SERMON V
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SERMON V. Dans les carrefours et les places, je chercherai celui que mon cœur aime. (Cant. III, 2.)

 

1. Le discours d'hier s'est prolongé tandis que nous tracions la route parcourue par l'épouse. Grâces vous soient rendues, ô Seigneur Jésus, de ce que vous avez rendu vos paroles si agréables à mon gosier et plus douces que le miel. A peine pour faire place à d'autres, tombent-elles de la bouche qui les a goûtées, qu'on les rumine avec lenteur et si elles sont entrées dans le coeur, par un mouvement plein de suavité elles reviennent à la bouche pour être savourées de nouveau. Tout cela pouvait être dit brièvement et avec rapidité, mais le charme de la matière traitée, est agréable au palais de celui qui s'en nourrit ; cette matière produit un vif désir, et elle ne cesse pas de l'exciter quand une fois on a commencé d'en faire l'objet de son étude. Le pain que la nourrice broye pour le donner à manger au petit enfant, après l'avoir pressée sous sa dent soigneuse, elle le retient quelque temps dans sa bouche afin de l'imbiber d'un goût agréable! Et nous, distribuant aux autres, si toutefois quelques-uns d'entr'eux en ont besoin, les aliments solides de ce cantique, nous n'avons pu nous priver de la dilectation que nous avions prouvée . nous nous sommes prêtés au service des autres, de manière à satisfaire en ceci notre propre désir. Enfin quand je crois mon discours fini, et parvenu au terme convenable, la nourriture du verbe me revient impatiemment aux lèvres et quand la mémoire de l'abondance, de la suavité remonte ainsi, la matière déjà traitée, demande à être traitée encore. Quoi donc! est-ce que le figuier, n'est pas fréquemment secoué parce que ses fruits ne sont jamais tous tombés? qui s'étonnera si elles est souvent remuée l'âme qui rendue plus féconde par son propre dépouillement, semble rivaliser avec la main qui la tiraille, et vaincre par l'abondance de ses fruits, l'avidité de celui qui les cueille? Tel ne fut pas l'arbre que ;maudit notre Seigneur Jésus-Christ, le trouvant sans fruit et le condamnant pour sa stérilité à une aridité éternelle. (Marc. XI, 13.)

2. Voyez comment la foi du Christ a rendu arides les traditions dos Juifs et les doctrines des philosophes. Comment il a desséché les fleurs de l'Egypte. Ce n'est ni d'ans leurs systèmes ni dans leurs explications que se trouve le fruit dont il est dit au Psaume : « Notre terre donnera son fruit (Psalm. LXXXIV. 13.) Le Christ ne se peut trouver dans leurs quartiers et dans leurs places, déjà, ô Juifs! il est sorti de vos liens. Déjà il a quitté sa maison et abandonné son héritage. (Jerem. XII, 7.) Enfin vous êtes devenu comme une hutte dans un champ planté de concombres, comme une cité qui est ravagée. Il est dit néanmoins des places que « la vérité tombe dans la place. » Il est dit des philosophes païens, qu'ils retiennent la vérité de Dieu captive dans le mensonge. (Rom. I,18.) Est-ce que par ce carrefour vous ne pouvez pas entendre Israël selon la chair : car ce peuple était de la race d'Abraham, réuni et resserré par un seul rite, et lié par une seule et même loi? Mais les sages des nations sont figurés avec raison par les places; emportés par une licence effrénée, ils sont sortis du chemin de la vérité, affirmant de la majesté divine des propositions non moins offensantes pour sa dignité qu'opposées à la vérité. Retenus par la pauvreté de leur intelligence sur la singularité de la substance divine, les Juifs ne purent dilater leur foi jusqu'à connaître les personnes du Fils, et du Saint-Esprit. Les philosophes païens courant les champs, n'étant retenus par aucune révélation divine, admirent un grand nombre de natures et une infinité de personnes en sa divinité, chacun d'eux ayant son sentiment particulier, et tous étant dans la vanité.

