SERMON XII
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SERMON XII. Je l'ai saisi, je ne le lâcherai pas jusqu'à ce que je l'introduise dans la chambre de ma mère. (Cant. III, 4.)

 

1. Ils ne savent pas avoir des pensées anciennes, ceux qui cherchent les nouveautés des paroles, qui forgent des dogmes récents, qui n'évitent pas les désirs de jeunesse, qui n'ont rien qui soit plein de gravité, d'autorité et du poids de l'âge ; il n'y a pas d'amen là où il se trouve, ou bien la dispute, ou bien la déception des idées ; là où règne l'infidélité, là où la foi est flottante. Entrez dans les ports assurés de la foi, introduisez le bien-aimé dans l'appartement de votre mère, afin que tous vos sentiments, que vos manières de voir relativement au Christ soient renfermés dans les règles de l'Église et châtiés par sa censure; opérez ces oeuvres-là dans votre sabbat. Autrement, si vous avez du repos et ne vous appliquez pas à des objets semblables, des pensées vaines et des désirs empoisonnés envahiront votre esprit oisif. Ensuite, comme vous savez que « les orties et les épines remplissent le champ du paresseux (Prov. XXIV, 31), ainsi l'Évangile vous dit que « deux étant dans un lit, l'un sera enlevé et l'autre laissé » (Matth. XXIV). Elle est comparable à un lit, la vie tranquille et calme de ceux qui vivent dans le giron de l'Église, l'existence de ceux qui ne sont pas attachés au fardeau d'un emploi ecclésiastique, ni occupés du soin de pourvoir aux besoins des autres et de le gouverner, et qui, sous la conduite d'un supérieur, jouissent en liberté de leurs loisirs. Tous cependant ne jouissent pas comme il convient de ces loisirs qui leur sont dûs ; mais dans le temps libre qui leur est donné, ils trouvent occasion de se livrer à la paresse.

2. Le lit est bon si on en fait un usage légitime, et si on profite du repos qu'il ménage à l'extérieur pour vaquer au plaisir de la contemplation intérieure. Ceux qui agissent ainsi seront transportés du lit actuel de l'Église à ce lit céleste où se repose le Christ, pour s'y trouver avec lui. Là où sera le corps, là s'assembleront les aigles (Matth. XXIV, 28). Et vous, soyez comme un aigle, ayez des yeux brillants, habituez-vous à la contemplation spirituelle, demeurez dans les rochers, habitez les roches sauvages ; bien plus, entrez dans les ouvertures de cette pierre singulière qui est le Christ. Retirez-vous, selon la parole d'Isaïe (Is. XXVI, 20), dans vos appartements, fermez les portes, et cachez-vous pour un moment, jusqu'à ce que la colère ait passé. Ou plut8t soyez caché, afin que la charité demeure pour jamais. Cachez-vous dans l'asile de la paix, dans les puissances du Seigneur, car la paix est dans sa force. Souvenez-vous de la justice, que lui seul possède, pour qu'en vous se rencontrent la justice et la paix. Souvenez-vous de la justice, que lui seul possède, car, que possédez-vous que vous ne l'ayez reçu? (I Cor. IV, 7.) De la justice que lui seul possède. Bonne justice que vous défendez dans une sorte de combat contre les vices qui vous chatouillent. Plus heureuse quand, ne combattant pas pour elle, vous trouvez en son sein vos délectations ; quand vous ne luttez plus, vous jouissez; quand vous n'êtes pas aux prises avec les vices, vous êtes en douce relation avec la vertu. Vous la possédez, vous n'attaquez pas les vices, lorsque, oubliant ce qui est en bas, vous pensez, non à ce qui est de l'homme, mais à ce qui est de Dieu, et vous souvenez de la justice que lui seul possède, lorsque la justice et la paix s'embrasseront en vous, car le règne de Dieu, « c'est la justice, la paix et la joie (Rom. XIV, 17). Si royaume, pourquoi pas et maison et appartement ? « Car sa demeure a été placée dans la paix et son habitation dans Sion. » (Ps. LXXV, 3.) Entrez dans le séjour de la paix, de la pais extérieure, mais plus encore de la paix intérieure, dans la maison de la contemplation; car Sion veut dire contemplation. « Dans la paix, dit le Psalmiste, en ce même bien, je dormirai et me reposerai. » (Ps. IV, 9.) « En ce même bien » se rapporte à la contemplation. C'est là la part qui ne sera jamais enlevée. Enfin l'épouse s'endormit avec le bien-aimé dans le lit de sa mère, et dans les embrassements de son époux elle éprouva l'extase d'une âme livrée au sommeil. C'est pourquoi on lit à la suite : « Je vous adjure, » et le reste.

