|
|
SOIXANTE ET ONZIÈME SERMON.
1. La morale entière, parfaite, consiste principalement en deux choses : à fuir le vice et à rechercher la vertu, attendu qu'il ne suffit pas d'éviter le mal si on ne fait pas le bien. C'est ce qui faisait dire au Psalmiste : « Eloignez-vous du mal et faites le bien (Psal., XXXVI, 27). » Fuyons donc le vice et embrassons la verni. Rappelons-nous, en quelques mots, quelques traits de l'histoire sainte. La famine contraint . Israël à aller en Egypte, et là, il trouve un nouveau maître, perd sa liberté et devient esclave (Gen. XIII, 2). Pour avoir fixé son séjour dans ce pays, il est soumis au pouvoir de Pharaon qui fait tuer tous ses enfants mâles et ne conserve la vie qu'aux filles. Israël est condamné à de durs travaux de mortier et de briques, Pharaon ne lui donne que de la paille pour son travail et la famine le contraint à servir (Exod. I, 14). 2. Ce n'est ni la disette de pain, ni la soif d'eau, mais le besoin d'entendre la parole de Dieu qui pousse bien des hommes à entrer en Egypte. La parole de Dieu est la vraie lumière qui éclaire tout homme venant en ce monde (Joan, I, 9). Aussi le Psalmiste dit-il : « Le précepte du Seigneur est plein de lumière et il éclaire les yeux (Psal. XVIII, 9). » Quiconque marche à l'éclat de cette lumière ne marche pas dans les ténèbres, il a au contraire la lumière de la vie. De la lumière des préceptes, on passe à celle des récompenses. Ceux qui souffrent la disette de cette parole divine sont forcés d'entrer dans l'Egypte, je veux dire dans les ténèbres. Ils se trouvent, en effet, tout environnés des ténèbres de l'ignorance et soumis à la domination du Pharaon, je veux dire du diable, qui est le prince de l'Egypte, c'est-à-dire des ténèbres. Selon ce mot de l'Apôtre : « Nous n'avons point à combattre contre la chair et le sang, mais contre les principautés et les puissances, contre les princes du monde, c'est-à-dire de ce siècle ténébreux, contre les esprits de malice répandus dans les airs (Eph. VI,12). » Sous le joug du Pharaon, on fait des ouvrages de terre, je veux dire sans consistance et mal propres. Il donne de la paille, c'est-à-dire des pensées légères; or la paille fait un feu léger et se consumé en un moment; ainsi en est-il des mauvaises pensées que le démon nous envoie; elles s'allument promptement dans notre esprit au consentement de la mollesse de la chair. Mais si nous nous étudions à résister aux hommes, avec l'aide de Dieu, elles ne tarderont point à s'éteindre. C'était en brûlant de la paille que les Israélites cuisaient l'argile et durcissaient les briques. Or, les mauvaises pensées, qui sont de la boue, sont soumises au feu de la paille de la délectation, et, quand elles, se traduisent en actes, alors elles sont cuites, et quand elles passent en coutumes, elles sont durcies comme la brique.
|