3. Quelle est l'âme qui cherche l'époux dans ces quartiers et dans ces places ? C'est une concubine, s'il en est quelqu'une, ou une adultère; l'une n'a pas de séjour perpétuel avec l'époux, l'autre n'a pas avec lui de cohabitation sûre. Pourquoi cherche-t-elle en un lieu où ne se trouve pas la chaste sagesse, mais une doctrine étrangère et impure? C'est ainsi qu'elle est décrite au livre des Proverbes, se présentant au jeune dissolu quand il passe sur la place, au coin de la rue, le soir, au déclin du jour, dans les ténèbres, et les obscurités de la nuit, disposée à perdre les âmes, errante et parleuse : tendant ses piéges tantôt dehors, tantôt dans les places , tantôt dans les recoins. Cette place m'est suspecte, en laquelle une femme, aux rôles si divers et si changeants, tend au jeune homme impudique les piéges de ses caresses. Je ne sais ce que m'offre d'obscur, de détourné et de fardé cette parure de femme effrontée. Elle m'est suspecte, ou du moins je la dédaigne certainement toute doctrine qui ne fait pas mention de Jésus-Christ, qui ne me renouvelle pas par les sacrements, ne me forme pas par les préceptes, et ne m'enflamme point par ses promesses. Les juifs l'ont dans les, pages de leur livre, ils ne l'ont pas dans l'interprétation qu'ils en donnent. Le voile est encore plus sur leur esprit que sur leur loi. Il ne peut être enlevé , que lorsqu'ils se convertiront au Seigneur. Elle m'est suspecte soit dans les doctrines divines, soit dans les usages de la vie, la licence de l'un, la restriction de l'autre, et l'obstination de l'un et de l'autre. Le nombre que l'un introduit dans la nature divine, la singularité que l'autre y maintient et l'aveuglement de tous les deux. Aussi ce n'est pas dans ces quartiers et dans ces places que j'indiquerais à l'épouse de chercher le bien-aimé. Assignons-lui en d'autres, car le Christ l'a épousée dans la foi et la vérité.

4. Il y a deux manières de vivre pour les fidèles. Les uns suivent un chemin spacieux. Les autres ,se régissent par une discipline très-étroite. Car bien qu'il soit écrit : elle est étroite la voie qui mène à la vie, il y a ici une distinction tx faire, et l'un de ces genres de vie est plus large, s'il est comparé à l'autre. Ne voyez-vous pas la largeur du commandement, là où. personne n'est contraint de tendre à la perfection, mais où non-seulement la mauvaise santé mais encore la volonté faible a licence de s'arrêter à un degré inférieur? Grâces vous soient rendues, Seigneur Jésus-Christ, de ce que vous nous préparez les occasions de salut et proposez les conseils aux âmes promptes et généreuses, de manière à laisser aussi un remède facile aux infirmes et un degré accessible aux paresseux. Jérusalem, votre cité sainte, a non-seulement les quartiers de ceux qui vivent selon une règle étroite, mais elle a aussi les places de ceux qui aiment une manière plus basse et plus aisée. Ainsi, dans toute profession, dans tout ordre, l'âme, l'épouse, cherche les vestiges de celui qu'elle aime chastement, en tant qu'elle rencontre de toutes parts et l'exemple pour copier et l'amour pour brûler. Elle ne dédaigne pas d'emprunter même de ceux qui sont dehors et qui ne sont liés par aucune discipline plus sévère, des exemples éclatants de vertu : croyant que souvent l'affection est plus fervente là où la condition est plus basse.

