de Carracetta, il brisa les liens qui l'y tenaient attachés, et, poussé par un esprit de révolte, il fit le voyage de Clairvaux. La reine Sanche, qui aimait beaucoup ce monastère, éprouva un vif mécontentement de ce qui se passait et écrivit tant à l'abbé qu'à toute la communauté de Clairvaux, les priant de ne pas commettre la faute de recevoir le susdit abbé. Cédant aux prières de la reine, l'abbé de Clairvaux ne voulut point recevoir Ferdinand au nombre de ses religieux qu'il ne se fût, au préalable, pourvu de l'autorisation de l'abbé de Carracetta; n'ayant pu obtenir cette autorisation, il mourut sans être religieux ni de Carracetta ni de Clairvaux. »

Toutefois quelques années plus tard ce monastère passa sous la règle de Cîteaux (Note de Mabillon).

201. Mon frère Nivard, qui se loue beaucoup... Les Cisterciens concluent avec raison de ce passage que saint Bernard envoya son plus jeune frère Nivard, à la tète d'une colonie de moines, fonder, en Espagne, le monastère d'Espina. Déjà il l'avait dans une autre circonstance envoyé en Neustrie, pour organiser l'installation du nouveau monastère de Vaux-les-Soleuvre près de Vire, diocèse de Bayeux.

Robert, fils de Heirnesius, donne, vers l'an 1146, à Bernardi abbé de, Clairvaux, et au monastère de Sainte-Marie de Vaux-les-Soleuvre, sa maison d'habitation voisine du Hêtre penché. L'évêque de Coutances, nommé Algar, confirme une donation faite par un certain Guillaume Silvain, «à Dieu, à la bienheureuse Marie de Vaux-les-Soleuvre, et aux religieux qui servent Dieu dans cette maison, entre les mains de Nivard, frère de dom Bernard, abbé de Clairvaux. » On voit par là que Nivard était abbé de cette maison à cette époque.

Peu de temps après, c'est-à-dire en 1150, la maison de Vaux-les-Soleuvre se trouvant trop étroite et peu commode, la communauté se transporta à Vaux-Reicher, propriété féodale et paroisse de l'évêché de Bayeux. Vaux-les-Soleuvre fit retour, du consentement de saint Bernard, à l’évêque de Bayeux, à qui cette maison avait primitivement appartenu. On trouve dans la Neustrie chrétienne une lettre de Philippe, évêque de Bayeux, au sujet de la convention intervenue entre lui «et l'abbé Thomas de Vaux-Richer, au sujet de l'endroit appelé Vaux-les-Soleuvre, où, dans le principe, se trouvait son abbaye, » transportée depuis à Vaux-Richer dans un endroit que l'évêque Philippe lui céda, de la même manière qu'il en avait abandonné un autre auparavant à « l'abbé de Morte-Mer. »

Hugues, archevêque de Rouen, confirma cette donation à Bayeux en 1150.

A Thomas, abbé de Vaux-Richer, succéda, Roger, qui est appelé, dans son épitaphe, second abbé de cette maison.

Actuellement Vaux-Richer, qui est situé à plus de deux lieues de Lisieux, est habité par seize religieux de la stricte observance de Cîteaux, sous la conduite du R. P. D. Dominique Georges, saint abbé qui a tout fait pour rétablir et propager la pratique rigoureuse de la règle de son ordre (Note de Mabillon)

 

 

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