3. Et vous aussi, si vous avez saisi l'époux, tenez-le donc, ne le laissez pas partir jusqu'à ce que vous l'introduisiez dans la demeure de votre mère. Pourquoi vous recommander à présent ce à quoi l'expérience de la douceur que vous avez goûtée vous attire et vous invite beaucoup plus fortement? Si quelqu'un, en effet, a pu, dans son esprit libre, à la dérobée et comme en éclair, éprouver les joies heureuses de cette méditation élevée, je ne sais s'il est une autre occupation à laquelle il se porte avec plus d'entraînement, que de se donner entièrement et sans réserve à cette suave application. Les premières douceurs de la ravissante contemplation attiraient l'épouse et l'appelaient au lieu du repos où elle se flatte qu'elle introduira le bien-aimé. « Je ne le lâcherai point jusqu'à ce que je le fasse entrer. » Ne vous semble-t-il pas qu'elle vous dit ce qui est exprimé par ces paroles du Psaume « Si je donne le sommeil à mes yeux, si je laisse goûter le repos à mes paupières, jusqu'à ce que je trouve une place pour le Seigneur (Ps. CXXXI, 4), » je quitte tout pour ne pas le quitter. Je regarde toutes choses comme une perte, afin de gagner Jésus-Christ, et d'obtenir la joie suréminente que cause sa présence. « Si deux dorment ensemble, ils se réchaufferont mutuellement; un seul, comment se réchauffera-t-il ? (Eccl. IV, 11.)» C'est l'Ecclésiaste qui parle ainsi. Il est bon d'être réchauffé et d'être enflammé dans les embrassements du Verbe (car la parole du Seigneur est grandement brûlante), et d'être bouillonnant de désirs spirituels : c'est pourquoi je ne livrerai pas mes yeux au sommeil, et mes paupières ne connaîtront point de repos, jusqu'à ce que je l'introduise dans le lit de ma mère. Alors je me reposerai, et mon sommeil sera suave. Ainsi dormit Jean incliné sur la poitrine de Jésus, où sont cachés tous les trésors de la sagesse et de la science de Dieu. Là est le lieu du véritable repos, la sérénité de l'intelligence, le sanctuaire de la piété, le lit de la délectation. Dormez en cet endroit, pour voir ce que vit cet Apôtre, « le Verbe dans le principe» (Joan I), le Verbe chez le Père, et le Verbe Dieu, et pour comprendre dans le Christ la co-éternité d'existence avec le Père, la diversité personnelle et l'unité consubstantielle, que trouvez-vous de plus semblable au sommeil? Là ne peuvent pénétrer les regards de l'homme, là ne peut s'introduire la raison. L'homme ne verra pas ces mystères sans mourir. Il vous est donc bon de vous endormir, d'être enseveli dans l'oubli des sentiments et des affections humaines, afin de pouvoir dormir un tel sommeil. Là est le lit des apôtres qui nous ont engendrés dans le Christ. Paul est comme une mère lorsqu'il s'écrie : « Mes petits enfants, que j'enfante de nouveau jusqu'à ce que Jésus-Christ soit formé en vous (Gal. IV, 19.) » Voilà la mère; voulez-vous le lit? « Notre vie est dans le ciel (Phil. III, 20). Voulez-vous le sommeil? « Par l'esprit, dit-il, nous sommes ravis en Dieu. (I Cor. V, 13). »

4. Passez en ce lieu avec votre bien-aimé, restez-y, méditez ces mystères, vivez en eux : ou si vous ne pouvez y atteindre, soyez plus retenu; si vous ne pouvez reposer sur la poitrine de Jésus, là où se trouve la source d'une sagesse inépuisable, reposez-vous entre ses épaules, où vous contemplerez les exemples et les mystères de sa patience. Entre ses épaules, « car sa principauté a été établie sur ses épaules (Is. IX, 6.) » Et il a été dit de Benjamin, « que le très-grand ami du Seigneur reposera entre ses épaules (Deut. XXXIII, 12). » Jésus se reposa et s'endormit sur la croix, afin que vous aussi vous dormiez dans la foi et le souvenir de sa Passion; ou plutôt entre ces places, allez et venez, entre la poitrine et les épaules, entre les mystères de. la foi et la manifestation de la vérité. Dans l'un de ces côtés, établissez votre demeure, et dans l'autre, votre lit. Le grand ami du Seigneur, Benjamin, demeurera tout le jour comme dans un lit, et il se reposera entre ses épaules. Vous apercevez comment il place le lieu de son repos entre les épaules? Que sera-ce donc dans la poitrine? Là et là il y place pour une belle contemplation, entre les épaules et sur la poitrine. Mais il y a plus de grâce dans la poitrine; elle est le foyer de l'amour, le siège des pensées, elle donne la facilité pour étreindre, et fournit la faculté de considérer le visage. Le lit nuptial est donc bien dans la poitrine de Jésus; bien plus, cette poitrine est un trésor. Là sont et les délices de l'époux et les richesses du Verbe, parce qu'en lui . sont cachés tous les trésors de la sagesse et de la science de Dieu. Pénétrez dans ces trésors, cachez-vous loin du tumulte des hommes, dans le secret de sa face, et que personne ne vous excite ou vous réveille que vous ne le vouliez. C'est ce qu'exprime l'adjuration que prononce à la suite de ce passage l'époux, le Christ Jésus, qui vit et règne au siècle des siècles. Amen.

 

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