5. Que dirons-nous de ceux qui ne cherchent jamais les occasions du salut, prétextant que le relâchement est dans les places et la confusion dans les carrefours ? Il en est plusieurs qui sondent toutes les professions et tous les ordres ; nulle part ils ne rencontrent rien qui les attire, partout ils trouvent de quoi critiquer; reprochant à une règle d'être trop sévère, à un autre de ne l'être pas du tout. C'est à ces esprits inquiets qu'il appartient de dire aussi misérablement que véritablement : je ne l'ai pas trouvé. C'est un sentiment mauvais que d'assurer : le Christ est ici, mais il est encore plus là : c'en est un très-dépravé que d'affirmer : il n'est ni ici ni là. L'épouse le cherche partout, ici et là: «je chercherai dans les carrefours et les places celui que mon coeur aime : » Par carrefours entendez la sévérité, par places, la sage largeur. Ne prenez ni l'une ni l'autre en mauvaise part dans les ministres de l'église. L'église admet l'une et l'autre; dans l'une et l'autre l'épouse cherche le bien-aimé : non pas dans l'une seule, mais dans l’une et l'autre elle le poursuit. Dans votre coeur, aux carrefours soigpez les places. Vous demandez comment? Si l'affliction vous oppressé, soit qu'elle ait été volontairement cherchée ou qu'elle soit venue par la force des choses, dilatez votre coeur par la soie spirituelle et déjà vous avez uni la place aux carrefours. Ne voyez-vous pas qu'il a l'une et l'autre, celui qui se réjouit d'être dilaté dans la tribulation ? (Psalm. IV. 2.) L'apôtre désirait une certaine dilatation dans l'angoisse de la tribulation à ceux à qui il dit :     « Vous réjouissant dans l'espérance, souffrant dans les chagrins (Rom. XII. 12.) La dilatation se rapporte à l'espérance : « Ayant de si grandes promesses, ô mes bien-aimés, dit-il, » dilatez vous, vous aussi » (II Cor. VI, 13.) La réalité du moment actuel est étroite, l'espérance est plus large. Récente est la possession,. l'attente s'étend davantage. Rapportez donc ces places à l'espérance dont elles sont une image. L'apôtre dit : «vous réjouissant dans l'espoir, » Et le prophète : « vos places seront encore remplies des danses de ceux qui s'amusent. » (Zach. VIII. 5.) Voyez-vous comment l'apôtre et le prophète enseignent la même doctrine au sujet de la place et de l'espérance. Ils y voient tous deux l'expression de la joie.

6. Il faut encore remarquer, selon une autre distinction, que dans les quartiers on séjourne pour vaquer aux soins domestiques, que dans les places se trouvent les loisirs employés à se réjouir. Sur les places sont les danses et les assemblées des joueurs. Le repos et le délassement se trouvent donc sur les places. Bonnes sont-elles donc; l'esprit dégagé s'y soulève avec agilité, s'élançant comme par de légers bonds vers la contemplation. L'épouse cherche donc dans les places celui qu'elle aime, quand, dégagée des soucis domestiques, sortant du séjour de son corps, abandonnant autant que possible sa maison terrestre, elle monte vers la contemplation avec autant de liberté que de joie. Dans les carrefours, le séjour est plus prolongé; il est plus court, mais plus agréable dans les places. Dans les quartiers, l'usage et l'exercice des vertus qui nous sont nécessaires tant que nous demeurons dans les corps; dans les places, les préludes heureux de la félicité à venir. Considérez à présent l'ordre des paroles. La bien-aimée place d'abord les carrefours et ensuite les places. Vous trouvez dans le Psaume quelque chose de semblable : « qu'ils sont aimés vos tabernacles, Dieu des vertus, mon âme languit et soupire après les parvis du Seigneur. (Psalm. LXXXIII. 1.) Vous admirez l'empressement de l'épouse? Suivez l'ordre qu'elle observe elle-même. Ne vous croyez pas plus prudent ou plus prompt qu'elle. Exercez-vous d'abord dans les actes de la vertu, afin de vous élever par la suite, au lieu d'où l'on a à contempler la vérité. Pourquoi vouloir faire de l'entrée ce qui est la sortie? Avec l'épouse, venez des carrefours dans les places et avec le Psalmiste après les tabernacles des vertus, arrivez aux vastes parvis de la vérité : agir autrement, ce n'est pas changer l'ordre, c'est le pervertir. Plus les carrefours sont étroits, plus sont libres et abondants au-dedans les loisirs de l'âme. Que dis-je, les loisirs? Je m'exprimais mieux en disant la dévotion de l'âme. La discipline étroite au-dehors dilate l'âme au-dedans. Par places entendez soit la liberté, soit la joie ; où mieux que dans l'ordre que nous indiquons, trouverez-vous des places plus étendues ? Mais ne dites pas de suite, où les carrefours sont plus étroits, où l'exercice de la liberté est-il plus grand pour l'usage et l'exercice de la vertu, que dans cet ordre et cette sainte assemblée? C'est pourquoi, moins est grande la licence pour le mal, plus grande est la liberté pour le bien. Plus le frein, est serré, plus vive est l'impulsion qu'il imprime. Les carrefours plus étroits laissent pour les places des espaces plus considérables! Qu'est-ce donc que chercher Jésus dans les carrefours et les places, sinon se retenir, comme il vient d'être dit, et se dilater pour recevoir la joie que cause la lumière?

7. Voulez-vous que je vous montre l'un et l'autre dans l'âme, c'est-à-dire places et carrefours ? Ne vous paraît-il pas placé dans une rue et bien à l'étroit celui dont la patience est tourmentée, la chasteté attaquée et la charité mise à l'épreuve? Celui qui en nul exercice de vertu ne vit en liberté sans fatigue, sans travail et sans produire aucun effort d'esprit, ne vous paraît-il point être dans une impasse étroite? Et quoique des âmes qui sont en cet état, cherchent non sans peine, non sans effort, cependant elles aussi poursuivent comme à travers les rues le repos en celui qu'elles aiment. C'est d'elles que parle le prophète : « Seigneur, dans l'angoisse ils vous ont cherché et nous vous avons attendu dans le sentier de vos jugements. » (Is. XXVI, 16.) C'est ce qui arrive souvent aux ignorants et aux novices; ils ont coutume d'être éprouvés par diverses tentations ou par un certain ennui, quand les désirs de la chair les pressent ou lorsque le charme de la vertu ne les attire pas. Et bienheureux qui ne se scandalise pas en ces épreuves, qui ne se blesse pas, qui ne perd point Jésus, mais qui le cherche dans ces passagers étroits, dans l'angoisse et non comme il est dit de certains : « Dans l'angoisse il vous ont cherché, dans l'épreuve votre doctrine leur est un sujet de murmure. » (Ibid.) Bien plus, dans toutes ces traverses, le coeur fidèle comprend et les exercices de la vertu et la doctrine du Père; il marche fortement de la fin vers la fin, jusqu'à ce que dés rués il entre dans les places : et ceux qui sont plus parfaits et accoutumés aux places, quelquefois Dieu permet qu'ils retombent dans les défilés étroits. Et quelle est l'âme plus parfaite que celle qui reçoit le titre d'épouse. La voilà pourtant qui cherche, dans les carrefours, et comme dans des méandres resserrés, le bien-aimé. Elle exerce l'humilité, elle enflamme le désir. Cette difficulté de chercher ne laisse pas dans l'oisiveté. Que de fois me Bris-je senti errant comme dans des dédales inextricables et emprisonné dans les angoisses de l'esprit, quand soudain j'ai rencontré une issue sur les places voisines et le Seigneur bon m'a fait entrer dans le large? J'expirais presque dans les rues étroites, et le souffle m'est revenu de suite dans les places. La place rappelle la largeur et la liberté d'un esprit dégagé de tout lien et de tout travail.

8. Mais prenez garde de faire tourner cette liberté au profit de la chair, d'entasser la boue dans votre place et les immondices d'une pensée coupable. Autrement, le Seigneur vous fera disparaître, comme la fange des grands chemins. « Nos pas ont glissé dans les places, » dit le prophète. (Thren. 4, 18). Voulant faire entendre, par ces places boueuses, les endroits où glissent les pieds des hommes. Que vos places soient couvertes non de boue, mais d'or. Qu'il n'y ait pas de fange, qu'il n'y ait pas cependant une sorte de sécheresse et d'aridité, qu'il y coule un fleuve d'eau vive, une sorte de ruisseau de méditations spirituelles. Sur ces places, divisez le cours de ces eaux dans toute la latitude d'un esprit libre. La sagesse dit :            « semblable au platane, j'ai été élevée le long des eaux dans les places. » (Ecc. XXIV, 19.) Non pas seulement dans les places, non pas seulement le long des eaux, mais «le long des eaux et dans les places », dit-elle. Combien pensez-vous que contribuent à faire monter les tiges joyeuses de la sagesse, le repos exempt de soucis et las irrigations fréquentes d'une sainte méditation. Elle s'élève bien comme le platane, l'âme qui est mise en terre dans ces conditions. O vraiment. heureuses ces places, dans lesquelles la sagesse croît, s'élève et domine de la sorte, se montrant en évidence sans qu'on ait besoin de la chercher! Et voyez comment quelques chrétiens ouvrent à la prudence séculière toute l'étendue de leur coeur; combien ils distendent leur esprit et le dilatent dans une place, afin d'y mettre un arbre étranger, une tige infidèle; et comment ils en prennent soin en lui prodiguant les labeurs continuels de la doctrine et des méditations fréquentes. Aussi, voyez en eux, joyeux et vigoureux, la sagesse du siècle et le sens de ce monde qui donne ses fruits : quant à la sagesse qui vient de Dieu, humble et obscure, elle ne peut se trouver dans leur âme.

9. Sortez dans les places et les carrefours de la cité : Sondez les loisirs, examinez-les occupations de ceux qui président aux jugements, qui occupent la chaire et sont assis sur les tribunaux : contemplez ce qu'ils font en public, ce qu'ils font en particulier. La pure et vraie sagesse du ciel brille-t-elle chez eux! la voit-on dans leurs moeurs comme dans leurs discours? L'y trouvez-vous brillante, exaltée comme le cèdre sur le Liban, et comme le cyprès sur la montagne de Sion? Car c'est sur ces hauteurs qu'elle se glorifie d'être exaltée. Leurs noms mêmes renferment des mystères : l'ordre  qui            préside aux paroles ne laisse pas, lui aussi, que d'avoir une utilité réelle. Le « Liban, » précède dans la louange de la sagesse, « Sion » vient ensuite : après avoir obtenu la blancheur d'un coeur pur, vous vous élevez à l'éclat de la contemplation de la vérité. La pureté attire la connaissance, non pas une connaissance qui s'arrête seulement à la lettre, mais douce et intime, mais répandue dans la moelle des os. La pureté est la compagne, la suivante et l'avant-courrière de la vérité. C'est pourquoi la sagesse exige pour composer la louange, la réunion de ces deux montagnes, du Liban et de Sion. Ces cimes sacrées où pourrez-vous les faire vair chez ceux qui s'appliquent à conduire ou à terminer les procès? La sagesse peut-elle se rencontrer chez ceux en qui il n'y a pas de place pour elle? Elle aime le Liban, elle aime Sion, elle aime les places, il lui faut la liberté et les hauteurs. Quel renversement si la sagesse qui s'occupe des procès, qui cherche le lucre s'élève, et celle qui est de Dieu se cache? Celle qui se plaît dans les discussions domine, et celle qui est pudique, pacifique, qui s'accorde avec le bien, se retire dédaignée comme dans l'obscurité. L'une est cultivée, l'autre est négligée, comme si elle était stérile et de nul profit. La plantation qu'on néglige ne s'élève pas bien haut. Rarement vous la trouverez exaltée dans les places comme le platane. Elle ne se rencontre pas facilement. Aussi l'épouse dit : « J'ai cherché et je ne l'ai point trouvé.»

10. Le vénérable nom de Jésus est partout employé, il figure dans toute question, on le trouve en tous lieux. Et plut au ciel, que la vie exprimât ce que la parole dit, que l'imitation le rendît sensible, que les moeurs le fissent éclater et reluire! Que celui qui cherche la sagesse résidant en vous, la trouve sur le seuil de votre maison, dans vos sens, dans votre modestie et toute la composition de l'homme extérieur. Car il y a des portes par lesquelles passent les indices de celui qui habite à l'intérieur. C'est par vos fruits que l'on connaît si Jésus habite en vous. L'épouse s'approche de vous, elle tourne les feuilles de votre figuier, elle cherche en vous du fruit, elle cherche le bien-aimé. C'est là le fruit qui est doux à son gosier. Heureux êtes-vous si ce fruit abonde en vous, si vous rassasiez de cette nourriture l'épouse de votre Seigneur. Sa nourriture est une nourriture choisie. Ses délices sont que son bien-aimé se trouve avec vous. Elle ne connaît ni envie ni jalousie. C'est pourquoi elle cherche chez tous, afin de le trouver et de l'attirer chez tous. Elle cherche Jésus chez ceux dont elle désire le progrès en Jésus. Elle le cherche dans les carrefours et les places, mais elle ne le peut trouver chez tous. « Je l'ai cherché », dit-elle, « et je ne l'ai point trouvé. » Paul, avait soif du salut de tous, il désirait rencontrer le Christ dans les entrailles de tous, les désirant tous dans les entrailles de Jésus-Christ. Mais, écoutez ce qu'il dit, entendez comme il déplore le sort de plusieurs. « Je n'ai personne qui soit entièrement unanime avec moi. Tous cherchent leurs intérêts, non ceux de Jésus-Christ. (Phil. II, 20.) Croyez-vous qu'on peut trouver le Christ chez ceux qui ne le cherchent pas pour le trouver? Et vous en rencontrerez un grand nombre, qui courent après d'autres biens en dehors de Jésus-Christ, mais se servant de lui comme d'un moyen pour les avoir. On délibère dans les conseils, on discute dans les jugements, ou controverse dans les écoles, on chante dans les églises. Ce sont là des choses religieuses; mais allez au terme où aboutissent ces eaux, et considérez quelle est la fin la plus commune de ces œuvres. Voyez si en toutes ces actions on ne fait pas un certain commerce du Christ. Le nom de Jésus-Christ est un moyen de s'enrichir. Rien de plus précieux, rien de plus désiré. Heureux cependant celui qui veut atteindre la puissance de ce nom. Que les autres en fassent l'objet de leurs traités, de leurs discussions et de leurs disputes. Pour nous, qu'il nous suffise qu'il soit aimé dans nos cloîtres. Nulle part, on n'en trouve mieux le moyen, et partant nulle part il ne peut y avoir de honte plus grande, si Jésus-Christ ne se trouve point parmi nous. Il n'y a pas de forme de la justice, si l'intention qui anime les oeuvres pieuses n'est pas pure. Car la joie est un certain transport de l'âme, qui se ressent d'ordinaire de la présence de ce divin ami et que nous pouvons avec vérité, appeler sa présence. Cette affection céleste et surabondante n'est pas chose facile ni commune. C'est, à ce qu'il me paraît, celle que l'épouse désigne, lorsqu'elle dit : «J'ai cherché et n'ai point trouvé celui que mon coeur aime, » Jésus-Christ qui vît et règne aux siècles des siècles. Amen.

 

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